Les bateaux étaient chahutés au beau milieu d'une tempête, et les éléments déchaînés cherchaient à faire chavirer les embarcations.

Ne pouvant rien faire d'autre qu'attendre, Eirik, presque quadragénaire, crâne rasé, était assis, dos appuyé contre le bois du navire. Il ferma les yeux et repensa à son départ, au début du printemps :

Aslak avait été blessé durant une sortie de chasse, sa blessure l'empêchait de participer à cette première expédition du printemps, alors le jarl avait confié ce voyage commercial à Eirik et ils étaient sur le départ :

Accroupi pour faire face à ses fils, Henrik, âgé d'à peine sept ans et de Rurik, âgé de bientôt quatre ans, il leur posa tendrement une main sur la joue :

— Soyez de bons garçons, leur dit-il. Écoutez bien votre mère, elle est enceinte et aura besoin que vous soyez forts et courageux ! insista-t-il.

— Oui, papa ! affirmèrent-ils en chœur avant de se jeter à son cou.

Eirik savoura ce petit moment câlin, puis il relâcha son étreinte pour se relever et faire face à Aliénor, qui étudiait ses hommes avec amour et fierté. Eirik lui sourit et l'embrassa, avant de s'accroupir devant son ventre rebondi tout en y posant délicatement ses épaisses paumes :

— Quant à toi, mon Trésor, déclara-t-il au bébé à naître. J'espère être de retour avant ta naissance, en attendant, ma fille, ne donne pas trop de coups à ta merveilleuse mère.

— Et si c'est un garçon ? l'interrogea-t-elle, en français (la langue maternelle d'Aliénor était devenu leur langage à eux, ce qui accentuait leur complicité), alors qu'il lui embrassait le ventre.

Amusé, Eirik leva la tête pour dévisager Aliénor, qui était radieuse. Ses cheveux avaient beaucoup poussé en presque huit ans. Sur les côtés, la jeune femme portait des tresses collées au crâne : cette coiffure de femme Danoise lui donnait un air sauvage et mêlé à la douceur de ses traits, ça la rendait encore plus attirante, sans oublier que sa grossesse la faisait rayonner plus qu'à l'accoutumée. Pour Eirik, Aliénor était la femme la plus belle et désirable, qu'il ait jamais vue.

Tout en soutenant ses magnifiques yeux noisette, il se releva pour lui prendre le visage en coupe :

— C'est une fille, affirma-t-il. J'en suis sûr ! insista-t-il avant de déposer en doux baiser sur ses lèvres.

— Eirik, je ne veux pas que tu sois déçu, répliqua-t-elle en lui posant les mains sur le cou.

Serein, Eirik colla son front au sien :

— Si c'est un garçon, j'en serai très heureux, mon Trésor, répondit-il en glissant ses paumes sur sa taille pour l'enlacer. Et sache, que je ferai tout pour te donner une fille ! ajouta-t-il en se redressant, tout sourire.

— Alors, reviens-moi ! souffla Aliénor, rayonnante.

— Toujours, promit-il.

Ils s'embrassèrent d'un baiser passionné et plein de promesses de bonheur à venir, puis le couple se serra l'un contre l'autre, pour une dernière étreinte.

Les navires étaient sur la voie du retour et étaient chargés de produits divers et variés, mais les vagues successives qui s'écrasaient sur les navires cherchaient à les entraîner vers le fond.

Les navigateurs ne pouvaient rien faire qu'attendre et subir, car la force du vent quasi dévastatrice, mêlée à la puissance de la mer en furie, mettaient à l'épreuve la conception des bateaux : leurs lames de bois chevauchées grinçaient pour s'ajuster et résister à ces forces de la nature, « mais pour combien de temps ! » se demanda Eirik, qui ouvrit les yeux pour dévisager ses compagnons silencieux.

La mer et le vent hurlaient un chant funeste, réclamant des vies !

Eirik sourit en pensant à ses proches restés au village :

Erma avait donné naissance à une fille : le fruit de son union avec Hakon. Grim, douze ans, était heureux d'être devenu un grand frère protecteur.

Erika, la veuve de Folmer, avait pris Olrik comme époux après trois années de deuil. La guerrière eut deux grossesses rapprochées et était une mère dévouée.

Botilde avait fini par accepter la demande de mariage d'Eskil, qui l'avait mise enceinte après un hiver rigoureux, cinq ans plus tôt.

Quant à Eldrid et Aslak, ils avaient eu deux autres enfants : un garçon prénommé Snorre, âgé de cinq ans et une fille, Ingrid, âgée de trois ans.

Des navires chavirèrent.

Les Danois et leurs biens tombèrent dans une eau froide et chaotique, alors que les vagues les éloignaient les uns des autres. Certains cherchaient à nager vers les bateaux les plus proches pour survivre, mais les rouleaux d'eau glacée engloutirent les naufragés pour les emporter vers le fond.

Aliénor et ses fils se dirigeaient vers la plage, car on venait d'annoncer que les bateaux étaient en approche. Un seul coup d'œil lui suffit pour voir que trois navires manquaient à l'appel, alors son cœur se serra.

Henrik et Rurik levèrent les yeux sur leur mère qui leur tenait la main, car elle venait de ralentir le pas.

Lentement, le petit trio arriva sur la plage. Les Danois avaient presque tous débarqué et commençaient le déchargement des marchandises, aidés par la foule pressée de savoir qui étaient revenus ou non.

Aliénor qui cherchait Eirik serra encore plus fort les petites mains qu'elle tenait, alors qu'Henrik et Rurik observaient la foule : certains riaient, d'autres pleuraient...

Curieux, les enfants d'Aliénor lâchèrent la paume de leur mère pour aller voir ce que les équipages avaient rapporté.

Arrivé par-derrière, deux mains se posèrent sur son ventre pour l'enlacer :

— J'ai cru que... déclara-t-elle en laissant couler ses larmes.

— Je sais, souffla Eirik avant de l'embrasser dans le cou. J'ai bien cru ne plus jamais vous revoir, soupira-t-il. Mais, je suis là !

— Oui, tu es là, se réjouit Aliénor, en se laissant aller contre le torse de son mari.

***

chapitre dédié à :

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désolée Cilla_pris et Lulu19846, finalement je n'ai pas écrit de chapitre de transition pour clore l'histoire, ça ne me semblait pas utile, contrairement au bonus qui sera un peu long😅

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Il existe un  chapitre Bonus ( en 2 parties) si vous souhaitez le lire merci de me le dire, je l'ai dépublié parce que les personnes qui lisent le dernier chapitre pour connaître la fin renoncent à lire l'histoire 😌