Chapitre 62
Le lendemain matin, nous rentrons au palais, le cœur fatigué mais rempli de détermination. Avant notre départ, Marius m'a confié une missive à remettre au roi Charles, et je ne cesse de me questionner sur ce qu'elle peut bien contenir. Cette question me taraude l'esprit, mais je ne peux me résoudre à assouvir ma curiosité.
Une fois de retour au palais, nous nous mettons à la recherche de nos amis pour leur faire part de nos péripéties et, surtout, de nos découvertes. Nous les trouvons dans le petit salon, assis devant la cheminée. L'atmosphère est tendue, ils semblent attendre nerveusement notre retour. Dès notre entrée, ils se lèvent précipitamment de leurs sièges.
— Vous êtes enfin là, s'exclame Victor, avançant à grands pas vers le prince.
Les deux hommes se prennent dans les bras et se donnent de grandes tapes dans le dos, sans doute la manière la plus masculine qu'ils aient trouvée pour se montrer leur affection.
— Que s'est-il passé pour que vous reveniez dans cet état ? demande Hannah, inquiète en voyant mes habits froissés et mes cheveux en désordre.
— Rien de grave, nous avons juste été surpris par la pluie, je réponds en tentant de minimiser les faits.
Mon amie fronce les sourcils, suspectant qu'il y a plus que cela, mais elle ne commente pas. Nous prenons place dans le salon, nous installant confortablement près de la cheminée. La chaleur de la pièce est agréable après ce long voyage. Je prends une profonde inspiration, me préparant à leur faire part de nos découvertes.
— Alexander a pu obtenir l'emplacement de leur centre de commandement.
Victor hausse un sourcil, une pointe d'ironie dans le regard.
— Et pour ça, j'imagine qu'il a simplement eu à demander gentiment.
Être éloigné de son ami le met décidément de bien mauvaise humeur. Si cela continue, je vais finir par demander au majordome de lui apporter une verveine. Au vu du regard noir qu'Alexander lui lance, il semble être du même avis que moi.
— Désolé, je n'aime juste pas être mis sur le banc de touche, s'excuse Victor, ses traits se détendant légèrement.
— Personne n'a été blessé, c'est tout ce qui compte, soupire le prince.
Victor acquiesce et pose sa main sur son épaule, la tapotant doucement. Ils ont une relation particulière, faite de taquineries et de querelles fraternelles, mais n'importe qui peut voir la grande loyauté qui les unit. Ils se battraient l'un pour l'autre jusqu'à la mort si la situation l'exigeait, cela, je n'en ai aucun doute.
— Comment allons-nous procéder ? demande finalement Victor.
Alexander cogite quelques instants, un air sérieux sur le visage. Je peux presque voir les rouages tourner dans son esprit, torturant ses méninges pour les pousser à réfléchir toujours plus vite. Finalement, il se redresse et prend la parole d'une voix forte.
— Nous allons mobiliser nos troupes et attaquer leur repaire pour en finir une bonne fois pour toutes avec cette menace. Mais avant ça, je voudrais aller faire du repérage.
— Quand voulez-vous partir ? je demande, me préparant mentalement à reprendre la route.
Son regard plonge dans le mien, empreint de prudence.
— En fait, je pense qu'il serait préférable que vous restiez au palais pour poursuivre votre entraînement.
— Il en est hors de question, je réplique immédiatement. C'est moi qui vous ai impliqué dans cette histoire, il n'est pas envisageable que je ne vous accompagne pas.
Une sensation de déjà-vu m'envahit à l'idée qu'Alexander veuille me mettre à l'écart. Nous nous faisons face, une tension palpable dans l'air. Victor se tient un peu à l'écart, les bras croisés sur la poitrine, observant silencieusement la scène. Après quelques secondes, Alexander soupire et m'entraîne dans un coin de la pièce.
— Enora, s'il vous plaît, soyez raisonnable. Tant que vous n'avez pas débloqué toutes vos capacités, c'est trop risqué pour vous de m'accompagner.
— Pourtant, je suis venue avec vous pour attaquer leur planque.
— À ce moment-là, je n'avais pas d'autre choix.
— Vous me surprotégez, je souffle avec frustration.
— Ce n'est pas le cas, je vous assure, poursuit-il à voix basse. Voyez ça comme une opportunité de vous entraîner, de débloquer vos pouvoirs et de vous préparer à la bataille à venir. Je suis certain que sans moi pour vous traîner dans les pattes, vous ferez des progrès phénoménaux. Et puis, je préfère me faire ma propre idée de la dangerosité de la situation avant de vous envoyer dans la gueule du loup.
Je ne suis pas d'accord avec sa façon de voir les choses, mais cela semble être la meilleure manière de procéder si je veux être prête à m'attaquer à la Confrérie. Je suis déterminée à redoubler d'efforts pour atteindre mes objectifs.
— Combien de temps serez-vous partis ?
— Pas très longtemps, quelques heures tout au plus. Ne vous en faites pas, je n'aurai même pas le temps de vous manquer que je serai déjà de retour dans vos bras, répond-il avec un clin d'œil.
Dieu que cet homme m'exaspère. Je lève les yeux au ciel et me détourne, me dirigeant à nouveau vers les canapés. Alexander me rejoint rapidement et place un bras autour de mes épaules. L'atmosphère semble vibrer d'excitation alors que Victor et lui plongent dans une discussion animée, réfléchissant à la meilleure manière de mettre en place leur expédition. Quant à moi, je les écoute en silence, ne pouvant m'empêcher d'être inquiète pour eux.
— Ne vous en faites pas, nous serons prudents, déclare le Duc, remarquant mon malaise.
J'acquiesce, peu convaincue. Connaissant Alexander, il n'est pas du genre à éviter les dangers. Au contraire, il fonce tête baissée dans la bataille, ce qui n'est pas pour me rassurer. Je décide cependant de ne pas me torturer l'esprit plus longtemps et annonce à mes amis que je remonte dans mes quartiers. Il faut que j'aille enfiler quelque chose de plus convenable avant d'aller apporter la lettre à mon grand-père.
— Je viens avec vous, lance Alexander en se relevant de son fauteuil.
— Vous avez besoin de repos, intervient Hannah avec sollicitude. Je vais vous monter un encas, essayez de vous restaurer avant de songer à vous entraîner.
Un sourire timide naît sur mes lèvres, touchée par l'attention de mon amie. Je sais néanmoins que je n'ai pas le luxe de pouvoir m'accorder du repos. Après cela, nous saluons Victor et montons tranquillement dans la chambre. Alexander me laisse entrer la première, refermant doucement la porte derrière nous. Quant à moi, je m'approche de la fenêtre, contemplant les jardins éclairés par la lumière du crépuscule.
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