Chapitre 87

Après avoir inspecté quelques corps de plus, je décide de rejoindre mon compagnon. Il est en grande discussion avec Victor, un peu à l'écart du reste de la compagnie. Lorsque le Duc me remarque, son visage s'illumine d'un sourire chaleureux, contrastant étrangement avec le chaos environnant.

— L'héroïne du jour nous fait enfin l'honneur de sa présence.

— Que racontez-vous là ? je réponds en me glissant dans les bras d'Alexander, cherchant instinctivement le réconfort de sa proximité.

Il me serre contre lui, passant distraitement ses doigts dans mes cheveux.

— Le chevalier Guillaume nous a raconté de quelle façon vous lui avez sauvé la vie. Il faut un grand courage pour oser s'opposer ainsi à trois combattants aguerris.

— Un grand courage ou une grande folie, murmure Alexander, son ton oscillant entre l'admiration et le reproche.

Je le regarde d'un air penaud, consciente que j'ai pris de gros risques, mais le prince se contente de secouer doucement la tête.

— En tout cas, laissez-moi vous dire à quel point c'était impressionnant de vous voir combattre tous les deux, reprend Victor avec des yeux ébahis. Avec vos forces réunies, vous étiez presque invincibles. Je n'avais jamais vu ça de ma vie.

— Tes dires sont excessifs, répond Alexander avec une étonnante modestie.

— Je suis sérieux, je ne vous avais jamais vu faire usage d'une si grande quantité de magie en si peu de temps. Votre armure et votre épée étaient comme possédées par une puissance mystique, empêchant quiconque de s'approcher à moins d'un mètre de vous.

— Il a raison, tu sais, intervient le prince Alban en s'approchant de nous. Pour une fois, tu t'en es assez bien sorti.

Quand il entend la voix de son frère, Alexander se retourne vivement vers lui. Il hésite un instant avant de l'attraper dans ses bras, le serrant fort contre lui.

— Alban..., murmure-t-il avec émotion. Je suis heureux que tu ailles bien.

Alban reste immobile quelques instants, surpris par cette démonstration d'affection, avant de répondre maladroitement à l'étreinte d'Alexander.

— Tu t'es pris un coup sur la tête ? demande-t-il en plaisantant à moitié.

— Ne dis pas de bêtise, soupire l'aîné.

Les voir renouer des liens me réchauffe le cœur, mais nous sommes toujours sur le champ de bataille, entourés des corps de nos ennemis. Ce n'est ni l'endroit ni le moment pour ce genre de retrouvailles. Par chance, Victor semble du même avis et s'éclaircit bruyamment la gorge, interrompant la scène avec pragmatisme.

— Je suis désolé de mettre fin à ce moment chargé d'émotions, mais nous ferions mieux d'aller inspecter le manoir avant que les renforts ne rappliquent. Ce n'est pas que je n'aime pas les défis, loin de là, mais je préférerais enquêter sans avoir une dizaine d'hommes me courant après pour me trancher la tête.

Alexander acquiesce, relâche son frère et reprend son sérieux.

— Très bien, va prévenir les hommes que les recherches commencent. Assure-toi aussi qu'au moins trois chevaliers se relaient pour monter la garde et faire des rondes autour du bâtiment. Je ne veux pas que l'on nous attaque par surprise.

Victor hoche la tête avec gravité.

— Et préviens également les gardes qu'il faudra être prudents, ajoute Alexander. Nous ne savons pas ce qui nous attend à l'intérieur.

— Bien, Monsieur.

Je regarde Victor s'éloigner rapidement pour exécuter les ordres, ne pouvant empêcher un sourire de naître sur mes lèvres à la vue de sa démarche assurée. Quand je me retourne vers Alexander, je le surprends en train de me regarder avec intensité.

— Vous savez, commence-t-il avec hésitation. Quoi que nous découvrions dans ce manoir, je serai à vos côtés. Je ne vous lâcherai pas une seule seconde.

— Je n'en doute pas, je souffle en attrapant sa main dans la mienne, touchée par ses mots et son soutien inébranlable.

— Et votre blessure, comment va-t-elle ? demande-t-il avec préoccupation.

— Elle est complètement guérie, vous n'avez pas à vous inquiéter pour ça, je réponds d'une voix tranquille. Allons régler cette histoire au plus vite.

Je lui adresse un petit sourire, prête à rejoindre le reste du groupe.

— Attendez, Enora ! m'interpelle-t-il avant que je ne m'éloigne.

Je tourne la tête vers lui, le regardant avec des questions plein les yeux.

— Vous avez fait preuve d'énormément de courage aujourd'hui. Je suis vraiment fier de vous. De la femme forte que vous êtes devenue.

C'est la deuxième fois aujourd'hui qu'il m'adresse de telles éloges. Je lui souris doucement, sentant une chaleur réconfortante prendre place dans ma poitrine. Il se penche vers moi, passe sa main derrière ma nuque et pose ses lèvres sur les miennes. Sa langue caresse la mienne dans un baiser langoureux, un baiser si intense qu'il me fait oublier jusqu'au temps qui passe. Je suis perdue dans ses bras, envoûtée par ses caresses, quand un toussotement met brutalement fin à notre étreinte.

Je me recule, gênée d'avoir été une fois de plus interrompue par Victor. Ce dernier affiche une grimace dégoûtée, ses yeux nous toisant comme une vision d'horreur.

— Il y a certaines choses que je préférerais éviter de voir, marmonne-t-il.

Alexander, fier de lui, lui adresse un sourire narquois avant de reprendre son sérieux.

— Bien, maintenant que tu es là, nous pouvons y aller.

Nous nous dirigeons vers la grande bâtisse, un pas après l'autre. Le manoir est sombre et effrayant, ne présageant rien de bon, mais je veux croire qu'il nous permettra de trouver des réponses à nos questions. Mettant mes réserves de côté, je pousse la grande porte en fer, prête à affronter les révélations qui nous attendent.

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