Chapitre 69
— Enora, qu'est-ce que c'est que ça ? demande Victor, stupéfait.
Je n'ai même plus la force de redresser la tête pour lui répondre. Ma vision est floue, chaque muscle de mon corps crie de fatigue. Il s'approche doucement, posant une main sur mon épaule avant de s'accroupir à mes côtés. Avant qu'il n'ait le temps de m'interroger davantage, nous entendons les gardes revenir à toute vitesse. Les sabots de leurs chevaux claquent durement contre le sol de la forêt, contrastant avec le calme sinistre qui règne autour d'Alexander.
— Le médecin est enfin arrivé, tout ira bien maintenant.
Victor essaie de m'aider à me relever, mais je ne peux me résoudre à lâcher Alexander. Je n'ai pas le courage de le laisser.
— Enora, Alexander est blessé, il faut laisser le médecin faire son travail.
Même si cela ne me plaît pas de l'admettre, je sais que le Duc a raison. Je me recule légèrement, juste assez pour laisser les gardes attraper Alexander et le déplacer jusqu'au brancard. Même si je sais qu'il sera en sécurité avec eux, mon cœur se serre en sentant la distance entre nous s'agrandir. Sans réussir à m'en empêcher, je me remets à sangloter, me recroquevillant sur moi-même. Mes épaules tremblent, et chaque souffle est un effort surhumain. Victor reste silencieusement à mes côtés, un soutien dont je suis reconnaissante. Après quelques minutes, il m'aide à me relever. Ses gestes sont empreints d'une tendresse inattendue alors qu'il me guide vers un tronc d'arbre.
Après s'être assuré que je suis bien installée, il s'assied à mes côtés, ses yeux remplis d'une inquiétude silencieuse.
— Il va s'en sortir, déclare-t-il à voix basse, essayant de paraître rassurant.
Je ne lui réponds pas, ne faisant pas confiance à ma voix. Je me contente de hocher la tête, les lèvres tremblantes, mes yeux fixant obstinément le sol. Les minutes suivantes me paraissent interminables. Je ne peux m'empêcher de jeter des regards inquiets vers le lieu où Alexander est soigné, chaque seconde étirant mon angoisse.
Quand un garde arrive enfin pour nous donner des nouvelles, je saute presque de mon siège, mon cœur battant à tout rompre.
— Le médecin a fini de...
Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase et me précipite vers le prince. Le médecin se trouve encore à ses côtés, essuyant ses mains ensanglantées. L'inquiétude me serre toujours la poitrine, mais je fais de mon mieux pour ne pas la laisser m'envahir.
— Comment va-t-il ? je demande d'une voix tremblante.
— Mieux que je ne l'aurais pensé, répond l'homme avec précaution.
Il jette un coup d'œil au prince avant de poursuivre.
— J'ai réussi à recoudre la plaie sans problème, mais ce qui est étonnant, c'est qu'il avait déjà quasiment cicatrisé. De toute ma carrière, je n'avais jamais vu une chose pareille, dit-il en fronçant les sourcils.
Je sens un soulagement immense m'envahir à l'idée que le prince est hors de danger, mes jambes cédant presque sous le poids de mes émotions.
— C'est grâce à Enora, elle m'a sauvé la vie, murmure soudain une voix familière.
Je me retourne vers le brancard, surprise d'entendre la voix d'Alexander. Mon cœur s'emballe en le voyant réveillé. Sans réfléchir, je me jette dans ses bras, les larmes aux yeux.
— Ouille, doucement, ma belle, je suis encore blessé, dit-il avec un petit rire.
Je me recule précipitamment, penaude, mais le prince m'attire délicatement contre lui. Son sourire, bien que faible, illumine son visage tout entier.
— Je ne savais pas que vous étiez guérisseuse, souffle-t-il avec un mélange d'étonnement et de fierté.
— Je ne le savais pas non plus, je réponds en haussant les épaules, un léger sourire aux lèvres.
Alexander caresse le côté de ma joue, ses doigts traçant une ligne brûlante sur ma peau. Tandis que ses yeux caressent mon visage, ils semblent s'emplir de regrets et de tristesse.
— Je voudrais m'excuser pour mes paroles d'hier soir, soupire-t-il doucement.
— N'en parlons plus, c'est du passé.
Il secoue légèrement la tête avant de plonger son regard dans le mien.
— La vérité, Enora, c'est que j'avais peur. Peur de ce que je ressens pour vous. Peur de ce que je pourrais ressentir si un jour, je venais à vous perdre. Et par crainte, j'ai agi comme un idiot. Je sais que je ne vous mérite probablement pas, que je ne pourrai jamais vous rendre véritablement heureuse, et pourtant, je suis assez égoïste pour vous vouloir quand même. M'accorderez-vous une chance de me faire pardonner ?
À court de mots, je me contente de hocher timidement la tête. Alexander m'adresse le sourire le plus éblouissant que je n'ai jamais vu. Il passe sa main dans ma nuque et m'approche de lui. Ses mouvements sont lents et précautionneux, comme s'il avait peur de me briser. Lorsque ses lèvres se posent finalement sur les miennes, je sens mon cœur prêt à exploser de bonheur. Je n'ai plus aucun doute : Alexander est l'homme que je veux, et je suis prête à me battre pour le garder à mes côtés.
Au bout de quelques secondes, il se recule légèrement.
— J'ai eu peur pour vous, vous savez. Quand je vous ai vu vous effondrer... souffle-t-il en secouant doucement la tête. Qu'est-ce qu'il vous a pris de nous rejoindre en pleine nuit ?
— J'ai eu le sentiment que quelque chose de mauvais allait arriver, je ne pouvais pas rester sans rien faire. Pas quand votre vie était en jeu, j'explique avec sincérité.
Un léger sourire prend place sur ses lèvres, ses yeux reflétant toute l'affection qu'il ressent à mon égard.
— Vous n'auriez pas dû vous mettre ainsi en danger, mais je vous remercie de m'avoir sauvé, poursuit-il à voix basse, son regard ancré dans le mien. Je ne sais pas ce qu'il me serait arrivé si vous n'étiez pas intervenue.
— Vous ne vous seriez sans doute pas pris de flèche si vous n'aviez pas été distrait par cette charmante demoiselle, intervient Victor, sa voix mi-sérieuse, mi-taquine.
Le prince relève la tête dans sa direction, étonné de le trouver devant lui. Trop pris dans notre discussion, nous ne l'avions pas entendu arriver.
— Pourquoi êtes-vous si surpris de me voir ? Je n'ai pas le droit de venir prendre des nouvelles de mon meilleur ami ? J'étais inquiet pour vous, vous savez, continue-t-il en reprenant tout son sérieux.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top