4. Une seule chance.
VALENTINA.
— Tu es complètement folle !
Elle se croit dans un thriller ou quoi ? Son plan est suicidaire et inconscient !
Je fais les cent pas dans le salon, tout en me massant les tempes. Il y a trop de choses qui m'échappent.
— Valentina, on n'a pas le choix.
Je toise ma cousine, toujours assise sur le canapé, ses bras entourant ses jambes pliées. Son air dépité me donne encore plus la nausée.
— Et si on lui parlait ? Et si on essayait de contacter ce... Comment tu as dit qu'il s'appelait, déjà ?
— Il se fait appeler Preto. Tu le retiendras très vite, c'est le futur roi de la drogue à Mexico !
— J'aimerais ne pas avoir à connaître ce genre de choses ! Bref, on ne pourrait pas le convaincre simplement en allant lui parler ?
Paloma émet un rire nerveux. Pendant que je me sens bouilli de l'intérieur, son hilarité ne semble pas vouloir se calmer.
— Je peux savoir ce que j'ai dit de si drôle là ?
— Tu te crois dans une telenovela ? On parle de Preto ! Un putain de dealer ! Tu imagines qu'il va gentiment nous accueillir dans son bureau pour écouter notre plaidoirie en nous offrant des mouchoirs ? Il croira son bras droit, pas deux petites étudiantes.
Sa réaction me vexe, je l'admets, mais il faut reconnaître qu'elle a totalement raison. Cette histoire commence à me donner la migraine.
— Donc, si j'ai bien compris, ton idée, c'est de voler la marchandise de ce Preto ? Et là, tu penses qu'il nous accordera plus de crédit ?
— C'est notre seule chance !
— Tu fais exprès d'être idiote ou il n'y a que moi qui trouve cette idée absolument stupide ? Tout ce qu'on va récolter, c'est une balle entre les yeux !
— Enfin, réfléchis ! On ne peut pas aller voir Preto comme ça. Il faut qu'on ait quelque chose pour lui. Ruben l'a dit lui-même au téléphone : ce soir, à 2 heures du matin, un camion de livraison attendra un de ses complices. On prendra des photos, on aura des preuves de sa trahison. Ensuite, on embarque le camion et on oblige Preto à nous écouter en échange de sa marchandise !
— Tu sais quoi au juste sur ce camion ? Ça me paraît tellement absurde... Je ne sais pas quoi en penser.
Paloma glisse sur le canapé et m'attrape la main.
— Je sais juste qu'une fois qu'on aura ce camion, on aura de quoi faire pression sur Preto. Valentina, il faut vraiment que tu me fasses confiance sur ce coup. Il n'y aura personne au moment de l'échange, juste la cargaison. Si on arrive avant le conducteur, on peut simplement partir avec la marchandise et tout ira bien !
— C'est trop risqué et ça m'a l'air d'être un bourb...
La porte s'ouvre derrière nous.
Paloma et moi sursautons toutes les deux. Mon cœur bat la chamade, mais mes yeux tombent seulement sur Abuelita dans l'encadrement de la porte. Un sac de courses à la main, elle nous dévisage avec une tendresse mêlée d'inquiétude. J'échange un regard affolé avec Paloma. Est-ce que ma grand-mère a entendu notre discussion ?
— Ah, Paloma, ta mère vient de m'appeler pour vérifier que tu étais ici. Tu comptes dormir à la maison ce soir ?
Abuelita s'avance en boitant comme à son habitude et accueille ma cousine avec un sourire doux. Paloma, elle, secoue la tête doucement, légèrement fuyante.
— Non, Abuelita, je... je ne peux pas. Je dois rentrer, j'étais juste passée discuter avec Valentina.
La déception transparaît une seconde dans le regard de ma grand-mère, puis elle lui répond d'une voix un peu plus sévère :
— Mi guapa, ça fait un moment qu'on ne t'a pas vue, tu sais. Tu nous manques, à ta mère et à moi. Tu travailles bien trop.
Paloma pince les lèvres, puis baisse les yeux, incapable de soutenir le regard de notre matriarche. Alors qu'elle tourne le menton, la trace de sang devient plus visible à la lumière du soleil. Et au froncement de sourcils de ma grand-mère, je sais que ça ne lui a pas échappé.
— Je sais, Abuelita, je sais, murmure-t-elle. Vous me manquez aussi. Beaucoup. Mais c'est compliqué en ce moment.
Sur le coup, le déchirement de ma cousine me pince le cœur. Abuelita hoche la tête avec compréhension, mais la ride sur son front indique que Paloma n'a pas apaisé ses craintes. Pourtant, même si elle pourrait lui poser des questions sur sa tenue, elle n'en fait rien.
— Ne t'en fais pas, Paloma. Ta famille sera toujours là pour toi.
Quand Abuelita nous tourne le dos pour aller ranger les courses dans la cuisine, Paloma se lève à contrecœur. Je l'observe mettre ses chaussures avec un regard de pitié, presque suppliant. Notre conversation n'est pas terminée, je n'ai pas accepté de la suivre dans son plan, et pourtant... Une fois devant la porte d'entrée, elle se retourne vers moi, la peur déchirant ses traits.
— Valentina, tu viendras ? Tu ne vas pas m'abandonner, hein ? On se retrouve devant chez moi à 1 heure du matin. Je t'en prie, ma cousine.
Elle ne me laisse pas le temps de lui répondre et sort.
Je reste quelques minutes devant la porte fermée. Je suis probablement livide, mais ma grand-mère ne le remarque pas quand elle s'installe dans le canapé. Elle ne pose aucune question, rapidement absorbée par le nouvel épisode de Cuidado con el ángel, la telenovela qu'elle regarde chaque après-midi, juste pour l'acteur William Levy qui joue Juan Miguel.
— Tu as mangé, Valentina ? me demande-t-elle quand je finis par m'installer à côté d'elle.
— Oui, avec Paloma, ne t'inquiète pas, affirmé-je en posant ma tête sur ses cuisses.
Est-ce qu'elle croit à mon mensonge ? Pourquoi ne me demande-t-elle pas pourquoi je ne suis pas en cours à cette heure ? Ses doigts glissent simplement dans mes cheveux qu'elle caresse affectueusement tout en commentant la scène qui défile sous mes yeux. Pas une remarque. Pas une question. Ma grand-mère a toujours été ainsi, soucieuse de respecter notre vie privée, de nous laisser venir à elle et nous confier, sans insister quand elle sent qu'on n'est pas encore prêtes.
— C'est pas vrai, s'exclame-t-elle. Comment María peut encore lui pardonner après tout ça ?
Je reviens soudain sur terre et rive mes yeux sur le petit écran posé sur le meuble. Je vois les personnages s'embrasser, sans vraiment y prêter attention. Les mots de Paloma me hantent. Ils tournent en boucle dans mon esprit et retournent encore mon estomac. Néanmoins, même si mon cœur n'y est pas vraiment, je réponds :
— C'est sûr, c'est... C'est impardonnable.
Habituellement, j'aurais défendu Juan Miguel bec et ongles, ce qui ne manque pas d'alerter ma grand-mère. Abuelita pose ses mains sur mon bras et me dévisage avec suspicion :
— Ma chérie, en temps normal, tu aurais déjà crié devant une scène comme celle-là...
Je force un sourire et me redresse.
— Je suis désolée. Je crois que je suis juste... Je sens que je tombe malade.
Elle pose une main sur mon front et fait la moue. Je saisis alors son visage vieilli et adorable, puis j'embrasse son front avant de lui afficher un sourire cette fois-ci sincère.
— Je vais aller dans ma chambre, Abuelita. Profite bien de la fin de l'épisode.
Je me lève en me sentant presque coupable de tout ce que je lui cache. Ce n'est pas dans mes habitudes, mais je sais que je le fais pour son bien.
— Repose-toi bien, mi vida, me dit-elle doucement, alors que je quitte la pièce.
Je me dirige vers ma chambre, et j'entends à peine les échos de la telenovela lorsque je referme la porte derrière moi et pose mon front contre le bois. Je n'entends plus que les battements sourds et angoissés de mon cœur. Je n'ai plus que quelques heures pour me décider...
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Hey, aujourd'hui, je vais mettre un post sur Instagram pour teaser une surprise qui arrive bientôt... 😎🇲🇽
Instagram : azra.reed
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