Elle se rapproche de lui, tous les deux ne se quittant plus des yeux. La température monte d'un cran, et la sueur  leur coule sur le torse, sans qu'ils en aient cure, l'esprit centré sur ce qu'ils s'apprêtaient à faire. Une histoire commençait à s'écrire dans l'intimité impromptue que leur offrait l'ascenseur, intimité rompue lorsque soudainement, les lumières se rallument et l'ascenseur se remet en route.

-Putain, ils pouvaient pas attendre un peu! Grogne Adam, énervé qu'ils n'aient pas terminé ce qu'ils avaient commencé.

-Heureusement que je suis encore habillée, se rassure Karen, plus ou moins soulagée qu'ils se soient arrêtés à temps.

-T'as vu ta tête merdique?

-Sérieux ?

Elle profite de la descente un peu trop précipitée à son goût de l'ascenseur pour s'arranger de la tête aux pieds. Elle lisse ses cheveux, fait descendre sa jupe devenue un peu trop vulgaire et fourre son haut rose, tout cela sous les yeux d'un Adam devenu soudainement lunatique.  Les portes s'ouvrent enfin pour laisser passer un vent frais, se substituant à la hausse de température, comme s'ils venaient de sortir de prison, des dizaines de paires d'yeux les dévisageant.

-Je me demande bien à quoi ils pensent ceux-là, dit-elle pour baisser la pression.

-Bryan et Ariane nous cherchent depuis un quart d'heure, répond Adam en consultant ses derniers messages. Elle dit qu'ils sont sur la grande place.

-Allons-y alors.

                                           *

-Où vous étiez passés, on vous a cherché partout ! S'exclame Ariane en les voyant arriver.

-N'exagérons rien, on vient à peine de se dire qu'on les avaient pas vu depuis un bout, avoue Bryan.

-Bon ok, j'avoue. Mais vous étiez où?

-On s'est retrouvé coincé dans un ascenseur.

-Comme dans les films où la meuf rencontre son âme sœur par ''miracle". Adam? Interroge Bryan, suspicieux.

-J'ai été un ange, juré, répond Adam en levant les deux mains.

-Tu as trop la chance la chance Ari, toi au moins t'as pas eu à supporter un con toute la journée, crache Karen en fond sonore.

-T'as pas idée à quel point Bryan aussi a pu être chiant aujourd'hui, dit Ariane. Ils se sont entendus pour l'être ces deux-là.

-Toi non plus, glousse Bryan en l'embrassant.

-Beurk les amoureux, attendez qu'on dégage d'ici !

-On reste encore un peu ou on rentre les amis ? Demande Ariane.

-Il est à peine dix-sept heures, et je sais pas vous, mais j'ai super faim.

-Comme d'habitude Karen, comme d'habitude, dit Adam.

Karen le fusille du regard, des sérieuses envies de meurtres sur les paupières.

-Ouais, t'as raison. Et il y a de quoi bouffer pas loin. En plus il y'a un concert géant ce soir, c'est clair je reste ! Conclue Bryan.

-C'est une pizzeria seulement que j'ai vu, et Ariane est végétarienne, fait remarquer Adam.

-On peut faire une exception, j'ai tellement la dalle ! Lâche Ariane, se tenant le ventre de faim.

Ils décident finalement de rester et se rendent dans la pizzeria la plus proche où ils restent jusqu'à ce que commence le giga concert qui était au programme sur la place des Bois, au centre du parc.

                                    *

Minuit. Ils viennent d'arriver. Sur le campus, certains étudiants déambulent. Certains main dans la main ou en groupe, d'autres seuls.

-On vous laisse ici, les enfants, On va passer par ici, dit Bryan.

-Doucement Bryan, j'ai envie de la retrouver vivante demain, dit Karen.

-Je te retourne le souhait marmotte.

-Aucun risque Brichouchou.

-Brichouchou? Appuie Adam, moqueur.

-Karen je vais te tuer, répond Bryan, faussement en colère.

-On peut pas faire pire comme surnom, souligne aussi Ariane, un chouya jalouse.

-On vous laisse je suis crevée, à plus les tourtereaux! Lance Karen en fuyant déjà.

-A plus!

-Eh, mais attend moi! L'interpelle Adam en lui emboitant le pas.

Ils partirent deux à deux dans des directions opposées.

-C'est trop beau l'amour tu ne trouves pas Adam? Demande Karen après qu'il l'ait rattrapée, un peu lunatique.

-C'est utopique. Tu essuies les défauts de l'autre et tu finis par te retrouver dans la galère.

-T'es pessimiste...mais t'as pas tort. Tu t'y connais assez on dirait.

-Non, juste quelques expériences.

-Et t'as jamais eu l'impression que tu t'es trahi?

-Comment?

-Se rendre compte qu'on aime alors qu'on se dit cœur de pierre.

Il s'arrête et la regarde. Elle fit de même et se retourne pour croiser son regard.

-Si.

La lune dessinait son reflet dans leur iris, et les battements de cœur étaient les seuls à être de concert cette nuit silencieuse. Elle sourit et reprit sa route.

-J'ose te rappeler au passage que tu me dois un gage, rappelle Adam.

-J'ose te rappeler que ce n'est pas de ma faute si l'ascenseur s'est remis en marche.

-Je m'en fiche totalement.

-Pas moi.

Elle poursuit son chemin, impassible, déterminée, les mains dans les poches, faisant exprès de marcher plus vite délibérément pour ne pas avoir à subir le magnétisme qu'éveillait en elle Adam.

                                   *

Une fois rentrée, elle se débarbouille rapidement, tire les rideaux et se met à la fenêtre. Elle contemple avec admiration la magnificence de cette éclatante pleine lune. 

-C'est vrai qu'elle est très belle ce soir, cette lune. Elle dégage quelque chose d'intense tu ne trouves pas ? Lui susurre une voix posée par dessus son épaule.

Elle se retourne et tombe nez à nez avec Adam, les traits difficilement déchiffrables. Leurs visages étaient proches, leur respiration se chevauchait, laissant naitre mille et une pensées charnelles.

-Tu aurais pu être plus pudique que de rester en simple boxer...Lui fait-elle remarquer d'une voix suave.

-Toi aussi, avec ce simple pyjama...

Elle se mord la lèvre inférieure en regardant vers le bas, perturbée, et il l'embrasse. Elle mit sa main en séparation et le fait reculer de quelques centimètres, bloquée qu'elle est contre le mur.

-On n'a pas le droit Adam. J'ai mes principes, je te l'ai déjà dit.

-Arrête de faire ça, ça me rend dingue que tu te mordes la lèvre comme ça.

-Je peux pas le faire, tu le sais très bien.

-T'as une mauvaise habitude.

-Laquelle?

-Tes yeux et ton corps ont l'habitude de parler à ta place.

-Et ta copine In...

-Chut, dit-il en mettant son index sur ses lèvres. Je veux pas entendre son nom. Je ne l'aime pas, tout le monde le sait. On est ensemble pour l'apparence. C'est toi que je veux.

Dubitative, son front se froisse d'incertitude, le faux se mêlant au vrai. Adam, était-il sincère ? Où jouait-il encore une fois un rôle ? Allait-elle être à nouveau le docile mouton d'un homme pour un amour qui n'était peut-être pas réciproque ? Fallait-il franchir le pas ? Elle avait des principes, oui, mais cette envie là, elle ne la contrôlait pas suffisamment pour trouver la force de le repousser. 

-Je ne veux pas aller plus loin Adam même si j'avoue avoir été un peu fort ce matin, restons-en au baiser, lui murmure-t-elle finalement. 

Il baisse la tête, et la remonte immédiatement pour la dévorer d'un regard dévastateur.

-On n'en trouve plus, des filles comme toi. Je ne me suis pas trompé. Tu as effectivement une grande valeur, lui dit-il sur un ton profond.

Il lui prend le menton et elle se laisse embrasser, aux anges qu'il la voit comme ça. Il y met toute la douceur du monde, craignant de déroger à la règle. Mais il est rapidement envahi d'une fougue qu'il ne tarde pas à lui faire sentir par la puissance de ses lèvres.

-Je respecte ton choix, et je n'irai pas plus loin, sois en rassurée.

Il la libère et se fourre dans son lit, croisant les cuisses pour empêcher son membre de révéler au grand jour ce qu'elle éveille en lui et le pousse même à regretter de devoir s'abstenir à la toucher.

Elle fait de même, le bas-ventre un peu humide, mais sûre d'avoir pris la bonne décision. Mark, c'était autre chose. C'était cruel de faire croire à Adam qu'elle était réticente à tout rapport alors que ce n'était ni plus ni moins ce qu'elle faisait au seul claquement de doigt de Mr Karlsen. Elle ne ressentait rien de tout ça avec lui. Mais au stade où elle en était, elle se devait de sauver le peu de dignité qui lui restait. Tout cela serait bientôt fini, Mark appartiendrait à son passé et elle dirait toute la vérité.

Mais ce baiser la chamboulait tout de même. Parce qu'il était frénétique, particulier, et révélateur.
Seul gigantesque dilemme de cette soirée épique : D'où lui venait ce plaisir qu'elle savait interdit: De son colocataire à croquer, de Mark et de ses exigences non puériles, ou d'elle-même et de son lourd secret?

A suivre...

Chapitre suivant ou chapitre suivant?

Bisou suivant💖💮!