Chapitre 11
- Bon, vous voulez voir quoi ? interroge Julien.
- Pourquoi pas ce film-ci, réponds ma meilleure amie. Il a l'air plutôt pas mal. Et puis, quoi de mieux qu'un film romantique pour notre premier rendez-vous à quatre ?
- Ah non hein, tu veux toujours voir ce genre de films, à chaque fois j'accepte mais cette fois-ci, c'est trop ! s'exclame Ju.
- Mais allez, mon ange, s'il te plait, le supplie-elle.
- J'ai dit non, c'est non, et pas la peine de faire tes yeux doux !
- Si c'est comme ça je m'en vais.
Adam et moi regardons la scène sans vraiment réaliser ce qu'il est en train de se passer mais lorsque Clémentine quitte réellement la scène, enfin, mon angle de vue, quelque chose se débloque dans ma tête et je pars à sa poursuite.
- Clem, attends ! tenté-je.
Mais elle ne réagit pas. Je me mets alors à courir le plus vite possible, ce qui se résume à la marche rapide d'Adam. Celui-ci me dépasse déjà à grandes enjambées et arrive, avant moi évidement, aux côtés de notre amie.
Quelques secondes plus tard, j'arrive à mon tour au près d'eux et commence à essayer, j'ai bien dit ESSAYER de raisonner la fille la plus bornée de tous les temps. Pendant ce temps, Adam retourne faire de même avec Julien.
- Sérieux Clem ? Pourquoi tu t'es énervée aussi facilement ? C'est pas ton genre, que ce passe-t-il ?
J'entends un petit *SNIF* à ma droite
Mais mais mais... Elle pleure !
Je la prends dans mes bras et lui susurre calmement :
« - Hé, Clem, calme-toi, chut, ça va aller, je suis là, raconte-moi tout. Qu'es-ce qu'il se passe. »
- C'est... C'est, intervient-elle avant de replonger dans ses sanglots.
- Chut, calme-toi ma puce, calme-toi, dis-je en lui faisant des papouilles dans les cheveux.
Je sais qu'elle adore ça, les papouilles. Ça la calme et la réconforte de ouf. C'est un peu ma façon à moi de la calmer.
J'ai du étudier cette technique pendant près de dix ans avant qu'elle soit au point ! Et ça restera mon petit secret à moi, je veux que personne d'autre ne puisse la rassurer autant que moi.
Comprenez-moi, ça fait des années que je travaille là-dessus ! Mais c'est aussi parce que c'est une des personnes, si pas la personne que j'aime le plus au monde et je déteste la voire souffrir. Et je sais aussi que les autres sauront aussi la consoler très bien, mais ces papouilles là, ce sont les miennes, et je ne les utilise que sur Clémentine parce qu'il n'y a qu'elle qui les mérites autant.
Oh putain ce que j'aime cette fille !
Enfin bref, lorsque celle-ci s'est calmée grâce à mes papouilles magiques, elle se met à parler.
- Je ne sais pas pourquoi j'ai craqué aussi facilement, commence-elle.
- Tu sais, depuis une semaine, je fais n'importe quoi, je ne suis plus moi-même, continue-elle. C'est comme si depuis que tu n'es plus auprès de moi, je ne sais plus me contrôler.
Cette petite phrase me met le baume au cœur.
Lorsque Clem est complètement remise de cette petite baisse de régime, nous retournons toutes les deux vers les garçons qui s'étaient assis sur un de ces fameux sièges rouges en velours typiques aux cinémas.
- Pardon Ju, je suis vraiment désolée, s'excuse-elle en arrivant devant celui qu'elle aime.
Clémentine se tient debout, avec les épaules un peu baissées en avant. Cette posture me fait penser à un enfant qui demande pardon à sa mère parce qu'il a très bien conscience de la bêtise qu'il a faite.
- C'est rien, je te pardonne, dit Julien en prenant sa copine dans ses bras et en lui faisant un petit bisou sur le front.
Ils restent tous deux dans cette position plusieurs longues minutes tandis qu'Adam et moi les regardons. Ils sont si mignons ensemble. J'espère que leur relation durera encore longtemps.
***
Tandis que le film touche à sa fin, je remarque que la main de mon copain se trouve sur ma cuisse, je ne sais même pas quand il l'a posée, je ne l'avais même pas remarqué, j'étais trop absorbée par le film.
Alors je m'en veux, et si je l'avais vexé ? Et si je n'étais pas une assez bonne copine pour lui ? Et si notre premier rendez-vous n'était pas assez bien ?
Toute une multitude de questions se bousculent dans ma tête. Mais quelque chose me sort de cette tempête, une voix.
- Val... Le film est fini hein, me rappelle-Clem interloquée.
- Oui, oui, je... On y va, marmonné-je.
Je me lève et vais me glisser sous le bras d'Adam, toujours sous le choc.
Le choc de quoi ? Eh bien je ne sais pas, c'est comme si j'étais dans la lune, un énorme brouillard s'est emparé de moi en même temps que l'ouragan de questions.
***
Lorsque nous sommes arrivés dans ce petit restaurant de basse qualité au bout de la rue du cinéma, le serveur nous installe sur une table dans un coin.
Je ne mets que très peu de temps à remarquer qu'à l'autre bout de la pièce se trouve la copine de mon frère, Noémie, et sa bande, qui contient la fameuse Emma, celle que Gabriel convoitait tant il n'y a pas si longtemps.
Je dis donc bonjour à Noémie avec un simple signe de la main. Celle-ci me répond en souriant. Elle se lève et traverse la pièce jusqu'à se trouver en face de moi. Elle vient me parler un peu de mon rétablissement surtout, mais après nous divaguons et partons dans différents sujets jusqu'à ce qu'arrivent les deux inséparables que les filles attendaient, Gab et Théo. Ce dernier prend mon interlocutrice par la taille et lui glisse un petit bisou dans le cou après avoir soigneusement repoussé les beaux cheveux blonds de sa belle.
- Oula, c'est chaud ! intervient-Ju pour rigoler.
Je n'avais jamais vu mon frère comme ça avec une fille, ce geste là, il me l'a déjà fait un bon nombre de fois, que ce soit pour faire écarter un mec relou en soirée ou simplement comme ça, pour me montrer un peu d'affection. Mais jamais, il ne l'avait fait comme ça, c'était... différent.
- Bon, je te laisse Val, on va y aller maintenant que les garçons sont là, lance Noémie. On se voit bientôt ?
- Ouai, à plus, dis-je en me rasseyant auprès de mes amis.
À peine assise, Adam passe son bras autour de mes épaules (eh oui, encore et toujours).
- C'était tendu ici, non Ad ? demande Clémentine.
- Ouai, j'ai cru que vous alliez vous entretuer, intervient Julien.
Je sens Adam se crisper, il a resserré son emprise autour de moi.
- Oh, j'ai pas senti, il s'est passé quoi ? questionné-je en me tournant vers mon copain.
- Rien, coupe celui-ci.
Nous nous sommes regardés avec les autres et nous sommes mis d'accord pour ne plus évoquer le sujet. Et tout ça rien qu'avec des regards ! C'est fou ce qu'on est connectés tous les quatre.
Le reste du repas s'est déroulé sans accroches, c'était parfait. Les éclats de rire réguliers du groupe de mon frère à l'autre bout de la pièce me faisaient sourire. Et je ne dis pas que mes amis ne sont pas drôles, au contraire ! Je me suis vraiment bien amusée dans ce petit restaurant.
Lorsque nous nous levons pour partir, Théo le grand frère trop protecteur se lève aussi et viens nous rejoindre.
- Valou, tu veux que je te ramène ? propose celui-ci.
- T'inquiète mec, je la ramène, enchaine Adam.
Mon frère me demande du regard si je suis en accord avec cette décision et je lui réponds que oui.
- T'inquiète, il conduit bien, tu n'as aucuns soucis à te faire, ajouté-je pour rassurer Monsieur Delmot trop protecteur envers sa petite sœur adorée.
Il me fait un petit bisou sur le front et me dit bonne nuit avant de retourner à sa table.
***
Dans la voiture, je tente le diable en posant au conducteur la question que mes amis lui avaient posé plus tôt dans la soirée : « ce qu'il s'est passé entre lui et Gabriel »
- C'est que depuis l'épisode de l'hôpital, commence-il, tu te souviens ? La fois où tu es arrivée dans le couloir et que tu es tombée... Deux fois... Eh bien depuis lors, je ne le supporte plus, si tu savais ce qu'il m'a dit ce jour là !
- Mais vas-y dit moi ce qu'il t'a dit ce jour là, demandé-je calmement sans le brusquer.
- Ses mots tournent en boucle dans ma tête depuis, je n'arrive plus à dormir, j'y repense tout le temps. Ça me hante, bordel !
Il termine sa phrase en s'énervant et tapant sur le volant mais avec une voix qui se brise de plus en plus, comme s'il était sur le point de craquer.
- Alors parle-en moi, je suis là pour ça, continué-je toujours avec une voix douce et réconfortante.
En tout cas, c'est ce que j'essaye de faire passer, car le désir de savoir ce qu'ils se sont dit tous les deux ce fameux jour brule au fond de mon ventre.
Après avoir pris une grande inspiration, Adam se lance avec un tellement haut niveau de rage dans la voix que ça m'effraye.
- « Écoute-moi bien Monsieur Parfait, Valentine n'est pas faite pour toi, et tu le sais très bien. Rappelle-moi un peu comment se fait-il que ce n'est que depuis hier que vous formez un couple, explique-moi comment tu as fait pour la persuader alors qu'a peine une semaine avant, c'est moi qu'elle a embrassé, et à deux reprises. Dis-moi pourquoi tu n'es jamais resté longtemps avec tes anciennes copines, dit moi tout. Ta Valentine chérie ne sera pas longtemps tienne, et ça, tu le sais très bien aussi. »
Il laisse un long blanc durant lequel je ne dis rien non plus avant de reprendre avec une voix qui se brise petit à petit.
- « Tu ne réponds rien ? Allez, donne-moi la réponse à toutes ces questions, elles ont tout un sujet en commun. Tu ne veux vraiment pas laisser sortir ces quelques mots de ta bouche ? Bon d'accord, je le fais à ta place alors. Valentine m'aime. Elle m'aime moi, et ce depuis sa naissance, nous sommes faits pour être ensemble, c'était déjà prédit avant sa naissance. Et toi, tôt ou tard elle te laissera tomber comme une vieille chaussette, et ça t'apprendra, ça t'apprendra à avoir fait trainer si longtemps avant de lui avouer tes sentiments parce que plus tu attends, plus la peine est forte. Mais ça t'apprendra surtout à ne plus jamais te confronter à moi. Tu m'entends ? Plus jamais tu ne t'en prendras à moi, plus jamais tu n'approcheras quelqu'un à qui je tiens, plus jamais t'as compris ? »
Sur ces derniers mots, sa voix s'est complètement brisée, et Adam, l'homme le plus courageux, le plus fort mentalement et le plus résilient que je connaisse était entrain de pleurer. Et qui plus est, à côté de moi, et par ma faute.
Je ne sais que faire pour le calmer ou même pour discuter de ce monologue qui vient de se terminer. Toutes ces paroles redites avec une telle colère ne sont qu'une minime partie de ce qui m'entoure actuellement. Adam pleure ! Mais que dois-je faire dans ce genre de situation, je ne vais quand même pas lui faire des papouilles comme si c'était un chat, il faut que je trouve autre chose pour lui remonter le moral. Mais il est au volant, comment faire ? S'il vous plait, aidez-moi !
- Valentine, sanglote-il, s'il te plait, dis moi que... Que ce n'est pas vrai.
Adam est complètement désespéré, et moi, aussi mauvaise copine que je suis, je ne sais que faire. D'un côté, Gabriel avait un peu raison, mais pas dans ce sens là... Adam et moi, on n'est pas fait pour être ensemble, il est trop bien pour moi. Et puis je ne sais même pas quoi faire pour arrêter les pleurs de celui que j'aime. Je reste là à ne rien dire alors que je sais pertinemment que celui qui se trouve à ma gauche attend que j'ouvre la bouche et que je parle.
Alors les larmes coulent gouttes à gouttes le long de mes joues. Mais ça, Adam ne le sais pas parce que ça fait bien trente secondes qu'il a détourné son visage du mien. Son regard passe de la route à la fenêtre, tout en évitant bien de croiser le mien qui lui, passe de son visage à la fenêtre emplie de gouttes d'eau qui ruissellent de la même manière que coulent les larmes sur mon visage.
Lorsque j'entends son « putain » et sa main qui claque sur le volant, je pose ma main gauche sur sa main droite et me résous enfin à parler.
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