- No soy...

Sofia se stoppa. Elle ne pouvait pas se mentir à elle-même plus longtemps. Elle devait se confronter à la dure réalité. Il avait raison. Elle était un monstre. Elle avait tué quelqu'un.

En face d'elle, Anthony voyait sa future femme en proie à des pensées assassines.  Deux forces contradictoires semblaient lutter dans son regard vide. Le pauvre jeune homme s'inquiétait, mais il ne pouvait rien faire. Il n'était que spectateur de la situation. Il ne comprenait pas, ne comprenait rien. Les révélations faites auparavant avaient déserté son cerveau, une seule idée l'obsédait. Sortir. Sortir de ce hangar, sortir de cette situation, sortir de l'emprise de cet homme. Il devait sortir. Se libérer.

Pendant ce temps, la rouquine reprenait petit à petit ses esprits. Elle ne devait pas abandonner, se dit-elle. Elle devait rester forte. Pedro allait continuer à la dénigrer jusqu'à l'épuiser mentalement. Jusqu'à ce qu'elle se tire une balle, probablement.

Son attention fut attirée par les mains d'Anthony qui s'affairaient derrière la chaise depuis un moment. Il dessinait un mouvement circulaire avec ses poignets et les écartaient au fur et à mesure. Il essayait de se détacher. L'espoir refit surface en la jeune femme. S'il réussissait, il était assez près  du malfrat pour le prendre par surprise et le déstabiliser.

Malheureusement, le plan échoua instantanément. Pedro s'aperçut du manège et tira un coup sec sur les liens du garçon. Ils étaient de nouveau resserrés à leur maximum. Assez content d'avoir déjoué le plan, l'espagnol vint se rasseoir sur la chaise, non sans avoir auparavant vérifié les poignets de Sofia.  Cette dernière gardait la tête baissée. Sa couette lui tombait devant le visage, et le dissimulait en partie. C'en était fini d'eux, elle en était désormais consciente. Dans un film, les flics auraient débarqué, avertis on-ne-sait-comment, et ils auraient été sauvés in extremis de ce psychopathe. Mais la vie n'est pas une série télévisée, elle l'avait compris bien assez tôt. 

Elle releva doucement la tête, espérant croiser le regard de son petit-ami. C'était le signal que Pedro attendait.