TOME 2 - CHAPITRE 2 - JENNA

Le lendemain, à huit heures, je sors de ma chambre. Je m'assois sur un tabouret devant le plan de travail et saisi mon téléphone. J'ai envie d'appeler Will, j'hésite, mais je sais qu'il ne me répondra pas. J'appelle ma grand-mère, elle répond à la deuxième sonnerie.

- Jenna ? Tu vas bien ?

- Oui, je me disais... Tu penses que c'est une bonne idée que je vienne te voir ? Cette semaine, je peux prendre un avion jusqu'à Paris, puis un autre jusqu'à Lyon et après je prends le train.

- Euh... oui, mais pourquoi as-tu envie de retourner en France si subitement ?

- J'ai eu un problème, je t'en parlerais quand j'arriverais chez toi.

- Donc tu viens ? Et quand est-ce que tu arrives ?

Je réfléchis puis déclare :

- Demain.

- Ok, tu m'envoie un SMS de confirmation, Bisous ma Chérie.

- Gros bisous Mamie.

Je cours dans ma chambre pour acheter un billet d'avion, je pars ce soir à 18 heures à l'aéroport de Dulles de Washington. J'arriverais à l'aéroport de Saint Exupéry à trois heures de matin, puis je prends les transports en commun jusque chez ma grand-mère.

Pendant toute la journée, je prépare mes affaires. A deux heures, Gwen m'emmène à l'aéroport, nous arrivons là-bas à trois heures, j'enregistre mes bagages et patiente jusqu'à ce qu'il arrive. Je dois avoir une mine affreuse, malgré le maquillage et le fait que Gwen m'ait assurée toute la journée que j'étais magnifique, je sais qu'on voit à dix kilomètres que je suis en train de déprimer.

Durant la durée du vol, j'envoie des SMS à Will, sans réponses. C'est logique, mais je me suis dit qu'en lui citant des passages de Roméo et Juliette, il comprendrait que je l'aime, parce que je sais qu'il regarde mes messages, un petit œil est dessiné à côté des bulles de conversation.

- "Les plaisirs violents ont des fins violentes, dans leur excès il meurt, tel le feu et la poudre que leur baiser consume..." J'ai eu du mal à comprendre le sens de cette phrase, mais aujourd'hui, tout est évident. Tu as détruit l'armure de mon cœur, tu l'as libéré et pour finir tu m'as permis de gagner une bataille que je croyais perdu d'avance. Mais en m'enlevant ces protections, tu m'as rendue humaine, j'ai ressenti des émotions, comme ce plaisir immense et violent. Mais je suis aussi exposée à la tristesse, la peur et la honte, ces émotions qui ont permis de me blesser plus profondément encore... Tu m'as prouvé que j'étais capable d'aimer, et je le sais, je t'aime...

Je souris, je suis fière de mon analyse, si j'avais été en cours, je pense que j'aurais eu une bonne note. Mais ce n'est pas une analyse et je ne suis pas en cours. C'est la vérité, dans la vie réelle, Will est vraiment partit, il ne répond vraiment pas...

J'arrive en France, je me sens nerveuse, et si mon oncle débarquait chez ma grand-mère ? Non, elle ne le laisserait pas faire... Je saute dans le premier bus qui part pour Lyon après avoir récupérer ma valise. Je regarde les lumières de périphérique par la fenêtre, je ne compte pas le nombre de fois que j'ai pris cette route avec ma mère... Elle me semble tellement familière et pourtant, j'ai peur. J'envoie un SMS à ma grand-mère pour la prévenir de mon arrivée imminente.

Quand je suis au pied de l'immeuble, je l'appelle, elle répond tout de suite :

- Monte, c'est ouvert.

- Merci.

Je raccroche et pousse la première porte, puis la seconde. Je monte dans la l'ascenseur et il m'envoie au troisième étage. J'en ressors et cours jusque chez ma grand-mère. Je frappe à la porte et elle m'ouvre en souriant, je l'imite tandis qu'elle me prend dans ses bras.

- Tu m'as manquée, je déclare une fois qu'elle m'a lâchée.

- Toi aussi...

Elle me prend ma valise des mains et l'emmène dans ma chambre, je l'a suis.

- Tu veux boire quelque chose ? Me demande-t-elle quand nous retournons dans la cuisine.

- Je vais prendre un Coca, tu veux quoi à boire toi ?

- Aller ! Je vais prendre un Coca aussi !

Je lui adresse un grand sourire et ouvre la grande porte du frigo. Je me mets sur la pointe des pieds et attrape deux canettes de Coca. Je les pose sur la table et sors des verres du placard sous l'évier. Je m'assois sur les chaises en bois et en osier, en face d'elle. Elle a toujours les mêmes sets de tables, avec des photos qu'elle a prise elle-même, des ponts, des fleurs...

- Bon, Jenna, qu'est-ce qu'il se passe ?

J'inspire un grand coup, je n'ai jamais pensé que ma grand-mère pouvait avoir honte de moi, mais aujourd'hui, j'ai quand même une petite appréhension à lui expliquer ce que j'ai fait à Anthony.

- Tu sais, avec mes amis, quand j'avais quinze ans, on a fait une grosse connerie. Maman l'a dit à Will, et depuis, il ne me parle plus.

- Et... qu'est-ce que c'était cette bêtise ?

- J'ai fait croire à un garçon, Anthony, que je l'aimais alors que je n'en avais rien à faire de lui... Mais j'avais quinze ans, je me moquais de tout, je n'ai pas pensé une seconde à ce qu'Anthony pouvait ressentir. Le problème c'est que maintenant Will pense que j'ai fait pareil avec lui, ce qui est complètement faux !

Ma grand-mère fait la grimace, je ne peux pas lui en vouloir, je me suis comportée comme une connasse avec Anthony, c'est certain.

- Tu as essayé de l'appeler ?

- Ouais, mais sans succès...

Ma grand-mère ne semble pas savoir quoi répondre, elle qui a toujours un moyen de faire avancer la conversation :

- Bon... On va aller à la part-Dieu, ça va te changer les idées, tu dois repartir à Washington quand ?

- Mercredi soir.

- Parfait, ça nous laisse le temps de flâner au musée des confluences... à moins que tu préfères aller aux Beaux-arts ?

Je souris :

- On peut faire les deux, Confluences Lundi et les Beaux-arts Mardi.

- On verra, prête pour la part Dieu ?

Je hoche la tête, nous ressortons et prenons le métro jusqu'au centre commercial. Une fois là-bas, nous faisons le tour de pleins de boutiques. J'achète un jean noir, des pulls, une paire de bottes et une robe d'hiver noire qui m'arrive aux dessus de genoux. L'une est plutôt large, pas du tout dans le style de robes que je porte d'habitude, une large ceinture noir ressert la robe à la taille. L'autre est assez semblable mais c'est plutôt un pull long un peu moulant. Elles sont toutes les deux aussi belles l'une que l'autre ! Je prends une paire d'escarpins noirs pour aller avec les robe, je ne suis pas sûre de les mettre mais ma grand-mère insiste pour me les acheter. Nous sortons du magasin de chaussures quand je tombe nez-à-nez avec Jules, un ami du Collège et du Lycée.

- Jenna ? Me demande-t-il en m'apercevant.

- Jules ! Tu vas bien ? Je demande plutôt nerveusement.

- Ouais super et toi ? Faut que tu viennes nous voir un de ces jours ! Tu es en France pour longtemps ?

- Ça va aussi, je suis en France jusqu'à Mercredi, je peux passer demain soir si tu veux, tu m'envoies un SMS pour me dire où tu habites ? Tu as toujours mon numéro ?

- Oui ! On fait ça !

- Ouais, je dois y aller, à demain !

- A demain !

Je lui souris en m'éloignant, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée de les revoir, après tout, si je suis ici c'est parce que Will m'a largué quand il a découvert ce que j'ai manigancé contre Anthony avec Jules et les autres... Mais bon, j'ai envie de sortir, si je reste à la maison, je vais pleurer pendant des heures, ce qui ne sert strictement à rien.

Ma grand-mère et moi rentrons chez elle. Elle prépare des pâtes au beurre. Nous mangeons rapidement, je suis trop fatiguée, je n'ai pas bien dormi dans l'avion et la nuit d'avant non plus. Je sais que je ne vais pas bien dormir cette nuit non plus mais je préfère ça que rien du tout.

Je me réveille au milieu de la nuit, couverte de sueur. Ma grand-mère est assise à côté de moi, elle me tend un verre d'eau. Je vois dans ses yeux que le souvenir de cette nuit est aussi pénible pour elle que pour moi.

- Je suis désolée, me murmure-t-elle.

- Non, moi je suis désolée, je ne devrais pas te réveiller au milieu de la nuit.

Elle me sourit et ses yeux humides sont pleins de compassion pour moi. J'ai énormément de chance de l'avoir pour m'aider.

- Je t'ai vu Jenna, je l'ai vu aussi, et je sais que tu n'as pas à t'excuser de me réveiller pour ça. Même quand tu es à Washington, tu peux m'appeler pour en parler, je suis là pour toi, et je comprends ce que tu ressens.

Je hoche la tête, quelques larmes glissent encore sur mes joues humides.

- Merci, alors, de ne pas être partie en courant quand tu as vu ce qu'il a fait... Merci de m'avoir tenue dans tes bras... Merci de l'avoir fait partir... Merci de m'avoir fait voir un psychologue... Merci de répondre à mes appels, de m'écouter, m'aider, me conseiller, me comprendre à peu près... Merci de m'avoir appris tout ce que tu m'as appris... Merci d'être restée près de moi quand je pétais les plombs... Bref, la liste est longue, mais merci pour tout...

Elle prend ma main dans la sienne, un grand sourire triste dessiné sur ses lèvres.

Bonne lecture ! N'oubliez pas de voter ! (Bientôt les 200 votes !!!)

Merci pour tout ! ❤️

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