Chapitre 33

Je suis blottie dans les bras puissants de ce Viking, . . . de Thorsten, l'homme qui m'avait arrachée à mon village et dont j'étais tombée amoureuse. Sans m'en rendre compte, mes doigts réalisent des dessins imaginaires sur son torse quand il se redresse brusquement et sort du lit.

Même si nous venons de faire l'amour, le voir ainsi nu devant moi dans toute sa splendeur me fait rougir. Cependant quelque chose dans son attitude m'interpelle, . . . me questionne. Je le regarde s'habiller rapidement et mettre des affaires en tas dans un sac.

Je me redresse alors sur un coude surprise d'une telle réaction mais surtout ne la comprenant pas. Il ne m'a pas encore dit un mot et son visage fermé ne m'incite pas le moins du monde à lui poser la question. Le voir ainsi s'affairer sans même un regard dans ma direction me fait douter de que nous venons de vivre.

Il y a encore quelques instants, il était doux, attentionné, tendre, . . . et là le voir comme cela me donne l'impression qu'il regrette ce que nous venons de faire . Instinctivement, je serre le drap contre moi. Se pourrait-il que Thorsten se soit servi de moi, qu'il regrette ce que nous avions fait ? À ces pensées, les larmes me brûlent les yeux et je me mords les joues au sang pour ne pas pleurer. Je refuse qu'il me voit dans un tel état.

Je profite qu'il ne s'occupe pas de moi, trop pressé à rassembler des affaires pour retrouver les miennes le plus discrètement possible. J'arrive à me rhabiller tant bien que mal sans qu'il ne s'en aperçoive. Mais mes mains tremblent tellement que je n'arrive pas à nouer mes jupons correctement.

Je pousse un petit cri de surprise quand je sens les mains de Thorten sur les miennes. J'agis par instinct et recule pour éviter tout contact avec lui. Car c'est trop douloureux en cet instant. Autant il y a quelques heures, ses mains me faisaient découvrir un monde de douceur et de plaisir mais là c'est comme si elles me poignardaient en plein cœur. Pourtant ce qui me met en rage contre moi même, c'est quand les premières larmes roulent sur mes joues car je n'arrive pas à les retenir.



J'ai franchi toutes les limites, toutes les barrières. Jamais je n'aurais du me laisser aller avec Eivor. Je lui ai pris ce qu'elle avait de plus précieux sans rien pouvoir lui promettre en retour. Mais . . . mais quand elle m'a dit qu'elle aurait aimé que l'on ne nous retrouve jamais. Toute ma résistance mise à l'épreuve, toute ma volonté de vouloir rester correct s'était envolée. J'étais tellement heureux qu'elle ressente la même chose . . . qu'elle partage les mêmes envies que moi . . . que mes barrières ont cédé.

Alors je lui avais fait l'amour . . . avec elle cela avait été totalement différent de ce que j'avais pu connaître avec les autres. Tout était plus . . . plus . . . plus . . .

Je ne pouvais pas la laisser ici. Eivor devait se reposer d'après Dagny, . . . mais je me refusais à la voir réduite au rang de simple esclave au service de Sigfrid. Je quitte alors la douce chaleur de ce lit et commence à rassembler des affaires. Je dois l'éloigner . . . nous éloigner de ce château et vite.

Ma première idée est de l'emmener dans mon refuge. Une petite maison que j'ai restauré adolescent avec Gunnar dans la forêt. Cet endroit est mon sanctuaire, . . . mon refuge. Et Eivor a besoin de se reposer et moi . . . de mettre de l'ordre dans mes idées . . . dans les décisions que je dois prendre . . .

Je sors brutalement de mes pensées quand je vois Eivor, habillée, prête à partir, . . . prête à me quitter. Je saisis ses mains pour la ramener vers moi. Mais je me fige à sa réaction. Elle sursaute et recule comme si . . . comme si elle avait peur de moi. Sa réaction me fait terriblement mal. Je pensais qu'elle me faisait confiance mais cela me semble vain. S'est-elle offerte à moi car elle me craignait . . . ou parce qu'elle le voulait ? Cette simple question me retourne le cœur. Et devant sa réaction, je lâche sa main mais j'ai beaucoup de mal à contenir l'émotion dans ma voix.

_ Eivor, . . . que fais-tu ? Dis-je plus brutalement que je l'aurais voulu.

_ Je . . . je . . . je rentre auprès de ma maîtresse, bredouille-t-elle sans même oser me regarder dans les yeux.

La voir ainsi si triste, si résignée me fend le cœur. Elle n'ose même pas un regard dans ma direction alors que nous venions de vivre le plus parfait moment qui soit. Elle représente tant à mes yeux. Je l'attire contre moi et l'emprisonne dans mes bras. D'abord réticente, elle essaie de se dégager de mon étreinte mais je la resserre un peu plus, la collant contre mon torse. Peu à peu, elle finit par lâcher prise. Sa tête se colle contre mon torse et mon menton se pose naturellement sur le sommet de son crâne. Nous restons un moment ainsi, avant qu'elle se dégage doucement et redresse son beau visage vers moi.

_ Que veux-tu Thorsten ? Me demande-t-elle en me regardant droit dans les yeux.

Je ne lui réponds pas et plonge mon regard dans le sien ou je me noie dans l'émeraude de son regard. Elle soupire et ferme les yeux quand ma main se pose sur sa joue.

_ Je ne peux pas rester, . . . je dois retourner à ma place, . . . imagine que cela se sache tout serait perdu. Ton mariage serait menacé et . . . je ne donnerai pas chère de ma vie, termine-t-elle en appuyant sa joue contre ma paume.

Puis sa main se pose sur la mienne et elle se dégage définitivement de mon étreinte. Elle se dresse sur la pointe des pieds et dépose un doux baiser sur mes lèvres.

_ Au revoir Thorsten, me dit-elle la voix tremblante.

Mais alors qu'elle s'éloigne de quelques pas, je les comble et saisit son poignet.

_ Non . . ., dis-je simplement.

Elle me regarde interdite par mon geste.

_ Que veux-tu dire ? Articule-t-elle perdue par ma réaction.

J'inspire profondément et prends son visage entre mes mains. Je veux qu'elle comprenne l'importance qu'elle a pour moi.

_ Je ne veux pas que tu sortes de cette pièce sans moi. Je ne veux pas que tu retournes dans cette chambre humide. Je ne veux pas te voir réduite au rang d'esclave . . . Je ne sais pas encore ce que l'avenir nous réserve mais je ne veux pas te savoir loin de moi, terminais-je en déposant un tendre baiser sur ses lèvres.

Je la serre contre moi et sens sa respiration s'apaiser. Puis tout en la gardant dans mes bras, je lui murmure de passer par les cuisines pour récupérer un panier qu'Adélaïde a préparé pour nous et de me retrouver à l'arrière du château.

Sans un mot supplémentaire, je romps notre étreinte, et prends le sac lui faisant signe d'y aller. Mais avant qu'elle ne franchissent la porte, je ne peux m'empêcher de goûter encore une fois à ses lèvres. Elle me sourit une dernière fois et se dirige vers le couloir.



J'arrive à rejoindre les cuisines sans croiser trop de monde. Et ceux que je croise m'ignore, cela me convient pour être parfaitement honnête. D'ailleurs je prie intérieurement pour ne croiser ni Aurora, ni Sigfrid et encore moins Vidrün.

Pour une fois, la chance est de mon côté et j'atteins les portes des cuisines sans encombre. À peine ai-je mis un pied à l'intérieur, qu'Adélaïde me prend la main et m'attire dans un recoin à l'abri des oreilles indiscrètes. Je n'ai pas le temps de dire un mot qu'elle place un cape sur mes épaules et me met un panier dans chaque main.

_ J'ai mis ce qu'il vous faut pour plusieurs jours. Si cela devait durer, je déposerai un panier à l'endroit habituel dans la forêt, me dit-elle sans reprendre sa respiration. Elle me serre dans ses bras avant de m'embrasser tendrement sur le front. Puis elle reprend, faites attention à vous mes enfants. Passe par là, termine-t-elle en me montrant une porte dérobée.

Je lui rends son étreinte et quitte rapidement les cuisines par la porte indiquée. Je me retrouve dans un coin sombre de la cour juste à côté de la grande porte qui permet de sortir du château. J'ajuste ma capuche pour me fondre parmi les villageois qui rentrent chez eux et sors sans encombre de la cour.

Après avoir fait quelques pas avec les villageois, je bifurque sur un petit sentier qui m'amène sur l'arrière du château. Ensuite, je suis les indications de Thorsten et trouve rapidement le point de rendez-vous. J'attends un moment mais il n'arrive pas. Alors je finis par m'asseoir contre un arbre pour l'attendre. Je commence à me demander si je n'ai pas commis une erreur de plus mais à ce moment-là, j'entends un cheval. Par réflexe, je me cache dans un buisson, mais avec la lumière qui décline, je ne vois pas de qui il s'agit.

_ Eivor . . . Eivor . . . Eivor . . . où es-tu ?

Reconnaissant la voix de Thorsten, je sors de ma cachette et vois un sourire illuminé son visage. Sans un mot, il s'approche de moi, prend mon visage en coupe et fond sur mes lèvres. Je me laisse aller contre lui, trop heureuse de le retrouver. Son baiser tendre devient audacieux et je ne peux retenir un gémissement de plaisir quand il resserre son étreinte. C'est lui qui rompt notre étreinte et colle son front contre le mien. Sa respiration est aussi saccadée que la mienne.

_ Allons-y, j'aimerais arriver avant que la nuit ne soit noire, me dit-il en ramassant les paniers et en me dirigeant vers sa monture.

Il charge les paniers et me fait monter sur son cheval avant de s'installer dans mon dos. Le cheval progresse au pas à cause de la végétation. Même si ma cape est chaude, la fatigue, le froid et l'humidité de la forêt me font frissonner. Thorsten resserre alors sa prise autour de ma taille et me colle contre son torse avant de m'envelopper dans sa cape. Je me laisse aller contre lui et ne mets que quelques instants à m'assoupir dans ses bras, enveloppée par sa chaleur, son odeur et bercée par le rythme lent du cheval . . .

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top