Chapitre 15

Lorsque Raphaël revit à lui, il faisait sombre et la chaleur était étouffante, il peinait à respirer et la touffeur ambiante lui brûlait les narines à chaque inspiration. Une fois ses yeux habitués à la noirceur il tenta de se lever, aucune difficulté ne s'opposa à lui malgré un bruit métallique qui résonnait à chacun de ses mouvements, mais quand il voulu avancer il compris que le cliquetis de ferraille venait de ses chevilles. En effet il ne put aller bien loin car il était attaché au mur. Sa cellule, bien que visiblement grande, n'était pas accessible dans les moindres recoins, tel un chien, on ne lui avait laissé qu'une longue de deux mètres pour qu'il puisse se dégourdir les jambes. Il voulu également battre des ailes, qui commençaient à être endolories, mais celles-ci étaient attachées l'une à l'autre par un anneau de métal qui déclenchait une vive douleur lorsqu'il tenta de les bouger, il cessa aussitôt.

Il fit un inventaire rapide de son corps, tout était à la bonne place et à part un léger mal de tête il ne semblait pas être blessé. Samaël avait du l'assommer et aucun châtiment ne lui avait été fait, ce qu'il trouva rassurant mais un peu étrange venant de la part des démons. Il se doutait que se traitement de faveur ne serait que de courte durée. Car s'il n'accédait pas à la demande plus ou moins courtoise de Lucifer et Samaël, ils allaient sûrement passer à une manière plus virulente de le lui faire faire guérir les ailes du Roi d'Asmodée. Ce que les démons ne savaient pas c'est qu'après la mort d'Uriel, dont Raphaël se sentait plus que responsable, il s'était fait la promesse de mourir plutôt que d'accéder à leurs exigences. Il ne voulait pas être le responsable de le mort de centaine de millier d'innocent, un seul était bien suffisant sur sa conscience. Et ils avaient besoin de lui vivant, donc ils allaient certainement user de la torture pour arriver à leur faim, Raphaël était conscient qu'il allait passer des moments difficiles. Il essayait de se préparer mentalement à la douleur, mais lui qui n'avait jamais rien vécu de douloureux physiquement, il avait du mal à se l'imaginer.

Un bruit de serrure puis de porte qui s'ouvre le fit sursauter, la résonance des lieux rendait un son banale terrifiant. Il se rassit brutalement, son coccyx frappa violemment le sol ce qui lui arracha, malgré lui, un gémissement. En son fort intérieur, il se dit que si le sol lui faisait mal, il allait avoir du mal à résister à la torture. Il ravala donc sa fierté et attendit. Un homme arriva à son niveau, il ne ressemblait pas à un démon, et de fait il n'en était pas un, il faisait parti des anges déchus. Il lui posa sa pitance sans un mot et reparti. Visiblement Raphaël ne méritait pas la moindre considération, il n'était qu'un prisonnier parmi tant d'autre. Il reporta son attention sur l'assiette qu'on venait de lui servir, bien malgré lui son estomac cria famine, mais la vu du pain rassit l'écœura, il repoussa la gamelle. Il entendit « Tu devrais pas faire le difficile gamin, ici on a pas de quoi manger tous les jours, ils s'assurent juste qu'on ne meurt pas de faim. Mais si tu n'en veut pas je prends ta part ».

Les yeux de Raphaël tentèrent vainement de faire la mise au point dans la pénombre afin de distinguer à qui appartenait cette voix caverneuse. « Tu ne me verra pas tout de suite, petit, mes yeux ont bien mit un mois à s'adapter. Mais mon nom est Mikhaël, j'ai perdu le fil du temps à force, ici il fait tellement noir qu'on perd vite la notion du temps, on n'arrive même pas à distinguer le jour de la nuit. J'espère que tu n'as pas un poulet sur le feu gamin, parce que tu es ici pour un moment... »

Raphaël prit peur, il était en train de prendre conscience du pétrin dans lequel il s'était fourré. Toute fois, si ses yeux ne l'aidait pas, son ouïe fonctionnait à merveille, il fit glisser l'assiette sur sa droite, dans la direction de la voix de Mikhaël. Qui le remercia en se léchant les babines, le jeune homme se dit qu'il deviendrait surement moins difficile avec le temps, mais pour l'instant le pain moisi ne lui faisait pas envie, il n'était pas encore assez affamé pour ça.

Le silence se fit à nouveau, et le temps s'écoula, comme l'avait prévenu son co-détenu, il n'avait aucune notion de l'heure ou du moment de la journée. L'ennui devint vite une habitude, puisse que la seule chose qu'il pouvait faire c'était penser et dormir. Ses pensées ne le laissaient pas tranquille, il se refaisait sans cesse le film de la mort d'Uriel, sa culpabilité l'assaillant et grossissant à chaque fois un peu plus. Petit à petit, son corps s'habitua à la chaleur ambiante même si l'air ne lui brulait plus autant le nez, il suait néanmoins à grosse goutte, et le médecin en lui se demandait comment les prisonniers n'étaient pas tous morts de déshydratation. Il en était venu à lécher les gouttes de sueur qui perlaient au coin de ses lèvres, car il avait rarement à boire avec son pain rassit, qui lui était donné plus ou moins aléatoirement, peut-être quand le garde pensait à les nourrir.

Un jour, enfin Raphaël supposa que c'était le jour, l'un des gardes vint le voir dans sa cellule, Raphaël pensait qu'il venait lui apporter sa maigre pitance mais ne vit rien dans les mains du démon. Ce dernier lui intima l'ordre de se lever se qu'il fit sans discuter. Les pieds et les ailes liés le démon ne prit même pas la peine de lui attacher les mains, il ouvrit la cellule et lui demanda de le suivre, une fois encore Raphaël ne discuta pas. Il tenta de suivre le démon, mais les chaines entravants ses chevilles et la pénombre le firent perdre l'équilibre à plusieurs reprises, ce qui faisait rire le démon. Tant bien que mal, ils arrivèrent dans une salle légèrement plus éclairée où trônait au centre de la pièce une chaise qui visiblement était destiné à l'ange. Raphaël fut parcouru d'un frisson, ce qui allait se passer dans cette pièce n'allait pas pas être une partie de plaisir. Il fut rapidement ligoté à la dite chaise et laissé seul.

Le temps s'écoula avec une lenteur infini, personne ne vint le voir et il lui était impossible de bouger, tout son corps était endolori ce qui commençait à être douloureux. Mais conscient qu'il n'était pas au bout de ses peines Raphaël prit son mal en patience... De toute manière il ne pouvait rien faire d'autre. Puis au bout de ce qui lui sembla une éternité, la porte s'ouvrit pour laisser place à Samaël et l'un de ses larbin, l'ange se raidit, les ennuis arrivaient.

Un silence pesant régnait dans la pièce, Samaël prenait bien le temps de s'installer confortablement, tandis que le démon qui l'accompagnait, farfouillait dans un coin, mettant en place ses instruments. Cette attente donnait déjà des sueurs à Raphaël, et visiblement Samaël se délectait de son angoisse. Le prince démoniaque entama la conversation : « je vois qu'on t'a bien traité, tu n'as pas une égratignure, tu as un peu maigris peut-être mais rien de plus. » L'ange laissa un échapper un petit rire de dédain, jute maigris ? Il avait perdu au moins cinq kilos depuis son arrivé, entre le manque de nourriture et la déshydratation. Mais il ne se laissa pas démonter, sa seule arme était sa répartie : « écoute je suis plutôt agréablement surpris, le gite et le couvert mérite au moins deux étoiles, je reviendrais avec plaisir. Mais si tu pouvais me laisser rentrer chez moi je ne dirais pas non à une bonne douche.» Samaël afficha un sourire signe du chat du Cheshire, toutes dents dehors, il prenait visiblement plaisir à cette joute verbale, la partie de faisait que commencer.

Les heures s'égrainaient avec lenteur, les secondes semblaient prendre plaisir à s'allonger afin de prolonger le plaisir des deux démons, ainsi que la souffrance de Raphaël. Ce dernier était déjà bien contusionné, des hématomes apparaissaient ici et là sur son corps meurtris par la séance de torture. Mais l'ange avait tenu bon, il ne rendrait pas ses ailes à Lucifer, il garderait le peu d'énergie qui lui resterait pour panser ses plaies. Frustré par cet interrogatoire improductif, Samaël sorti de la salle et deux démons durent porter Raphaël jusqu'à sa cellule tant il ne tenait plus sur ses jambes. Ils le jetèrent au sol comme une poupée de chiffon et le rattachèrent tout de même au mur avant de ressortir. Le jeune médecin entendit seulement un sifflement impressionné et la voix de Mikhaël « Et bah je sais pas ce qu'ils veulent de toi mais ils t'ont pas loupé », avant de perdre connaissance.

Lorsqu'ils rouvrit les yeux, la pénombre l'accueilli et il s'assit avec difficulté, son corps le faisant souffrir le martyr. Il entreprit de guérir ces blessures, sous le regard ébahit de son co-détenu, qu'il voyait enfin de la pâle lueur que générait son pouvoir de guérison. Et son voisin détention n'était pas beau à voir, on aurait dit l'un des détenus d'un camps de concentration nazi, il était d'une maigreur effarante, ses cheveux et sa barbe ne semblait pas avoir de début ni de fin. Il ne distinguait pas la couleur des ses yeux, la lumière trop faible et la lourdeur de ses cernes les rendants presque invisible. L'homme portait un ensemble de guenille et compris finalement d'où venait l'odeur de moisissure. Raphaël aurait préféré ne pas mettre de visage sur le nom de Mikhaël.

Les démons ne laissèrent aucun répit au jeune homme, à peine avait-il guéris qu'il le remmenaient en salle de torture, où y passait des heures entières. Mais ne le voyant toujours pas craquer, ils lui laissèrent de moins en moins de temps pour guérir. Ils s'attaquèrent au corps abimé de Raphaël, frappant volontairement sur ses chaires à vif afin de décupler la douleur. Le mentale commençait à flancher, il était difficile de voir du positif dans toute cette histoire, entre la douleur et le manque de sommeil, l'ange commençait à avoir des hallucinations, il aurait voulu que tout cela s'arrête. Mais il savait pertinemment que tant qu'il n'aurait pas donné à Samaël se qu'il voulait, tout ceci allait continuer.

Au bout de plusieurs semaines, voyant que Raphaël n'avait toujours pas craqué, qu'il était presque mourant et à moitié fou, le prince démoniaque lui laissa un peu de répit. L'ange s'était enfermé dans un mutisme, il passait ses journées prostré à se balancer d'avant en arrière, sursautant à chaque bruit par peur d'être emmené à nouveau. Il ne faisait plus la fine bouche et mangeait tout ce qu'on lui apportait, que se soit moisit ou rassit. Mikhaël assistait avec horreur et impuissant au plongeon de Raphaël dans les abîmes de son âme, le jeune homme n'avait jamais été très causant, et ne lui avait jamais révélé la raison de sa présence ici. Mais le vieux détenu n'était pas dupe, son colocataire n'était pas un prisonnier comme les autres, Satan voulait quelque chose de lui, et tant qu'il ne l'aurait pas obtenu, il continuerait à le briser. Pour Raphaël la seule issue qui pourrait le soulager était la mort.

Malheureusement pour le jeune ange Dieu avait d'autres plans que la mort, en se qui le concernait. Raphaël du subir encore deux interrogatoires avant de recevoir la lueur d'espoir qu'il espérait tant. Après avoir réintégrer sa cellule, l'ange déchu qu'il avait vu à son arrivé lui apporta à nouveau un repas, il allait s'en emparer pour le dévorer mais il vit quelque chose dépasser du pain, il y regarda de plus prêt et il s'agissait d'un bout de papier. En l'ouvrant il lu le mot écrit en lettres phosphorescentes : « le plan Alcatraz est lancé tiens bon j'arrive. E. » Raphaël laissa échappé un sanglot, sa partenaire ne l'avait pas laissé tombé, il avait reconnu son écriture avant même d'avoir commencé à lire, sa calligraphie était reconnaissable aux belles boucles qu'elle formait à la première et à la dernière lettre de chaque mot, on aurait dit des peintures. Il allait pouvoir sortir de cet enfer. Les larmes ruisselèrent en silence sur ses joues, pendant il serrait le morceau de papier sur son coeur. L'étincelle de l'espoir c'était allumé dans les yeux de l'ange.

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