12. Démangeaisons
Miguel s'agenouilla. Les mains sur son cou, il tentait tant bien que mal de respirer.
- Evangelisto ! hurla Alessi. J'ai jamais été aussi content de te voir.
- Parles pour toi, soupira Valerio, à quatre pattes sur le bitume. Sa présence m'irrite toujours autant.
Le shérif laissait ses jambes traîner au sol. Puis, il arriva devant la victime.
- Quels sont vos motivations ? Tu es voué à mourir, autant aider.
- Je ne balancerai personne. Allez vous faire voir.
Son corps s'étala sur le sol chaud. C'est alors qu'un homme passa à toute vitesse devant eux. Il était sur un bycicle banal. De la poussière s'envola à son passage et fit tousser chaque personne autour du cadavre.
- Connard, regarde où tu vas ! braillait Alessi en lui faisant un doigt d'honneur.
- Bon, les Luziano, rentrez chez vous.
- Hors de question shérif, rétorqua Valerio. Vous devez avoir besoin d'aide.
- Si vous ne voulez pas être inculpés, partez immédiatement.
Dorian ne souhaitant pas avoir d'ennui, se retira. Il s'en était sorti avec quelques blessures qu'il jugea comme étant non importante. Dans son lit, il se reposait un peu jusqu'au dîner.
Lorsqu'il descendit ses escaliers, il passa sa main sur son bras. Sa peau se retirait légèrement à certains endroits.
- Bonsoir, mère.
- Tu t'es bien reposé ? Tu as encore sauvé la ville aujourd'hui ?
Le garçon mit la table et commença à préparer le repas. Des lasagnes. Pendant le dîner, il se grattait les deux bras. Puis, il tira sur l'un d'eux. Une grande couche de peau se retira facilement.
- Tu es vraiment dégoûtant ! hurla sa mère en laissa tomber ses couverts.
Celle-ci s'en alla en le laissant seul.
Qu'est-ce qui m'arrive ? se demandait Dorian. Je n'ai pas mal. Ça me démange juste énormément.
Sans finir son repas, il se leva et enroula son plat dans du cellophane. Puis, il fit la vaisselle et alla se coucher directement.
Le lendemain matin, Valerio entra au Baracuda. Il commanda une bière et s'installa auprès des jumeaux qui jouaient aux cartes.
- Alors les gars, tout se passe bien ?
- Super. On attends le boss pour lui annoncer quelque chose.
- Ah oui ? Une bonne nouvelle ?
Alessi s'installa auprès d'eux en allumant une cigarette.
- Les Suarez risquent de tomber. dit Tonio.
- Techniquement, c'est bon pour nous, répliqua Farenzo. M'enfin, je tenais à le dire au chef. Apparemment, ils auraient dû livrer des armes à un type hors de Verremburg mais leurs hommes se sont fait descendre et leur client est parti sans donner l'argent. Ils n'ont plus rien.
Alessi posa son index sur la peau morte de Valerio et fronça les sourcils.
- Tu t'es énormément gratté ?
- Ouais, je ne sais pas pourquoi mais quelque chose me brûle depuis hier soir.
- Moi aussi mais j'ai mis de la crème.
L'homme remonta ses manches et se leva, surpris. Sa chaise recula brutalement et se renversa.
- Merde... La crème ne fonctionne pas apparemment.
Quelques zones de son bras craquelaient. Sa peau se retirait toute seule.
- On dirait une mue, s'exclama Tonio en se levant. Vous êtes des Rodriguez infiltrés ?
- Ça ne va pas ? répondit le barbu. Je ne suis pas un foutu lézard. En revanche, je me demande si ce n'est pas à cause de celui d'hier.
- On l'a vaincu, rétorqua Alessi. Son Écho ne devrait plus nous affecter.
La mère de Dorian se réveilla assez tard. Dans son lit, elle observait le plafond et repensait à Silvio. Son mari lui manquait énormément. Au bout d'une longue heure à penser à sa vie d'avant, elle se leva et se dirigea vers la salle de bain. C'est là qu'elle vit ses bras. Sa peau se retirait et du sang sortait de certaines plaies.
- Dorian ? Qu'est-ce que tu m'as fait ?
L'adolescent n'entendit point sa mère. Il venait de partir en direction du bar, inquiet. Il ne comprenait pas pourquoi ses bras le démangeaient autant. Arrivé auprès de ses collègues, il grimaça.
- Alors toi aussi, déclara le blond.
- Ça s'est sûrement passé hier, soupira Alessi. Vous vous souvenez du gars qui est passé en vélo ?
Valerio se leva brusquement.
- Ce serait un Écho ?
- Si c'est le cas, répondit Dorian, va falloir qu'on le retrouve.
Ricard entra enfin dans le bar. Après les explications des jumeaux, les trois infectés allèrent dans son bureau lui expliquer le problème.
- Il est possible que ce soit un Rodriguez. Vous devez trouver leur planque au plus vite.
- Mais par où commencer ?
- J'ai des pistes. Quelqu'un pense avoir vu un reptile aller à l'opéra du Sife.
Sachant ça, les Luziano montèrent dans une des voitures de la famille. Valerio se mit au volant comme à son habitude. Seulement, les démangeaisons ne cessaient pas. C'était de plus en plus fort.
- Je ne vais pas réussir à rester concentrer. Ça me gratte même les épaules.
- Tu ne vas pas conduire dans cet état.
Basilio prit sa place suite à la demande d'Alessi. Il les emmena à l'est de la ville. Ils s'approchaient d'un grand bâtiment. Un panneau indiquait qu'il était fermé depuis quelques temps.
- C'est louche, cette histoire. murmura Dorian. Vous dites que ça fait un an qu'ils sont à Verremburg ?
- Ouais. Ça doit être leur planque. Infiltrons-nous dedans.
Basilio prit ses fusils mitrailleurs et les cacha dans un grand sac. Puis, il le souleva et le tendit à Valerio.
- Je fais le guet. Vous aurez besoin de ça contre eux.
- Merci.
Le barbu enfila les bretelles et avança lentement. Les trois Luziano descendirent quelques marches et s'approchèrent des égouts. Sous le pont menant à la grande bâtisse, ils marchaient avec une des plus grandes discrétion.
- Regardez, chuchota Alessi. Un passage secret ?
Il fallait traverser le Sife pour atteindre l'entrée. Accroupi sur le rebord, Dorian lança un regard empli d'inquiétude à Valerio qui s'arracha de la peau et de la chair à l'épaule gauche.
- Arrête ça ! s'écria Alessi. Tu vas te blesser.
- Intrus ! hurla un lézard en sautant du pont.
Celui-ci ne toucha pas le sol. Il se fit pulvériser bien avant d'atterrir. Les Luziano se tournèrent et virent deux Mozami. Celerino et un de ses compères.
- Woah ! Le boss des Mozami a un pouvoir ?
- Non, répondit le chauve. C'est Gustavo. Mon second.
L'homme à ses côtés fixait l'adolescent.
Il avait des cheveux gris, une couette de trente centimètres à l'arrière de ses cheveux, un piercing sur la lèvre inférieur de sa bouche, un autre sous son nez, trois sous chaque œil et six sur l'oreille droite. Ses yeux étaient entièrement blancs.
- Il est aveugle ? s'étonna Alessi.
- Oui. Aveugle mais efficace. Bref, Ricard nous a demandé de vous suivre. C'est notre piste, à la base.
Finalement, ils remontèrent afin d'entrer par la porte principale. Face à l'opéra, les Luziano ressentaient une énorme énergie.
- Ça me rappelle mon enfance. Cette peur.
Valerio se replongea dans un souvenir. Perdu dans son monde, il se sentait disparaître. Tout s'effaçait autour de lui. C'était parti pour un flash-back important et rien ne pouvait l'empêcher d'y penser.
C'etait un soir comme les autres. Il faisait frais, la lune éclairait les cieux et les lumières de chaque maison du quartier étaient allumées. Le barbu était à cet époque âgé de douze ans. Il jouait avec les enfants du coin, dans le parc ouvert.
Valerio courait après un ballon, poursuivit par deux silhouettes. Ces personnes n'étaient pas importantes pour ses souvenirs alors il était incapable de les voir correctement. De les imaginer. Il remplaça également leurs noms par "Élément A" et "Élément B".
Soudain, il frappa dans la balle et l'élément C qui semblait être une fille se fit heurter par l'objet. Elle qui se contentait juste de regarder, venait de se mettre à pleurer.
- T'es trop mauvais ! s'exclama D. Tu devrais aller aux cages.
- Ouais, dégage ! répliqua B. Tu sais même pas jouer.
L'enfant se mit à courir et alla au niveau des buts. Il s'en fichait de sa position tant qu'il s'amusait. Ce qu'il ne comprenait pas, en revanche, c'est que ces jeunes ne le prenaient pas pour un ami. C'était juste un gamin qu'ils pouvaient utiliser pour compléter leurs équipes de football.
- Allez, je vais marquer !
- On a Valerio aux cages, on va perdre !
D'un coup de pied, l'élément E fit valser le ballon qui arriva vers le petit blond aux yeux bleus. Avec peur, il attendait que celui-ci s'approche plus. Son cœur battait la chamade et son ventre lui faisait atrocement mal. Afin d'éviter d'être la risé de tous, il se devait d'arrêter ce tir.
La balle lui tapa dans le nez et du sang en sortit. Au moins, il avait arrêté ce but.
- Venez on fait un autre jeu !
- On fait du saut ?
Valerio, ignoré des autres, décida de commencer leur parcours. Il devait monter sur une poutre, sauter sur un tourniquet et courir sur une palissade. Sa peur ne cessait de grandir. Il voulait juste être aimé. Être meilleur que ce que les autres pouvaient imaginer.
- Eh, regardez !
Hélas, il glissa et tomba vers une grille. Les pointes au-dessus de ce portail traversèrent ses côtes. Apeurés, les autres s'en allèrent sans alerter leurs parents ni les secours. Le petit blond sentait cette déchirante et horrible sensation. Le pic le perforant arrachait doucement son foi. En fait, ce n'était pas si désagréable. Il se sentait mieux. Libre. Il en oublia sa douleur et ferma ses yeux. Le monde était devenu bien plus vaste et plus accessible. Le garçon courait dans les ténèbres avec assurance. Il s'approchait de ce qui semblait être une lumière.
C'est le paradis, pensait-il.
Valerio se trompait. C'était la vie à laquelle il s'accrochait. Une lueur d'espoir. Puis, il créa de nombreux champs de force qui explosèrent les murs du voisinage. C'est comme ça qu'un homme vit l'enfant empalé.
- Merde, chérie, appelle-les secours !
Ces souvenirs avaient refait surface lors de leur avancée sur le pont. Face à l'opéra, le barbu ressentait les ténèbres de la mort. Ce n'était pas sa peur à lui. C'était l'aura de l'outre-monde. L'odeur de la rancœur.
- Il y a des Échos surpuissants, là-dedans, déclara Valerio. J'espère que vous êtes prêts.
- Vous n'aurez pas à entrer. Je m'appelle Pablo ! Je suis le bras droit du général Rodriguez. Personne n'entre ici. De toute façon, si vous entrez, vous ne ferez rien. Mon écho arrive à son terme.
- Comment ça ? s'écria Dorian.
- Votre peau va se nécroser d'ici peu de temps.
Celerino n'en avait que faire de son charabia. Il s'est alors permis de l'interrompre en lui tirant dans la tête. La balle s'echappa de son crâne en laissant une giclée de sang tâcher la grande porte du bâtiment.
- Logiquement, déclara le boss des Mozami, vous ne devriez pas avoir de problème avec votre peau, s'il est mort.
- C'est vrai. Maintenant, rentrons. On sait qu'ils sont ici, on va devoir préparer un plan.
Dans une pièce, un lézard s'énervait contre un sac de frappe. Il se déchainait en hurlant le nom de ses camarades décédés.
- Bourreau ! Tu perds ton temps. Pourquoi te défouler sur quelque chose qui ne ressent rien ?
- Général !
- Pars les affronter si tu le souhaite. Notre mère supérieur t'accorde une chance de les vaincre seul. Tu en es capable, n'est-ce pas ?
Le reptile transforma son bras droit en hache et ses yeux devinrent rouges.
- Bien-sûr, général...
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