13 (et le dernier) . 3
Les jours, les semaines passèrent depuis l'annonce et la vidéo. J'eus souvent l'occasion de voir Isotz Hautz à l'écran. Il fut désigné comme le représentant des Alters, si j'avais bien compris. Infirmant les propos d'Alain, mais pas la partie où il fut tué, il était en pleine négociation pour éviter une guerre avec les plus grands dirigeants du monde. Il devait aussi gérer les répercussions de la découverte des coupables des meurtres dans Vy.
Mes avis étaient qu'il n'y aurait jamais de guerre. Les hommes, peu importe l'espèce, étaient incapables d'avoir une opinion unique sur un sujet.
Une chose de sûre était qu'Isotz Hautz avait réussi à paraître presque inoffensif malgré sa carrure et sa cicatrice au visage et c'était effrayant de constater une telle chose. Les médias avaient généralement une bonne opinion sur sa personne, ce qui influait l'opinion publique. En soi, les Alters pourraient bientôt vivre au grand jour si tout se passait bien, mais voir qu'un Alters aussi puissant puisse être si... Non, honnêtement, j'en avais des sueurs froides. Évidemment, chaque jour, je me demandais comment tout ça allait finir. Aurions-nous des visites sur l'île ? Le monde aura-t-il plus d'Alters qui fouleront la terre ?
Je n'eus jamais de réponse d'Isotz Hautz non plus. Kael avait pourtant bien donné la clé avec mon petit mot. Mais après que ma colère soit passé, j'avais eu le temps de réfléchir : j'étais bien contente qu'il ne m'ait pas rappelé.
Malheureusement, je n'eus pas à réfléchir bien longtemps car j'avais d'autres préoccupations. Je n'avais plus un rond sur mon compte, je n'avais pas fait les réparations nécessaires et le propriétaire souhaitait me dégager. Je passais donc mes journées sur mon canapé à la recherche d'un emploi et un appartement. Ce fut encore plus difficile que d'ordinaire car j'étais blessée et était accompagnée de Métamorphes.
Alors que je continuais à chercher, Ruben passa la fenêtre. Sa mâchoire maintint une pille de courrier qu'il m'apporta. Je jetai au sol tout ce qui ressemblait de près ou de loin à ma banque. Il resta une seule enveloppe assez fine. Aucun cachet ne le décorait mais mon nom était écrit à la main sur l'ensemble de l'enveloppe. Mon œil changea sûrement de couleur car je vis un effluve magique s'échapper de celle-ci. Je n'arrivai pas à trouver de quelle espèce elle provenait mais je m'en méfiai.
Une sonnerie retentit dans l'appartement.
Je me figeai puis me précipitai vers le téléphone de madame Belevitch. Peut-être allais-je avoir enfin une proposition d'entretien.
- Mademoiselle Rowtag, retentit la voix d'Isotz Hautz.
Je clignai des yeux alors que les poils sur ma nuque se dressèrent. Il était la dernière personne que j'espérais avoir au téléphone.
- Monsieur Hautz, le saluai-je incertaine.
- J'espère que vous avez reçu la lettre.
- Je ne l'ai pas encore ouverte.
- Vous devriez.
Calant le mobile entre mon oreille et mon épaule, je pris la lettre des babines de Kael en le remerciant silencieusement d'un baiser sur le museau. Un chèque suivit d'un petit mot tombèrent dans ma main.
« Pour service rendu à la communauté. »
Le chèque contenait huit chiffres. Lâchant un cri de surprise, je fis tomber le chèque au sol. Puis je me précipitai de le récupérer pour le relire. Je ne m'étais pas trompée.
- Je... C'est une grosse somme, répondis-je.
- Pour les dommages causés.
- Je ne sais pas si je dois vous remercier ou vous hurler dessus.
- Pourquoi me hurleriez-vous dessus ?
- Avez-vous reçu ce que je vous ai envoyé ? , commençai-je en retournant m'asseoir.
- Oui , mademoiselle Rowtag et d'ailleurs parlons-en. Qu'est-ce donc ?
J'entendis comme une menace dans sa voix, peut-être un peu d'agacement, et ma colère remonta. Je n'étais pas en faute ici et il n'était pas le seul à être capable de montrer sa colère à travers un téléphone.
- La preuve de votre culpabilité.
Silence. Puis il baissa d'une octave pour continuer cette discussion.
- Je vous demande pardon mademoiselle Rowtag ?
- Vous m'avez bien compris. En fait, je suis à peu près sûre que vous êtes responsable de ce qui s'est passé. Voire que c'était votre but ultime.
- Vous feriez mieux de surveiller...
- La ferme. Que comptiez-vous me faire ? Je tiens à vous rappeler que je n'ai plus rien à perdre. Alors fermez-la et écoutez.
- Il y a quelques mois, poursuivis-je pour l'empêcher de détruire mon courage et ma colère, vous avez réuni le gratin de la société magique, les dirigeants de chaque espèce pour leur annoncer que vous vouliez révéler l'existence des Alters.
- Comment aviez-vous vous eu connaissance de cette réunion ?
- Ce n'est pas le propos ici, fis-je en regardant le livre d'Asda Belevitch qui au final était le mien. Le fait est que vous aviez expédié cette nouvelle sans instruction ni date de votre apparition. Au début, je ne comprenais pas pourquoi on m'avait montré cette réunion. Puis il y a eu le Démon.
- Les Démons n'existent pas mademoiselle Rowtag.
- S'il vous plaît. Ne me la faites pas à moi. Je sais qu'il existe bien plus que des Vampires et des Métamorphes.
Un silence tendu s'étira. Il n'allait pas me berner aujourd'hui. Après une minute de silence, il décida de l'interrompre.
- De quel Démon parlez-vous ? Je n'en ai vu aucun.
- Oh vraiment, fis-je sarcastique, c'est surprenant. Mais peut-être est-ce parce que j'ai dû tuer son réceptacle ! Que vous me croyiez ou non, ce n'est absolument pas mon problème. En fait, là, n'est pas le souci. Je me suis dit : mon dieu un Démon. Pourquoi est-ce qu'il y a un Démon qui attise la haine et permet de telles horreurs ? Puis je me suis rappelée de ce que vous aviez dit lors de cette réunion. « Quand ce sera nécessaire. Et la forme de cette révélation dépendra de l'espèce. ». Le Démon supérieur, présent à votre petite réunion, a dû estimer qu'il était nécessaire de se révéler maintenant. Alors il a demandé à un Démon inférieur de faire en sorte d'échauffer les esprits pour que leur venue sur Terre soit bénéfique. Les Démons pourront alors profiter de cette situation et être plus forts en aspirant les émotions provenant de ce chaos. Vous avez volontairement été vague dans vos propos pour permettre aux espèces de faire leur coming-out comme ils le désiraient. Donc... Il y a cette attaque sur un front puis il y a la vôtre.
- Faites attention à ce que vous supposez.
- Je ne suppose rien, je suis sûre. La preuve en est de votre second donnant une vidéo qui va être rendue publique au chef du groupe qui vous hait le plus. Vous n'allez pas me faire croire que vous n'avez pas donné l'autorisation à ce fils de chacal de transmettre cette vidéo à Alain. Vous lui avez ordonné de le faire. Ou alors vous avez été négligent sur les actes de vos sujets mais je doute vraiment que ce soit le cas. Dans tous les cas, vous ne pouvez pas prétendre « être sidéré qu'une telle vidéo ait pu atterrir entre les mains d'un individu voulant diviser plutôt que de rassembler ». Vous avez fait en sorte que ce soit possible.
- Mademoiselle Rowtag, il vaut mieux que vous arrêtiez là.
- Je n'ai pas fini. Votre culpabilité ne s'arrête pas là quand on y pense. Les commerçant Alters augmentent le prix de leurs produits pour les humains. Vous les laissez vivre dans la pauvreté pour maintenir une position de supériorité. Ça vous a coûté puisque l'animosité des membres de l'Humanité a causé la mort de vos petits. Sachez une chose, terminai-je en insinuant autant de détermination que possible, si je découvre une fois de plus que vos décisions ont mené à un désastre aussi important, j'exposerais vos plans. Que l'on me croie ou non n'aura aucune importance. J'aurais insinué le doute et vos prochaines actions seront surveillées. Et je rendrais votre vie tellement compliquée que vous ne pourrais pas me tuer sans être directement suspecté. Peut-être que je ne peux vivre qu'un siècle et que pour vous, cette période doit être du pipi de chat, mais ce siècle vous semblera le plus long possible.
Je raccrochai instantanément.
Voilà. J'avais dit ce que j'avais à dire. Maintenant...
Alea jacta est.
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