- Vas te préparer ! M'appelle Will depuis la cuisine, on va au restaurant dans une heure !

Je me relève à contre coeur du canapé en cuir et marche vers ma chambre en m'étirant. Je suis encore plus fatiguée que ce matin, je récupère un jean bleu et un gros pull en laine noir dans l'armoire et entre dans la salle de bain. Le bruit assourdissant de la machine à laver me donne mal à la tête et je me dépêche de rentrer sous la douche pour couvrir ce bruit. Je me douche rapidement à l'eau brûlante pour bien me réveiller puis sors de la douche. Mon corps se couvre de chaire de poule, je me dépêche de m'enrouler dans une serviette. Je m'habille en vitesse et brosse mes cheveux encore dégoulinants. Je branche le sèche cheveux et me sèche les cheveux le plus vite possible. Je trace un fin trait d'eye liner au dessus de mes yeux puis j'ajoute du mascara sur mes cils encore humides. Je me sens mélancolique, sans savoir pourquoi... Je respire un grand coup en sortant de la salle de bain, pourquoi est-ce que je n'arrive pas à me débarrasser de cette impression de mélancolie qui m'appuie sur le coeur ? Je récupère mon sac à main et je me dirige vers l'entrée pour mettre mes "bottes de la Part-Dieu" comme je me plais à dire. Will sors à ce moment de la cuisine il m'adresse un léger sourire et poursuit son chemin d'un pas décidé vers notre chambre. Je me demande ce qui lui arrive, je préfère ne pas poser de questions, je n'ai plus assez d'argent pour une deuxième voyage en France.

T'es prête ? Me demande-t-il en revenant vers moi après avoir mis un sweat sur ses épaules.

Je me relève en souriant et déclare :

Ouais ! On va où ?

C'est une sorte de pizzeria, pas loin d'ici, répond-t-il d'un ton absent.

Je lui adresse mon plus beau sourire, ignorant de la sorte son air déprimé. Quelques minutes plus tard nous arrivons devant le restaurant. Will rentre machinalement dans la pizzeria et demande au serveur une table pour deux personnes. Celui ci nous indique une table près d'une fenêtre qui donne sur parking. Ce n'est pas la meilleure place mais ce n'est rien. Will remercie platement le serveur qui nous propose la carte. Je commande une pizza quatre fromages et jette un coup d'œil à ma montre, il est 19 heures trente, je commence mon service au bar commence à vingt et une heures, ça me laisse un peu de temps pour comprendre ce qui tracasse Will. Nos pizzas arrivent, on aurait du en prendre une pour deux, elles sont immenses.

Bon appétit, je souhaite à Will.

Il me répond un rapide merci, je lui sourit sans rien ajouter, j'essaie de paraître le plus naturel possible... enfin, je fais comme si je ne voyais rien parce que si j'étais naturelle, on serait sûrement déjà en train de se crier dessus au milieu du restaurant. Nous sortons du restaurant à vingt heures, c'était la soirée la plus tendue de ma courte existence. C'est à peine si Will m'a adressé la parole deux fois pendant le repas. Je monte silencieusement sur le siège passager et Will sors du parking aussi rapidement que possible. J'ai l'impression de frôler la mort toutes les trentes secondes, je n'ai jamais vu Will conduire aussi rapidement... Je ferme les yeux et agrippe les bords de mon siège en priant pour qu'il ne nous arrive rien. Il prend un brusque virage à gauche et je laisse échapper un petit cri en me retrouvant projetée contre la vitre. Il sort de la voiture en jurant, je récupère mes clefs de voiture dans mon sac à main et monte dans ma voiture sans lui dire au revoir. De toute façon, il est sûrement déjà rentré. Je conduis à une vitesse normale jusqu'au bar. Je dis rapidement bonjour à Madyson puis je vais me changer dans le local avant de passer derrière le bar.

Ça va ? Me demande-t-elle en faisant un cocktail.

Je hoche la tête en souriant et demande à mon tour :

Et toi ?

Pareil, ça va super bien.

Nous arrêtons de parler, notre patron a embauché un DJ pour les soirs de weekend. La musique me perce les tympans, il augmente encore le son conversation devient impossible, vive le langage des signes ! Je sors de mon travail à vingt trois heures, je marche en vitesse vers ma voiture quand un homme m'interpelle :

Mlle Smith ?

Je me retourne légèrement réticente à l'idée de parler à un homme que je ne connais visiblement pas alors qu'il est vingt trois heures.

Oui, je peux vous renseigner ? Je demande le plus poliment possible.

Mon rythme cardiaque accélère quand je découvre qu'il s'agit de Georges Connor, le père de Will. Il me tend un main que je serre poliment et il poursuit :

Il me semble que notre relation avait pris un mauvais départ, que diriez-vous que nous recommencions sur de bonnes bases ?

Euh...

Je panique légèrement mais je n'ai pas un grand choix de réponses alors je déclare avec mon sourire le plus faux :

Avec plaisir, Monsieur Connor.

Vous savez... Mademoiselle Smith, vous êtes quelqu'un de bien, sincèrement. Vous avez beaucoup de qualités et un caractère qui peut vous sauver dans maintes situations. Je ne pense pas en toute sincérité que mon fils soit fait pour vous. Il est très simple d'esprit, et préfère vivre sa vie normalement plutôt que de se démarquer. Alors qu'il a toutes les clefs (que vous n'avez pas, pardonnez moi d'être aussi direct) pour réussir.

Eh bien... Je ne suis pas de votre avis, Will est vraiment quelqu'un d'intelligent et il est toujours très gentil avec moi. Et vous savez, il n'y a pas de normalité, et peut être que lui son rêve c'est d'avoir une vie belle, pas exceptionnelle.

Je vous préviens juste que vous pourriez trouver mieux que lui, il est très violent parfois, je l'ai déjà vu se disputer avec ses amis, ce n'était pas beau à voir. Ne restez pas avec lui, c'est un conseil d'ami.

Je hoche la tête et déclare d'un air désolé :

Je suis navrée mais je dois vraiment y aller, peut-être aurais-je le plaisir de vous recroiser un de ces jours.

Je l'espère aussi, au revoir Mademoiselle Smith.

Bonne soirée.

Je tourne les talons et marche rapidement jusqu'à ma voiture. Je mets le chauffage en route dès que je suis à l'intérieur et sors en vitesse du parking. Quand j'arrive à la maison, je suis tellement fatiguée que je rentre dans ma chambre sans prendre le temps d'enlever mes chaussures. Will n'est pas là, je le sais parce que sa voiture n'était pas garée sur sa place habituelle sur le parking. Je finis par enlever mes chaussures pour pouvoir m'endormir, je n'ai pas envie de chercher Will dans toute la ville.