Chapitre 37
Karen entrouvre les yeux, assise sur une vieille chaise branlante. Dans une petite pièce à peine éclairée, elle arrive à discerner quelques vieux meubles trainant aux alentours, ainsi que son kidnappeur assis non loin, envahie par l'étouffante et opaque fumée de l'herbe qu'il fume. Elle tente de bouger, mais sent immédiatement une douleur aux bras, à cause de l'épaisse corde qui la lie sans délicatesse à la chaise sur laquelle elle est assise. Pareil pour les jambes, le fémur et le tibia eux aussi ligotés. Plus ou moins calme malgré l'ambiguïté de la situation dans laquelle elle se trouve,
Karen souffle un bon coup et redresse la tête pour mieux explorer l'endroit. Mis à part l'odeur exécrable de sa drogue et le désordre sans borne qui règne dans la pièce, elle a tout l'air d'un salon qui fait aussi office de terrasse. Le fauteuil dans lequel il est assis ressemble trait pour trait à un canapé-lit qui semble fatigué d'occuper la même misérable fonction. La plupart des meubles sont modestes et les seules modernités qu'elle aperçoit sont une petite télévision couleur et un micro-onde presque moisi. À travers la fenêtre, un mistral sans merci la fait grelotter malgré la petite veste qui surmontait son haut, froideur à laquelle s'ajoute l'angoisse que lui fait ressentir cette bicoque malgré l'éclairage bienveillant de la lune.
-Je vais rester encore longtemps ici ? Se décide-t-elle à dire.
Joe pivote la tête en direction de la voix qui l'interpelle et esquisse un sourire mesquin.
-T'es réveillée ma belle ?
-Tu ne m'as pas répondu, rétorque-t-elle.
Intrigué par sa charmante répartie et son aura, il se lève et s'approche d'elle. Il s'appuie sur les bras de Karen attachés aux accoudoirs de la chaise, ce qui a pour effet de faire lâcher un gémissement de douleur à son otage, ce qui l'emplit de satisfaction.
-Dans quelques jours, tu verras ton mec, lui dit-il. S'il m'apporte ce qu'il faut, je te laisserai partir sans problème.
Sans rien ajouter de plus, il tire sur son sixième doigt et projette la fumée de l'herbe dans son visage. Elle répond à sa méchanceté gratuite par une grimace de déplaisir, avant d'éternuer bruyamment.
-Bonjour le confort, l'embouche-t-elle.
Une fois la fumée dissipée, Joe s'attarde un peu plus sur les traits de Karen, qui évite par tous les moyens de croiser son regard.
-Ton visage m'est familier, pute.
-Pourquoi pute? Tu aurais pu de te passer de vulgarités pour une fois, ça te rendrait vachement plus sympathique.
-Toutes les filles que je connais sont des putes, ce n'est qu'une remarque.
-Forcément, Joe, les gens comme toi ne croise pas mieux, enfin, jusqu'à ce qu'on se rencontre tous les deux.
Il écarquilla les yeux, surpris.
-Tu me connais ? Lui demande-t-il.
Elle se tait et détourne les yeux.
-Tu me connais oui ou non? Répète-il en lui donnant un violent coup au visage.
-Ahhhh ! Crie-t-elle sous l'effet de la douleur qui se matérialise par le sang qui lui pisse des narines. Je ne sais pas de quoi tu parles...
-Si tu m'énerves, je risque de te faire encore plus mal. Mais c'est dommage, tu es ma rançon, je n'ai pas le choix.
Il attrape sauvagement ses cheveux en queue de cheval pour la forcer à lever la tête, la respiration de Karen se faisant plus haletante, l'oreille qui siffle à cause de la violence du geste de son persécuteur.
-Tu sais que tu es belle ? Roucoule-t-il, un peu plus attendri, le regard s'attardant sur ses lèvres gonflées et rouges.
-Ça se peut.
Il baisse le regard, quittant la finesse de ses traits qui forme une harmonie injurieuse sur son visage, pour fixer la naissance de sa poitrine, rendue encore plus désirable par les mouvements qu'elle fait lorsqu'il la malmène.
-Et tu sais ce que ça me donne envie de te faire?
Elle ne dit rien pendant un moment avant de lui cracher au visage avec hargne. Joe ne lui répond rien, et se contente d'afficher un sourire fier, l'esprit déjà satisfait par la sale besogne qu'il s'apprête à effectuer.
*
...Dans la peau d'Adam...
Bryan: C'est ici non?
Moi: Oui, gare la voiture.
Comme un pilote de course aguerri, Bryan se gare précipitamment sur le bord de la route. On descend précipitamment tous les quatre dans une clairière plutôt accueillante ce soir de premier croissant de lune. À l'horizon, pas l'ombre d'un chat. Ça m'inquiète parce que je ne suis pas là pour pique-niquer, mais pour retrouver ma Karen, et j'ai l'impression de faire fausse route depuis le début.
Moi: Fouillons les alentours.
Je le dis sans aucun engouement, mais leur emboite le pas pour ne pas les contaminer avec mon pessimisme. Dans un calme plutôt tonitruant, on fouille tout l'endroit, sans laisser la moindre feuille.
Mais rien, aucune preuve, aucun indice, rien.
Je m'assoit finalement sur une pierre située non loin d'eux. Les autres en font de même, épuisés. Les pauvres, ils devaient être entrain de faire la fête à l'heure qu'il est. Mais ils n'ont pas voulu me laisser seul, parce que même conduire allait être du boulot.
Je n'ai pas les idées vraiment en place, tout se mélange dans ma tête.
Je n'arrive pas à raisonner correctement, une seule question tourmentant mon esprit:
Karen, où est-tu??
Bryan: Inquiet. On fait quoi?
Je hausse les épaules et passe la main dans mes cheveux pour me ramener sur terre. Franchement, c'est le 10eme endroit qu'on fouille, je ne sais plus quoi faire.
Ma poche vibre quelques minutes plus tard, brisant le silence qui pesait. Je glisse la main dans la poche de mon sweat qui jusque là m'a empêché de crever de froid et d'angoisse. C'est le téléphone de Karen, qui affiche un numéro inconnu.
Hayden: C'est qui?
Moi: Je ne sais pas, il n'y a pas de nom. En décrochant. Ouais, allô?
...: Belle soirée? Franchement, félicitation pour le match, j'ai regardé, et je t'ai trouvé incroyable mon cher !
Les poils hérissés par cette voix familière, je bondis immédiatement sur mes deux pieds, sous les regards perplexes de mes accompagnateurs épuisés qui ne comprenaient rien à ce cinéma.
Moi: Me redressant subitement. Joe! Imbécile dis moi où elle est!
Joe: Oh, oh, oh, calme toi mec, elle vit ta sucrette! Elle a même envie de te faire coucou.
Il approche sûrement le téléphone d'elle, mais je ne peux m'empêcher d'entendre de petits gémissements suspects. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai subitement peur de parler, d'entendre quelque chose qui pourrait m'achever.
Moi: Ka...Karen?
Elle : Bon...bonsoir Adam, ahh !
Entendre ce cri me déchire le cœur, me brise littéralement au plus profond de moi. J'imagine sans le vouloir ce qu'il doit lui faire pour la faire crier ainsi de douleur, et j'en ai des maux de tête. C'est à moi de la faire crier, de préférence de bonheur, et non pas à un moins que rien de son espèce.
L'enfoiré.
Moi: Karen, dis-moi qu'il ne t'a rien fait de mal, bébé dis-le moi!
Les autres me regardent, suspendus à mes lèvres. Mais je les vois à peine, le regard perdu dans le vide, à penser à ce qui se passe à l'autre bout du fil. J'entend de faibles bruits, mais n'arrive pas à percevoir ce qu'ils traduisent. J'ai l'impression qu'elle se débat pour le confronter, mais n'y arrive pas. Ma Karen, pas toi...
Joe: Dit !
Non...
Elle: Adam! Je te...
Non...
Joe: Parles!
Elle: Je te déteste!
Je la sens à bout de force, sonnée, perdue, tout autant que moi. C'est ma faute, ce qui se passe. J'aurais dû écouter Enzo, et éviter de me rebeller. Mais comment aurais-je pu savoir qu'il frapperait là où j'aurais le plus mal ? Je m'assois à même le sol, torturé par l'idée qu'il ait osé lui faire du mal. Je me sens animé par un sentiment d'extrême impuissance, je n'arrive même plus à parler.
Elle: Je t'en supplie, sors moi de là! Adam pitié, ne me laisse...
Elle ne termine même pas sa phrase que j'entend des cris stridents. À ce moment, la douleur que je ressens, elle est incommensurable.
Moi: Karen? Qu'est-ce qu'il y a!? Karen? Qu'est-ce qu'il t'a fait? Karen!?
Elle ne me répond plus.
Au contraire, j'entend Joe ricaner comme un porc, fier de lui même.
J'ai envie de...
Ahhhhhh!!!
Je vais mourir de rage!
Joe: Comment vous pouvez essayer de me chercher où on a l'habitude de se croiser? Tu vas la revoir dans quelques jours ta copine. Je t'enverrai l'adresse. Si vous faites un scandale, vous coulez avec moi. J'imagine que tu le sais déjà.
Moi: Joe je te jure que...allô! Joe? Merde il a raccroché !
Je détache furieusement le téléphone de mon oreille qui garde encore les souvenirs douloureux de notre altercations. Je reste longtemps à fixer le téléphone, ignorant toutes les questions de mes amis qui fusent. Mon pouls bat à tout rompre et j'ai les mains moites. Juste avant que je ne range le téléphone à sa place, il m'envoie un message. Je me précipite pour l'ouvrir, et j'y vois une photo de Karen, de Ma Karen, le haut remonté jusqu'à la bouche pour former un bâillon, en simple soutif et pantalon, les yeux fermés et très mal en point. Tout son visage est ensanglanté, et le contour de ses yeux est tellement sombres que j'en ai les yeux qui piquent.
.De Joe à moi
Ne t'inquiète pas, je lui donne le plaisir dont elle a besoin. Bonne nuit.
Comment a t il pu...la déshabiller...
Comment a-t-il pu...la frapper... la toucher même...
Je jette le téléphone au sol, envahi par la colère, la haine, haine envers la terre entière, envers Joe. L'appareil se décompose au sol, l'écran en mille morceaux et la coque sévèrement endommagée. Le choc un peu passé, je le ramasse, le cœur brisé que ce téléphone puisse être le dernier souvenir de la fille que j'aime...
Ce que je vais faire à Joe pour la revoir à tout prix...il ne peut même pas imaginer. S'il le savait, il me la rendrait immédiatement.
Bryan : Alors, qu'est-ce qu'il dit?
Je tourne le visage vers mon ami qui affiche une mine inquiète alors que moi j'ai des yeux rouges de colère.
Moi: Ce connard m'a dit qu'il va faire signe dans quelques jours. Je vais lui faire sa fête à cet abruti, il ne va pas s'en tirer comme ça...
Je me rassois là, et, silencieux, les deux mains sur les cheveux, je me demande que faire :
Rentrer simplement au campus et s'avouer vaincu jusqu'à ce Joe se manifeste ou continuer coûte que coûte les recherches?
Une chose est certaine : De la libérer et de faire payer Joe, je me le jure. Et pour cela, je serai prêt à tout.
Absolument tout.
A suivre...
Vous proposez quoi?
Bisou dilemme💖💮!
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