Chapitre 14 : Premiers je t'aime

— Cadkar, concentre-toi un peu.

— J'y arrive pas.

— Va bien falloir pourtant, tes examens sont dans une semaine.

— Je sais, souffle Cadkar tout en tournant sur le seul fauteuil de la chambre d'Issa.

Faut dire que la soirée d'hier a été riche en rebondissements et émotions. D'avoir vu Nathan, ce putain de Nathan, mais aussi d'avoir retrouvé Issa. Et Cadkar a plein de choses qu'il veut dire à Issa, mais il ne sait pas par quoi commencer alors il lâche juste :

— On peut manger ?

— Si tu veux, mais on travaille après.

Et voilà Cadkar de nouveau reparti dans ses pensées. Ne sachant pas comment parler à Issa, il passe par un autre moyen en lui préparant le repas tandis qu'Issa travaille ses cours, lui-aussi ayant très prochainement des examens, mais après Cadkar.

— Tiens, c'est prêt.

Alors les deux jeunes se mettent à table, en silence puis Issa remercie Cadkar du repas.

— Pas de quoi, répond simplement Cadkar, mangeant à pleine dents.

— Tu comptes me dire pourquoi tu m'as complétement ignoré pendant presque deux mois ?

— Mange tant que c'est chaud.

— Je te reposerai la même question quand on aura fini de manger.

— Si ça te fait plaisir, hausse simplement des épaules Cadkar.

Et c'est ce que fait Issa lorsque les deux ont fini de manger :

— Alors, je peux savoir pourquoi le grand Cadkar m'a complètement ignoré ?

— Qu'est-ce que ça peut te faire ?

— Tu vas arrêter d'éviter les sujets que tu veux pas. Je pensais qu'on avait passé ce cap.

— Faut croire que non.

— Alors c'était que des conneries hier soir ?

Aussitôt, le regard de Cadkar change, se renfermant sur lui-même à nouveau. Il n'a pas envie de parler d'hier soir. Hier soir c'était hier soir, aujourd'hui est un nouveau jour. Cadkar ne sait pas ce qui lui a pris hier soir à vrai dire. Mais c'est fait alors il ne peut qu'assumer maintenant.

— Cadkar, réponds, s't'eu plaît.

— Non, c'était pas des conneries. On peut passer à autre chose maintenant ?

— C'est ce que tu veux ?

— Oui.

— Ok, souffle Issa tout en débarrassant la table et en commençant à faire la vaisselle.

Et pour une fois Cadkar, culpabilise. Parce que c'est vrai qu'hier soir, c'était spécial, si spécial que ça effraie maintenant Cadkar, notamment des mots qu'il a pu dire. Il ne sait actuellement que faire parce qu'il sait qu'il est allé trop loin hier. Alors en silence, il vient encercler Issa de dos et pose sa tête sur l'épaule d'Issa, ne trouvant pas les mots. Issa se retourne, le regard un peu dur, mais ne dit rien pendant un moment avant de faire remarquer :

— T'as l'air si différent...

— Différent comment ? demande précision Cadkar.

— Triste, t'as l'air triste.

Et ça fait quelque chose à Cadkar que quelqu'un lui dise ça, surtout venant de la part d'Issa.

— C'est notamment pour ça que je voulais plus qu'on se voie... J'avais pas envie que tu me vois comme, comme ça, a du mal à trouver les mots Cadkar.

— Mais je te vois là et tout ce que je pense c'est que c'est dommage que je ne t'aie pas vu plus tôt.

— Pourquoi ?

Issa roule des yeux, visiblement agacé mais il ne répond pas. Les deux jeunes, très proches l'un de l'autre, se contentent de se regarder.

— Peut-être parce que, comme je te l'ai dit hier, il se pourrait que tu m'aies un peu manqué.

Cadkar se recule, un sourire en coin, retrouvant confiance.

— Je sais, c'est souvent l'effet que mon corps fait.

— Pas que ton corps, Cadkar, s'avance à nouveau Issa.

Et ces mots perturbent fortement Cadkar, peu habitué à ce qu'on lui fasse des compliments sur autre chose que ses performances au lit ou son physique.

— Mais tu vois, tu fuis à nouveau.

— Je fuis pas, s'avance Cadkar à nouveau pour prouver ses dires.

— Alors ose me dire droit dans les yeux ce que tu m'as dit hier.

— J'ai dit beaucoup de choses hier.

— C'est vrai, mais sur la partie du manque par exemple...

— Comme « tu m'as manqué, Issa » ?, sourit Cadkar, rentrant dans son rôle qui lui colle tant à la peau.

— Ouais, par exemple.

Alors Cadkar, sentant cette putain d'envie qui l'avait pourtant quittée, embrasse la peau du cou d'Issa et glisse près de son oreille :

— Tu m'as manqué, Issa.

Puis il vient embrasser Issa, chose qu'il n'avait pas fait depuis trop longtemps et c'est juste trop bon. Et Issa le lui rend bien. Il lui ordonne même :

— Montre-moi alors à quel point je t'ai manqué alors.

Et Cadkar ne s'en prive pas, bien au contraire. Il vient alors soulever Issa et l'amène jusqu'au lit de ce dernier. Puis il soulève le tee-shirt du plus jeune et vient y déposer des baisers envieux avant d'enlever complètement le haut. Il embrasse tout ce qu'il peut d'Issa, le déshabillant complètement au passage. Pourtant, lorsqu'Issa est nu devant Cadkar, celui-ci doute. Faut dire qu'il n'avait pas ressenti de désir depuis tout ce temps et là il se sent juste envahi de toute cette envie. Issa doit sentir que quelque chose cloche car il vient embrasser doucement Cadkar, lui enlevant son haut par la même occasion. Il le déshabille finalement entièrement et les deux corps des deux jeunes se retrouvent.

Issa est au-dessus de Cadkar et il vient jouer avec son lobe d'oreille avant de chuchoter :

— Tu m'as manqué aussi, Cadkar.

— Fais pas genre que tu m'as attendu, sourit Cadkar, essayant de paraître détaché.

— Et si je te disais que si ? Si je te disais que j'ai touché personne depuis ?

Issa vient toucher le sexe de Cadkar qui réagit immédiatement tandis que ce dernier lâche un soupire tout en continuant de sourire, mais différemment.

— Et toi Cadkar, t'as touché quelqu'un d'autre ou t'as laissé quelqu'un d'autre te toucher ?

En même temps, Issa vient jouer avec l'un des tétons de Cadkar ce qui commence à sacrément allumer Cadkar qui souffle avec honnêteté :

— Personne.

Et les deux jeunes viennent s'embrasser à nouveau, Cadkar passant au-dessus. Il observe alors le visage puis regarde avec envie le corps du plus jeune, la lueur d'envie ne le quittant toujours pas. Et les deux se sourient. Cadkar, se sentant vraiment bien, enfin, lâche même :

— Il n'y a eu personne que je n'avais envie de toucher.

— Et moi, t'as envie de me toucher ?

— Oui, très, même.

— Alors vas-y.

Et c'est ce que fait Cadkar, rattrapant tout ce temps perdu. Il touche tout d'Issa, tout ce qui lui a manqué et le dévore, littéralement. Alors les deux jeunes passent un excellent moment, se retrouvant avec envie et joie. Ils s'en donnent tous les deux à corps, mais aussi à cœurs joie.

Quand Issa est venu, ce dernier s'occupe maintenant de Cadkar, qui n'en peut plus et n'attend qu'une chose : venir, en Issa, ça serait encore mieux. Alors, c'est ce qu'ils font. Cadkar n'en peut plus et ne tient pas bien longtemps entre les cuisses d'Issa et vient assez fortement oralement parlant. Il a limite envie de pleurer tellement c'est bon et que ça lui avait manqué d'avoir un orgasme, surtout que celui-ci est vraiment puissant. Cadkar est tout tremblant tandis qu'Issa l'accueille dans ses bras, lui aussi aux anges.

Les deux jeunes se regardent, se sourient et s'embrassent, encore et encore. Puis ils finissent par aller se doucher et Cadkar laisse Issa le nettoyer, appréciant ce contact à nouveau. Il vient même le prendre dans ses bras quand il a fini de le rincer et admet enfin :

— Désolé de pas avoir donné de nouvelles.

— J'aimerais surtout savoir pourquoi.

— Promis, je t'expliquerai, mais pas maintenant, je suis crevé.

— Ok, on fait comme ça. Crevé ou pas, on va travailler maintenant.

— Putain, souffle Cadkar tandis qu'Issa sourit, cachant un rire.

Et ils ne font donc que ça, pratiquement, bosser, bosser, bosser et encore bosser les cours de Cadkar. Ils passent alors leur semaine chez Issa, ne s'en rendant même pas compte. C'est seulement lorsqu'Aphté prend des nouvelles que Cadkar réalise qu'il a passé une semaine entière chez Issa, H24 avec lui. Aphté propose un petit repas tranquille à la coloc' et Cadkar s'y rend et amène naturellement Issa.

Lorsque Cadkar vient aider à la cuisine, Aphté lance à Issa, avec un clin d'œil :

— Contente de te revoir, Issa.

Alors les quatre colocataires ainsi qu'Issa passent une très bonne soirée, ce que fait remarquer Issa à Cadkar une fois tous les deux dans la chambre de ce dernier. Ce n'est d'ailleurs pas sa seule sa remarque :

— C'est moi où Aphté et Gullveig ont l'air plus proches qu'avant ?

— C'est pas toi, c'est la réalité. Il s'est passé quelques trucs du genre Aphté n'est plus avec son copain et elle et Gullveig sont comme qui dirait ensemble.

— Wouah, ok. Eh bien, c'est cool !

— Yep, c'est cool, surtout pour l'ambiance de la coloc', s'amuse Cadkar.

Les deux jeunes hommes se posent dans le lit et discutent jusqu'à ce qu'Issa parle plus sérieusement :

— Est-ce que le fait que tu n'aies plus de voiture et que ton père soit venu à l'improviste en février a un lien ?

— Plutôt oui, il m'a repris la voiture. Et il a arrêté de me donner de l'argent.

— Vraiment ? ! s'étonne Issa.

— Ouais.

— Pourquoi ?

— De ce que j'ai compris pour que je me responsabilise parce que selon lui je suis une pute qui travaille pas assez ses cours.

— Une pute ? Il t'a dit ça ? !

— Oui.

— Woauh, dur. Mais pourquoi « pute » ? Qu'est-ce qui lui a fait dire ça ?

Cadkar se tend et Issa le sent pourtant il ne compte pas s'arrêter là, bien décidé à connaître toute la vérité cette fois.

— Parce que.

— Cadkar...

— J'essaie, ok ? Mais c'est pas facile.

— J'ai jamais dit que parler c'était facile.

— Bon, en gros, mon père a reçu des photos de moi dénudées.

— Hein, mais comment ça se fait ? !

Issa se redresse et s'assoit en tailleurs en face de Cadkar.

— Je me suis posé la même question et je vois qu'un truc : la nuit où je me rappelle de rien.

— T'es en train de me dire que ce mec est tellement dégueulasse qu'il est allé à prendre des photos de toi et à les envoyer à ton père ?

— Je vois que ça, oui.

— Va vraiment falloir que tu penses à porter plainte, Cadkar, c'est grave tout ça.

Cadkar ne répond rien, contrarié mais sachant qu'Issa est plus proche de la vérité qu'il ne l'est. Mais il n'a pas envie d'en parler, ni ce soir, ni jamais. Alors il se contente d'attraper Issa et de le serrer dans ses bras.

— Essaye d'y penser au moins.

— Hum hum...

— Merci de m'avoir dit la vérité en tout cas.

— Content que ma vie de merde te fasse plaisir.

— Idiot, secoue la tête Issa tandis que Cadkar lâche un petit sourire.

Et ce soir, comme d'autres, les deux jeunes s'endorment ensemble, ce soir sans n'avoir même couché ensemble.

Trois semaines après, les deux Sciencepistes ont leurs résultats. Ce sont les derniers à les avoir, Gullveig et Issa ayant déjà validé leur année.

Cadkar ne veut pas le montrer, mais il stresse à mort. Toutefois, Issa le remarque mais ne dit rien pour ne pas l'embêter plus. Ils regardent les résultats tous les deux, dans la chambre de Cadkar.

— Va bien falloir que t'ouvres les yeux si tu veux voir tes résultats, ironise un peu Issa.

— Tu veux pas regarder pour moi ?

— Si, je peux.

Alors une dizaine de minutes plus tard, les résultats tombent et Issa cherche le nom et prénom de Cadkar et il finit par trouver.

— Alors ? stresse Cadkar du silence d'Issa.

— Regarde.

Alors Cadkar regarde et écarquille les yeux d'étonnement.

— Putain ! crie-t-il plusieurs fois d'affilée avant de lâcher un cri de joie.

Directement, il vient prendre Issa dans ses bras et l'embrasse de partout sur son visage en lançant des « merci » très enjoués. Puis il réalise son geste et se calme un peu lâchant tout de même un dernier « merci ». Issa sourit, fier de Cadkar, et vient le tirer contre lui, Cadkar sur ses genoux, et l'embrasse. Alors les deux se perdent dans leurs baisers tandis qu'Aphté tape comme une dingue à la porte de Cadkar, criant de victoire.

C'est comme ça que les quatre colocataires plus le cinquième non officiel, Issa, filent au bar avant d'aller en boîte. Dans la soirée, Cadkar reçoit un message de son père et, aussitôt, son ventre se tord et il pâlit, pas sûr de ce qu'il va y découvrir.

Mais, tout simplement, son père le félicite pour l'obtention de son année, avec la petite mention en plus.

Issa sent que Cadkar s'est tendu alors il discute de ce qui est en train de se passer et Issa conseille gentiment :

— Tu devrais lui parler.

— Je sais mais je suis pas sûr que j'y arriverai.

— Tu voudrais que je vienne avec toi ? propose sincèrement Issa, ne voulant que le meilleur pour Cadkar.

— Tu ferais ça ?

— Si ça peut t'aider, bien sûr.

Cadkar sourit à Issa puis pose sa tête sur son épaule, tout naturellement. Et, encore une fois, ce geste si naturel, trop naturel justement, effraie un peu Cadkar. Il y a définitivement quelque chose qui a changé entre les deux jeunes depuis leurs retrouvailles. C'est plus comme avant, même si ça ne datait peut-être pas de leur séparation en réalité. C'est juste que ça a sauté à la gueule de Cadkar à leurs retrouvailles. Mais en soi, depuis combien de temps n'étaient-ils plus de simple fuck buddy ? Depuis combien de temps Cadkar se voilait-il la face ? Et ça l'effraie, putain que ça l'effraie alors il fait comme si de rien n'était.

Pourtant, quand il voit Issa si dévoué et sincère, il se dit qu'il devrait peut-être arrêter d'être si effrayé. Surtout vu comment ils sont bien quand ils sont tous les deux. Alors Cadkar cogite toute la soirée, à coup de regards envers Issa, et ce dernier le remarque bien mais ne dit rien pour l'instant.

C'est lorsqu'ils sont tous les deux seuls dans la chambre de Cadkar qu'Issa commence :

— C'est moi où j'avais un truc spécial ce soir parce que t'as fait que me regarder.

— Je sais pas, peut-être, s'approche Cadkar. T'es souvent spécial, avoue Cadkar un peu timidement et ça fait sourire Issa.

— Oula, que me vaut cette déclaration mielleuse ?

— Fais pas genre que ça te plaît pas.

— Je n'ai effectivement pas dit le contraire.

Et Cadkar ne sait pas comment dire les choses ni s'il doit les dire. Il n'a ni envie d'être moqué ni rejeté. Mais il crève d'envie, au fond, de dire à Issa, de lui dire qu'il n'est pas qu'un simple fuck buddy. Ça fuse dans le cerveau de Cadkar qui passe d'une pensée à l'autre à la seconde, complètement perdu concernant ce qu'il doit ou non dire ou faire présentement.

— Hey, ça va ?

— Je t'aime.

Au début, Cadkar a ses yeux encrés dans ceux surpris d'Issa puis il les ferme fermement, espérant disparaître ainsi. Putain, pourquoi il a sorti ça, sérieux ? Ça craint, vraiment, ça craint. Mais qu'est-ce qu'il lui a pris ? ! En plus-

— Cadkar, souffle Issa venant s'approcher de Cadkar, ouvre les yeux.

— J'ai pas envie.

— Et moi j'ai pas envie que tu les gardes fermés alors obéis pour une fois un peu.

Après un grand soupire exagéré de Cadkar, il ouvre les yeux et découvre un Issa avec un petit sourire en coin alors Cadkar finit par lui sourire aussi. Puis Issa vient embrasser Cadkar qui a l'impression de reprendre sa respiration tant il était tendu. Mais il attend, il attend la réponse d'Issa qui ne semble pas venir, pas tout de suite du moins.

— Cadkar ?

— Oui ?

— Je t'aime aussi idiot.

Et Cadkar remercie Issa du regard de lui avoir répondu, n'étant simple pour aucun de deux de dire ces fameux mots. Alors Cadkar sourit, de bonheur, n'ayant pas ressenti ça depuis trop longtemps puis vient prendre Issa dans ses bras. Il finit par embrasser à nouveau Issa et ça sera loin d'être le dernier baiser qu'il partagera ce soir.

Maintenant que Cadkar a réussi à dire ses trois petits mots, il n'a qu'une envie : les dire à nouveau. Surtout quand ça fait autant sourire Issa, le remplissant de joie lui-aussi.

Alors après avoir couché ensemble, enlacés, Cadkar le redit, il redit « je t'aime » à Issa qui le lui rend aussi.

— Putain, qui aurait cru il y a quelques mois qu'on en serait là ?

— C'est sûr que je m'attendais pas à ça en venant faire le ménage dans ta coloc', s'amuse Issa.

— Comme quoi. Maintenant je vais devoir me méfier de tous tes clients.

— Tellement pas ton genre, Cadkar, j'y crois pas deux secondes.

— Qu'est-ce que tu sais de moi en couple ? rit Cadkar avant de se taire, choqué de ses propres propos.

— Parce qu'on est en couple ?

— Je sais pas, on couche ensemble depuis des mois, régulièrement, on a pas d'autres partenaires et on fait pas que coucher ensemble. Alors ça y ressemble étrangement, ouais.

— T'aimerais ou ça te fait toujours autant flipper ?

— Hé, qui a dit que ça me faisait flipper ? se vexe un peu Cadkar face à un Issa qui le comprend si bien.

— Cadkar, quand je t'ai rencontré, t'étais le mec le plus cliché que je connaisse niveau relation, genre tout ce qui y ressemblait de près ou de loin, tu fuyais, même en amitié limite.

— Ça fait mon charme, écoute. Et puis il y a que les cons qui changent pas d'avis.

— Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ?

— Au fond, je ne suis pas sûr d'avoir changé d'avis, commence Cadkar et Issa reste dubitatif, c'est juste, qu'il faut se rendre à l'évidence, on vit comme un couple et ça nous va alors, peu importe comment on appelle notre relation, on ne peut pas nier que c'est plus que du cul maintenant.

— Qui te dit que je veux pas juste ton petit cul ?

— Peut-être parce que tu me l'as dit.

— C'est vrai, sourit Issa ce qui fait sourire Cadkar à son tour. Alors tout ce qui change finalement, c'est comment on appelle notre relation ? Genre tu vas dire à tes coloc' que je suis ton copain ? s'amuse Issa.

— Genre ils sont aveugles. Je vais faire de mon mieux, mais ouais, on peut dire qu'on est ensemble.

— J'ai hâte de voir tous tes principes s'écrouler à chaque fois que tu me présenteras comme ton petit copain.

— Petit con, sourit Cadkar avant de venir chatouiller son nouveau petit ami, nom auquel va devoir s'habituer Cadkar.

Quelques jours après les résultats, Cadkar et Issa se rendent chez le père de Cadkar, au courant qu'il amène un ami et ça le surprend quelque peu de découvrir le gars de la piscine. Celui que le père de Cadkar a vu embrasser son fils il y a de ça des mois. Et, à preuve du contraire, son fils n'est pas du genre à garder quelqu'un des mois comme ça alors forcément il est étonné de revoir l'ami de son fils.

— Bonjour.

— Bonjour Issa et bienvenu, enfin tu connais déjà les lieux.

Issa ne sait pas si le père fait une blague alors il se contente de sourire brièvement.

— Cadkar, sourit le père.

— Salut Papa.

Mais Cadkar n'a toujours pas digéré les mots de son père alors il lui fait une simple bise, et non une accolade. Les trois hommes s'assoient dans la salle à manger et portent un toast à l'année des deux garçons, mais surtout de Cadkar. À ce moment, Issa feint un appel urgent puis lance un pouce en l'air à Cadkar avant de déguerpir dehors.

— Subtile votre petit jeu.

— On fait comme on peut, répond Cadkar à son père.

— Alors ça y est c'est l'heure de la grande conversation ?

— Il y a de quoi avec tout ce qui s'est passé..., fait tristement remarquer Cadkar.

— Oui, c'est vrai. D'ailleurs, je suis désolé des mots que j'ai employés. C'était dur, très dur. J'étais tellement choqué de ses photos que ça m'a fait perdre tous mes moyens.

— Merci parce que, ouais, certains mots étaient très durs. Et justement ces photos...

Cadkar respire difficilement, commençant à sentir à l'étroit dans sa chaise.

— Il y a quelque chose que je dois te dire, en rapport avec ces photos.

Le père s'attend au pire, mais pas dans le sens que prend la conversation. Cadkar rassemble tout le courage qu'il peut, notamment celui qu'Issa lui donne.

— Ses photos, elles ont été prises sans mon consentement.

— C'est-à-dire ? tente de comprendre le père les mots inaudibles de son fils.

Cadkar a la gorge serrée lorsqu'il continue son aveu dont il a tant honte :

— Il y a, il y a un gars qui m'a drogué un soir et je me rappelle de rien. Sauf que le lendemain, j'avais des traces physiques que quelque chose s'était passé et ses photos ne font que le confirmer.

Cadkar est tout tremblant mais tente de le cacher. Cependant, son père vient poser une main réconfortante sur les mains tremblantes de son fils. Mais le père ne trouve pas les mots face à des choses qui ne devraient pas exister alors il se contente de prendre son fils dans ses bras.

— Je suis désolé, Cadkar, je savais pas. Mais maintenant que je sais, on va tout faire pour te protéger. Je connais des très bons avocats dans ce domaine-là, t'inquiète pas.

Cadkar a terriblement peur des mots employés de son père mais se tait, appréciant l'étreinte de son père. Les deux hommes restent un moment dans les bras l'un de l'autre puis Cadkar finit par s'excuser et quitter la table. Il retrouve Issa dehors et avant qu'aucun des deux ne parlent, Cadkar se réfugie dans les bras d'Issa. Issa fait tout ce qu'il peut pour être là comme il le fait avec Cadkar et le console donc comme il peut.

— Je veux rentrer.

— Ok. T'as prévenu ton père ?

— Non.

— Tu veux que je le fasse ?

— Oui, s'il te plaît.

Alors Issa retourne dans la maison et annonce au père :

— On va rentrer. Merci pour le repas.

— Oh mais on a à peine commencé le repas... Il va pas bien, c'est ça ?

— Oui, il a envie de rentrer.

— Laisse-moi vous mettre le plat et le dessert dans des tupperware au moins.

Issa sourit puis aide le père de Cadkar à tout mettre dans les boîtes plastiques.

— Merci.

— Merci à toi d'être là pour lui. C'est un bon garçon mon fils alors il mérite qu'on prenne soin de lui. Et t'as l'air de faire, alors merci.

— Je fais ce que je peux, Monsieur.

— Et c'est déjà beaucoup, Issa. Tu sais qu'il ne m'avait jamais présenté quelqu'un, précise le père allant à l'entrée raccompagné Issa.

— En soi, il ne m'a pas présenté.

— Pas besoin pour que je comprenne qu'il tienne à toi. Alors prenez soin l'un de l'autre et n'hésitez pas à passer quand vous vous voulez.

Ainsi les deux jeunes rentrent, chez Issa, sous la volonté de Cadkar et les deux mangent le repas du père, en silence, Cadkar perdu dans ses pensées.

— Ton père est quelqu'un de bien, dit Issa.

— Oui, je crois aussi. Vous vous êtes dit quoi quand j'étais pas là ?

— En gros, qu'il était content que je sois là pour toi. Il a compris qu'on était genre pas des amis.

— Issa, il nous a vus nous embrasser dans la piscine. Tu sais la fois où il est rentré à l'improviste, il nous avait vus en fait.

— Oh, ok, je vois. Mais il s'en fout que tu sois pas un coureur de jupons comme il pensait ?

— Faut croire que y'a plus important à ses yeux.

— Je crois qui m'aime bien alors.

— Il n'y a pas de raison le contraire.

— Et il a raison, Cadkar, même si ça ne te fait pas plaisir à entendre, il faudrait que tu penses - et je dis bien pense et pas faire - à porter plainte.

— Non.

— Pense-y au moins, ok ?

— Non, sujet clos.

— Et s'il le faisait à d'autres personnes ? Et si t'étais pas le premier ni le dernier ?

— Pas mon problème, se braque complètement Cadkar. Maintenant, on parle d'autres choses s'il-te-plaît.

— Oui, ok, désolé.

Issa vient prendre la main de Cadkar et les deux jeunes lient leurs doigts ensemble, Cadkar ayant la boule au ventre et s'endormant difficilement ce soir-là.

Quelques jours plus tard, les quatre colocataires, et Issa bien entendu, font leur dernière soirée de l'année à la colocation, chacun déménageant incessamment sous peu.

Les quatre colocataires sont surexcités ce soir et commencent la soirée, avec Issa, par un Beer Pong. Puis ils partagent un apéro dinatoire ensemble tout en discutant de leur différent projet cet été.

Issa n'est pas sûr mais il pense travailler et essayer de rendre visite à sa famille, si toutes les conditions le permettent notamment politique. Phtolos lui ne sait pas trop encore mais va surtout osciller entre famille et voyages, ayant travaillé toute l'année déjà. Aphté, elle, va travailler en centre de loisirs en juillet en Bretagne mais trop loin de chez elle pour loger dans sa maison, puis profiter de sa famille en août notamment en voyageant. Gullveig va bien profiter de ses amis et famille, mais aussi se trouver un logement en Allemagne pour l'année prochaine. Enfin, Cadkar va voyager, seul, mais il l'espère aussi avec son père.

Chacun a des projets et chacun s'y intéresse.

Après une bonne heure de discussion et des verres d'alcool dans le nez, les cinq jeunes se lancent dans un Just Dance endiablé malgré le manque de manettes. Ils s'amusent comme des fous, notamment sur « Rasputin », un classique. Ils sont tous plus ou moins crevés et assez puants lorsqu'ils s'arrêtent de « danser », certains ayant plus danser que d'autres en réalité. Ils passent maintenant à des jeux de cartes mélangés à de l'alcool. Et vers trois heures du mat', après avoir dansé à fond sur des musiques bien fortes, la colocation s'endort petit à petit et chacun part dans sa chambre, deux paires de jeunes dans la même.

Phtolos se sent si seul lorsqu'il voit Cadkar et Issa partir ensemble dans la même chambre tout comme Aphté et Gullveig dans celle d'Aphté. Ces deux dernières, à peine, seules dans la chambre, s'embrassent àpleine bouche, complètement bourrée. Elles sourient dans leurs nombreux baiserséchangés puis finissent rapidement en sous-vêtements puis complètement nues, àla merci l'une de l'autre. Alors elles passent un agréable moment malgré leuralcoolémie élevée. Si agréable qu'après avoir couché ensemble, Gullveig lâche spontanément,tout sourire :

— Je t'aime.

Et aussitôt Aphté se braque. Elle devrait être heureuse d'entendre ces mots, mais elle ne l'est pas et Gullveig le remarque bien, s'en voulant directement d'avoir prononcé ces mots. C'est comme si elle venait de décuver d'un coup tellement la réaction d'Aphté est violente. Aphté ne se sent pas prête à aimer, pas tout de suite alors que sa rupture avec Titouan est encore trop fraîche dans son cœur encore en morceaux.

— Moi aussi, je suis bien avec toi Gullveig.

— Mais tu m'aimes pas comme ça, c'est ça ?

— Je suis pas sûre que je sois prête à aimer à nouveau pour l'instant. Et sache que ça n'a rien avoir avec toi ou pas, c'est moi et juste moi, ok ?

— Ok, tente de comprendre Gullveig, bien qu'un peu blessée.

Les deux jeunes femmes ne parlent plus, Aphté sentant qu'elle a gâché l'ambiance alors elle fait ce qu'elle fait de mieux dans ce cas-là : elle fuit. Après un dernier baiser sur le front de Gullveig, elle sort fumer sur la terrasse et y trouve étonnement Cadkar.

— Toi aussi, pas sommeil ?

— Observatrice, sourit Cadkar mais son sourire sonne faux.

Il a du mal à dormir en ce moment et ce malgré l'épuisement physique agréable que lui procure Issa. Ça ne change malheureusement pas le bordel dans sa tête.

Aphté allume sa clope puis avoue à son ami, allant droit dans le sujet :

— Gullveig m'a dit « je t'aime ».

— Vu ta tête, ça n'a pas l'air une bonne nouvelle.

— Observateur, répète Aphté les mots de Cadkar.

— Tu ne l'aimes pas ?

— Ce n'est pas ça, bien sûr que j'apprécie Gullveig, on serait pas ensemble sinon. C'est juste que la rupture est encore trop fraîche avec Titouan et je me sens pas prête à aimer à nouveau, pas quand ça implique de la souffrance, encore.

— Et Titouan, tu l'aimes toujours ?

— Bien sûr, on a été deux ans ensemble quand même, je peux pas l'oublier du jour au lendemain.

— Compréhensible, c'est sûr.

— Mais ça, tu vois, je ne peux surtout pas le dire à Gullveig, elle ne comprendrait pas.

— C'est sûr aussi.

— Tu me trouves horrible ?

— Humaine, surtout, mais depuis quand la grande Aphté en a quelque chose à faire d'être vu comme horrible ou pas ? ironise Cadkar pour détendre l'ambiance sérieuse.

— Faut croire que ton avis m'importe maintenant.

— Oh, je vais pleurer.

— Ta gueule, sourit Aphté et Cadkar le lui rend. Et toi, avec Issa, vous vous êtes déjà dit « je t'aime » ?

À la tête inconfortable de Cadkar, Aphté comprend qu'elle a visé juste.

— Ouais, on se l'est dit.

— C'est mignon, se moque gentiment Aphté.

— À mon tour de te dire ta gueule.

— Nan, mais en vrai, si c'est réciproque, c'est cool, c'est même génial.

— Et bien alors c'est génial, oui, sourit niaisement Cadkar et Aphté est sincèrement contente de le voir sourire ainsi, lui le playboy de la coloc'.

De son côté, Gullveig veut parler avec Aphté, mais la seule chose qu'elle entend c'est que cette dernière aime toujours son ex et ça la brise, littéralement, d'entendre et de savoir ça, surtout qu'elle le dise à Cadkar et pas à elle, la principale concernée quand même. Elle se sent si conne au fond d'aimer une fille qui a toujours le cœur pris, malgré le fait qu'elles sortent bel et bien ensemble maintenant. Elle a beau avoir le statut de couple avec Aphté, elle ne réussit pas à avoir son cœur.

— Tu sais que ce n'est pas bien d'écouter la conversation des autres ?

Mais quand Phtolos voit les larmes au coin des yeux de sa colocataire, il perd son sourire et lui propose de venir dans sa chambre. Aussitôt dans celle-ci, Gullveig vient pleurer dans les bras de son ami. Ça ne dure pas longtemps avant que Gullveig se calme et essuie ses larmes après s'être mouchée.

— Aphté ne m'aime pas, elle aime toujours Titouan.

— Outch, merde.

— Merde, comme tu dis, répète Gullveig.

— Après ils ont été deux ans ensemble et elle avait vraiment l'air de l'aimer, alors forcément les sentiments ne partent pas du jour au lendemain. Mais ne dis qu'elle t'aime pas parce que je ne crois pas que ce soit vrai, elle ne serait pas avec toi sinon.

— Tu crois ?

— J'en suis sûr. Par contre, peut-être qu'elle n'est pas encore prête à aimer à nouveau, mais ça viendra.

— Le problème, c'est qu'on a très peu de temps.

— Pourquoi ? tente de comprendre Phtolos.

— Parce qu'Aphté ne veut pas de relation à distance.

— Alors c'est votre dernier soir ce soir ?

— Non, non, enfin je crois pas, on avait dit fin août.

— Parce que vous vous êtes donné une date de fin ?

— Ouais, en quelque sorte. On a dit qu'on profitait du temps qu'il nous était donné et que ça se finirait à la prochaine rentrée scolaire.

— Ok, et ça te va ?

— D'après toi ?

— Et tu lui as dit ?

— Pas besoin, elle le sait.

— Alors pourquoi t'as accepté ?

— Parce que je l'aime j'imagine, soupire Gullveig.

Et Phtolos, souvent jaloux des autres relations de la maison, se dit que leur relation ne sont pas si parfaites qu'elles en ont l'air. Il se demande alors comment va se passer cet été et notamment les retrouvailles des colocataires en Bretagne, en août, chez Aphté.

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