4. Un problème de taille
Branno se rendit sur la falaise, au pied d'un arbre. Il passa sa main dans son épaisse barbe grise et sourcilla.
- Ce gamin en veut au parrain, j'en suis certain.
Au bout de très peu de temps, il revint au Palace où attendaient les autres. Avant son retour, les garçons en apprenaient davantage sur le clan.
L'homme aux longs cheveux verts était assis sur son bureau, les mains croisées.
- Il y a plusieurs factions au sein des Lupi Neri. Vous avez été acceptés dans la plus importante mais aussi la plus dangereuse. Seuls ceux qui sont au Palace me connaissent.
La porte s'ouvrit.
- Mensonges ! Ce ne sont que des balivernes !
- Qu'y a-t-il ? demanda le boss.
Branno se posta devant les nouveaux et grimaça.
- Il n'y a aucun corps, j'ai bien fouillé.
Furieux, Otto attrapa le col du vieil homme et se fit aussitôt repousser par trois coups de poings au visage de cet individu.
- Réglez vos comptes ailleurs, je vous prie. Les garçons, je veux la tête de Miria dans les douze heures qui suivent.
Des ronces vinrent s'enrouler autour de leurs cous.
- Si jamais vous échouez, je vous torture avant de vous éliminer...
À l'extérieur, au bout de la rue, alors qu'ils avaient fait le début de la route en silence, le blond tapa dans une poubelle en ferraille avec son pied. Celle-ci tomba et son contenu se déversa sur le sol.
- Quel fils de pute. Il veut nous empêcher d'approcher son petit boss chéri ?
- Tu as une tête de traître, soupira Albani. Il doit se douter de quelque chose.
- En attendant, va falloir le battre parce que sinon, on est morts. Il n'a pas mis très longtemps, le corps doit être encore près de la falaise.
Ils arrivèrent à destination en cinq minutes. Près de l'arbre se trouvait la pelle du jeune homme et un tas de terre. Rapidement, il s'acharna sur le sol et sentit quelque chose buter. Une autre matière.
- C'est quoi ces conneries ? demanda Albani.
Le corps était toujours là. Rassuré, en lâchant un long soupir, Otto s'appuya sur sa pelle, plantée dans le sol.
- Il a dû se tromper d'endroit, tout va bien.
Après un certain temps mis à déterrer le corps, Otto se laissa tomber contre l'arbre. Albani, lui, hurla :
- T'ES CON OU QUOI ?
- Laisse-moi me reposer.
- Si quelqu'un arrive et voit le corps, on fait quoi ?
Un homme s'interposa justement lors de cette étrange conversation. Il s'était caché afin d'observer les garçons.
- Alors il avait raison... Deux petites merdes ont tué Miria.
Le blond ouvrit grand ses yeux. À cet instant, il venait de comprendre que Branno les avait dénoncé à la famille des Serpente Rosso. Albani posa sa main sur la crosse de son arme.
- Cette fois, je te couvre.
Il avança jusqu'à leur nouvel ennemi.
- Va raconter ça au boss...
- T'es sérieux ?
- T'as tué ce mec parce que tu avais une bonne raison de le faire. Pas pour le clan. Alors je vais risquer ma vie pour toi aujourd'hui.
Il regarda Otto dans les yeux.
- Pas en tant que collègue... En tant qu'ami.
Il lui adressa un sourire et cria :
- Seven Doors ! Viens avec moi !
Une trappe apparut sur le sol avec un motif de carreau dessus.
- Ne t'inquiètes pas pour moi, pars devant. Je te rejoins.
Le mafieux, lassé de leurs idioties infantiles, frappa Albani d'un coup de genou dans le ventre. Puis, le garçon des Lupi Neri s'enfuit en courant.
- Qu'est-ce que...
Pied gauche, pied droit et encore celui de gauche pour repartir sur la droite. Pas à pas, très rapidement, sans respirer comme il le fallait pour éviter les douleurs, il se précipita jusqu'à une bouche d'égout. Sans forcer, il retira la plaque et entra à l'intérieur. Seulement, il se fit piquer par une aiguille à la jambe.
En tombant, surpris par la douleur, il aperçut quelque chose. Plouf ! Dans l'eau souillée, il flottait en sentant quelque chose affecter son corps. Il se sentait faible. Sans faire d'effort, il s'approcha du bord et monta sur la pierre. C'est là qu'il vit qu'une seringue rose était plantée dans son mollet. Sans réfléchir, il l'ôta et sentit soudain sa puissance revenir.
Perché sur la falaise, quelques minutes plus tard, le type qui lui a lancé son écho jeta sa cigarette dans l'océan et sourit.
- Tu devrais te presser un peu, tu risques de te sentir à l'étroit, gamin...
Une explosion attira son attention derrière lui. Le sol venait de se briser et des clôtures furent arrachées. Albani venait de sortir des égouts.
- AU SECOURS ! hurla un civil en courant. UN GÉANT ! UN MONSTRE !
Le jeune brun réagit enfin. Il était en proie à une constante croissance. Pour éviter de faire paniquer plus de monde, il courut après le civil terrorisé.
- Attendez monsieur ! Vous faites erreur !
Son pied droit rejoint l'autre en terrassant une maison entière. Les murs s'envolèrent, les meubles furent détruits et l'habitant courut chercher son fusil à pompe. Face au géant, tremblant de peur, il chargea son arme.
- Monsieur ! Ne me faites pas de mal !
Le coup partit. Il venait de se suicider. Son crâne se vida de sa cervelle en une seconde en laissant un trou bien gros et immonde. Aussitôt après, la police arriva et Albani continuait de grandir.
« Merde, pensait-il. Je ne peux pas m'enfuir. Je risquerais de tout démolir. »
Il fixa l'inconnu aux cheveux gris. Cet individu devait mourir s'il voulait retrouver sa forme normale. Il n'avait plus le choix. Il devait sauter au-dessus des voitures de police.
- Les mains en l'air, monstre !
Quelques balles le touchèrent. Sa peau était devenue bien résistante mais il sentait les projectiles le blesser.
- Tant pis, je vais devoir user de ma puissance aussi.
Il ferma les yeux et ouvrit sa bouche afin de prononcer ces mots : Acceleratrix duplo.
Sa vitesse fut multipliée par deux. D'un bond, profitant pleinement de son pouvoir limité par le temps, il se dirigea vers l'arbre. L'impact qu'il laissa au sol fit voler de la poussière et des morceaux de béton sur des dizaines de mètres.
En raclant le sol plus loin, il freina et s'apprêta à attraper le fugitif qui courut jusqu'aux voitures de police.
- JE ME RENDS !
La vitesse du garçon retomba. Comme à chaque fois qu'il usait de cet écho, il sentit ses muscles se froisser. La plupart du temps, ils se contractaient si fort pour supporter le choc que ses os se brisaient. En géant, cela ne lui laissa qu'une forte douleur.
- L'ordure... Il est protégé dans cette voiture de flic.
Les hommes tiraient toujours. Il n'était plus en sécurité sur l'île. Alors, il se laissa tomber en arrière. Sa taille ne cessait de s'accroître. Il tomba dans l'océan en provoquant de très grandes vagues. Du haut de ses six mètres, il touchait le fond. L'eau ne lui arrivait qu'au torse.
- Je n'ai aucun moyen de prévenir Otto... C'est la merde...
Puis, il eut une idée. Une heure plus tard, lorsqu'il mesurait quinze mètres, il marchait près du bord de la ville. Les civils apeurés lui jetaient beaucoup de trucs dessus. Du papier toilette, des chaises, des fléchettes et tout ce qui leur passait sous la main.
Arrivé près d'une maison rouge, il sauta hors de l'eau et atterrit dans la rue. Il n'y pouvait rien mais il venait de détruire plusieurs habitats. Les voitures de police arrivaient à toute vitesse. Bien trop haut pour saisir l'objet qu'il voulait, il s'allongea. Une petite partie de l'île fut dévastée par sa faute.
« Comment je peux prendre ce téléphone sans le détruire ? »
Cette question se répétait en boucle dans sa tête. Il n'avait plus le temps de réfléchir. Avec ses mains, il fit un barrage pour empêcher un adolescent de s'enfuir.
- Écoute-moi ! Je ne te veux aucun mal !
- Foutaises ! Tu veux me manger !
- Je t'en prie, sois coopératif ! Je veux que tu appelles quelqu'un pour moi ! C'est le seul moyen pour que je retrouve mon apparence normale !
Contre la cabine téléphonique, le jeune paniquait.
- S'il te plaît, ne me force pas à te tuer...
- D'accord, d'accord ! J'y vais !
Il entra dedans et tapa le numéro qu'Albani lui donna. Puis, Otto décrocha. Il tendit le combiné au géant, tremblotant.
- Sérieux, tu t'es pissé dessus ? Bon, je te comprends, ça fait peur.
- Allo ? Albani, c'est toi ?
- J'ai un problème !
- Nous aussi...
Le blond s'apprêtait à quitter le Palace avec ses collègues.
- Un géant serait en train de foutre la merde.
- Si tu veux remédier à ça... Tues Branno...
Ses yeux s'écarquillèrent. Choqué par cette demande, Otto s'arrêta de courir, dans le couloir du Palace.
- Pourquoi ?
- Je t'en prie, fais moi confiance !
Albani plongea à nouveau dans l'eau pour fuir la police qui venait d'arriver sur les lieux. Pendant ce temps, Otto hurla le nom du barbu. Celui-ci résonna dans le couloir et les autres s'arrêtèrent à leurs tours.
- Qu'est-ce que tu veux, petit ?
- Je crois que je viens de comprendre...
Le blond tira vers lui. En sueur, Branno ouvrit les portes et s'en alla.
- Qu'est-ce que tu fous ? s'écria Kamila.
- Je ne fais que confirmer son identité... C'est lui, l'enflure qui a tout manigancé !
Branno était dans la rue, deux fois plus grand que d'habitude. S'il est sorti, c'était uniquement pour préserver le Palace.
- Comment vous avez compris ?
- Albani est un génie !
Quelques secondes plus tôt, avant qu'ils raccrochent, le blond se permis de poser deux autres questions :
- Comment tu veux que je te fasse confiance ? Tu sais ce que tu fais au moins ?
- J'ai cru entendre qu'un type des Lupi Neri pouvait changer son apparence à souhaits. C'est forcément Branno qui est venu, il n'aurait pas risqué de se faire tuer par les Serpente Rosso juste pour nous faire dégager.
- Tu as raison, il est rentré il y a peu. Je crois qu'il est parti en même temps que nous alors qu'il venait déjà de dehors.
- C'est la police qui l'a ramené ici ?
Le blond fronça les sourcils.
- Oui, je crois...
Sans que ses collègues ne soient au courant, il obtint un deuxième pouvoir qui consistait à faire grandir ce qu'il voulait.
- Vous n'êtes que des gamins, vous n'allez jamais avancer !
- Pourtant, déclara le parrain en sortant, l'un d'eux va devenir mon bras droit.
- Quoi ? Mais je suis là, moi !
Plusieurs racines vinrent se loger dans la bouche du géant afin de lui écarter la mâchoire jusqu'à la faire éclater. Puis, avec ses fouets de ronces, sans bouger le petit doigt, leur chef le massacra jusqu'à le tuer. Branno reprit alors sa forme originale et Albani put remonter tout en rétrécissant.
Au final, dans le bureau du boss, les deux garçons furent choisis pour devenir une personne plus importante au sein du clan.
- Cependant, vous allez devoir vous départager.
- Pas besoin, sourit le brun. Otto le mérite bien plus que moi.
- Nan, je refuse.
Le blond épata son ami. Lui qui voulait s'approcher du parrain afin de le tuer et de profiter des avantages tel un égoïste... C'était impensable.
- Tu es sérieux ?
- Oui, Albani. Tu as tué beaucoup de gens, les habitants de Salslaw t'en veulent et t'as tout fait pour arrêter ça au plus vite pour les sauver malgré tout. Je ne sais pas si j'aurais eu la patience et j'aurais peut-être bien tout détruit.
L'homme aux cheveux verts se mit à rire.
- J'ai dégoté deux perles rares, j'en suis ravi ! Mes amis, je vous souhaite la bienvenue chez les Lupi Neri.
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