Chapitre 59

— Seulement vous deux ? s'étonne Marius. Ce n'est pas prudent. Je vous accompagnerais bien, mais j'ai peur qu'un vieillard dans mon genre ne vous soit pas d'une grande utilité.

Je comprends aisément pourquoi le prince veut procéder de cette façon. Ce serait plus sage d'aller chercher des renforts au palais, mais si leur repaire se trouve vraiment qu'à quelques centaines de mètres d'ici, cela nous ferait perdre un temps considérable. Il faut arrêter la Confrérie avant qu'elle ne nuise à d'autres personnes. Même si c'est risqué, il vaut mieux y aller maintenant et prier pour que l'effet de surprise joue en notre faveur.

— Vous nous aidez déjà énormément. Il n'est pas nécessaire de prendre plus de risques, je dis doucement à Marius.

— Cela ne me plaît pas d'envoyer la petite-nièce d'Anastasie en plein cœur du danger, mais je suis certain que votre homme veillera sur vous.

— C'est une évidence, répond Alexander avec une assurance tranquille.

— Une dernière chose, les enfants. Ne sous-estimez pas ces individus. Il ne s'agit pas d'une petite organisation inoffensive, loin de là. Restez toujours sur vos gardes.

— Nous redoublerons de vigilance, promet le prince.

Marius nous tend un plan qu'il a grossièrement dessiné sur un bout de papier. Il désigne une petite croix située au nord-est de sa cabane.

— C'est ici que vous trouverez leur campement. Si vous voulez passer inaperçus, allez-y en courant. J'ai entendu votre cheval arriver à des kilomètres.

— Mais nous ne pouvons pas le laisser dans la forêt... je réplique.

— Ne vous en faites pas, je m'en occupe. Maintenant, allez-y avant qu'il ne fasse complètement nuit, conclut-il en nous chassant d'un geste de la main.

Nous saluons le vieil homme avant de nous diriger vers l'arrière de la cabane. De fines gouttes tombent du ciel, trempant nos vêtements. Alexander commence à se déshabiller, attachant soigneusement sa chemise autour de sa taille.

— Que faites-vous ? je demande, surprise.

— Je mets ma chemise à l'abri pour que vous ayez de quoi vous couvrir si vos vêtements finissent trempés, répond-il calmement.

— Mais vous allez avoir froid !

— C'est toujours mieux que de laisser d'autres hommes voir votre chemisier complètement transparent, dit-il en lorgnant ma poitrine.

Je secoue la tête, amusée. Son idée n'est pas mauvaise, même si, d'un certain côté, je suis persuadée que la gorge de ces hommes serait bien plus rapidement tranchée s'ils avaient le malheur de me regarder ainsi. Alexander est possessif, ce qui peut avoir des avantages, surtout sur le champ de bataille. Son regard suit les courbes de mon corps, faisant grimper mon excitation en flèche. Une vague de chaleur m'envahit, contrastant avec le froid de la pluie qui s'abat sur moi.

— Je ne pourrais pas supporter que quelqu'un d'autre vous regarde de cette manière, murmure-t-il d'une voix suave.

Il s'approche de moi, faisant accélérer les battements de mon cœur. Mon regard suit une goutte qui descend lentement le long de son flanc. J'ai envie de toucher sa peau, de l'embrasser avec toute la passion qu'il fait naître en moi. Mais je lutte contre mes pulsions, consciente que ce n'est ni le lieu ni le moment pour nous laisser aller.

Il attrape ma main, et nous nous élançons dans les bois. L'odeur de la pluie emplit la forêt, et le sol devient une masse boueuse et glissante. Nos vêtements collent à notre peau, nos chaussures s'enfoncent profondément, mais rien ne nous arrêtera.

Nous arrivons rapidement devant une maison isolée, presque à l'abandon. Alexander m'entraîne derrière un gros buisson pour nous mettre à couvert. Je reprends doucement mon souffle en observant les alentours. Un homme monte la garde devant la cabane. Même dans l'obscurité, il nous remarquera bientôt.

— Il faut le distraire, je murmure à Alexander.

— Je vais m'occuper de lui.

Je cherche rapidement une solution. J'ai besoin d'attirer l'attention du garde sans alerter ceux qui sont à l'intérieur. Peut-être un caillou lancé près de lui, mais c'est risqué. Alexander avance dangereusement vers le garde, et je crains qu'il ne se fasse repérer. Le temps presse. Dans une impulsion, je me jette au sol en feignant de m'être tordu la cheville. Le bruit de ma chute fait sursauter l'homme et immobilise Alexander.

— Aïe, ce n'est pas possible d'être aussi maladroite, je grogne doucement. Déjà que je me perds, il faut en plus que je me blesse... Je n'ai vraiment pas de chance.

L'homme hésite, jette un œil vers la cabane avant de tourner de nouveau son attention vers moi. Mon cœur tambourine alors que je croise les doigts pour qu'il ne décide pas d'appeler des renforts. Finalement, il fait un pas en avant. Alexander ne lui laisse pas le temps d'approcher davantage. Silencieusement, il se glisse derrière lui et lui tord le cou d'un coup sec, émettant un craquement audible. Il dépose le corps inanimé au sol avant de revenir rapidement vers moi.

— Madame, dit-il en me tendant la main. Laissez-moi vous relever.

Mes doigts tremblent légèrement lorsque je les pose dans la paume d'Alexander. Même si ces hommes sont des monstres, je ressens un pincement au cœur pour celui qui vient de perdre la vie. Il avait probablement une famille quelque part...

— Enora, regardez-moi, murmure Alexander d'une voix douce, mais ferme.

Il détache sa chemise froissée et la pose sur mes épaules.

— C'est eux ou vous, chérie. Ne l'oubliez pas.

Ses paroles me rappellent pourquoi nous sommes là. Les souvenirs de ce que cette secte m'a infligé renforcent ma détermination. Ces hommes méritent de payer pour leurs actes. Je serre la main d'Alexander, lui signifiant que je suis prête.

— Allons-y. Les choses sérieuses vont commencer.

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