Je le repousse tout doucement en posant la main sur son torse.

Moi : Je savais que je n'aurai pas dû venir. Je pense qu'on devrait y aller non ?

Lui : Je t'ai amenée ici pour qu'on puisse parler tous les deux, sans les avoir sur le dos.

Moi : Parler de quoi ?

Lui : De nous.

Moi : Tu ne crois pas que ça déjà été le cas Adam ? Oublie tout ce que j'ai pu te dire la dernière fois, je n'étais pas moi-même.

Lui : C'est impossible Zhéma, pas tant que je le lirai dans tes yeux.

Moi : Qu'est-ce que ça change...tu avais raison quand tu disais que c'était une erreur. Quand tout ça sera terminé, je disparaitrais de ta vie pour de bon. Tu vas te remarier, trouver la femme parfaite et lui faire des gosses. C'est mieux pour tout le monde.

Je me retourne après mon monologue et me dirige vers le bord pour remonter.

Lui : C'est toi que je veux Zhéma, pas une autre.

Je me fige sur place et laisse ses mots m'atteindre en plein cœur. Moi...

Lui : J'ai eu tort, tu sais. Tort de dire que c'était une erreur.

Je sens quelques larmes picoter mes yeux, mais je me pince la lèvre pour garder mon calme.

Lui : La vérité, c'est que je ne t'ai jamais oubliée tout ce temps. La vérité, c'est que je t'aime toujours Zhéma. Je t'aime à un point que tu ne peux pas imaginer.

Je me raidis sous le poids de l'émotion. Il m'aime...il vient de me le dire ouvertement, sans détours.

Je me retourne et croise son regard profond qui appuie ses mots.

Ce même regard, cette même empreinte d'amour qu'il y a six ans, cette même passion, cette flamme qui nous consumait, l'aurait-il toujours gardée allumée pour...moi ?

Elle se retourne vers moi, la lèvre pincée et les yeux larmoyants. Elle est à à peine un mètre, l'air profondément accablée par ce que je viens de dire.

Elle : D'un ton sec. Sache ce que tu veux.

Moi : Je...

Elle : Je ne sais plus quoi penser quand je suis avec toi Adam. Un jour tu es distant, et le jour qui suit, tu m'embrasses comme si de rien était et vice-versa. Je n'arrive plus à comprendre.

Moi non plus je ne savais pas ce qui m'arrivait. Ces derniers temps, ça été le déni total dans ma vie.

Pendant qu'elle parle, je sens que ses larmes sont au bord de la chute, dans l'attente de ma réponse.

Je ne supporte pas de la voir comme ça, ça me brise le cœur. Mais j'ai besoin de lui dire ce que j'ai vécu tout ce temps sans elle. Qu'elle sache la vérité.

Moi : Je sais que je suis étrange ces derniers temps avec toi Zhéma. Je le sais, mais c'est maintenant que je sais pourquoi.

Je me rapproche un peu pour qu'elle n'ait pas envie de s'éloigner de moi encore une fois. Elle reste stoïque, les yeux rivés vers l'eau.

Moi : Le jour où j'ai mesuré à quel point je t'aimais, c'est quand je suis passé te voir à l'hôpital. Le fait de te voir dans cet état à cause de moi m'a fait un choc. Un choc tellement grand que dès que j'ai mis les pieds dans ma chambre, j'ai pleuré comme un gamin. Je m'en voulais tellement que j'en ai perdu l'appétit, le goût de vivre même. Le pire, c'était de ne plus pouvoir te voir, ni te parler quel que soit le moyen, ils me l'avaient interdit. Il ne s'est pas passé une seule journée sans que je ne pense à toi ces deux ans. Quand j'ai su que tu sortais enfin, ça été l'un des plus beaux jours de ma vie. J'étais caché pas loin quand Samy est venu te chercher, je voyais enfin ton visage. Mon esprit jusque-là nourrit de souvenirs a capturé pour toujours le sourire que tu avais ce jour-là.

Pendant que je parle, je ne peux m'empêcher de sourire en y repensant.

Moi : Tu ne peux pas savoir à quel point j'étais surpris et heureux le jour où je t'ai croisé au cimetière. Je ne savais même pas comment t'aborder.

Elle : En souriant, un peu gênée. Moi aussi j'étais complètement bouleversée ce jour-là.

Moi : Crois-moi je l'étais plus que toi.

Elle rit timidement et relève enfin la tête vers moi.

Moi : Après notre petite discussion dans le parc, je renaissais. Tu m'as dit que tu m'as pardonné, je t'ai même prise dans mes bras...

Je renifle un peu en disant ça.

Moi : J'avoue, je dois avoir l'air tchip là.

Elle rit encore, de ce rire que j'adore.

Elle : Fais pas attention, continue, je t'écoute.

Sa voix apaisante me rassure, et me pousse à continuer.

Moi : Je pensais avoir enfin tourné la page. Mais tout a changé quand je t'ai revu à la réunion, qu'on s'est reparlé dans mon bureau, pire, quand on a commencé à travailler ensemble. Pourtant la moindre des choses que je me demandais, c'était de garder mes distances pour ne pas te faire souffrir encore une fois. Mais je n'y arrive pas, même en passant mes journées à travailler pour t'oublier, t'éviter.

Je m'approche un peu plus et prend ses joues entre mes mains.

Moi : Quand je te vois, si je ne deviens pas froid, mon envie de te prendre contre moi, t'embrasser même devient incontrôlable. J'ai besoin de ton omniprésence dans ma vie Zhéma.

Elle : La dernière fois, tu pensais ce que tu disais ? La veille du mariage ?

Moi : Je voulais m'éloigner définitivement, bannir mon amour pour toi une bonne fois pour toute.

Elle : Adam, tu ne te rends pas compte qu'en le faisant, tu m'achèves complètement...

Cette fois, ses larmes coulent vraiment. Avec mon pouce, j'essaie de les balayer et colle mon front contre le sien pour l'apaiser.

Moi : C'est pour ça que je ne veux plus lutter.

Elle : Faiblement. Comment tu peux être sûr que c'est Zhéma ou Karen que tu aimes ?

Moi : C'est celle à qui j'ai passé l'anneau que j'aime.

Je lui prends la main et touche la bague qui est à son annulaire pendant qu'elle perd ses doigts dans mes cheveux, dans mon cou.

Elle : Je t'aime aussi Adam. J'en ai assez de faire semblant, je veux être ta femme, pour de vrai...

Moi : Tu l'es depuis longtemps à mes yeux. La seule que j'aime plus que tout.

Nos regards se portent mutuellement sur nos lèvres, tremblantes d'envie. Elle ferme les yeux, consentante à mon geste futur.

Là, sous l'œil attentif du soleil couchant, je l'embrasse enfin. Plus rien n'existe à part elle, nous. Ce baiser se veut passionnel, le plus délicieux de ma vie, empreint d'un amour trop de fois refoulé.