Chapitre 17

Enora

Lorsque je me réveille, le soleil pointe à peine à l'horizon, teintant le ciel de nuances d'or et de rose. Même s'il ne doit pas être plus de sept heures, je me redresse d'un mouvement vif, résolue à ne pas rester enfermée plus longtemps.

Je m'approche prudemment de la porte, mes pas amortis par l'épais tapis de laine. Je tends l'oreille, espérant capter un murmure, un mouvement de l'autre côté. Rien. Juste un calme presque oppressant. Après un instant d'hésitation, je prends une profonde inspiration et appuie sur la poignée. La charnière émet un long grincement aigu, me figeant sur place. Je ferme les yeux un instant, redoutant de croiser le regard désapprobateur d'un garde ou, pire encore, le regard furieux du prince. Mais quand je les rouvre, je constate que le couloir est désert.

Sans perdre un instant, je sors de la chambre, déterminée à retrouver mon amie. Je prends une première intersection à droite. Puis une à gauche, traversant des couloirs qui se ressemblent tous. Mais après plusieurs minutes à tourner en rond, je suis forcée de me rendre à l'évidence : je ne sais pas où aller. Je songe un instant à demander de l'aide à un des gardes postés dans le couloir, mais l'idée d'être renvoyée de force dans la chambre me fait hésiter. Mais je n'ai plus vraiment d'autre choix.

— Excusez-moi ?

Aucune réponse.

— Monsieur ?

Toujours rien. Le garde reste parfaitement immobile, ses yeux fixant un point invisible devant lui, comme si je n'existais pas. Tournant les talons avec un soupir excédé, je percute quelqu'un de plein fouet et bascule en arrière.

— Mademoiselle, attention !

Des bras forts s'enroulent autour de ma taille, m'empêchant de tomber au sol. Quand je lève les yeux, je découvre un homme charmant qui me dévisage, son expression partagée entre la surprise et la curiosité. Je recule précipitamment, m'inclinant devant lui.

— Toutes mes excuses, monsieur, je ne vous avais pas vu.

— Enora ?

Ses yeux gris me scrutent avec attention. Je reste figée, cherchant à comprendre pourquoi cet inconnu semble me connaître. Mais avant que je puisse poser la moindre question, des gardes surgissent de toute part, leurs bottes frappant le sol avec fracas.

— Prince Alban, êtes-vous blessé ?

— Que s'est-il passé ?

— Cette femme vous a-t-elle agressé ?

Les questions fusent à toute vitesse. Les gardes se pressent autour de nous, leurs visages tendus, leurs mains déjà prêtes à dégainer leurs armes. En une fraction de seconde, l'atmosphère devient étouffante.

— Non, pas du tout, c'était un accident...

Je tente de répondre, mais mes mots tombent dans le vide. Un des gardes m'attrape brusquement par le bras et me pousse au sol sans ménagement. Le choc m'arrache un cri de douleur, mais c'est surtout l'humiliation qui me brûle de l'intérieur. Jamais on ne m'a traitée ainsi. Et ça ne va certainement pas commencer aujourd'hui.

Alors que je m'apprête à leur faire entendre quelques-unes de mes injures les plus inventives, le prince Alban s'interpose.

— Assez ! Cette femme n'est pas une menace.

D'un simple regard, Alban congédie les gardes et ils obéissent sans protester.

— Permettez-moi de vous aider, dit-il en tendant la main vers moi.

J'hésite une fraction de seconde, mais la sincérité dans son regard me pousse à accepter. Ses doigts fermes enveloppent ma main alors qu'il me relève avec une aisance déconcertante.

— Je vous remercie.

Il incline légèrement la tête, un sourire discret flottant sur ses lèvres. Ses traits, maintenant que je les observe plus attentivement, possèdent une ressemblance frappante avec ceux du prince Alexander. Il lui ressemble comme deux gouttes d'eau, si ce n'est une musculature un peu plus fine et des cheveux coupés plus courts.

Voyant mon regard insistant, il esquisse un sourire maladroit, presque timide.

— Je vous présente mes excuses pour cet incident déplaisant, dit-il en rompant le silence. Je vous assure que cela ne se reproduira plus.

— C'est à moi de m'excuser, Votre Altesse. Je ne regardais pas où j'allais.

Il hausse les épaules avec nonchalance, comme si tout cela lui importait peu.

— Ce n'est rien, Enora, répond-il d'un ton plus doux. Êtes-vous blessée ?

— Non, tout va bien. Plus de peur que de mal.

Un éclat de soulagement traverse son regard, et il me tend le bras.

— Permettez-moi de vous raccompagner. Ce palais peut être un véritable labyrinthe.

Je ne réfléchis pas longtemps avant d'accepter. Mieux vaut sa compagnie que de risquer de me perdre à nouveau dans ces couloirs interminables.

— Je ne savais pas que vous étiez en visite au palais, hasarde-t-il pour briser le silence alors que nous avançons côte à côte.

— Je ne le suis pas. Pas officiellement, en tout cas.

Il arque un sourcil, visiblement surpris, mais il se retient de poser davantage de questions.

— Votre secret est en sécurité avec moi.

J'incline légèrement la tête en guise de remerciement.

— Je vous en suis reconnaissante.

Il y a quelque chose de familier dans sa présence, une douceur étrange qui me donne l'impression que nous avons partagé bien d'autres moments comme celui-ci. Ce qui est sans doute le cas, même si ma mémoire me fait encore défaut.

Alors que nous atteignons les escaliers principaux, je m'arrête.

— Je pense pouvoir me débrouiller à partir d'ici. Merci pour votre aide.

Mais alors que je m'apprête à m'éloigner, il retient doucement mon bras, me montrant une scène pour le moins singulière.

— Mon Dieu, que vais-je faire ? Le prince va me tuer s'il apprend que je l'ai perdue, grommelle l'homme en parcourant frénétiquement la pièce.

Il farfouille sous les fauteuils, décolle les tableaux, interpelle chaque personne qui passe près de lui comme si sa vie en dépendait.

— Ce n'est pas possible, où est-elle passée ?

Je fronce les sourcils, perplexe. Alban, à côté de moi, semble presque amusé de la situation. Il se penche vers moi, chuchotant quelques mots à mon oreille.

— Je crois que quelqu'un vous cherche.

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