Chapitre 24
Il me laisse tout juste le temps de me redresser avant de débuter ses explications. Il me décrit avec moult détails les zones les plus facilement accessibles en cas de combat rapproché, ainsi que la conduite à tenir pour provoquer un maximum de dégâts en un minimum de coups. Il me donne également bon nombre de précisions sur les armes les plus mortelles, les manœuvres d'esquive utilisables en cas de danger, ou bien encore sur l'art du camouflage. Tous ses dires sont illustrés de larges mouvements de mains, donnant vie à ces notions quelque peu abstraites à mes yeux.
Quand je l'écoute parler ainsi, captivée par sa passion et ses connaissances aussi pointues, je comprends tout de suite pourquoi, malgré son jeune âge, il est considéré comme l'un des plus grands guerriers du royaume de Lumia. À cette pensée, je sens mon cœur se gonfler d'orgueil, bien que je n'en sache pas véritablement la raison. Je secoue doucement la tête, tentant de chasser ces pensées envahissantes, sans grande réussite.
— Tu m'écoutes ? questionne Alexander d'un ton suspicieux.
Il plisse les yeux dans ma direction, me transperçant de son regard de braise. Je passe ma main dans mes cheveux et lâche un petit rire nerveux, gênée d'avoir été démasquée.
— J'imagine que c'est suffisant pour le moment, soupire le prince. Je ne peux pas trop t'en demander. Viens, allons faire une pause à l'auberge.
J'aurais pu le contredire, mais en vérité, mon cerveau est sur le point d'exploser. J'ai plus que besoin d'un peu de repos. Je le suis donc sagement, essayant une dernière fois de me repasser en mémoire tout ce qu'il m'a appris aujourd'hui.
Une fois de retour à l'auberge, il se dirige immédiatement vers la grande salle. Je regarde les escaliers, partagée entre le désir de le suivre et celui de rejoindre le confort de ma chambre. Finalement, ma curiosité l'emporte. Quand je franchis la porte, il est déjà en grande discussion avec Victor, écoutant ce qui semble être un rapport.
— Les trois gardes sont partis en éclaireur comme vous l'aviez demandé. Si les conditions sont favorables, ils devraient être de retour d'ici deux ou trois jours, maximum quatre.
— Très bien. Nous n'avons plus qu'à espérer qu'ils nous ramèneront des informations utiles, acquiesce le prince avec sérieux.
— Tout à fait. D'ailleurs, que comptez-vous faire en attendant qu'ils reviennent ? Avez-vous prévu de partir enquêter dans un autre village ?
À ce moment-là, Alexander me remarque et me fait signe de venir m'asseoir à ses côtés. Il attend que je m'installe avant de formuler sa réponse au Duc.
— Non, je pense que nous allons rester ici pour l'instant. Cela fait longtemps que les chevaliers ne se sont pas entraînés en dehors du château, un peu d'exercice ne pourra pas leur faire de mal.
— Vous vous chargerez de l'entraînement ? demande Victor avec un sourire diabolique.
Je peux voir dans ses yeux qu'il espère de tout cœur que le prince accepte, sans doute dans l'espoir d'avoir le droit à un joli spectacle. Après ce que j'ai vécu aujourd'hui, je ne doute pas qu'avoir le prince comme entraîneur puisse s'apparenter à une forme de torture. Et pourtant, je suis certaine qu'il a été clément avec moi. Je n'ose imaginer ce que ces pauvres chevaliers doivent endurer.
— Non, je t'accorde l'honneur pour cette fois. J'ai moi-même des cours particuliers à donner.
Victor nous regarde, le prince et moi, bougeant ses sourcils dans une grimace suggestive. Alexander lève les yeux au ciel, mais ne contredit pas pour autant les pensées plus qu'évidentes de son ami.
— Je vais vous laisser discuter, il semblerait que vous ayez des malentendus à régler, je déclare avec un sourire poli. Nous nous verrons plus tard.
— Ne pars pas trop loin, nous n'en avons pas fini pour aujourd'hui, réplique Alexander, toute trace d'humour disparue.
— Oui, Votre Majesté, je soupire avec résignation.
Après tout, comme me dit toujours mon père, il n'y a pas de repos pour les braves.
Voulant mettre cette pause à profit, je décide de retrouver Hannah pour partager avec elle les détails de mon entraînement. Mais à ma grande surprise, elle n'est pas dans notre chambre. En regardant par la fenêtre, je la repère au loin, en grande discussion avec un des chevaliers de Lumia. Curieuse, je décide de les observer discrètement.
Elle rit légèrement, ses yeux pétillants fixés sur l'homme en face d'elle, quand soudain une brise la décoiffe. Sans hésitation, le chevalier se penche vers elle, replaçant délicatement une mèche de cheveux derrière son oreille. Je retiens mon souffle, captivée par la scène qui se déroule devant mes yeux. Un léger rougissement teinte les joues d'Hannah tandis que son regard croise celui du chevalier. Ils semblent apprécier la compagnie l'un de l'autre et je ne peux qu'être heureuse pour ma douce amie.
Un sourire tendre étire mes lèvres alors que je me détourne, les laissant savourer ce précieux moment à l'abri de mon regard indiscret.
...
Quand je redescends plus tard dans la journée, Alexander se trouve toujours dans la grande salle. Pendant mon absence, il a recommencé à interroger le gérant de l'auberge, espérant sans doute obtenir des informations utiles sur la disparition de la princesse. Le pauvre homme tremble de la tête aux pieds face aux questions inquisitrices du prince, mais tente courageusement d'y répondre.
— Je suis désolé Monsieur, mais je n'ai jamais entendu parler de la moindre prophétie, bredouille-t-il.
— Tant pis, soupire Alexander. Et rien ne vous semble bizarre dans les parages ?
— Non, rien du tout.
— Aucune agression ? Aucun vol ? Aucun nouvel arrivant suspect ? insiste le prince.
L'homme réfléchit quelques instants avant que son visage ne s'éclaire.
— Maintenant que vous le dites, quelques bandits se sont mis à rôder dans les environs il n'y a pas si longtemps. Ils ne sont pas très dangereux, mais embêtent beaucoup les villageois en leur volant bois et gibiers. Cela dit, ça fait quelques jours qu'ils se sont faits plus discrets.
— Depuis quand ?
— Trois jours, je dirais, j'espère qu'ils ne préparent pas un mauvais coup, soupire le gérant de l'auberge.
Alexander et Victor échangent un regard entendu. Il nous faudra être prudents quand nous nous promènerons aux abords du village. Cependant, je ne doute pas une seule seconde que le prince saura nous préserver de tout danger.
— Nous essayerons de nous occuper d'eux avant notre départ, promet Alexander.
L'aubergiste le regarde avec de grands yeux, surpris par sa déclaration. Pour ma part, cela ne m'étonne guère. Il a beau jouer les durs, Alexander semble toujours répondre présent quand quelqu'un a besoin de lui. Preuve en est qu'il est ici aujourd'hui pour enquêter sur la disparition d'une femme dont il ne garde aucun souvenir. Si cela ne témoigne pas de la grandeur de son cœur.
— Allez, viens Alice, retournons y avant que le soleil ne se couche.
— Ce n'est pas obligé, vous savez, je tente d'une petite voix.
Il me lance un regard entendu, comprenant bien vite ce que j'ai derrière la tête.
— Au contraire, nous avons encore beaucoup de travail si nous voulons que tu sois capable de battre ne serait-ce qu'un bébé hérisson.
— Hé, je m'exclame en lui frappant le bras.
Le prince lâche un petit rire, et c'est sur cette note joyeuse que l'entraînement se poursuit jusqu'à la tombée de la nuit.
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