17. Luziano
Cela faisait déjà deux mois que Ricard était en prison. Sa sentence a été prononcée et elle était irrévocable. Trois ans fermes. Il a laissé à son fils l'honneur de devenir le boss des Luziano en l'attendant. Valerio n'en était pas ravi mais hélas, il n'avait pas le choix de respecter la décision de leur ancien chef.
Le 10 novembre de cette année-là, Evangelisto fêtait ses dix-sept ans. Quelques jours avant, c'était l'anniversaire de Dorian. Prêts de leur majorité, ils ont tout-deux eut les mêmes cadeaux. Des préservatifs, de l'alcool et une arme. Un fusil à pompe pour le nouveau et un sniper pour le maître de Killer.
Malgré leur engouement pour la fête, les Luziano avaient du mal à accepter la disparition de Ricard. C'est alors que son fils se leva. Il était debout, sur le comptoir, le soir de son anniversaire.
- Écoutez-moi tous. Je sais que cela ne vous fait pas plaisir de me voir à la tête de la famille mais c'est comme ça.
Il bu une gorgée de bière et cassa la pinte en la laissant tomber au sol.
- Le truc, c'est que ça ne me plaît pas non plus. Pas dans ces circonstances. Alors allons convaincre les Suarez et les Mozami de nous verser un peu d'argent et on paiera le juge ou je ne sais qui. En bref, on va corrompre le connard qui a foutu mon père en prison.
Enjoués et déterminés, les mafieux hurlèrent en levant leurs verres. C'était le début d'un nouveau chapitre de l'histoire de Verremburg...
Dans sa chambre, Dorian s'entraînait à développer ses réflexes et son flying. Il cassait de nombreux verres mais le nettoyage ne fut pas compliqué avec son pouvoir. Au bout d'une heure, il décida de descendre et de tenir compagnie à sa mère.
- J'ai entendu dire que le chef des Luziano était en prison ?
- Oui. Notre famille est dans la merde.
Les yeux de cette femme brillaient. Elle baissa la tête et soupira.
- Alors toi aussi tu m'abandonne.
- Quoi ? Tu sors ça d'où ?
- C'est ta famille, hein ?
Blessé par la réaction de sa mère, il baissa également la tête et se tut. Il valait mieux pour lui qu'il n'en rajoute pas plus. La nuit allait tomber et quelqu'un frappa à la porte. Cela venait de briser leur silence.
Le garçon alla ouvrir et vit Valerio et Basilio.
- On va manger au resto, tu viens avec nous ?
Dorian se tourna vers sa mère qui l'ignora.
- J'arrive, je vais chercher une veste.
Ces derniers temps, tout était différent. Elle replongeait dans une profonde déprime tandis que l'adolescent se sentait seul sans son boss. Evangelisto n'avait pas fait de bêtise mais il sentait que la catastrophe n'allait pas tarder à arriver.
À une table isolée des autres, au fond du restaurant, les mafieux discutaient de tout et de rien.
- L'autre jour, je suis allé vois mon oncle, s'exclama Basilio. Il m'a fait une tourte au vautour, c'était succulent.
- Personne ne mange d'oiseau, répondit Valerio. Tu es carrément bizarre.
- Je t'en ferais une un jour, tu verras.
- Sans façon.
Le serveur vint leur apporter les plats qu'ils avaient commandé. Dorian et Basilio s'étaient pris des spaghettis à la bolognaise. Le barbu, lui, avait choisi une brochette de poisson posée sur un riz de qualité et assaisonné par une sauce verte.
- C'est quoi ce truc ? demanda l'homme en grimaçant.
- C'était écrit sur la carte, chuchota Basilio.
L'employé ajusta le torchon qu'il tenait et lui adressa un beau sourire.
- C'est du pesto, monsieur.
- Tout le monde connait à Verremburg, ajouta l'adolescent. Dans quel monde vie-tu ?
- Attendez, y a quoi dedans ? Je suis allergique à la cacahuète.
- Hahaha, ne vous en faites pas. Il n'y a que de l'huile d'olive, des pignons de pin, de l'ail et évidemment, l'ingrédient principal, du basilic. Le chef étant très pointilleux sur l'originalité, y a rajouté une pincée de sel et sa petite touche de poivre blanc.
Sans laisser l'homme terminer ses explications, Valerio saisit ses couverts et ouvrit sa bouche, affamé.
- Trop bien !
La porte du restaurant s'ouvrit. Un type avec des dreadlocks blanches, des yeux bleus, un jean déchiré et un pull noire entra. Sans saluer les employés, il prit une chaise à une table et s'installa devant les Luziano. Face au dossier de la chaise, tout simplement assis à l'envers, il leur fit un petit clin d'œil.
- Bon, les pédés. Demain, avant d'aller voir les Suarez, on va embaucher de nouveaux copains.
- Evangelisto, c'est quoi ce look ? demanda Valerio, étonné.
- On s'en branle, je vous parle sérieusement.
Dorian posa ses couverts sur la table, prit sa serviette et essuya sa bouche avant de saisir son verre, de croiser ses jambes et de s'appuyer au dossier de la chaise.
- Des nouveaux Luziano, alors ?
- Ouais, j'ai reçu quelques demandes. Ça me fait chier de remplacer les gars mais on va avoir besoin de renforts si jamais une situation tourne mal.
- Entendre ça de ta bouche me fait peur, répondit Basilio. T'as pas prévu de guerre, hein ?
Le garçon sourit.
- Bien-sûr que non, tout va bien se passer.
À l'aube, à l'intérieur du bar, les garçons attendaient la venue de certains nouveaux. Le premier arrivé se nommait Davidio. Il avait les cheveux blonds, un œil bleu et l'autre vert.
- Plutôt musclé, sourit Valerio. Tu as un écho ?
- Un quoi ?
- D'accord, soupira Basilio. Enfin un mec normal.
Le suivant s'appelait Vinnie. En plus de ses cheveux bleus et de ses yeux noirs, il avait un dragon tatoué sur tout le bras gauche.
- Un écho ?
- Je ne sais pas de quoi vous parlez mais j'ai également un pouvoir étrange.
Lui aussi était comme trois des Luziano. Son don était assez particulier puisqu'il pouvait faire un tas de chose avec les ténèbres. Il portait des lunettes et ne souriait pas beaucoup.
- En attendant les autres, les deux nouveaux peuvent déjà aller chez les Mozami avec vous deux.
Evangelisto pointait Valerio et Dorian du doigt. Puis, lorsqu'ils s'apprêtaient à partir, ils virent Janice.
- Salut beauté, sourit le barbu.
- Va te faire foutre, putain. dit le fils de Ricard en lui faisant un doigt d'honneur. C'est ma copine.
- Qu'est-ce qu'elle fout là ? s'etonna le blond aux yeux bleus.
- Tu te demande pas comment c'est possible qu'il ait une compagne ? ajouta Dorian.
Elle rejoignait les mafieux elle aussi. L'équipe se réformait. Les quatre choisis pour la mission montèrent dans la première automobile du parking du Baracuda.
En route, les deux nouveaux firent connaissance avec leurs tuteurs. Ils leur expliquaient la situation au sujet de Ricard. Puis, Valerio appuya brutalement sur la pédale de frein. Il descendit du véhicule et courut jusqu'à un homme lézard. En le plaquant contre un mur, il l'insulta de tout les noms.
- Arrête, qu'est-ce que tu fais ? s'exclama Dorian en l'attrapant.
- Ces fumiers ont tués nos amis.
- Ce ne sont pas eux. Puis de toute façon, c'étaient les ordres de leur boss.
- Et alors ?
- Si Ricard te demandait de tuer un Suarez ou un Mozami, tu le ferais. Mets toi à leur place.
Le reptile le fixait sans réagir à l'agression. Alors, le barbu le lâcha, lui cracha au visage et retourna dans la voiture.
Arrivés chez les Mozami, les garçons préparaient leur excuse.
- Bon, Celerino... On ne va pas y aller par quatre chemin.
- Vous voulez encore de l'aide ? De l'argent ? Moi qui croyais que les Luziano étaient les meilleurs.
- Ricard est en prison.
- Je sais. Vous voulez combien ?
Après une brève négociation, les mafieux avaient une condition. S'ils voulaient l'aide des Mozami, ils allaient devoir rendre visite aux Suarez. Ceux-ci n'avaient pas remboursé leur dette envers Celerino et ils devaient payer autrement.
- Le problème, c'est qu'on comptait aussi sur leur aide.
- Je vous donnerais le double. Si vous tuez Crocifisso.
Les deux mafieux grimacèrent. Davidio et Vinnie ne connaissaient pas cet homme et ne savaient pas que c'était une mission délicate.
- Vous n'aurez aucun problème. S'ils vous voient, dites-leur que vous passez un message de la part des Mozami.
Inquiet, le blond décida d'en parler à Evangelisto qui était assis dans la pièce de son père, les pieds sur son bureau.
- Alors execution.
- Écoute, petit. Tu remplaces peut-être ton père mais tu devrais réfléchir un peu plus. Là, on va déclencher une guerre.
- Ce n'est pas la nôtre.
- Mais on sera en plein dedans !
Killer apparut soudain et toucha la pomme d'adam de Valerio avec une dague.
- Tu vas emmener les nouveaux et tu vas tuer Crocifisso. C'est bien clair ?
- Je sais que c'est ton père mais...
Il sentit la lame appuyer sur sa gorge.
- Tu le ferais vraiment ?
- Ne me tentes pas.
- T'es vraiment une merde, Evangelisto.
Puis, l'homme se retourna afin de s'éloigner de lui sans la crainte de se faire poignarder dans le dos. Il descendit les escaliers et vit les deux nouveaux boire leur première bière au Baracuda.
- Bon, les gars, vous allez être mêlés à une sale affaire.
Près de leur base, ils attendaient que quelqu'un sorte pour se faufiler à l'intérieur. Assis dans la voiture, ils regardaient l'heure défiler. Il était presque midi. Ils avaient passé la journée à attendre. Personne n'avait ouvert la porte.
- Deuxième option, soupira Valerio. On sonne et on prie pour que notre homme ouvre.
Les hommes avancèrent et sonnèrent à l'interphone. Au bout de trois secondes, un type ouvrit.
- On veut voir Crocifisso.
- Va chier, il n'est pas là.
- Ça te trouerais le cul d'être respectueux ? Je veux vérifier.
- Dégagez ou je vous bute.
Le Suarez allait fermer la porte mais le barbu poussa celle-ci et entra. À cet instant, il se fit pousser et recula de quelques pas afin de ne pas tomber. Vinnie frappa alors leur interlocuteur au visage.
- Enfoiré...
Pour se venger, il donna un coup de crosse de pistolet au nouveau. Ses lunettes tombèrent et se cassèrent. La porte se ferma devant eux. Valerio tendit sa main à son collègue qui ne bougeait plus.
- Ça va ?
- Il a cassé mes lunettes...
Une explosion de fumée noire repoussa les deux autres pendant que Vinnie se relevait.
- Personne ne touche à mes lunettes...
Des flammes noires brûlèrent instantanément la porte. Puis, trois Suarez sortirent avec des fusils à pompe dans les mains.
- Merde, on se tire !
En courant, les Luziano retournèrent dans leur voiture. Puis, Valerio entendit sa vitre se briser. Au volant, il fixait l'horizon.
Tiens... J'ai mal...
Du sang coula sur son siège. Son épaule venait d'être traversée par des projectiles. Lorsqu'il s'en rendit compte, il poussa un hurlement et appuya sur la pédale. Seulement, il se tenait le bras et personne ne conduisait. Pour ne pas percuter de mur, Davidio saisit le volant et le tourna vers lui.
- ATTENTION !
Bom ! Ils percutèrent un policier qui traversait la route. L'agent explosa le pare-brise et s'ouvrit légèrement.
- Recule ! cria Vinnie.
Valerio écouta son collègue et fit quelques mètres vers l'arrière afin de faire tomber l'homme contre le béton. Puis, il avança pour l'écraser.
- Tu viens de tuer un flic ?
- On aurait pu finir en taule. Hors de question que je retrouve le boss dans ces conditions.
Leur voiture s'éloigna. Assis sur une terrasse, le général des Rodriguez les observait partir.
- Putain de merde, Luziano, dans quelle merde vous vous êtes foutus. Va falloir que je m'en mêle si vous voulez vous en sortir...
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