18 - Mouse Trap

Hello !

C'est encore moi ! Comme promis, nous retrouvons Abaddon Tahir pour ce chapitre... où on va reparler de grosses machines. Caillou est en train de traduire le chapitre suivant, et je peux vous dire qu'il râle... énormément. J'espère juste que tout ça vous plaira !

Merci à ceux (celles, je crois) qui ont laissé des reviews ainsi que des votes : je leur ai déjà dit, mais ça m'aide à la fois à construire le scénario et à voir où je dois apporter des corrections.

N'hésitez pas à me dire ce que vous avez compris/pas compris du chapitre qui vient, il se peut qu'il soit un peu trop flou.

En espérant qu'il ne vous ennuie pas !

Sea

*

Quelques heures plus tôt, dans la nuit.

Abaddon Tahir  avait reçu un appel pressant, sur ce qu'il appelait sa « ligne rouge ».  Un appel au secours, provenant de son usine principale, en banlieue  parisienne. L'un de ses employés, paniqué, avait apparemment fait une erreur monumentale  et suppliait son patron de se déplacer. Or, tous les subalternes de  Tahir savaient quel était le prix à payer pour une erreur. Et ils  savaient également que ce prix était majoré par l'agacement possible du  milliardaire. À deux heures du matin, soit l'employé de Zenvolf Corporation qui avait osé composer le numéro de la ligne rouge était suicidaire, soit il avait réellement commis une faute épouvantable.

Soit,  comme le comprit Abaddon Tahir en se retrouvant face à face avec Jérémy  Dupré, dans l'usine vide, le dit employé lui avait tendu un piège.

- Dupré, je vous ai déjà dit que votre congé maladie pour choc post-traumatique avait été accordé.

Du  haut de son mètre quatre-vingt cinq, il toisa Jérémy Dupré, l'homme qui  avait failli mourir écrasé par un accès de folie – ou de fatigue,  l'enquête piétinait... – de Romain Durant.

- Pour le reste, voyez avec nos avocats.

- Allons, Tahir... sourit Dupré d'un air suffisant, pas de ça avec moi.

Abaddon  Tahir soupira longuement et, de la main gauche, tâta son long manteau  de velours noir. La crosse du SIG Sauer 1911 qu'il portait par devers  lui le rassura, mais pas le rictus amusé de Dupré.

- Oh... allons, Tahir ! On est entre nous !

- Vous  allez me faire le plaisir de cesser vos familiarités, Dupré. Et je  vous conseille de vous avancer, vous savez que cette plate-forme est en  réparations.

- Et que si je tombe, c'est droit dans la broyeuse, hein, Tahir ? ricana l'homme. T'es pas con, tu sais.

Abaddon  sentit une sueur froide glisser dans son dos. Et il détestait cette  sensation. Sans manifester la moindre émotion, il pinça les lèvres :

- Je  mettrai ceci sur le compte du choc psychologique, mais je doute qu'en  tenant compte du dit-choc, vous puissiez encore longtemps travailler  pour nous. À présent que voulez-vous.

- Oh, relaxe, Tahir. Et arrête de caresser ton flingue comme ça, ça commence à me donner des idées...

Abaddon  Tahir fronça les sourcils. Il y avait autre chose. Ce n'était pas de la  folie, ni du ressentiment. Il y avait autre chose. Dupré tentait de  jouer avec lui. Avec ses nerfs. Le PDG comprit, sans pouvoir se  l'expliquer, que son .22 long rifle ne lui serait d'aucune  utilité. Il observa encore une fois le visage de son employé, qui se  tenait toujours sur la plate-forme grillagée, au-dessus de la broyeuse.  L'homme d'affaire fit glisser la langue sur ses lèvres et ferma les  yeux.

- D'accord, murmura-t-il. C'est comme ça...

- T'as compris ? caqueta Dupré en applaudissant. T'as compris ? C'est bon ?

- Mon père me sous-estime donc tant ?

- Tu dis ça pour moi ? Pas très sympa, Tahir...

Abaddon  laissa échapper un rire, un rire froid. Il avait compris et bien que la  situation n'eut absolument rien de risible, il avait en conséquence le  sentiment d'en être redevenu maître.

- Tu rigoles, là ? Pourquoi ?

- Si père est obligé d'envoyer une ridicule marionnette comme toi, cela signifie que j'ai gagné.

- Gagné ? Gagné quoi ?! Tu nous as humiliés, c'est ça que tu voulais ?!

Dupré vit Tahir avancer imperceptiblement :

- Fais gaffe, Tahir : il y a des caméras paaaartout ! Il va falloir choisir, maintenant !

Abaddon  vit son employé avancer le bras et lancer la broyeuse, qui s'activa  dans un vacarme épouvantable. Il était pratiquement impossible  d'entendre quoi que ce fût, à présent. Tahir comprit qu'il avait été  piégé, affreusement piégé. Bien sûr, songea-t-il. Son père n'allait  certainement pas accepter d'être bon joueur, surtout s'il devait perdre.

- Tu  reviens, Tahir ? s'égosilla Dupré en s'adossant à la rambarde  métallique, au-dessus de la broyeuse dont les pales s'entrechoquaient  avec violence. Tu laisses tomber ?

- Jérémy ?

Une voix de  femme s'était élevé dans l'usine, en contrebas. Abaddon Tahir vit une  inconnue, qui avait jeté à la hâte un manteau sur sa robe de chambre  rose, avancer sous la passerelle métallique où il se tenait. En voyant  la position dangereuse de Jérémy Dupré, elle hurla :

- JÉRÉMY !

Une  douleur sourde vrilla les tempes de Tahir. La voix traînante de Dupré  résonna dans sa tête, alors que l'employé souriait méchamment :

« Chouette  nénette, hein, Tahir ? Je te la laisse, si tu veux. Elle est très  inventive. Non ? Tu veux pas ? Bon. Je vais devoir faire mon deuil, je  l'avais carrément demandée en mariage ! »

Abaddon vit alors  Dupré tourner le visage vers la jeune femme éplorée dont l'état mental  virait lentement mais sûrement à l'hystérie. Il vit les iris bruns de  son employé virer au jaune vif. Abaddon Tahir savait ce à quoi cet  indice était précurseur, et bien qu'il n'eut aucune bienveillance à  l'égard de la fiancée de son employé, il savait qu'il serait responsable  de tout ce que Dupré risquait de commettre dans les instants qui  allaient suivre. Parfaitement conscient qu'il se jetait tête baissée  dans un piège mortel, le treizième célibataire le plus convoité du monde  bondit en avant afin d'arrêter Dupré. Il voulut seulement le plaquer au  sol, mais Jérémy Dupré, dès que les mains de Tahir l'effleurèrent,  cligna de l'œil à son intention et se jeta sur la rambarde, qui lâcha.  Abaddon eut tout juste le temps de se jeter sur le côté avant de voir  son ex-employé réduit en bouillie entre les pales de la broyeuse.

En contrebas, la fiancée s'était effondrée, inanimée.

Tahir  se releva lentement, conscient de l'épouvantable cabale dont il venait  d'être victime. Il jeta un coup d'œil aux caméras, dans son dos, dont  les diodes rouges indiquaient qu'elles avaient tout filmé. Abaddon  épousseta ses vêtements et soupira :

- Six fois... Je ne me contenterai pas de six fois...

Il jeta un rapide coup d'œil à la fiancée évanouie et retroussa les lèvres :

- Il aurait pu trouver mieux.

Puis il tira un smartphone de sa poche et composa un numéro d'un air impatient.

- Lukosdulus ? Vous m'entendez ?

Tahir écrasa le bouton d'arrêt de la broyeuse.

- Et  maintenant ? Bien. Mon père a une fois de plus triché. Non, pas de  mort, vous vous en doutez. Encore six, oui. Oui, dans la broyeuse. Je  sais. Oui, un témoin. Une femme. Non, vous savez que je n'en ai pas le  droit. Voyons, Lukosdulus !

Abaddon Tahir soupira et passa une main sur sa courte barbe :

- Vous  vous souvenez de cette femme très irritante ? La Liliputienne, oui. Je  pense qu'elle ferait l'affaire, elle est terriblement brillante, pour  une femme. Non, je ne veux pas tronquer ne serait-ce qu'un centième de  ma fortune pour soudoyer un juge imbécile, Lukosdulus, réfléchissez cinq  minutes ! Je n'ai pas touché ce type, il est tombé. Comment ça, j'ai pu m'énerver ? Lukosdulus je ne me suis pas énervé,  mais je risque de... Là, c'est vous qui me tapez sur le système  Lukosdulus ! Oui, l'enveloppe charnelle est là. Un peu partout sur la  broyeuse et la rambarde, en fait. Oui, sur mes chaussures. D'accord.  D'accord. Bien. Je sais, oui. Peu importe, tout ce qui compte, c'est que  je sois innocenté avant que Wall Street ne me tranche la gorge !

L'interlocuteur d'Abaddon Tahir ajouta quelque chose qui fit s'assombrir le regard du magnat :

- Parfois, Lukodulus, fit le PDG, je me demande si vous ne travaillez pas pour mon père.

Tahir  raccrocha et relança la broyeuse. Il y jeta le téléphone portable, et  les composants électroniques de pointe vinrent se mêler à la chair et aux  tissus déchiquetés. Sans se soucier d'éteindre quoi que ce fût, Abaddon  mit la main dans les poches et s'engagea tranquillement vers la sortie.  Un grand chat de gouttière miaula dramatiquement depuis les toits de  l'usine lorsque Tahir se retrouva dehors.

- Quel mauvais joueur, murmura-t-il simplement.

*

A suivre...

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