42🎮Voyage en Tesla

« Raconte-moi ta vie, Charlie. »

Cette phrase, il me l'a balancée quelque temps après que nous ne soyons sorties de la capitale avec sa voiture moderne ne passant pas inaperçue sur la route et qu'il conduisait d'une main, assisté du pilotage automatique.

Alors pour détendre l'atmosphère, en plus de la fonction « pets » de la Tesla nous ayant fait rire cinq bonnes minutes, et n'ayant de toute façon aucune échappatoire, je m'étais lancé dans un monologue saupoudré d'humour acide.

Je sûre que Momo a dû fouiller dans ma vie et qu'il est au courant de plus de choses que moi, mais je me suis tout de même livrée à l'exercice.

Étrangement, je sens que je peux avoir confiance en lui.

Pas « étrangement », mais plutôt parce que je me sens redevable après ce qu'il a fait à... Simon Dubois.

Andréa a un ami d'enfance très mystérieux...

Tous les deux se ressemblent beaucoup dans leurs réactions, à se demander qui a influencé l'autre, mais ils sont également bien différents.

Momo a l'air à la fois plus sincère et plus secret. Plus sûr de ce qu'il fait. Il blague franchement et ne doit pas être du genre à mentir pour cacher ce qu'il ressent... Parce que toute son énergie est employée à protéger ce qu'il est réellement.

L'image qu'il semble avoir de lui-même.

Il est tard lorsque nous arrivons à un superchargeur alors que j'essaie de deviner dans quelle ville nous allons passer la nuit.

Je n'ai ma réponse que lorsque nous arrivons sur le parking d'un Hôtel Ibis Styles, là où sont disposés les chargeurs électriques de Tesla.

— On est à Bourges ? demandé-je en regardant la carte du tableau de bord.

— « Que » à Bourges à cause des embouteillages de tout à l'heure. C'est relou de ouf. J'aurais bien voulu visiter mais je préfère qu'on aille se coucher tôt parce qu'on a beaucoup de route demain.

— Ça va passer à la vitesse supérieure ?

— Ne me provoque pas.

Il est comme Andréa, c'est dingue.

La même répartie et cette impression de se connaitre depuis toujours... Sans le regard méprisant et les piques méchantes de l'homme qui m'a fait craquer.

À cette pensée, je secoue vivement la tête et tapote mes joues pour chasser son prénom revenant sans cesse dans ma tête.

Ce que Momo remarque très bien mais ne relève pas.

Au contraire, il change habilement de sujet et m'entraine dans ces rues inconnues mais pourtant si familières par son architecture, me rappelant mes week-ends avec mes parents.

Lorsqu'en passant devant la Cathédrale Saint-Étienne, je me souviens d'être déjà venu ici.

— Ma mère nous trainait dans des villes comme ça pour visiter des monuments historiques religieux. Je suis quasiment certaine d'être déjà passée dans ces rues.

— Tu as de la chance.

Son commentaire me rappelle soudain ce qu'il m'a dit avant de partir de la capitale. Ce qui m'a intrigué avant qu'il ne détourne mon attention en me demandant de raconter ma vie.

Mais alors que nous entrons dans l'une des dernières boutiques de vêtements ouvertes de la ville, j'hésite.

Je l'observe garder le silence en touchant les différents tissus avant de me montrer du doigt le rayon des sous-vêtements. Si Andréa en aurait profité pour sortir un « Tu veux de l'aide pour enfiler ta culotte ? », Momo reste silencieux et m'attend en déambulant dans le magasin.

« T'inquiète, je paie. » dit-il alors que j'arrive à la caisse avec de quoi m'habiller pour trois jours de vadrouille je ne sais où.

Je tente de refuser en l'empêchant de laisser sa carte se poser sur le terminal de paiement, mais je ne suis pas assez habile et notre petite scène fait rire la vendeuse.

Et moi, ça me rend à la fois grognon et gênée.

J'insiste juste après pour payer le prochain restaurant où nous nous arrêtons parce que « je n'ai pas besoin que l'on m'entretienne », jusqu'à ce que je regrette sa malice.

C'est là que je reconnais le fourbe ayant inspiré le diable : il prend ce qu'il y a de plus cher sur la carte de la crêperie où nous nous sommes arrêtés.

« Momo », commencé-je alors qu'il semble satisfait de sa commande, « Est-ce que je peux te poser des questions sur toi ? »

Un léger mouvement de recul dans son siège et son froncement de sourcil me dit qu'il ne va rien lâcher comme information ce soir...

« Ok. »

Quoique.

— On parcourt des kilomètres ensemble depuis quelques heures et je ne sais quasiment rien de toi. À part que tu es l'ami d'enfance d'Andréa, un barista mais aussi un mec qui touche à des trucs pas très légaux.

— C'est déjà plus que ce qu'on la majorité des gens.

Son ton est presque sec. Je laisse un silence planer entre nous alors que l'on vient nous servir des bolées de cidre, lorsqu'il reprend enfin la parole et brise le malaise entre nous.

— Excuse-moi. J'ai pris l'habitude de me surblindé. Et j'ai perdu celle d'avoir des rencards.

— Parce qu'on est en rencard, là ?

— Tu crois que je t'ai amené à Bourges pour quoi faire ?

Un clin d'œil et son sourire revient, le faisant changer d'expression aussi rapidement que de ton. Passant d'un homme mystérieux et méfiant à charmeur avec option humour.

Honnêtement, j'aurais pu craquer pour lui, avant. Mais avec le temps, j'aurais été saoulé de cette fausse confiance et de ce qu'il cache.

Si le cœur d'Andréa est entouré d'un mur, Momo porte un masque fait de la même matière.

— Je suis juste « un mec ».

— Tu n'as pas l'air d'être juste « un mec », Momo.

— Morgan.

Je cligne plusieurs fois des yeux, mon sourire s'étirant alors que l'homme en face de moi détourne le regard et semble cacher une légère gêne.

— Morgan ?

— « Morgane », répète-t-il alors que j'ai volontairement mal prononcé son prénom. Comme Morgan Freeman.

— Alors c'est pour ça qu'Andréa t'appelle « Morgie » ! Mais pourquoi tu te fais appeler Momo ? Je croyais que c'était Mohamed, du coup.

— Par habitude. Et on me dit tout le temps ça.

— Mais c'est tellement stylé, Morgan !

— Tss... On croirait entendre Andy...

C'est tellement amusant parce qu'il n'arrive même plus à me regarder dans les yeux tant il est troublé !

Est-ce que c'est une des nombreuses facettes cachées de Momo ? Morgan, plutôt ?

Nos plats arrivent très rapidement devant nous et même la fourchette à la main, je ne manque pas de mettre mal à l'aise mon nouvel ami en murmurant son prénom.

S'il avait la peau aussi claire que la mienne, il serait rouge comme une tomate.

— T'es chiante, arrête !

— Ok, ok... ! Mais ça n'a pas répondu à mes questions.

— Tu veux savoir comment j'ai rencontré Andy ?

— Vas-y, balance les dossiers.

Morgan me fait volontairement marinée le temps de deux trois bouchées dans sa galette avant d'essuyer le coin de sa lèvre avec son pouce et de commencer ses aveux :

« Il était une fois un mec qui guettait depuis sa fenêtre de son quartier, prévenant les « grands » au cas où des keufs en civil se baladaient entre les barres d'immeubles.

Sa vie était basique. Basique comme n'importe quelle personne naissant dans ce que les infos appellent les « banlieues chaudes ». Il était presque condamné à devenir comme son demi-frère : un dealeur paumé assez bon en maths pour faire de la thune et en sport pour ne pas se faire chopper.

Jusqu'au jour où il a eu un nouveau voisin. Un petit blanc gros comme Totoro qui faisait pitié et qui est devenu sa parfaite victime... Jusqu'au jour où ce gamin, qu'il méprisait de rester passif à ses insultes, lui a fait comprendre qu'il pouvait avoir de l'importance.

Qu'il n'était pas qu'un déchet de plus sans intérêt.

End of the story. »

Alors quand il disait qu'il en avait fait baver à Andréa quand il était jeune, c'était ça ? Andréa était le nouveau venu très différent des autres qui s'est retrouvé en victime... Sa victime ?

Morgan me dévisage, attendant une réaction de ma part alors que je prends une grande gorgée de cidre pour faire passer tout ça.

— Tu le harcelais ? demandé-je enfin.

— Ouais. Parce qu'il m'énervait à ne pas réagir. Il était comme une coquille vide et ça me saoulait. Et puis un jour, on est devenu ami.

— C'est pour ça que tu parlais de Syndrome de Stockholm ?

— Parce qu'il s'est attaché à moi malgré ce que je lui faisais subir.

— Alors c'est pour ça qu'Andréa est si...

— Non, m'interrompt-il, c'est à cause de moi qu'Andy sait se défendre et encaisser. Ok, j'ai aussi contribué à son image de salaud mais ce n'est pas moi la cause.

— C'est à cause de quoi ?

— De l'amour. Enfin de cette connasse de Steph surtout. Une nana débile qui a joué avec ses sentiments et qui lui a appris qu'il y avait bien plus douloureux pour son cœur que ce que je pouvais lui faire. Ouais, j'étais un enfoiré de gamin et j'irais surement en enfer mais si on n'avait pas été là l'un pour l'autre, je ne serais pas devant toi. Et tu n'aurais jamais rencontré Andy.

L'aplomb avec lequel il s'exprime sur leur passé me montre à quel point la relation entre les deux hommes peut être très complexe.

Je suis certaine que je n'en apprendrais pas plus là-dessus et qu'il doit éluder pas mal de détails.

Dans tous les cas, Morgan semble être convaincu qu'il est un enfoiré à cause de son passé de brute adolescente.

— Tu étais jeune et il y avait un contexte...

— Essaierais-tu de me faire déculpabiliser ? Alors que j'ai fait la misère à l'homme qui tu pourchasses actuellement ?

— Je ne le pourchasse pas ! Enfin. Bref. Je veux juste te faire relativiser. On se connait à peine mais malgré tout ce que tu viens de me raconter, je suis convaincue que tu es une bonne personne... Parce que tu m'as aidé.

— Au prix d'une famille détruite par la mise en lumière de la perversité de ta némésis. Avec des moyens pas très légaux.

— Tu as peut-être aidé d'autres personnes que moi en révélant qui il était vraiment.

Morgan ne poursuit pas la conversation et laisse un long silence entre nous, perturbé par nos couverts et l'ambiance de la salle.

Jusqu'à ce qu'il finisse par changer de sujet, arrivé au dessert, et me parle de ma performance sur IRIS.

Nous continuons à discuter de mes passions et d'autres alors que nous quittons le restaurant en direction de l'hôtel.

Nous dormons dans la même chambre mais dans des lits séparés et, alors que je me faufile dans les draps, j'entends la voix de Morgan s'élever.

« Est-ce que tu es amoureuse d'Andy ? »

Je ne peux pas voir mes joues rougirent mais je le sens tant la question est inattendue et me gêne.

Je me tourne et retourne dans le lit avant de relever la couette cachant une partie de ma tête et de déclarer d'une voix timide :

— C'est-à-dire ?

— On ne répond pas à une question par une question.

— Tu m'aurais demandé si j'étais amoureuse de Brute, mon coéquipier sur IRIS... Je t'aurais répondu « oui ». Mais là, c'est autre chose. Je ressens des sentiments contradictoires pour Andréa.

— Développe.

— Il m'a trahi, Morgan.

— Pfff... T'es sérieuse ? T'es pas bien placé pour parler de trahison. Perso, je suis au courant que tu as tenté de l'attirer dans tes bras pour te venger.

— Aie... C'est vrai que je l'avais dit à « Mawa ».

— Et tu sais comment Andy a réagi quand il l'a découvert ? Il a été blessé... mais il ne l'a pas vécu comme une trahison. Il a cherché à comprendre pourquoi tu lui en voulais autant. À savoir si tu n'étais qu'une manipulatrice.

— Merde...

— Alors ouais, il a déconné mais il ne t'a pas dit la vérité parce qu'il avait peur de ta réaction. Il ne voulait pas que tu le blesses parce qu'il sait que vous êtes pareil : vous faites sacrément mal quand vous êtes rancuniers, tous les deux.

— Je sais...

— Vous avez intérêt à avoir une vraie discussion parce que ça me casse les couilles de voir Andy dans cet état. Il est perturbé au point d'être dégouté par les autres meufs que toi.

— Attends, quoi ?

— Ben oui, bien sûr, il ne t'a rien dit. 'Tain, il saoule ! Andy n'a pas couché avec d'autres femmes que toi depuis qu'il sait que tu es Lucky. Franchement, si ses sentiments ne sautent pas aux yeux en sachant ça, c'est qu'il y a un sérieux déni.

J'entends Morgan grommeler tout seul en s'agitant dans son lit avant qu'un silence ne s'installe pour finalement entendre sa respiration régulière m'indiquer qu'il s'est rapidement endormi.

Il devait être crevé après sa journée de travail et les heures de route.

Mais moi, j'ai du mal à ne serait-ce que somnoler. Les paroles de Morgan tournent et retournent dans ma tête, agissant comme des baffes accompagnées par ma logique et mon bon sens.

Connectant mes neurones non pas défectueux mais bien aveuglés par le déni alors que je comprends toutes les réactions d'Andréa et ses mots :

Je ne suis pas « rien » pour lui. Je suis plus qu'une assistante et coéquipière.

Et il l'est tout autant pour moi.



🎮🎮🎮



— T'es complètement tarée, Charlie.

— C'était de la légitime défense !

— Tu as quand même réussi à te faire inviter à la pyjama party d'une fille qui t'avait volontairement cassé ta Nintendo DS pour pouvoir pisser dans son lit juste après qu'elle se soit réveillée. Pour que toutes ses copines pensent qu'elle n'avait pas pu se retenir.

— Elle le méritait, c'était une garce.

— Il va sérieusement falloir que tu revoies ta définition de « légitime défense ». D'ailleurs, sors de ma voiture.

— Oh ça va ! Elle n'a eu que ce qu-

— Je voulais dire qu'on était arrivé. Tu peux sortir.

Je me masse les paupières et étire mes jambes hors de la voiture après ce long trajet nous ayant emmenés jusqu'en Lozère.

En Lozère.

Andréa n'aurait-il pas pu choisir un endroit moins isolé et plus proche de la mer que ce département que je n'arrive pas à placer sur la carte ?

Le froid de la vallée m'agresse dès l'instant où je sors complètement de la voiture mais Momo, comme un bon sauveur, ouvre son coffre et en sort deux gros pulls moches mais essentiels.

— T'avais tout prévu ? réussis-je à articuler entre deux claquements de dents.

— Ouais, dès que j'ai reçu ton message, je me suis dit qu'il fallait s'y préparer. Et puis je connais bien cet endroit.

— Ah ouais ?

— Avec Andy, on a passé quelques vacances ici. On était seul, il n'y avait pas de réseau et encore moins internet mais on savait comment s'amuser. Du coup, je connais les alentours comme ma poche. Ça, et le climat au début de l'hiver.

— Comment est-ce qu'il peut faire aussi froid dans le sud... On n'est même pas encore en décembre...

Morgan laisse s'échapper un rire moqueur avant d'enfiler son pull et d'étirer ses bras face aux montagnes.

Et je dois l'avouer, même si ce n'est pas le sud que j'imaginais, c'est magnifique.

Tout est... tranquille.

Les montagnes boisées au loin nous coupent du monde et j'arrive même à entendre le bruit d'un ruisseau en contrebas de la vallée, ce dernier continuant calmement sa course jusqu'au Tarn que nous avons vu un peu plus tôt dans notre voyage.

Le nombre de voitures passant sur la route où nous sommes garées pourraient se compter sur les doigts d'une main l'espace de quelques heures. L'endroit est désert mais loin d'être mort.

Pour une joueuse comme moi enfermée dans sa chambre ou à arpenter les rues parisiennes, regrettant la verdure de sa petite campagne de banlieue, je trouve qu'être à cet endroit est comme... recevoir une bouffée d'air.

Respirer de nouveau.

— Je n'étais jamais partie en vacances jusqu'à ce que je devienne ami avec Andy. Ce n'est pas la plage ou partir au ski mais c'était tout comme pour moi. C'était une pause. Un moment pour souffler et me reconcentrer sur moi.

— Je commence à comprendre pourquoi Andréa est venu ici, alors. Après toute cette agitation, le tournoi et l'exposition à préparer, il devait être épuisé.

— Tu oublies la frustration sexuelle.

— Oh ça v-

Je sursaute en entendant les aboiements d'un chien courant jusqu'à nous et sautant presque sur Morgan pour mieux baver sur son jean.

« 'Faut pas avoir peur ! Il est tout excité aujourd'hui ! » s'écrie un homme descendant le chemin de gravier devant lequel nous nous sommes garés.

Un cinquantenaire à la barbe bien fourni portant un pull marron, un léger accent du sud dans la voix, et dont un bonnet avec le logo de La Poste cache son crâne chauve.

Il siffle d'un coup sec avec ses doigts, ce qui a pour effet de calmer le Border Collie faisant sa fête à Morgan.

— Les chiens ne sont pas censés attaquer les facteurs au lieu des pauvres gens innocents ?

— Toi, Morgan Baya, un garçon innocent ? Je t'ai connu haut comme ça que tu me volais déjà les paquets de gâteaux dans ma camionnette !

— Tu m'accuses parce que je suis noir, c'est ça ?! déclare Morgan d'un air faussement choqué, la main sur le cœur. C'est raciste, JP. Venant de toi, c'est vraiment choquant !

— Je suis d'origine martiniquaise et mon père est aussi noir que toi !

— Ça ne t'empêche pas d'être raciste.

— Petit con, va !

J'assiste à un échange étrange entre ces deux hommes qui commencent à mimer un combat de boxe entre eux alors que le chien attend à côté de moi que je le caresse.

Leur fausse bagarre s'éternisant, je ne me gêne pas pour suivre le chien m'entrainant jusqu'au bout du chemin tout en aboyant. Se retournant toutes les dix secondes pour s'assurer que je ne me suis pas perdue.

J'arrive devant un très grand jardin d'arbre fruité perdant leurs dernières feuilles alors que le Border Collie en profite pour uriner sur les pneus de la camionnette du fameux JP.

Et au bout du jardin fleuri, donnant l'impression d'être à la fois sauvage et méticuleusement entretenu, une magnifique maison en granite au toit en schiste me fait buguer.

J'ai déjà vu cette maison en photo. C'est celle de...

« Mon cœur, qui est-ce qu-... Oh ! Bonjour ? »

J'observe cette inconnue en col roulé rouge cerise portant un châle blanc sur les épaules, habillée d'une très longue jupe noire descendant jusqu'à ses chevilles et accompagnant une belle paire de chaussures plates salies par la terre.

La femme devant moi a les cheveux bruns coupés au carré encerclant son teint de porcelaine et porte des lunettes à la monture aussi rose que ses joues attaquées par le froid.

Elle est bien plus petite que moi mais aussi plus fine, me donnant l'impression que les mains de son compagnon, le grand facteur baraqué, pourraient briser son bras sans difficulté.

C'est la forme de son visage, de son nez et sa façon de me regarder qui me confirme son identité.

« Vous êtes Charlie ? » me demande-t-elle en écarquillant les yeux tout en souriant. Le genre d'expression faciale qui pourrait faire passer n'importe qui pour un psychopathe mais qui, chez cette femme dégageant énormément de douceur et de charisme, passe crème.

— O-oui ! bégayé-je avant de jurer intérieurement d'avoir foiré ma première impression. Charlie Ferrer, je suis...

— Je sais, ma belle. Et moi c'est Isabelle Simon. Enchantée.

Elle vient naturellement me faire la bise et m'étreindre très rapidement, comme si elle était ravie de me rencontrer alors que nous ne nous connaissons pas.

J'ignore ce qu'elle sait de moi, mais ça doit jouer d'une façon ou d'une autre sur son attitude.

Nous baissons toutes les deux la tête en même temps pour regarder le chien remuer la queue avant de s'agiter dans tous les sens, jusqu'à ce qu'un chat sorte de l'intérieur de la maison et vienne se frotter à mes jambes.

— Queen est très câline et King toujours excité de rencontrer de nouvelles personnes !

— King et Queen ?

La mère d'Andréa hausse les épaules en levant les yeux au ciel, et je reconnais encore une fois dans sa façon de faire un peu de son fils.

« Momo ! » s'exclame-t-elle soudain en voyant arriver derrière moi son compagnon et mon nouvel ami. « J'ai l'impression que tu deviens de plus en plus charmant à chaque fois que je te revois ! »

Morgan lui fait un clin d'œil, ce qui semble être sa marque de fabrique tant il l'utilise, avant de venir la serrer dans ses bras et de lui embrasser la joue avec douceur.

— Hello, Isa.

— Tu vas bien ? Tu as trouvé du travail ? Et tes frères et sœurs, ça va ? Est-ce qu'il y a une femme dans ta vie en ce moment ?

— Isa, commence le fameux JP, laisse le petit respirer ! Il vient d'arriver et tu veux le harceler de question !

— Surtout que je suis là pour toi, répond Morgan les mains posées sur ses épaules. J'ai appris que tu avais été à l'hôpital dimanche soir.

Quoi ? Dimanche soir ?

Alors ça veut dire qu'Andréa n'a pas fui mais... qu'il s'est précipité pour retrouver sa mère ?

Pourquoi Morgan ne me l'a pas dit directement ? Le fourbe.

— Une pure erreur de ma part ! s'excuse Isabelle les mains jointes. J'y étais pour madame Quérole ! Depuis des mois qu'elle y va pour tout et n'importe quoi, quand elle est tombée malade, elle a décidé de rester chez elle.

— On a dû la trainer de force aux urgences, rajoute JP, et on a bien fait. Le médecin nous a dit qu'elle n'aurait pas fait long feu, sinon.

— J'ai dit à Andréa que j'étais à l'hôpital et que j'y passerais la nuit parce que c'était grave mais comme il était tard et qu'on était crevé, j'ai oublié de lui préciser qu'il s'agissait de madame Quérole.

— Alors il a débarqué ici parce qu'il s'inquiétait pour toi... Logique. Et il est où ?

— Il a descendu le ruisseau de Runes pour rejoindre le Tarn à pied. Il voulait faire des photos de là où vous vous baignez quand vous étiez adolescents. Mais ça fait un moment que je n'ai pas de ses nouvelles.

— Et le réseau ne passe pas très bien dans les gorges. Je crois qu'avant de partir il nous avait dit qu'il ferait le sentier de Ruas et s'arrêterait en haut de la crête de la Girelle.

— En gros, on ne sait pas où il est, c'est ça ?

— Et il a pris du matériel de camping.

— Génial...

« Génial », c'était le mot.

Moi qui avais fait tous ces kilomètres pour le retrouver, je devais encore attendre à m'en rendre dingue.

Andréa n'était pas loin et en même temps, inatteignable dans ce coin du pays m'étant totalement inconnu.

Et je n'avais qu'une envie dans cette grande vallée...

Crier son prénom pour qu'il m'entende à des kilomètres et revienne en courant jusqu'à moi.



Est-ce qu'en une semaine, ça vous a manqué ? Moi, oui 🤭 La pause m'était nécessaire et même si je n'ai que très peu écrit, j'ai pu souffler un peu et avoir un regain d'inspiration.

Qu'avez-vous pensé de ce voyage avec Momo... oups ! Morgan 😏 ? De sa façon d'être mystérieux tout en étant concerné par la relation entre Charlie et Andréa ? De son passif avec Andréa quand ils étaient ados ?

De l'arrivée en Lozère et de la rencontre avec le "cercle restreint" d'Andréa ? Notamment de sa mère, Isabelle ? 

Des sentiments de Chachou qui ne vont pas aller en s'arrangeant tant que le diable ne pointe pas le bout de son nez...! Et croyez-moi, la suite risque d'être "aventureuse" 😉

J'espère que ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à me soutenir en votant et/ou en me laissant un commentaire pour me donner votre avis ! Je vous souhaite un bonne fin d'année et nouvelle, la santé, le bonheur, l'amour et tout ce qui vous fait envie ! 🎉🥂

P.S : je vais faire un BILAN DE L'ANNEE 2021 dans mon rantbook (comme chaque année) pour le 31 décembre donc restez à l'affut si vous voulez en savoir plus sur les futurs projets et autres 

🎮🎮🎮




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