Chapitre 11
« Amour, amour,
De nuit ou de jour.
Amour, amour,
Mensonge de toujours.
Qu'est-ce que cette poésie ?
Qu'est-ce que cette jalousie ?
Perfide chanson interdite
Ma raison doucement s'effrite.
L'amour n'existera jamais,
Et mon existence s'en blâmait.
Enlevez donc son identité à l'être parfait,
La souillure se répandra en son esprit défait. »
Nous le savions pourtant si parfaitement. Rien n'était éternel. Tout avait un début, tout avait une fin. Trahison et mensonge demeureraient à jamais raison de notre existence. Le cœur se brisait tandis que le temps défilait.
Personne ne survivait aux assauts du cœur, à sa peine et à sa douleur.
J'avais mal, la seule réalité que l'amour m'offrait et m'offrirait. Si les fleurs de l'amour étaient empoisonnées ou épineuses, elles restaient inaccessibles pour une tout autre raison. Elles apparaissaient en loin, d'un souffle cruel, puis disparaissaient pour toujours et à jamais, comme un fruit du hasard. Des choix comme prédestinés de fortune.
Il arrivait un moment où les flammes destructrices de l'amour venaient tout ravager.
Le feu consumait tout.
Durant le vol, agrippée aux épaules de cet imbécile d'ange, mon corps avait commencé à m'abandonner. Toutes ses forces s'en étaient allées. Cela n'avait pas alerté cet emplumé ! Ce dernier s'était contenté de continuer son chemin aérien comme si de rien était. Les humains étaient des animaux terrestres. Ils n'avaient rien à faire dans le ciel !
Arriva ce qui devait arriver, j'avais alors perdu conscience. Rien à voir avec de la terreur. En tant que pécheresse expérimentée, rien ne pouvait m'effrayer. Jamais.
Mais en reprenant connaissance, la sensation du vent sur ma peau ne terrifia pas mes sens. Tout était calme. Nous ne devions plus être en train de voler.
Un son de satisfaction m'échappa. Une agréable sensation semblait s'emparer de moi. Une chaleur douce et rassurante. Une chaleur brûlante, mais dont la flamme ne blessait pas mon épiderme, se contentant de seulement l'envelopper sans brusquerie. C'était agréable. Juste agréable et apaisant.
Me roulant en boule, je me blottissais dans ce cocon protecteur, ne désirant pas me réveiller. J'étais bien installée, j'étais comme à ma place ici.
« Le feu consumait tout. »
Ces mots, que je venais de rêver, furent comme murmurés à mon oreille. Je me figeais d'incompréhension. Était-ce bien autre chose qu'un simple rêve ?
Je n'eus pas le temps pour davantage de réflexion. Quelque chose s'enroulait autour de moi. Une menace ?
Observant rapidement mon nouvel environnement, il m'apparut rapidement l'évidence même : je me trouvais dans une chambre. La chambre d'une demeure assez aisée. Où avais-je donc pu atterrir ? Où m'avait emmené Lysandre ?
— Bien dormis ? m'interrogea une voix familière.
— Je crois...
Passant ma main contre mon front, je cherchais mes médicaments sur la table de nuit, à côté du lit. « Tiens, ils ne sont pas là. »
Je roulais alors des yeux. Je n'étais pas chez moi. Évidemment que mes médocs contre les migraines ne viendraient pas me soulager dès le petit matin. Il n'y avait même plus de chez moi. Adieu la chambre offerte par le père Daniel... Adieu l'appartement à Rome...
Ce n'est pas comme si ce petit appart minable loué auprès d'un pervers pouvait être considéré comme un chez-soi, haussais-je finalement des épaules. Mais tout à coup, une autre subtilité me paralysa. Ne venais-je pas de parler avec quelqu'un ?
Baissant enfin les yeux vers la situation possiblement contraignante, je me découvris allongée et roulée en boule sur... Eh bien, sur quelqu'un. Un corps masculin et légèrement doré, vêtu seulement d'un vieux jean usé. Le bras de cette personne autour de ma taille, il me gardait au plus proche de son corps brûlant. Un corps si ferme et pourtant si confortable... Un corps tout aussi familier que la voix de son propriétaire.
Lysandre, comme autrefois, me tenait fermement sans pour autant m'emprisonner de son étreinte. Un ange veillant sur mes nuits, ses propres mots de ce temps où lui était ma proie et moi une pécheresse exemplaire.
Que les temps avaient changé... Me voici devenue fugitive et lui plus étincelant que jamais.
— Tu me remarques enfin, parut-il se vexer par mon réveil tardif.
Il semblait furieux. Comme toujours ces derniers temps... Mes agissements n'avaient pas dû l'apaiser, bien au contraire. Décamper dès le matin en le laissant seul dans un grand lit énerverait n'importe quel amant épris.
Retirant son bras qui me retenait, Lysandre se leva. Il attrapa une chemise qui trainait sur une chaise et l'enfila sans attacher les boutons – comme si prendre le temps de bien se vêtir pour cacher ce corps divin était un effort insurmontable – se dirigeant vers la porte de la chambre pour en sortir.
Pas un seul regard, pas un seul mot. Il avait quitté la pièce comme ça.
— Enfoiré, c'est tout ce que tu as à dire après m'avoir kidnappée ! hurlais-je en lâche après avoir attendu que l'homme s'en aille pour le maudire.
Me saisissant d'un coussin, je le jetais en direction de la porte, imaginant suffisamment la présence de l'ange malaimé pour y mettre de la force. Excepté que celle-ci avait apparemment décidé de se rouvrir. Et Lysandre passa sa tête au mauvais moment. Ou plutôt au bon moment, se recevant le coussin en pleine face.
L'oreiller tomba au sol, révélant le visage d'un Lysandre vraiment en colère. Il avait fermé les yeux, comme pour se maîtriser alors que sa mâchoire se contractait.
Il n'a pas d'humour, c'est tout.
— Tu la fermes et tu te tiens tranquille, m'ordonna-t-il, ayant sans doute oublié la véritable raison de son retour dans cette chambre.
Il referma la porte et j'entendis un « clic ».
— Je rêve ou il vient de me donner un ordre ?
Non, je ne rêvais pas. Il venait bel et bien de m'ordonner de rester sagement dans la chambre.
— Oh, et ne me dit pas qu'il a osé...
Me levant, comme pour en avoir la certitude, j'allais jusqu'à la poignée pour la tester. Si, il avait également osé m'enfermer dans une chambre !
Bon, en tout cas, nous n'étions pas au Paradis. Ce style ancien et victorien n'était pas vraiment les genres privilégiés des anges de ce que j'avais pu remarquer lors de mon séjour chez eux. Si je ne me trouvais pas au Paradis, il ne restait que la Terre. Par conséquent, j'avais toutes les chances de mon côté.
Après une rapide analyse sur les alentours, deux autres bonnes nouvelles me sautèrent aux yeux. Premièrement, contrairement à de nombreuses héroïnes de séries kidnappées par des beaux gosses, je n'étais ni nue ni en petite tenue mais bien entièrement habillée de mes vêtements de la veille. Et deuxième constatation ayant le talent de me rendre de très bonne humeur, mon sac se trouvait là, tel le Saint Graal, posé sur une chaise.
Le prenant sur mon épaule, je m'approchais de la fenêtre dont les volets étaient fermés. Rien de plus simple, il suffisait de...
— Fais chier, pestais-je dans un murmure inaudible en constatant que ces derniers semblaient avoir été fermement condamnés.
J'avais beau forcer, rien n'y faisait. La fenêtre ne cédait pas. J'étais pourtant connue pour être l'un des agents du Vatican à la plus grande force, pécheresses ou autre ! Une force surpassant les hommes chasseurs de l'organisation.
Regardant autour de moi, j'entrepris de chercher un objet susceptible de pouvoir m'aider à m'enfuir. Mon regard se posa sur une statuette en pierre, je haussais des épaules. Pourquoi pas ? Néanmoins, je devrais faire vite. Le bruit alerterait Lysandre.
Prenant une chaise, je la coinçais contre la porte. Cela n'arrêterait pas un ange doté d'une force surhumaine, mais ça me donnerait du temps pour m'enfuir et trouver un moyen de ne pas me faire attraper immédiatement après.
Mon sac dans le dos, je regardais la statuette qui était à présent dans ma main. C'était une jolie statuette d'ailleurs, représentant une femme. Je détruisais l'art, mais c'était pour la bonne cause.
Je la balançais contre la fenêtre avant de me tourner pour ne pas recevoir de débris. Seulement, il y eut un problème.
Mon regard se posa sur la fenêtre. Celle-ci ne s'était pas brisée, tout le contraire de la statuette. L'objet était éparpillé en mille morceaux au sol. Qu'est-ce qui n'allait pas avec cette fenêtre ?
Quelqu'un força sur la poignée de la porte et je regardais autour de moi, un peu paniquée. Le plan ne se passait pas comme prévu.
Trouve un truc. N'importe quoi !
Et ne trouvant rien de mieux, je pris une deuxième statuette. Elle était plus petite que la première et semblait en métal. Je tentais de briser la fenêtre avec mais le résultat fut le même. La fenêtre ne se brisa pas. Et la statuette non plus d'ailleurs, tombant seulement au sol.
La porte fut enfoncée et détruite, tout comme la chaise. Lysandre venait d'entrer et je le menaçais de ma statuette de métal, de nouveau ramassée à même le sol.
— Je t'ai demandé de te tenir tranquille.
— Non, tu me l'as ordonné, nuance. Et je n'obéis pas aux ordres. C'est d'ailleurs pour ça que le Vatican veut ma peau.
— Le Vatican ne sera plus ton seul problème si tu continues d'agir comme une gamine. Pose cette statue et va t'assoir. Je reviendrai plus tard.
Il allait repartir, et m'enfermer dans une chambre à la manière d'une prostituée attendant son client. Il m'avait connu suffisamment pour savoir que ce genre de comportement avait la fâcheuse tendance à titiller mes nerfs très sensibles et rancuniers.
Hors de question que je le laisse de nouveau me tenir en bride dans cette pièce !
Lui balançant mon arme improvisée à la figure, je n'attendis pas qu'il la rattrape avant de foncer droit sur lui. Sautant dans ses bras, je voulus lui faire une prise classique de takedown, sauf que tout ne se passa pas comme convenu. Alors que j'avais réussi par un heureux miracle à enrouler mes chevilles autour de sa tête, m'apprêtant donc à l'amener au sol, Lysandre fut si rapide qu'il s'était saisi de mes chevilles, écartant soudainement mes jambes. Ce mouvement me fit tomber douloureusement par terre tandis que Lysandre lâchait sa prise.
Il commença à se baisser pour m'attraper et je roulais sur le côté, parvenant enfin à sortir de la chambre. Je pris tout de même le temps de donner au passage un coup de pied dans le dos de l'ange. Mon ego réconforté, il était temps de décamper.
Je me mis à courir dans ce long couloir. Mais alors que j'atteignais les escaliers, ma jambe s'effondra en m'arrachant un cri de douleur. Écrasée au sol, je regardais le membre en souffrance. Le pantalon était partiellement brûlé, mais ce défaut était presque entièrement camouflé par la noirceur de ma peau brûlée.
Je me tordais tout en geignant. Aucune position ne me permit d'amoindrir la douleur. Cet enfoiré m'avait brûlé et sa main encore brillante en était la preuve !
Je foudroyais Lysandre de mes yeux larmoyants. Celui-ci se rapprocha de moi.
— Ne me touche pas, trou du cul !
Mais il n'en fit qu'à sa tête, esquivant mes coups de poings alors qu'il me soulevait délicatement dans ses bras. Des bras qui tremblaient. Il était celui m'ayant mis dans cet état et pourtant il prenait soin de ne pas être brusque dans ses gestes, un sentiment inconnu obligeant son corps à subir ces tremblements.
S'il s'inquiétait après m'avoir blessé, c'est qu'il était encore plus timbré que moi !
Retournant dans la chambre, il m'allongea sur le lit, découpant soigneusement mon pantalon.
— Ne bouge pas s'il te plait.
— Ferme-la, je fais ce que je veux !
Cependant, lorsque je sentis la douleur qui s'apaisait dans ma jambe, je cessais de me tendre ou encore de me débattre. Un soupir de soulagement m'échappa, les paupières closent de ce répit. Des yeux que je rouvris immédiatement en sentant les mains de Lysandre sur ma jambe blessée.
Ses mains brillaient d'une douce lumière. La brûlure disparaissait à vue d'œil. Un don de guérison. Lysandre me soignait.
— Je ne voulais pas te blesser, mais tu ne me laissais pas le choix, chercha-t-il à se justifier. Je t'en prie Vi, reste ici sans faire d'histoire.
— Va te faire encu... !
Mon insulte fut coupée soudainement par la main de Lysandre qui venait s'écraser sur mes lèvres.
— Écoute, j'ai quelques trucs à régler avec mes frères. Ensuite, je te promets de retourner te chercher. Je t'expliquerai tout. Mais pour ta propre sécurité, reste ici.
— Je me suis fait cramer la jambe. Que je sois ici ou dehors ne m'apportera pas plus de sécurité.
— Dehors, ce pourrait bien être pire. Et pour ta jambe... je suis désolé.
Et celui-ci repartit immédiatement, me laissant vraiment seule.
Seulement la porte de la chambre n'existait plus. Et s'il pensait que j'allais rester bien sagement ici...
Me levant du lit, je m'effondrais au sol. Ma jambe ne tenait plus debout.
— Flûte.
Commençant un travail de kiné, je massais ma jambe et la forçais à bouger pour activer correctement les muscles. Une fois tout ce travail fait, ce qui me prit bien quelques minutes, je retentais encore et encore les essais de marcher. Un autre entrainement...
Je pouvais me souvenir de ce jour où, après avoir eu les membres bloqués durant des jours, un entrainement de résistance face à la torture, nous avions dû apprendre à réutiliser de nous-même notre corps. Particulièrement éprouvant et difficile, surtout à la sortie d'une torture visant à nous couper de notre enveloppe charnelle. Je ne m'en étais pas trop mal sortie. Encore jeune, cela m'avait aussitôt démarquée des autres. Un corps se remettant relativement vite et un esprit fort : la parfaite pécheresse en devenir.
Lorsque je parvins enfin à retrouver l'usage de ma jambe, je découvris que Lysandre était dans l'encadré de la porte à m'observer.
Un sourire amusé était dessiné dans le coin de ses lèvres.
— Tu es là depuis combien de temps exactement ?
— Trois minutes.
Très précis, trop pour que ce soit vrai. Quoique, la précision pouvait parfois être signe de véracité, n'est-ce pas ?
— Et tu es resté planté comme un débile pendant trois minutes ?
— Cela en valait vraiment la peine.
Il me tendit alors ses bras.
— Besoin d'aide ?
— Va te faire voir chez les grecs, je me débrouille très bien sans toi.
— Ce n'est pas polie pour les grecs ça.
— En termes de politesse, on reverra. Tu m'as cramé la jambe et ça je ne suis pas près de l'oublier.
Mais est-ce que Lysandre m'écouta moi et ma rancune ? Pas du tout. N'en faisant qu'à sa tête, il me souleva dans ses bras, avançant jusqu'aux escaliers avec moi en fardeau.
— Et pour ma défense, tu m'as attaquée plusieurs fois. Et tu m'as même tué. Donc, je dirais que nous sommes quittes.
Je ne répondis rien. De toute manière, je n'avais rien à répliquer, il y avait du vrai dans ces mots.
— Ce n'est pas une excuse, me défendais-je tout de même. C'était ma mission. Toi, tu agis comme un mari violent qui s'excuse de son comportement mais ne changera jamais.
— Donc si cela n'avait pas été ta mission, tu ne m'aurais pas tué ? ignora-t-il ma dernière remarque.
— Je...
Lysandre s'était arrêté, levant les yeux vers moi. Il attendait une réponse de ma part. Une réponse que je ne possédais pas.
Détournant le regard, je pestais intérieurement. Que répondre ?
— Je ne sais pas, avouais-je finalement.
Un grand sourire réapparu sur ses lèvres charmeuses. À cette vue, quelque chose se réchauffa tendrement en moi, dans ma poitrine qui se serrait.
— Ce n'est pas grave, j'ai eu ma réponse.
Je voulus lui demander ce qu'il entendait par là, mais il avait déjà descendu les escaliers et nous nous retrouvions bientôt dans un salon spacieux. Toujours dans ce même style victorien que la chambre quittée plus tôt, la pièce aux tons plutôt sombres comptait une table entourée de deux fauteuils et d'un canapé surement ancien. Il y avait aussi une bibliothèque et quelques meubles en bois du même style vieillis. On se serait cru dans la vieille Angleterre.
Et dans cette pièce, trois personnes étaient présentes, l'une d'entre elles se trouvant être Lauviah, l'ange qui avait bien failli me tuer au Paradis. Il se tenait debout à côté d'un fauteuil sur lequel était assis un homme à la chevelure mi-longue. Un être blond dont les yeux translucides oscillaient entre le blanc et le rose. Un troisième s'était installé sur le canapé. Ou plutôt allongé sur ce dernier. Ce fut lorsqu'il se releva pour me regarder avec un sourire angélique sur le visage que je pus l'observer. De courts cheveux blonds, coiffés en bataille, et surtout ses yeux d'un bleu pénétrant qui semblaient me transpercer. C'était un regard que je ne connaissais que trop bien, le même que Lysandre.
— Alors c'est elle, donna pour seule explication ce troisième individu.
— Oui, c'est elle.
Lysandre avait répondu et apparemment chacun d'entre eux compris.
— Oh hé, je suis là, me sentais-je obligée de rappeler pour que l'on cesse de m'écarter de nouveau.
Lysandre me posa au sol, gardant tout de même ma main prisonnière de la sienne.
— Je ne te présente pas Lauviah, me pointa tout de même Lysandre de sa main. La personne à côté de lui est Zaphkiel, l'Archange des Trônes. Quant à lui...
Il s'arrêta un instant en se tournant vers ce troisième individu.
— Voici Camaël, mon Archange. L'Archange des Puissances.
— Et toi, tu dois être Virginia Gladio, la petite tigresse qui n'arrête pas de se débattre depuis tout à l'heure pour essayer de sortir, intervint-il.
— Et j'aurais très bien pu y parvenir.
— Laisse tomber, la fenêtre était ensorcelée, m'expliqua Lysandre. Tu vois, je ne t'ai pas sous-estimée. Je savais que tu allais tenter de t'enfuir.
Attendait-il de moi que j'en sois reconnaissante ? Que je le récompense peut-être ? J'aimais que l'on me sous-estime. Même si mon ego n'en ressortait pas flatté, tout devenait vraiment plus facile pour moi.
— Si tu me disais plutôt pourquoi tu m'as kidnappée. Et d'ailleurs, comment est-ce que tu m'as retrouvée ?
— Je te retrouverai toujours.
Mais face à mon regard insistant, il soupira, vaincu.
— Un prêtre s'est mis à prier en citant ton nom, ce qui m'a permis de retrouver ta trace immédiatement.
Le prêtre Daniel, ça ne pouvait qu'être lui. Quel idiot ! Je l'avais pourtant plus ou moins prévenu pour les anges... Bien que je n'en fusse pas certaine.
— Tu arrives à entendre toutes les prières ?
— Tous les anges entendent toutes les prières, à l'exception de celles destinées à un seul ange ou un autre être en particulier. Cela rentre alors dans la sphère privée, nous n'y avons pas accès.
Je comprenais mieux pourquoi Lysandre était soudainement tombé du ciel devant moi.
— Et pour ton autre question, sache que je t'aurais récupéré tôt ou tard.
La lueur furieuse et intrépide dans son regard tenta de m'enflammer dans cette paralysie provoquée par une telle émotion. Sa prise se fit inconsciemment plus forte autour de ma main, menaçant de broyer mes os.
Il leva ses autres doigts, effleurant mon visage. Un souvenir paraissait lui être revenu.
— Tu t'es enfuie alors que je dormais. Je trouve ça cruel, même venant de ta part.
J'étais une pécheresse, cela n'aurait pas dû être aussi surprenant. Pourquoi me faire confiance ?
— Bon, votre querelle d'amoureux, ce sera pour plus tard. On a des affaires plus urgentes, déclara Camaël en frappant dans ses mains.
L'Archange s'appuya contre la bibliothèque, les bras croisés alors que Zaphkiel s'approchait de moi. Mais me rappelant ce qu'avait voulu faire Lauviah au Paradis, je reculais d'un pas, me plaçant aussitôt derrière Lysandre à qui je tins fermement la main. Il n'était pas question qu'un ange tente à nouveau sa chance pour me tuer. J'avais déjà le Vatican aux talons et un ange obsédé aux fesses. C'était bien suffisant.
Cela sembla surprendre Zaphkiel alors que Lysandre, lui, se mettait bêtement à sourire.
— Vi, c'est bon, me rassura Lysandre. Il ne te fera rien.
Même en me disant cela, je sentais déjà quelque chose se réchauffer en moi alors que mes yeux commençaient à me brûler. Comment le croire alors que cette sensation étouffante s'emparait à nouveau de moi ? Comme au Paradis...
Ne panique pas, tentais-je de me convaincre.
Lysandre me saisit par les deux épaules, me tournant face à lui. Ses mains glissèrent jusqu'aux miennes, qu'il souleva au niveau de sa poitrine pour les plaquer contre lui.
— Vi, il va juste regarder tes tatouages. Rien d'autre.
— C'est tout ?
Lysandre affirma de la tête et je me détendis. Il ne me mentirait pas là-dessus, j'en avais l'étrange certitude.
Écartant mes cheveux de ma nuque, je laissais l'ange s'approcher de moi. Il regarda attentivement les tatouages, passant parfois ses doigts dessus comme pour vérifier quelque chose. Puis, il s'écarta.
— C'est bien ce que je craignais, commençait-il à nous communiquer.
Pour toute réaction, je fronçais les sourcils, attendant patiemment les révélations de l'être céleste.
— Des roses, c'est intéressant, gronda-t-il avec sarcasme en observant Lysandre en biais. Mais l'une d'elle a fané et une autre a brûlé.
Posant son regard vers Lysandre, Zaphkiel semblait énervé. Ou agacé. Et Lysandre baissa les yeux. Camaël s'approcha de lui, encore plus furieux. Il souleva son menton pour le forcer à le regarder en face.
— Gaddiel, est-ce que tu te rends compte de la gravité de tes agissements ?
Lysandre émit un grondement sourd dans sa gorge alors qu'il continuait de baisser les yeux. Ce comportement de sa part m'énerva tellement que je repoussais brusquement la main de Camaël, celui-ci tenant encore Lysandre par le menton. L'Archange écarquilla en grand les yeux, visiblement surpris de mon comportement. Moi-même je n'arrivais pas à expliquer cette réaction de ma part. Néanmoins, je ne me dégonflais pas pour autant, pointant du doigt cet ange en une menace silencieuse.
— Je ne..., commençais-je.
Clignant plusieurs fois des yeux, je ne savais pas quoi dire. Un silence pesant se fit. Un silence très embarrassant où je menaçais Camaël de mon misérable petit doigt.
Lysandre choisit ce moment pour m'enlacer, enroulant ses bras autour de moi avant de poser sa tête sur mon épaule.
— Je t'aime Vi.
Entendant encore ces mots, je sentais mon corps se réchauffer, comme un automatisme sur lequel je n'aurai pas la main mise. Mes yeux se plissèrent face au ressenti d'une soudaine sensation douce et chaleureuse.
Pourtant, je repoussais Lysandre.
— Eh bien pas moi. Maintenant fiche-moi la paix. J'ai des choses à faire.
Je fis un pas en avant, afin de partir à la recherche de la porte de sortie, mais Lysandre se plaça devant moi. En obstacle, encore.
— Plus jamais sans moi, s'imposa-t-il.
Plus collant qu'une nana obsédée par son boys band préféré...
Les trois autres anges passèrent tranquillement devant nous, et Zaphkiel s'arrêta.
— Gaddiel, nous te la confions quelque temps. Fais en sorte qu'aucune autre fleur ne ternisse ou ne fleurisse.
— Pour ce qui est de fleurir, je ne vous promets rien.
Bien sûr, l'encodage de cette phrase ne put être traduit par mon intelligence proche du génie.
Zaphkiel sourit et monta les escaliers avec les autres. Il n'y eut bientôt plus que l'ange de malheur et moi.
— Lysandre, laisse-moi passer.
— Je viens avec toi.
— Non.
Il secoua la tête, exaspéré. J'étais une fille bornée. Lorsque je disais non, c'était non. Et là-dessus, il ne pourrait pas me faire changer d'avis. Soit il m'emprisonnait dans cette maison, soit il me laissait partir. Mais s'il me gardait prisonnière, tôt ou tard, je parviendrais à trouver un moyen de sortir.
La liberté ne pouvait m'être arrachée.
— Faisons un compromis. Si tu me laisses rester avec toi, alors je te dirais tout ce qui concerne les roses tatouées dans ta nuque.
Date dernière mise à jour : 05/08/2024
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