IV- Nouveau monde

Elle s'était levée, le regard noir. Elle le fixa dans les yeux. Lui ne bougea pas.

Elle sentait une force en elle nouvelle, une force de vie et de défi. Elle osa tourner les talons et s'éloigna. S'il souhaitait la tuer, qu'elle ne le voyait pas faire.

Mais l'animal grogna contre elle comme pour la stopper et d'un geste de l'homme, il se ravisa et vint se positionner près de son maître.

Ce fut alors que l'homme en noir, lui lança une phrase qui changea... tout.

« Une fois au village, demande à ton père ce qu'est devenu Naruto ! »

Elle s'arrêta net puis se retourna doucement tout en tremblant. Elle oublia de se couvrir, de se cacher le visage. Le nom qu'il avait prononcé, on l'avait banni de sa vie depuis plusieurs mois déjà.

« Pourquoi me parles-tu de lui ? Comment le connais-tu ?»

L'homme resta muet comme pour la torturer encore un peu.

Elle revint sur ses pas, elle ne sentait plus les ronces et les branches qui lui déchirait ses pantoufles en velours.

« Réponds moi... »

Sa voix avait tremblé et elle ne pouvait cacher son émotion.

« Tu ne sais donc vraiment rien ? »

Elle ne comprenait pas ce qu'il disait. Elle ne comprenait pas comment un criminel comme lui connaissait Naruto. Son Naruto.

L'homme se découvrit la moitié du visage. Lorsqu'il souffla comme pour inspirer puis expirer l'air frais de la nuit, un nuage vaporeux sortit de sa bouche.

Comme sa vue s'était accommodée à la nuit, Hinata distingua ses traits étonnamment fins, peu rude. En somme, il était bien fait.

Il s'avança. Son loup resté derrière lui, fronça son pelage et grogna en fixant la jeune femme. Ce n'était pas elle le danger ici pourtant. L'homme se positionna face à elle.

« Naruto... est mort ! »


Le monde sembla s'effondrer sous ses pieds trempés dans ses chaussons. Elle sentit ses genoux tremblés et avoir de la difficulté à rester debout.

« Quoi ? »

« Il a été pendu sur la place publique de ton village pour fornication, apostasie et association ! »

Ses genoux déjà fatigués par sa fuite cédèrent à la précision morbide.

Elle avait du mal à respirer, elle inspirait de grosses bouffées d'air afin de ne pas s'évanouir. Elle entendait le sang palpité dans ses tempes qui accélérait. Sa vision devint flou.

« Na... Naruto... »

L'homme en noir l'observait à ses pieds. Elle, fille de noble lignée, vautrée ainsi dans les ronces et la terre, portant des vêtements de valeur maintenant devenus guenilles, la voilà réduite à rien. Visage et chevelure découverte, bras et jambes visibles.

Dans n'importe quel village pratiquant le culte des Ootsutsuki, elle serait flagellée sans même prendre la peine de comprendre sa situation.

Il l'entendit pleurer sans retenue.

« Tu peux deviner pourquoi il a été condamné... »

Elle pleurait toujours. Oui, elle savait mais elle avait cru son père lorsqu'il lui avait promis la vie sauve du jeune homme contre son installation rapide chez son mari.

« Il m'avait promis... Il m'avait promis... »

Entre des larmes grosses comme des perles, elle articulait difficilement sa douleur.

« Ton père n'est qu'une crapule prête à tout pour arriver à ses fins, quels qu'ils soient... Tu étais sur sa liste ce soir ! »

« Mais je l'ai obéis... Je... »

« Pauvre fille... Tu ne sais rien... Tu ne comprends rien... »

Elle leva à nouveau la tête. Il vit ses yeux d'argent illuminés par les larmes qui roulaient entre ses cils.

Elle aurait voulu lui crier qu'elle voulait comprendre, qu'elle voulait tout comprendre, mais aucun son ne sortait de sa bouche.

Ils se fixèrent l'un l'autre. De mémoire, jamais Hinata n'avait pu observer un homme aussi longtemps et aussi franchement.

Elle ne se rendait pas compte du change que l'homme lui donnait. Il lui permettait son attitude, il ne la rappelait pas à l'ordre. Chez elle, elle aurait déjà reçu une punition soit de son père ou des dames de compagnie sur ordre de son paternel. Une femme n'avait pas à soutenir le regard d'un homme, même pas de son propre fils.

Elle se releva, en s'appuyant sur un tronc d'arbre mort près d'elle. Elle essuya ses larmes à l'aide de ses paumes et renifla doucement.

« Tout est de ma faute ! »

L'homme l'observa.

« C'est toi qui l'as pendu de tes mains ? »

Elle secoua la tête et serrât ses mains en croisant ses doigts sur sa poitrine.

« Non... Mais c'est par ma faiblesse qu'il a été conduit jusqu'à la corde... »

Des larmes quittèrent ses yeux à nouveau en pensant à lui, à sa tragique fin de vie... Et tout ça, juste parce qu'ils se sont...

« Depuis quand l'amour est une faiblesse ? »

Elle sursauta.

Il s'était finalement assis sur le tronc d'arbre tombé au sol dont le lichen avait envahi une partie de sa base. Le loup sombre posa sa grosse tête sur le genou de l'homme qui lui caressait le crâne. L'animal semblait presque ronronner.


Hinata leva la tête et observa le ciel sombre et la voute étoilée. Comme quand...



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Tous les matins, un rituel se faisait dans la chambre de dame Hinata. Depuis qu'elle avait eu 13 ans, les dames de compagnie s'affairaient dans sa chambre aux premières lueurs du jour. Le but était certes de l'apprêter mais surtout de vérifier si ses premières menstrues étaient arrivées. Son père, et encore plus son mari, s'impatientaient. Ses règles étaient tardives pour sûr. Et pourtant on la gavait de décoctions pour accélérer sa physiologie, on lui faisait prier plus tard, ou plus tôt pour que le dieu unique et miséricordieux lui accorde son cadeau ou plutôt ce fardeau de devenir femme.

Hinata, s'inquiétait aussi. Après tout, on lui avait toujours raconté comment elle saurait quand elle deviendrait femme. Dès les premières rougeurs sur ses draps ou sur ses vêtements, elle passerait automatiquement d'enfant à femme. Si au départ elle trouvait cela absurde, à force de martèlement surmonté d'enthousiasme de la part des conteuses, elle finit par trouver cela normal. Si Dieu le décidait ainsi, c'était que cela devait être ainsi. Même si elle avait déjà entendu parler de petites filles de 9 ou 10 ans prêtes à marier car réglées... Au départ, perplexe et dégoutée, elle apprit à l'accepter car qui pouvait comprendre la sagesse de Dieu ?

Et pourquoi questionner Ses lois ? C'était en soi un blasphème et suffisant pour recevoir une punition humaine -sans doute passer la nuit à genoux sur des graviers à réciter les versets du livre sacré- sans parler de la punition divine dans l'au-delà -sans doute la damnation éternelle.

Ainsi, chaque matin elle commençait la journée par cette inspection si intime. Et cela ne la choquait plus. C'était cela sa vie.

Un soir, il y avait de l'agitation au domaine. Servants et servantes s'affairaient à préparer la salle de réception. Salle interdite aux femmes exceptées aux servantes évidemment. Hinata et Hanabi observaient de loin l'agitation. Elles faisaient mines de ne pas regarder et d'être concentrées sur leur ouvrage de tissage mais que nenni. Elles ne sortaient jamais et voyaient donc que trop peu de monde, alors quand elle entendait autant d'agitation, elles savaient qu'il y aurait des convives. Elles espéraient être oubliées, installées sous la tonnelle donnant sur le bassin agrémenté de nénuphars mauve et rose, d'un saule pleureur qui laissait tomber quelques-unes de ses branches sur le toit en bois du guétali.

Mais c'était sans compter leur perceptrice et lieutenant en cheffe de toute la demeure après leur père, depuis la mort de leur mère. Son œil aiguisé et accusateur était toujours prêt à juger et condamner. C'était un vrai talent. Elle était habillée toujours de noir des pieds à la tête. Ses longues robes amples ne dissimulaient pas son fort embonpoint ce qui la rendait encore plus menaçante. De toutes les employées, elle était la seule autorisée à se couvrir, car elle avait un statut au-dessus des autres. Elle avait sa longue visière noire surmontée d'un lourd tissu de la même couleur. Dans les couloirs les plus sombres, elle avait l'air d'un fantôme prêt à prendre l'âme du premier malheureux venu.

Hanabi la détestait. Hinata essayait de temporiser. Après tout, sœur Obake était représentante de la foi chez les Hyuga. Elle s'assurait que tous, respectaient les lois de Dieu. Et encore plus les héritières.

Hanabi lui donnait du fil à retordre, alors la petite se retrouvait souvent punie à genoux sur des graviers en guise de dîner. Ce qui outrait le plus sœur Obake était les questions logiques et philosophiques allant à l'encontre des lois divines.

« Une bonne fille et une bonne femme évite de contrarier le dieu unique en restant à sa place de maîtresse de maison et de donneuse de vie ! »

C'était son crédo favori pour mettre fin à tout questionnement blasphématoire.

« Jeunes dames, les invités de votre père vont bientôt arriver ! Veuillez vous rendre dans vos chambres où le dîner vous sera servi... »

« J'aimerais dîner avec ma grande sœur et dormir dans sa chambre ce soir ! »

« Vous avez assez passé de temps à faire vos commérages aujourd'hui... Vous resterez donc isolées dans vos appartements à méditer sur quelques versets. Vous en sortirez plus proche de la lumière et plus érudites ! »

« Nous passons nos journées à lire des versets ! Et faire du tissage n'est pas faire du commérage ! Comment le pourrions-nous, vous êtes toujours sur notre dos ?! »

La femme forte serrât son livre sacré jusqu'à faire plisser la reliure de cuir. Une veine lui apparut sur la tempe.

« A nouveau cette impertinence qui vous caractérise dame Hanabi !! Voilà de quoi je parle quand je dis que vous passez suffisamment de temps ensemble ! Vous vous montez la tête de choses futiles qui vous éloignent de la vérité, de votre chemin de femme et future mère ! »

« Je n'ai que 7 ans ! Je ne suis clairement pas prête pour toutes ces- »

Et bam !

Hanabi ne put finir sa phrase, la sœur l'avait frappé à la figure avec son livre, faisant saigner le haut de ses gencives. Hinata vint aux côtés de sa cadette et la serrât contre elle.

« Qu'avez-vous fait ? »

« Rien de plus que la punition qui se doit quand l'impertinence défit les lois de la morale absolue ! »

Hanabi se redressa, son regard défiant ne l'avait pas quitté. Hinata admirait presque sa petite sœur. Jamais elle n'avait eu un tel tempérament, elle. Mais elle savait, qu'à la fin, Hanabi allait perdre. C'était inutile.

« Sachez pour votre gouverne que dès que vos menstrues apparaitront vous serez en mesure d'être prise pour épouse ! Votre père a déjà sélectionné de charmants prétendants de notre communauté pour vous ! Nous espérons seulement que vous soyez davantage bénie que votre sœur et que nous n'aurons pas à attendre trop longtemps ! »

Hinata écarquilla les yeux, certes elle venait de recevoir un reproche déguisé, comme si elle contrôlait son corps sciemment, mais à l'idée que sa petite sœur pouvait être donnée en mariage alors qu'elle était si petite la dégoutait. Hanabi elle, rageait et ne le cachait pas.

La veine toujours plus grosse sur le front de la femme, elle saisit d'une force hors norme le petit bras de l'enfant rebelle. L'entrainant dans l'arrière-cour. Hinata savait ce qu'il allait se passer, elle ne dit mot et regarda sa bien-aimée sœur s'éloigner par les barreaux en bois de la tonnelle. Voilà qu'elle était leur vie.

A l'heure du dîner, Hinata restât seule dans sa chambre. Les dames de compagnies étaient davantage occupées avec les invités du chef de clan.

Après le repas, elle fit mine d'avoir fini de prier, puis de s'endormir. Les servantes soulagées d'avoir moins de travail délaissèrent alors l'aile de ses appartements. Hinata savait que sœur Obake était conviée à la réunion elle aussi, sans doute une nouvelle réunion des dignitaires de la foi. Alors elle avait un peu de champ libre.

Elle cacha divers coussins sous sa couverture donnant l'illusion de son corps.

Elle fouilla sous son bureau, puis sortit une petite boite avec un mouchoir à l'intérieur contenant quelques dim sum qu'elle avait mis de côté durant son repas. Elle enfila un long manteau à capuche en soie noir ainsi que ses petites sandales plates et sortit de sa chambre.

Son cœur battait la chamade, elle avait l'impression de commettre un crime horrible, car elle risquait d'être vue par n'importe qui qui passerait dans l'arrière-cour. Mais son cœur de sœur ne pouvait laisser sa petite sœur sans repas et punie durant toutes ses heures.

Elle courut le plus discrètement possible, se baissant derrière la terrasse longeant les pièces de la maison.

Elle arriva dans l'arrière-cour et chercha sa sœur des yeux dans la pénombre pas si sombre à cause des lanternes allumées ici et là.

« Hanabi ? Hanabi ? »

Elle trembla à chaque fois qu'elle susurrait le nom de sa sœur. Mais où était-elle donc ? La sœur l'aurait-elle punie ailleurs ? Mais non, elle constata qu'un tapis de gravier avait bien été installé. Hanabi était là.


« Ouch !! »


Quelque chose avait heurté son dos. On venait de lui lancer un caillou. Flagellation ? Elle était débusquée ?

Mais son regard fut attiré par des mouvement rapides derrière les bosquets entourant le grand chêne familial. Elle s'avança doucement et reconnut sa sœur. Elle accéléra le pas mais stoppa soudainement constatant que sa sœur n'était pas seule. Un homme était avec elle. Blond comme les blés, les yeux bleus comme un ciel de printemps et un sourire malicieux sur les lèvres. Elle crut sentir son cœur sortir de sa poitrine. Le seul réflexe qu'elle eut fut de se cacher le visage car aucun homme extérieur à sa famille et son époux n'avait le droit de le voir.

Hanabi sortit des bosquets et prit la main de sa sœur pour l'attirer dans leur cachette. Hinata tomba durement sur le sol. Sa petite sœur était peut-être affamée mais n'avait pas perdu son énergie.

« Grande sœur ! N'es-tu pas folle de courir ainsi en pleine nuit ??! »

Hinata parut interloquée, seuls ses grands yeux clairs montraient ses expressions derrière le bout de tissu qu'elle tirait devant le bas de son visage.

« On aurait pu te voir ou même t'entendre !! »

« Comment oses-tu ? Toi qui te caches ici avec cet... Cet homme ?! Que pourrait-on croire ?! »

« Il prend autant de risque que toi grande sœur ! Et grâce à lui j'ai eu quelque chose à manger au moins... »

A côté de la petite sœur, une petite assiette presque vide avec quelques dim sum, les mêmes que ce qu'Hinata avait apporté. Elle vit aussi les genoux abimés et en sang de sa cadette. Son cœur se serrât.

« Bonsoir dame Hinata... Je me présente, je m'appelle Uzumaki Naruto et je fais partie de la ligue invitée par votre père ce soir... »

« Bon... Bonsoir... »

Elle se recroquevilla davantage sous tout son tissu. Elle ne devait même pas lui parler sans la permission de son père.

« Oh je suis désolé, je sais que vous êtes déjà mariée et que vous n'avez pas le droit de parler ni de vous montrer à un autre homme... Je me confonds en excuse ! »

Il avait comme lu dans son esprit.

« Ce sont des règles stupides qu'aucun Dieu n'aurait ordonnées, j'en suis sûre ! »

« Ha... Hanabi !!!! »

« Je suppose que c'est à cause de ce franc parler que vous vous retrouver dans ces situations mademoiselle ! »

Hanabi s'amusa de son humour. Cela était plutôt rare pour un dignitaire religieux. Ils étaient tous si sévères et austères en général. Le jeune homme sourit à pleine dents.

Le sourire ironique du jeune homme parut lumineux à Hinata. Son cœur se gonfla d'une émotion encore inconnue, mais si splendide. Comment l'Homme pouvait-il vivre sans cela au quotidien ? Pourquoi ne ressentaient-ils pas cela en se connectant à Dieu ? Car pour elle, cela avait quelque chose de divin.

« Je connais bien sœur Obake... Elle est très stricte ! D'ailleurs nous ne nous entendons pas bien... Haha ! Je te conseille de vite en finir avec ton assiette et la nourriture que ta apporté ta sœur et de retourner à ta punition... Sœur Obake remarque beaucoup de choses... Comme mon absence prolongée par exemple ! Haha ! »

Il se gratta la tête puis se releva. Il se tourna ensuite vers Hinata.

« Je vous conseille à vous aussi de retourner à vos appartements... Si l'on vous trouvait ici, ce serait un drame que même votre geste altruiste envers votre sœur ne saurait pardonner... »

« Encore une idiotie de ce culte ! »

« Haha ! Jeune mais éveillée demoiselle ! »

Hanabi tiqua.

« Et vous êtes un bien étrange dignitaire de la foi... »

Naruto se redressa. La petite fille, du haut de ses quelques années avaient un esprit vif et un œil aguerri sur les gens. Il sourit mais plus sérieusement.

« Je vais devoir vous laisser... à regret... »

A ces derniers mots, il fixa Hinata.

Elle frissonna.

Il s'en retourna vers le bâtiment où les réunions se déroulaient.

Hanabi engloutit aussi rapidement ses aliments que possible. Elle fit une bise sur la joue de sa sœur puis courut se remettre en position à genoux sur les graviers. Elle était forte, elle ne geignait pas, elle ne grimaçait même pas. Hinata lui caressa la tête avant de courir jusqu'à sa chambre, elle regarda une dernière fois vers le bâtiment ou le beau blond avait disparu, et se mit à espérer le revoir.

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