Chapitre 2
Je raccrochais le téléphone. Un sourire s'élargit sur mes lèvres. « Il était temps », pensais-je avec joie.
Après trois années à jouer la comédie, à faire semblant d'aimer, j'allais enfin effectuer ce pourquoi j'étais faite. J'allais achever ma mission.
Regardant dehors, à travers la baie vitrée, je posais ma main contre la vitre. C'était froid. Et pourtant j'avais eu l'impression étrange qu'une chaleur apaisante aurait recouvert ma paume, surement à cause du soleil qui se couchait à l'horizon. Les couleurs de ce ciel paraissaient si chaudes...
Je secouais la tête. Je devais rester concentrée. Ce soir, lorsqu'il rentrera, je serais prête à achever ma mission. Je le tuerai. Les anges n'avaient rien d'angélique.
Un ange...
À cette pensée, mon cœur se contractait dans ma poitrine. Le père Jean m'avait mis en garde. Il m'avait expliqué que lorsqu'il s'agissait d'un ange, il était toujours plus compliqué d'aller jusqu'au bout contrairement à ce que nous pourrions ressentir au contact d'une autre créature. Les anges étaient attractifs, conçus pour être bons. Et cette aura collait à leur peau, comme un second corps.
J'inspirais profondément. J'y arriverais, j'en étais persuadée.
Après tout, j'étais la meilleure des pécheresses.
Entendant la porte d'entrée qui s'ouvrait, je cachais mon épée derrière mon dos. La fine lame était assez petite, mais suffisante pour le tuer. Une arme conçue par ma famille...
Et il apparut devant moi, souriant généreusement. Il était magnifique, comme un ange tombé du ciel pour venir retirer toutes les peines et toutes les douleurs pesant en mon âme. Un homme bon, rayonnant de bonheur à mes côtés. Seule l'épée entre mes mains me permit de me rappeler. Il n'était pas l'être de bonté qu'il semblait me montrer jour après jour. Non, il était un ange qui ferait en sorte que l'humanité sombre par les condamnations de l'Apocalypse.
Et cette pensée en tête, je plongeais ma lame en son corps tandis qu'il me tournait naïvement le dos. Je touchais en plein dans le cœur, l'une des seules zones capables de tuer un ange d'après les rumeurs véhiculées. Tandis qu'il allait pour sombrer dans mes bras, je murmurais ces trois mots en latin. Trois mots ayant forgé ma réputation. Trois mots venant d'une simple citation mais qui, à mes yeux, représentaient tout.
— Veni vidi vici.
Lysandre s'effondra et l'impression que quelque chose en moi s'était brisé m'envahit.
Ouvrant lentement les yeux, mon regard s'attarda sur le plafond me faisant face.
— Encore ce rêve...
Chaque nuit qui passait depuis l'accomplissement de cette mission, Lysandre continuait de visiter mes cauchemars. Ce souvenir se présentait encore et encore sans espoir de disparaître un jour de ma mémoire. Le Conseil, Michele, le père Jean... Sans doute avaient-ils raison au final ? Je n'étais pas totalement remise.
Cet ange était mort, je l'avais tué. Avait-il laissé une sorte de malédiction en mon être, une trace de son passage dans mon âme ? Après tout, rien n'était impossible. D'autant que l'on en connaissait très peu sur ces êtres célestes.
Passant une main sur mon front, je fermais un instant les yeux. Ma tête m'élançait.
Je me levais à contrecœur, attrapant une boîte de médicament pour me saisir d'une gélule. L'eau fut inutile pour pouvoir l'avaler. Pour autant, je commençais à déambuler dans mon petit appartement pour aller prendre un verre. Une chambre, faisant aussi office de salon à l'occasion, une cuisine et une salle de bain. C'était ça mon appartement. Il ne coûtait pas cher et il était petit. C'était suffisant.
Mon travail de pécheresse me rapportait pas mal, mais je n'étais pas vraiment matérialiste. L'argent n'avait pas beaucoup d'importance pour moi, excepté lorsqu'il s'agissait de me nourrir ou de payer mon loyer. Et de m'acheter des vêtements et autres accessoires. L'art du déguisement, un talent de la pécheresse par excellence.
M'étirant, je me rendis compte que j'étais encore en petite culotte et débardeur.
J'allais dans ma mini salle de bain, entrant sous la douche pour retirer le peu de vêtements me recouvrant encore. J'attrapais le shampoing et commençais à me laver les cheveux alors que l'eau tiède frappait sur ma peau.
Aujourd'hui était le grand jour. Après une rapide réunion avec les chasseurs, nous irions tâter les terrains. Et demain...
Un frisson me parcouru, mon esprit imaginant déjà la chasse de demain.
— Une mission de reconnaissance, cherchais-je à me rappeler pour ne pas trop m'exciter là-dessus.
Le démon que nous chasserions était apparemment un incube. C'était très certainement pour cela d'ailleurs que l'on avait fait appel à moi. Étant une pécheresse, je serais plutôt utile puisque ces démons se nourrissaient de l'énergie sexuelle des humains. Notre nom n'avait rien de poétique. Nous étions une légion de femmes entrainées à la manière des chasseurs, mais de manières bien plus intensives. Nos missions étaient solitaires et nous autorisaient à user du moindre des péchés et des vices de ce monde. Le terme de « pécheresse » nous correspondait parfaitement.
Après avoir fini de prendre ma douche, je sortais de la salle de bain, enroulée dans une serviette. Soudain, quelqu'un frappa à la porte. J'allais pour voir qui était en train de me déranger, mais l'entrée s'ouvrit d'elle-même et ma main attrapa une dague que je plaquais dans mon dos en attendant de voir qui était l'idiot assez stupide pour entrer chez une pécheresse sans méfiance.
— Michele, espèce d'idiot ! m'énervais-je en voyant mon ami.
Ce dernier ferma la porte derrière lui. Il m'offrit un merveilleux sourire et je reposais ma dague.
— Il est 10h passé. Tu comptes venir à la réunion avant demain ? se moqua-t-il.
Je geignis alors une plainte, ou plutôt un râlement désespéré.
— Je n'avais pas vu l'heure. Laisse-moi deux minutes pour m'habiller et je te rejoins.
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Si les réunions entre chasseurs étaient toutes comme celle-là, j'étais bien contente d'être une pécheresse et non une chasseuse.
Je soupirais tout en écoutant les chasseurs préparer le « terrain ».
— Si tu t'ennuis tant que ça, tu peux toujours te retirer de la mission, Pécheresse. Nous n'avons pas besoin d'une gamine pour nous aider à faire notre travail, me cracha l'un des chasseurs autour de la table de réunion.
— Nino, l'interrompit Michele en lui lançant un regard sévère. Nous sommes ici pour arrêter une guerre, pas pour en créer une autre.
Nino était toujours comme ça de toute façon. Cela faisait des années que je devais supporter ses commentaires. Par le passé, je m'énervais bien plus facilement devant ses remarques, mais maintenant l'écouter m'amusait.
En vérité, le commentaire qu'il venait de me lancer violemment à la figure avait une tout autre signification. Cela pourrait se traduire par « La mission sera peut-être dangereuse. Je m'inquiète pour ta sécurité puisque tu es comme une sœur pour moi ».
Et oui, Nino était simplement trop timide pour exprimer ses véritables pensées. Cela me fit sourire.
Me levant de la table sur laquelle j'étais assise, j'allais près de Nino, ébouriffant ses cheveux blonds tout en riant.
— Tu es adorable, mais je ne fuirai pas.
— Espèce de..., commença à s'énerver Nino.
Avant qu'il n'ait le temps de m'insulter, j'enroulais mes bras autour de sa taille. Il se pétrifia avant de lâcher un soupir.
— Tu es une gamine. Les gamines devraient simplement arrêter d'embêter les adultes et retourner jouer dans le bac à sable.
Il ne dit rien de plus, regardant la carte posée sur la table. Mais il ne put cacher l'embarras sur son visage tout crispé. Je sentais bien qu'il se concentrait sur sa respiration pour inspirer et expirer calmement. Cela me fit rire discrètement.
Les autres chasseurs continuaient de discuter de leur plan, ne se préoccupant plus de Nino et de moi. En même temps, ils devaient être habitués.
Nino et Michele étaient des amis d'enfance. Nous étions tous les trois très proches, même si cela ne se voyait pas au premier abord puisque nous passions notre temps à nous chercher des noises et à nous disputer.
— Du coup, on compte sur vous, acquiescèrent les chasseurs en se tournant vers nous deux.
Je clignais plusieurs fois des yeux, ne comprenant pas. Je n'avais pas vraiment suivi ce qu'il se disait dans la réunion.
— Vous irez tous les deux repérer le terrain. Il nous manque les données de cet endroit, montra l'un des chasseurs sur la carte. Virginia, puisque tu es une pécheresse, ça ne devrait pas te poser de problème. Tu as l'habitude de récolter des informations.
Une pécheresse réduite à la collecte d'informations... Bien sûr qu'il s'agissait de notre rôle, mais tout de même, je méritais bien mieux !
Identification, compréhension et extermination. Une pécheresse était censée être capable d'identifier n'importe quel monstre. Nous étions des bestiaires vivants, rassemblant des données sur ces créatures surnaturelles pour aider à mieux les comprendre afin de rendre plus efficace le combat du Vatican contre le surnaturel et de bien mieux appréhender les niveaux de danger. Et surtout, nous étions des exterminatrices. Toujours seules, nous étions envoyées en dernier recours lorsque les chasseurs se trouvaient incapables de débusquer ou d'éliminer un ennemi.
Pour une pécheresse de ma renommée, ce genre de missions était l'une de mes priorités. Demain, on pourrait m'envoyer un dossier vide avec seulement une instruction « Détruisez Dracula, vous avez une semaine ». Le plus miraculeux étant que je n'échouerai pas.
Les pécheresses n'étaient pas aussi nombreuses que les chasseurs, et nos rôles se différenciaient notamment dans nos méthodes. Ils étaient des soldats, une force armée, une élite du Vatican rappelant aux monstres que le Conseil était fort. Nous, nous étions un mythe.
— Et pourquoi est-ce que nous devrions y aller seulement tous les deux ? s'interposa Nino, inconscient de la chance qu'il avait de pouvoir travailler avec une pécheresse aussi exceptionnelle que moi. D'ailleurs, elle ne devrait même pas y aller. On n'a pas besoin de son aide.
— Nous avons besoin de son aide, Nino. C'est pour ça qu'elle est là. Alors, tu collabores et tu te tais. Vous partez maintenant, ordonna le même chasseur.
Je me tournais vers Michele.
— Et toi ?
— Moi ? Je ne participe pas à la mission. J'ai quelque chose de plus important à faire.
— Une autre mission.
Il se contenta d'affirmer de la tête.
Me détachant de Nino, je m'approchais de Michele, un sourire aux lèvres. Michele était l'un des meilleurs chasseurs qui pouvait exister. Les missions qu'on lui assignait étaient souvent les plus dangereuses.
— Bonne chance alors, l'encourageais-je.
— La chance n'a rien à voir là-dedans. Je suis doué, c'est tout, déclarait-il en bombant légèrement le torse. En tout cas, je te laisse aux mains de Nino. Essayez de bien vous entendre pour une fois.
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M'entendre avec Nino était très facile, puisque j'arrivais assez aisément à le comprendre. Mais ce n'était pas le cas de tout le monde. Peut-être était-ce la véritable raison pour laquelle on ne nous avait envoyé que tous les deux ?
Dans tous les cas, nous nous trouvions à présent cachés dans des arbres, observant une maison au loin. Enfin, il s'agissait davantage d'un palace que d'une maison à ce niveau-là.
Située au milieu de nulle part, près de la forêt, le luxe qui s'en dégageait était lumineux. La demeure était construite dans un style moderne. À l'arrière se trouvait une immense piscine dont l'eau était aussi éclairée que la maison elle-même. Les démons ne vivaient pas dans la pauvreté en tout cas. Et les dizaines de voitures exposées devant la demeure venaient accentuer le message « Je suis riche, vous n'êtes rien face à moi ».
Je lâchais un soupir, m'ennuyant. Si j'avais été seule, j'aurais fait en sorte de me retrouver dans ce « palais du diable ». Mais ce n'était pas le cas. Et Nino, qui surveillait les lieux avec ses jumelles, semblait être un partisan de l'absence de fun. Il insistait sur le fait que nous devions seulement trouver les informations manquantes.
Une grimace tendit les traits de son joli visage. Il n'arrivait à rien avec ses jumelles.
Finalement, je décidais de descendre de mon arbre et d'aller dans la voiture. Elle n'avait rien de trop voyant. Dans le cas présent, ça m'arrangeait. J'actionnais le bouton en dessous du volant pour ouvrir le capot puis, munie de ma main, je trifouillais un ou deux trucs.
— Mais qu'est-ce que tu fais ? hurlait Nino tout en murmurant.
— Je récolte des informations. Va te percher dans un arbre si tu veux, mais reste éloigné de la voiture.
Prenant un élastique, j'enroulais mes cheveux écarlates en chignon puis j'enfilais une perruque blonde dont les boucles tombèrent en cascade dans mon dos et la frange cachait mon front. Prenant ensuite des lentilles marron dans mon sac, je regardais dans le miroir pour voir si j'avais correctement enfilé mon « costume ». Rien de trop sophistiqué, je n'avais pas le temps. Si on m'avait laissé faire à ma manière, la perruque aurait été remplacée par une coloration.
Une fois fait, je n'eus plus qu'à appliquer un maquillage discret et naturel qui changea complètement mon visage. Et pour être sûr que l'on ne me reconnaisse jamais, je pris des lunettes de vue.
Lorsque l'on était pécheresse, le maquillage et l'art du déguisement devenaient essentiels, tout comme de nombreuses choses telles que des connaissances en une multitude de disciplines. Enfin, ce n'était ni l'endroit ni le moment pour penser à ces années d'apprentissage.
Entrant de nouveau dans la voiture, je baissais le frein à main et allait derrière la voiture en laissant la porte conducteur ouverte. Posant mes mains contre le coffre, je poussais la voiture pour faire le chemin sur la route. Comme je l'avais demandé, Nino resta caché dans un arbre. Je n'arrivais même plus à le voir. Rien de trop étonnant, il faisait nuit. Donc il était beaucoup plus difficile de le repérer.
Cela prit quelques minutes avant que je n'arrive près de la maison. C'était le moment de redevenir une grande actrice.
Actionnant le frein à main, je commençais à me réjouir en regardant vers la maison. Puisque je devais jouer le rôle d'une jeune femme dont la voiture était tombée en panne dans la campagne, je devais être à fond dans mon personnage.
M'approchant du grillage, je cherchais la sonnette et appuyais dessus. Une voix se fit entendre après quelques secondes d'attentes.
— « C'est pour quoi ? »
— Euh... Excusez-moi, monsieur, de vous déranger aussi tard dans la nuit. Ma voiture est soudainement tombée en panne et je n'arrive pas à capter de réseau avec mon téléphone. Est-ce que je pourrais utiliser le vôtre ? Je ne vous importunerai pas longtemps, seulement le temps d'appeler une dépanneuse ou un ami qui pourrait me ramener.
Un long silence s'ensuivit et je commençais à douter de mes talents d'actrice. Tout en me mordant la lèvre inférieure, légèrement angoissée, je recoiffais nerveusement une mèche de mes cheveux blonds. Il devait surement m'observer, je devais donc rester dans mon rôle jusqu'au bout. Je frottais dans mes mains avant de me frictionner les bras, comme pour montrer que j'avais froid, bien que ce ne fût pas le cas.
— « Je vais vous ouvrir. Entrez votre voiture. »
— Merci beaucoup monsieur.
Alors les grilles s'ouvrirent et je souriais de bonheur. Je commençais à pousser ma voiture à l'intérieur lorsque deux hommes arrivèrent.
— Laissez, madame, nous nous en occupons, m'expliquèrent-ils en poussant ma voiture.
— M-Merci.
J'entrais en les suivant. Les grilles se fermèrent derrière moi.
Lorsque la voiture fut entrée, les deux hommes – très certainement des démons – m'ouvrirent la porte de la demeure.
L'intérieur était tout aussi luxueux et immense que l'extérieur, remplis seulement de blanc, de gris ou de noir. Déjà se dévoilait devant moi un grand nombre d'informations.
Les hommes m'emmenèrent jusqu'à un salon magnifique. Un canapé pour au moins une dizaine de personnes se trouvait devant une cheminée décorative. Et sur ce canapé, un homme brun confortablement installé. Il se tourna vers moi, un sourire charmeur aux lèvres. Je fis semblant d'être intimidée par les lieux et par l'homme à la beauté surnaturelle, ce qui était normal pour un démon de son niveau.
— Le téléphone est là-bas, m'indiqua le démon.
Je regardais dans la direction qu'il me pointait du doigt, c'est-à-dire sur la table basse devant lui.
— Merci beaucoup, vous me sauvez la vie, lui assurais-je en souriant.
J'avais vu l'intérieur des lieux, ce qui constituait déjà d'énormes informations pour les chasseurs. Ça, les caméras et les protections magiques alentours, livrées par des symboles discrets, dissimulés dans la décoration.
Je m'approchais du téléphone et commençais à composer un numéro lorsque le démon coupa mon appel. Je me tournais vers lui, véritablement surprise.
— Aucun garage de dépannage ne vous répondra à cette heure-là, m'expliqua-t-il avec le sourire.
Bien sûr que si. Certains garages sont ouverts la nuit, bouffon, avais-je envie de lui rétorquer.
Bien évidemment, je me tue. Je connaissais bien ce regard que me lançait le démon. Par expérience, cela m'indiquait que j'allais surement rester ici cette nuit.
— Ah oui, c'est vrai. Alors je vais appeler un ami.
— Un ami ? Il ne serait pas préférable d'appeler votre petit ami ?
— Je n'en ai pas, souriais-je faussement en commençant à composer le numéro de Nino.
Mais alors que j'allais appeler Nino, le démon prit mon visage dans ses mains pour me tourner vers lui. Sans crier gare, il s'empara de mes lèvres dans un baiser brûlant. À ce contact, je sentis immédiatement mon corps qui se réchauffait. Les démons étaient comme cela après tout. Ils incitaient au péché, et la luxure en était un grand. Mais il me relâcha tout aussi vite, grimaçant discrètement.
— Je suis navré, je n'aurai pas dû, s'excusa-t-il en véritable gentleman.
Ce genre de réaction était anormal. Un démon n'attendait pas le consentement. Il s'emparait de ce qu'il désirait en donnant l'impression à sa proie qu'elle était libre de refuser alors même qu'un piège s'était refermé sur son esprit doué de libre-arbitre.
— Ce n'est rien, lui accordais-je tout de même.
Sa main réceptionna entre ses doigts une mèche de mes cheveux blonds avec délicatesse, comme s'il avait peur de se brûler.
— C'est un bien joli collier que vous avez là, me complimentait-il.
J'écarquillais les yeux, ne comprenant pas. Quel collier ?
Baissant le regard, je sortis un pendentif qui se cachait sous mes vêtements. En voyant le bijou, mon visage se voila complètement. Il s'agissait d'une jolie croix gothique en argent. J'avais dû la confondre avec mon autre croix ce matin, en m'habillant.
Une simple croix n'aurait pas dû être un problème pour un démon de son rang. Il avait beau ne pas être aussi puissant que les proies auxquelles j'avais été habituée, il demeurait suffisamment intéressant pour que le Vatican veuille recueillir des informations. Mais la vue de l'objet ne devait pas l'enchanter.
Ce collier était un cadeau qu'il aurait mieux valu que je jette, mais dont je ne parvenais pas à me débarrasser. Le rubis en son centre avait la même couleur rouge que mes cheveux naturels. Il était magnifique, mais je devais m'en défaire. Un jour ou l'autre, je le ferais. Je me séparerais du seul cadeau que m'avait véritablement fait Lysandre pendant les trois années de mission qui m'avait enchaînée à lui. Ou tout du moins le seul ayant semblé avoir de l'importance pour lui.
Je levais le visage vers le démon.
— Je vais composer le numéro de mon ami et il viendra me chercher, lui expliquais-je tout en replaçant le collier sous mes vêtements.
— Ce ne sera pas nécessaire. Mes hommes ont réparé votre voiture.
Je me tournais vers les hommes qui attendaient à l'entrée du salon.
— Un contact était mal positionné, me donnèrent-ils pour explication.
— C'était seulement ça ? Je suis soulagée. Je n'aurais jamais eu les moyens de faire réparer ma voiture, m'exclamais-je alors.
Soudain une main se glissa dans ma poche alors que le démon me rapprochait vers lui.
— Venez me voir à cette adresse demain.
— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, murmurais-je en regardant ailleurs pour appuyer un sentiment d'embarras.
— Et moi, je pense que si. Vous m'intéressez vraiment...
— Alice, lui accordais-je alors qu'il attendait d'entendre mon nom.
— Alice, quel magnifique prénom.
Et tandis que je me dirigeais vers la sortie, je me tournais un instant pour observer le démon.
— Je vous attendrais, me lança-t-il avant de me laisser monter dans ma voiture.
Date dernière mise à jour : 30/06/2024
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