~Chapitre 2~
-Naïla tu passes à l'école ce soir ?
-Je sais pas je verrais, à plus maman, me dit-elle en m'embrassant.
Elle claqua la porte, comme d'habitude. Son frère descendit à peine quelques secondes plus tard, en courant dans les escaliers. Il claqua lui aussi la porte en sortant. J'attendis les bras croisés devant la porte, le connaissant par coeur. Comme je m'y attendais il réapparut et m'embrassa à son tour.
-A ce soir maman!
-A ce soir! Julian la porte.
Il prit soin de refermer la porte, sans la claquer cette fois-ci. Je montai dans la salle de bain pour me préparer. Je devais être dans une heure à l'école. Mon premier cours serait un cours de street jazz.
J'adorais mes élèves, j'adorais Alix, j'adorais mes enfants, j'adorais mon père, mes amis... Mais à ce moment-là sous la chaleur de la douche, je me rendis compte que ma vie n'était pas celle que je rêvais. J'étais devenue une mère et refusais toujours de me marier avec Alix, pourtant à bientôt 36 ans ma famille était tout ce que n'importe quelle femme rêvait! Mais le malaise subsistait. Je ne me sentais bien que lorsque je dansais ou qu'Alix dormait près de moi en m'entourant de ses bras. En France, le samedi soir m'étais réservé. Tout le monde se réunissait et m'appelait. Emma m'appelait aussi le mercredi matin avant que j'aille à l'école. En fait, la routine s'était instalée. Personne n'avait remarqué ma gène. Pas même mon père. Je savais qu'Alix le sentait mais ne disait rien.
Je fermais le jet du pommeau de la douche, m'enveloppais dans une serviette et sortais. Je prenais un legging et un tee-shirt long noir que je mis rapidement. Je me plaçais devant le miroir et mouillais mon visage. Un rire sinistre et lointain retentissait dans ma tête. Un rire de petite fille. Je relevai la tête, m'appuyant sur les bords du lavabo. Encore elle. Une larme de sang coulait sur ma joue. Je ne tentais même plus de l'essuyer, sachant très bien qu'elle ne partirait pas, tout comme la silhouette floue qui apparut derrière moi. Une silhouette d'enfant. Un rictus mauvais sur son visage. Des yeux gris et des longs cheveux blonds. Elle portait une sorte de robe noire qui montrait une très grande partie de ses jambes maigres. Je ne pris pas la peine de me retourner, je savais qu'elle disparaîtrait dès que je me tournerais. Je m'adossais au mur en posant ma tête sur mes genoux.
Je restais comme ça un long moment, dans le silence d'une matinée de fin d'automne.
Après plusieurs longues minutes je me relevai, terminai de me maquiller, attrapai mon sac et ma veste en cuir, pris les clés sur la commode et ma casquette et sortis.
À peine dehors, je mis mes écouteurs et laissais la musique porter mes pas. Ce que j'aimais à L.A., c'était que dans la rue, dès le matin, je pouvais danser sans que personne ne me prenne pour une folle. Je réfléchissais à la chorégraphie que j'allais leur apprendre ce matin.
J'arrivai quelques minutes plus tard devant l'école. Je saluai Steph à l'accueil et montai dans la salle. Les élèves arrivaient dans un quart d'heure tout au plus, j'avais le temps de peaufiner ma chorégraphie. Je branchai mon portable aux enceintes et le son envahit la pièce. J'avais choisi ma musique, une de mes chansons préférées.
"I'm one in a million..."
Dana et Max entrèrent doucement et s'installèrent sur le côté pour me regarder en attendant les autres. Petit à petit, les autres arrivaient et s'asseyaient près de ceux qui étaient déjà arrivés. La chanson terminée, mes élèves m'applaudirent. Je rigolai en leur faisant signe de s'approcher. Je mettais la playlist spéciale échauffement puis me tournai vers eux.
-Alors aujourd'hui, je vous ai préparé une choré sur One in a million, que vous connaissez tous je pense. Je sais, elle est pas très récente mais ce matin, quand je l'ai écouté ça m'a fait tilt! Il fallait que je fasse une choré là-dessus! dis-je en rigolant, tout en m'étirant.
-Pas de problème, c'est cool, affirma Djawad.
-En même temps tout est cool avec toi Djawad, rigola Justin.
Le cours me fit un bien indescriptible, comme à chaque fois que je passais la porte de cette école.
Je poussais en faisant un signe de la main à Steph et me dirigeais vers le bureau d'avocat de la ville. Je voulais rejoindre Alix pendant ma pause déjeuner pour lui parler. Je me décidais enfin à lui parler. Il était en droit de savoir que ma vie n'était pas celle que j'attendais.
-Bonjour, v-vous venez voir votre père? demanda la jeune femme à l'accueil qui rougissait.
-Non, je viens voir Alix. Il est là?
-B-bien sûr, je vais l'appeler.
J'avais arrêté de lui dire qu'elle arrête d'avoir peur de moi juste parce que j'étais la fille de Maître Renders parce que j'avais beau lui dire, ça ne changeait rien!
Au même moment, l'ascenseur s'ouvrit sur mon père au téléphone qui essayait tant bien que mal de retenir un tas de document qui tombait. Toutes les hôtesses d'accueil se précipitèrent pour l'aider. Moi j'essayais de retenir le fou rire qui me gagnait. Il entendit mon rire, leva les yeux vers moi et laissa tomber tous ses document nonchalamment et raccrocha. Je ne pus, cette fois, pas retenir mon rire qui explosa dans la salle. Mon père rigola avec moi pendant bien cinq minutes devant les hôtesses qui se battaient pour prendre les documents éparpillés à la sortie de l'ascenseur. Ascenseur qui essayait vainement de se refermer mais qui, par les gros fessiers des femmes accroupies, n'y parvenait pas. Notre rire ne faisait que redoubler. Je repris difficilement mes esprits et me dirigea vers les hôtesses.
-Laissez, je vais le faire! leur dis-je.
-Oh non! Mademoiselle nous allons le faire pour vous ne vous gênez pas! répondirent-elles.
-Vous me gênez plus qu'autre chose maintenant à vous dandiner comme des pingouins! Poussez-vous! commençais-je à m'énerver.
Deux secondes plus tard, elles étaient toutes à leurs bureaux en train de taper sur le clavier. Le stéréotype parfait de la secrétaire!
-Qu'est-ce que tu fais là? me demanda finalement mon père.
-Je viens voir Alix, je sais normalement c'est pas tout de suite sa pose mais je lui parlerais en même temps qu'il travaille, je me ferais toute petite!
-Oh mais non! Il va prendre sa pose! D'ailleurs ça fait un petit moment que tu es là, tu as prévenu l'hôtesse?
-Oui, mais avec toute cette histoire elle a dû oublier regarde-la!
En voyant nos regards posés sur elle, l'hôtesse nous souria bêtement en se demandant qu'est-ce qu'elle avait bien pu faire.
-Oh oui mince! Je suis désolée mademoiselle je vais le prévenir! s'empressa-t-elle de dire en devenant rouge pivoine.
-Non c'est bon, ça prendra plus de temps qu'autre chose, va le voir directement. Il est au cinquième dans son bureau je pense.
-Ok, bisous papa, à plus tard! lui dis-je en l'embrassant.
-Bisous chérie, à ce soir! dit-il avec un sourire en coin.
-Ce soir ...ce soir... Ce soir?
-Tu sais des tutus, des vestes en cuir et des baskets sur une scène avec des gens qui dansent dessus...
Des tutus, des vestes en cuir et des baskets sur une scène avec des gens qui dansent dessus? Merde!
-Mon spectaaaaaacle! Ouh la la faut que je me grouille! J'ai répétition générale à 14h! Bisous papa à ce soir!
Je mimai un bisous en courant vers l'ascenseur, bousculant tous les gens qui se trouvaient sur mon chemin au passage.
-Poussez-vous, c'est IIIIIIMPORTANT! criais-je en appuyant sur l'étage cinq.
-Et moi c'est DEEEEEEEEEEEEUX PORTANTS! dit une voix derrière moi.
J'aurais reconnu sa voix entre mille. Davrick.
Non je rigole! Alix! Je fis mine de ne pas avoir remarquer que c'était lui et poursuivis.
-Non moi c'est plus IIIIIIIIMPORTANT parce que je vais retrouver L'HOOOOOOOOOOOMME de ma vie.
-Ah, il a bien de la chance cet HOOOOOOOOOOMME! Comment s'appelle-t-il? demanda-t-il, je pouvais entendre son sourire en coin.
-Maître O'Donnells, dis-je en me retournant, le sourire aux lèvres.
-Je crois que c'est moi, dit-il en écartant les gens pour venir près de moi.
Dans cet ascenseur bondé, il se retrouva collé face à moi, il me dépassait de quelques centimètres, ce qui me fit lever la tête pour observer ses magnifiques yeux bleus. Poulette t'as les mêmes j'te ferais dire alors arrête de te vanter! ricana ma conscience.
Je l'égorgeais intérieurement. Alix passa une main dans mon dos et l'autre caressa ma joue. Ces fameux papillons dans le ventre que toutes les filles rêvent d'avoir, et bien à ce moment-là ils étaient bien présents! Je me mis sur la pointe des pieds pour être à la hauteur de son visage et lui fit un sourire à la je-sais-que-tu-as-une-folle-envie-de-m'embrasser-mais-tu-vas-devoir-attendre-on-est-dans-un-ascenseur-bondé! Et lui me rendit mon sourire avec son fameux sourire narquois qui voulait dire bondé-ou-pas-cette-scène-va-être-interdite-au-moins-de-18-ans! Je lui fis un regard de défi à la cap-pas-cap.
-Cap, dit-il simplement, un grand sourire sur les lèvres.
Et c'est à ce moment-là que les portes de l'ascenseur s'ouvrirent.
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