Chapitre 50
Mon père, suivi par Audar, traverse la grande salle dans un silence pesant. Tous les yeux sont rivés sur eux. Aux regards des personnes présentes, on peut aisément savoir dans quel camp ils se situent.Et même si pour ma plus grande joie, la salle semble dans sa majeur partie acquise à mon père. Je ne connais que trop bien les règles Viking. Si Audar sort vainqueur de ce combat, il sera le nouveau jarl. Et je ne donne pas chère de notre peau à tous.
L'assemblée sort dans la court du château, et une arène se dessine naturellement par la mise en place des spectateurs. Un homme que j'ai souvent vu aux côtés de mon père l'aide à enlever sa cape et sa chemise. Je ne peux m'empêcher de me mordre la lèvre en voyant la cicatrice barrant le flan de mon père. Mais surtout la grimace qu'il tente de dissimuler en levant son bras au dessus de sa tête. Comment allait-il pouvoir combattre si simplement lever le bras au-dessus de la tête lui était douloureux ? Mon cœur se serre à l'idée de voir mourir mon père sous mes yeux, impuissante, alors que j'avais tant à apprendre de lui, de mon histoire, . . .
Sans réfléchir, je me débats pour le rejoindre, mais Audvald resserre sa prise sur mon bras. Je grimace de douleur mais je passe inaperçue. Tous ont les yeux rivés sur le possible avenir du clan. Audar semble sûr de lui mais je sais que mon père est un valeureux Viking. Cependant sa blessure reste un vrai handicape.
Je suis là impuissante et l'angoisse que je lis sur le visage Vidrün ne me rassure pas. Mais ce n'est rien face à la haine qui la remplace quand elle voit Sigfrid se rapprocher d'Audar de façon charnelle. C'est à ce moment précis, que Vidrün semble prendre conscience de ce qu'il se passe. Elle comprend alors qu'elle a été dupée et cela ne lui plaît guère. Son regard se fait de glace quand elle observe Sigfrid murmurer à l'oreille d'Audvar je ne sais quoi.
Un homme du clan s'avance avec deux haches, une dans chaque main. Il en donne une à mon père et l'autre à Audar. Mon cœur se serre un peu plus voyant que le début du combat est imminent. Mes yeux se ferment quand un bruit violent de métal brise le silence signalant que le combat a commencé . . .
Je serre les dents encaissant les coups de ce lâche qui me bat sans avoir le courage de me détacher pour que je puisse répondre à ses coups. Chaque coup renforce mon désir de vengeance, mon désir de le tuer, pour tout ce qu'il a fait. À cet instant précis, je ne regrettais pas d'avoir mis à sac le village de cet homme. Je regrettais juste de ne pas l'avoir démasqué et tué en temps voulu. Si j'avais vu clair dans son jeu rien de tout cela ne serait arrivé. Aslaug n'aurait pas subi tout cela. Aslaug, à l'évocation de son prénom mon cœur bat plus vite. Cette femme représente tout à mes yeux désormais. Il fallait que je m'en sorte pour la revoir, pour sentir son odeur, pour caresser sa peau, passer ma main dans ses cheveux. . .
De penser à elle et à ma vengeance me font tenir. Et même c'est comme si j'arrivais à puiser des forces dans les douleurs de ce qu'Ulrik m'inflige.
_ Tu as conscience que tu ne sortiras pas vivant d'ici, me dit Ulrik entre deux coups de poings.
_ L'un de nous deux va mourir ici, mais ce ne sera pas moi, arrivais-je à lui répondre avant de recevoir un nouveau coup dans l'estomac.
J'encaisse en grognant mais refuse de lui faire la satisfaction de crier.
_Tu . . . sais . . . le . . . plus . . . drôle ? Me questionne-t-il en ponctuant chaque mot d'un coup mais sans attendre ma réponse. Car peu importe ma réponse. Alors que du sang me coule dans les yeux, je le toise refusant de baisser le regard devant cet imposteur.
_Tu fatigues déjà ? Lui répondis-je en le défiant volontairement du regard.
Ulrik s'éloigne de moi, clairement à bout. C'est que je cherche car alors il fera un erreur et je pourrais prendre le dessus. Je ne sais pas encore comment mais j'y arriverai. Mais alors que je cherche un moyen de me défaire de mes chaînes, Ulrik revient vers moi et prend mon visage entre ses mains ensanglantées.
_ Elle est enceinte. La petite bâtarde enceinte d'un bâtard, belle ironie du sort. Tu ne trouves pas ? Et dire que ton enfant ne verra jamais le jour, termine-t-il en riant.
Les mots qu'il prononce me transpercent. Aslaug, le femme que j'aime, attend un enfant, mon enfant. À cet instant, je ne veux qu'une seule chose les mettre en sécurité, elle et notre enfant. Sans réfléchir un seul instant, je rassemble toute l'énergie qu'il me reste et lui assène un violent coup de tête, le faisant tomber au sol . . .
J'ai suivi Aslaug mais je n'ai rien pu faire quand Audvald l'a attrapée. J'ai tenté de la prévenir mais elle ne m'a pas entendue. Je ne sais pas quoi faire. Je ne veux mettre en danger personne. Mais je vais devoir faire ce que je redoute le plus, parler à Gunnar. Certes au début, je l'avais séduit car il avait une position importante dans le clan qui me permettait d'avoir des informations pour le plan d'Audar et Ulrik. Mais le temps passé à vivre à ses côtés, m'a permis de voir à quel point cet homme est bon. Et contre toute attente, je suis tombée amoureuse de lui. L'idée de le perdre me glace les sangs mais je ne peux pas laisser des innocents mourir. Et je ne veux pas que Gunnar apprenne ce que j'ai fait de la bouche de quelqu'un d'autre que moi. Je serre les poings alors que le combat va commencer. Il faut d'abord sortir Thorsten de son enfer. Seul lui pourra mettre fin à ce duel. Je prie les dieux pour Magnar tienne suffisamment longtemps pour que Gunnar puisse libérer Thorsten. Je balaie la foule du regard et le vois, mon fier viking, l'homme dont j'étais amoureuse. Je respire, prend mon courage à deux mains et fends la foule pour le rejoindre. Quand il me voit un léger sourire ourle ses lèvres mais la contrariété et l'inquiétude se lisent sur son visage.
_ Je dois te parler, c'est urgent Gunnar, lui dis-je en le prenant par la main pour l'écarter de cet attroupement.
_ Peu importe ce que tu as à me dire mon aimée. Ce n'est pas le moment, je me dois d'être là. Saurais-tu où se trouve Thorsten lui seul peut mettre fin à cette mascarade, reprend-t-il sérieusement.
Je baisse un instant les yeux, mais je puise au fond de moi le courage de lui dire.
_ Je sais où est Thorsten. Je t'expliquerai ce qu'il se passe en chemin, mais . . . , je n'ai pas le temps de finir ma phrase que son regard se fait dur.
_ En route, me dit-il.
Sur le chemin, je lui raconte tout dans les moindres détails. Je vois son regard sur moi changer, mais qui pourrait le lui reprocher. Pour l'instant, le plus important est de stopper ce qui est en train de se passer. J'essaie de convaincre Gunnar de prendre des hommes avec lui. Mais il est trop fier pour cela. Il est persuadé de venir à bout d'Ulrik seul. Je connais la force de Gunnar mais je ne connais aussi que trop bien la détermination d'Ulrik. Et c'est ce qui m'inquiète le plus. Plus nous avançons vers la geôle de Thorsten moins nous croisons de monde. Arrivée devant la porte, Gunnar me fait promettre de rester dehors quoique j'entende une fois qu'il sera entré.J'acquiesce mais me jette dans ses bras une dernière fois avant de le voir pulvériser la porte à l'aide de sa hache.
Quand la porte vole en éclat suite à un coup de hache, Ulrik est au sol en train de reprendre connaissance. Gunnar ne se perd ni en conjecture ni en paroles inutiles. En un coup de hache, il me libère de mes chaînes. Sans un mot je saisis la hache des mains de Gunnar et la plante dans le crâne d'Ulrik sans la moindre hésitation et sors de la pièce sans même un regard en arrière.
À voir la tête de Ragna quand elle me voit, je dois être clairement dans un sale état.
_ Où est-elle ? Demandais-je simplement le regard noir.
Gunnar pose sa main sur mon bras mais l'enlève quand il voit l'expression sur mon visage fermé.
_Il faut d'abord sauver ton père, me répond-t-il simplement afin ecapter mon attention.
D'un simple signe de tête, il comprend qu'il doit me mener à lui. Sur le chemin il m'explique tout de la machination d'Ulrik et Audar ainsi que le rôle des différents protagonistes.
Je comprends que le combat n'est pas encore fini quand nous arrivons car la foule est toujours en cercle mais le silence montre que l'issue est proche. Je puise dans mes dernières forces et court pour rejoindre le centre, mais je ne m'attendais pas le moins du monde à la douleur qui allait envahir mon cœur.
Mon père tente tant bien que mal de tenir tête à Audar. Mais ce dernier bien que moins agile et expérimenté, et plus jeune et en parfaite santé. Magnar grimace à chaque fois qu'il contre une attaque et n'arrive malheureusement à n'en porter aucune. Je le vois fatiguer de plus en plus. C'est insoutenable de ne pouvoir rien faire. Je refuse de le voir mourir sans rien tenter. Je cherche une aide dans la foule mais rien. Audar porte un coup violent et Audvald lâche légèrement sa prise de mon bras pour mieux regarder. Je profite de cet instant, pour lui donner un violent coup dans le tibia et le ventre avant de m'élancer à travers la foule. Je ne réfléchis pas le moins du monde et me jette sur mon père au moment où la hache s'abat sur lui.
C'est mon hurlement qui stoppe tout. Ils sont devant moi, gisant sur le sol dans une marre de sang . . . mon père, l'homme à qui je devais tout et elle, . . . Aslaug, . . . l'amour de ma vie, la mère de mon futur enfant . . . en courant vers eux, je ne respecte pas les lois Vikings et décapite Audar d'un simple coup de hache. Tout mon être n'est que douleur et tristesse.
_ Allez chercher Eimund ou Dagny vite ! , par Odin faites vite !, hurlais-je en m'agenouillant auprès d'Aslaug. Mon amour ouvre les yeux, je t'en prie, la suppliais-je maintes fois, . . . mais rien.
Mes larmes se mêlent au sang qui coule sur mon visage. Peut importe ce que les autres peuvent penser, je ne veux pas qu'elle m'abandonne, je ne veux pas la perdre. Je la berce tendrement. C'est Gunnar qui doit me détacher d'elle aidé de trois autres hommes pour que je laisse Eimund l'ausculter, alors que Dagny s'occupe de mon père, . . . Je pousse un hurlement de douleur et de rage quand je vois le visage d'Eimund se fermer. Tout était terminé.
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