5. Cicatrice

Le Palace était vide. Albani et Otto lisaient quelques ouvrages intéressants sur la guerre des gangs de Salslaw. À l'époque, il n'y avait que trois groupes. Les Lupi Neri, les Squalo Bianco et les Serpente Rosso.

Stivio vint interrompre la séance détente des deux nouveaux en se raclant la gorge. Les garçons fermèrent leurs bouquins en y laissant juste un doigt afin de ne pas perdre leurs pages.
- Laissez-ça ici. On bouge.
- Il était rangé où déjà ? demanda le blond.
- Ne rangez rien, c'est chez vous ici. Vous pouvez revenir lire ce soir.

À la gare, ensemble, les hommes s'approchèrent du train de la ligne F. Stivio s'adossa à un pilier et commença à observer les civils.
- Au fait, on peut savoir ce qu'on fait ? demanda Otto.
- Vous avez déjà entendu parler du gang des clowns ? Ces types tuent de sang froid dans la ligne F depuis déjà bien longtemps. Peu de personnes survivent au passage dans le tunnel car lorsqu'il fait noir, ils agissent.
- C'est pour ça qu'on l'appelle la ligne maudite ? demanda Albani.

Le sifflet du train s'activa. Rapidement, les mafieux montèrent à l'intérieur du quatrième wagon. Assis sur les sièges confortables, ils attendaient que celui-ci démarre.
- Attendez, déclara le blond. Vous croyez vraiment qu'ils se déguisent avant de monter à bord ?
- Ça m'étonnerait, soupira Stivio. C'est pour ça qu'on va devoir bien fouiller. Le tunnel est à dix minutes.
- Pourquoi avoir choisi des nouveaux pour une telle mission ? s'étonna le brun.
- Les autres sont déjà occupés.

Trois hommes marchèrent près d'eux, sans les regarder. Ils avaient la tête levée, le regard vide et une expression plutôt sombre. Dans un des sacs qu'ils portaient dépassait quelques poils rouges. Silencieusement, sans le faire remarquer à ses collègues, Otto se retourna pour les regarder encore un instant.
- Je reviens, chuchota le garçon.

Il suivit ces types discrètement et entra dans le wagon suivant avec eux. Derrière lui, il plaça sa porte de cœur et s'approcha rapidement d'eux.
- Pardon, excusez-moi...
La recrue les poussa et se rua jusqu'à la sortie où il y plaça une nouvelle porte. Impossible pour quiconque de traverser ce wagon. Ceux qui venaient de l'extérieur allait tout simplement sortir de l'autre côté. Ceux de l'intérieur étaient piégés dans une boucle.

Cependant, aucun des types n'alla plus loin. Ils s'assirent dans un coin et ouvrirent leurs sacs. Il n'y avait que des ordinateurs et une petite boule de poils rouges. Il y avait une étiquette dessus. C'était probablement une peluche que l'homme comptait offrir à quelqu'un.
- Fait chier, je me suis trompé.

D'un claquement de doigt, il fit disparaître les portes et revint s'asseoir auprès de ses collègues. Le train démarra. Les contrôleurs commencèrent à passer dans les rangs et le compte à rebours venait de débuter.
- Bonjour, dit l'un d'eux en s'adressant aux mafieux.
Ils saluèrent à leur tour cet homme et tendirent leurs tickets. Puis, il passa au rang suivant. En chuchotant, les garçons poursuivirent leur discussion.

Stivio se recroquevilla légèrement vers l'avant.
- On va devoir se déplacer dans le train mais si nous sommes trop suspects, ils risquent de s'en prendre à nous.
- C'est déjà toute façon ce qu'ils feront quand on les aura démasqué, soupira Albani.
- Sauf qu'ils le feront quand on sera séparés.

Otto leva la tête et sourcilla.
- Vous avez entendu ?
- Un bruit sur le toit du train... On est prêt de la place du marché !
Le plus ancien du clan se leva et courut.
- ILS ONT SAUTÉ D'EN HAUT !

Rapidement, les garçons rejoignirent les types qui s'apprêtaient à entrer par une fenêtre.
- Halte !
Les clowns les fixaient avec leurs sourires abominables. L'un d'eux jeta une quille vers Stivio qui se jeta vers l'arrière par réflexe. Le train étant à pleine vitesse, il s'éloigna du groupe de quelques mètres. Puis, l'objet lancé par le gang adverse explosa.

Otto bondit vers eux, furieux. En courant, il frappa de plein fouet le visage du plus éloigné d'un puissant coup de poing. Les deux autres s'éloignèrent d'eux afin d'occuper les mafieux.
- Expulsion !
Les champs de force repoussa le clown qui s'accrocha au bord du toit. Secoué par la puissance du vent, il remonta rapidement.
- Seven Doors...
D'un coup de pied, le jeune homme projeta leur ennemi plus loin. Celui-ci tomba jusqu'à la porte de trèfle et apparut derrière le blond qui le frappa d'un coup de pied retourné.

L'adversaire roula sur quelques mètres et fut soudain saisit par le col, derrière lui. C'était Otto qui venait de l'attraper en sautant jusqu'à sa porte. Il était accroché à celle-ci et sans pitié, il éclata la tête du clown sur le train à pleine vitesse. Son visage fut râpé quelques secondes.

Pendant ce temps, Albani se faisait frapper à coups de quilles. Il encaissait les coups sans broncher. Puis, il annonça le nom de son attaque : Acceleratix Triplex ! Pour lui, tout alla bien plus lentement tandis que ses mouvements paraissaient trop rapides pour les autres.

Prêt à en découdre dans l'immédiat, il frappa sans cesse son ennemi. Une rafale de coup de poing et le temps reprit son cours. Le clown fut propulsé si loin que personne ne le vit s'écraser aux alentours. Il disparut juste de l'horizon, très loin.

Ce fut cependant très douloureux pour Albani. Il cracha du sang, sentant ses organes se brasser à l'intérieur de son corps. Il en était de même pour ses muscles qui serrèrent si fort que les os de ses bras furent brisés. Couché sur le train, il regardait les cieux défiler si vite.

Le dernier clown, sans doute le chef du petit groupe, s'occupait du dernier mafieux. Stivio avait la main gauche sur sa garde et l'autre sur son fourreau. Il attendait une offensive adverse.
- Ben alors ? rit l'ennemi. Tu as peur ?
Surprenant le type avec sa vitesse incroyable, l'homme dégaina son sabre en se déplaçant derrière lui d'un seul bond. Hélas, il a manqué sa cible.

Otto, intrigué, décida d'observer attentivement ce combat. Peut-être que son collègue détenait également un écho. Il était sûr d'avoir vu le mafieux toucher sa cible. Était-ce le clown qui avait un pouvoir ?
- Hahahahaha ! Tu ne sais pas manier le sabre ?
Sans réagir à ses provocations, Stivio le traversa avec sa lame noire à trois reprises : à l'épaule en descendant jusqu'à sa poitrine, sur les côtes et à la cheville.

Avec des shavettes, le tueur en série courut jusqu'à l'homme qui semblait avoir du mal à gérer un sabre. Puis, il commença à le taillader au visage et aux bras. Les veines ouvertes, le sang coulant abondamment de ses plaies, il sourit.
- Scar...

À cet instant, un tas de blessures apparurent sur le corps du Clown qui se mit à genoux, hurlant de douleur. Ses vêtements furent déchirés et de profondes cicatrices laissaient son sang voler dans les airs.
- Maintenant que tu es maudit par mon sabre, laisse-moi te punir comme tu le mérites.
Un mystérieux rayon noir s'échappa de la lame et alla envelopper l'ennemi d'une aura. D'un mouvement vertical vers le haut avec seulement son arme, il fit voler l'assassin. Puis, tout en jouant avec le sabre, il déplaça le corps dans tout les sens afin de l'éclater contre le plus d'obstacles possibles.

Une fois lassé de cette occupation, il fit revenir sa cible sur le toit du train. Puis il lui trancha la tête.
- J'espère que vous n'étiez que trois... Si tel n'est pas le cas, je tuerais un par un tes petits copains...
Puis il claqua des doigts.
- J'ai une idée. Inutile de faire apparaître ta blessure finale. Après tout, tu es maudit...

D'un franc geste horizontal, il déplaça à nouveau le clown dans les airs. Puis il jeta son corps sous le train. Les garçons sentirent le choc un instant. Déchiqueté par les roues et le poids, l'individu qu'ils avaient pourchassé n'a pas fait long feu.

Leur mission était enfin terminée. En pleine fin de journée, les mafieux allèrent boire un verre dans un bar bondé de monde, en terrasse.
- Fêtons cette victoire comme il se doit !
Otto but quelques gorgées de sa bière et la posa sur la table en fixant son collègue.
- Comment tu as eu ton écho ?

Le cœur de Stivio s'arrêta un instant. Ses cicatrices du passé refaisaient surface. Il fut transporté dans un souvenir qu'il aurait préféré garder enfoui jusqu'à sa mort.

C'était un soir de pluie, dans un dojo au Japon, dix ans plus tôt. Le garçon n'était encore qu'un enfant. Face à son maître, un sabre en bois à la main, il attendait.
- Alors quoi, tu ne me salues pas ?
- Je n'en ai pas envie.
Le jeune disciple laissa tomber son arme factice.
- Je veux arrêter de jouer et apprendre avec le danger. Si on a de vrais sabres, on donnera le meilleur de nous même.
- Ferme la, Jugo. C'est encore moi qui décide.

L'enfant tourna le dos à celui qui lui enseignait tout ce qu'il connaissait. Cet homme qui a tout fait pour son fils.
- Alors j'arrête.
D'un bond, le vieillard se précipita sur le garçon et le balaya d'un petit coup de pied. Puis, il prit une vraie arme et la donna à Jugo.
- Tu veux vraiment te battre ? Ne comptes pas sur moi pour être clément. Si je dois te tuer...
Il prit son enfant par les cheveux.
- Je le ferais...

Sur la terrasse, debout, Stivio retira son t-shirt. Beaucoup de femme regardaient son corps svelte avec envie jusqu'à voir l'horrible marque de la mort imprégnée dans son dos. Il montra aux garçons ce que son père lui laissa comme souvenir.
- Bordel de merde...

Un tas de cicatrice représentait un abominable crâne à pointes. L'entièreté de son dos en était recouvert.
- Ce soir-là, il m'a laissé pour mort sur le sol du dojo... Seul pendant toute une nuit...
- C'est pour ça que tu es venu en Italie ? demanda Albani. C'est pour fuir ton passé ?
- Non, les gars. Je ne connais pas la raison de votre arrivée dans le clan mais sachez qu'on a tous un but dans la vie. On est un peu des paumés, vous comprenez ?

Il remit son t-shirt et reprit place avec eux.
- J'ai entendu dire qu'il vivait à Salslaw il y a deux ans et je suis venu tuer ce fils de pute...

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