Chapitre 6: Le calme ne dure jamais très longtemps

Durant le trajet du retour à Paris j'ai parlé à personne. En fait, j'ai repoussé sans cesse la discussion avec ma sœur même si je sais que ça va me faire mal quand je devrais lui dire. En plus, Layal me manque déjà, je la reverrais seulement en février pour notre soirée d'anniversaire. A vrai dire, j'ai parlé à personne pendant les deux jours sauf à Ivàn et Sarah.

A chaque fois que je croise le regard de Deen j'ai le cœur qui me serre. Je suis tellement bête d'avoir fait ça. Le reste des vacances, je l'ai passé à regarder des films sous ma couette. Oui ça fait cliché. Mais je voyais pas d'autres solutions.

Puis BAM, ça m'est tombé dessus. Ma sœur a débarqué, la rage aux yeux. Je l'avais jamais vue comme ça. Tout de suite, j'ai senti que quelqu'un était passé aux aveux à ma place.

Si elle savait que c'était une erreur, que je ne ressens rien pour lui, que...

Sofia- Deen vient de m'appeler.

Roxane- Et ?

Je suis vraiment vicieuse parfois.

Sofia- Tu... tu te doutes bien de quoi je vais te parler !

Roxane- Dis moi.

Sofia- Rox' c'est vraiment pas le moment de jouer à la provoc avec moi !

Roxane- Ben dis le !

Je sais pas ce qu'il m'arrive mais je sors que des phrases nulles.

Sofia- C'est pas à moi de le dire, ASSUME UN PEU !

Je prends ma respiration profondément espérant qu'elle me pardonnerait.

Roxane- ... C'était pas voulu, c'était sur le moment.

Sofia- Bien sur, tu vas pas me faire croire qu'une fille qui a autant de caractère que toi n'a pas su se défendre quand il t'as embrassé ! Avoue juste que t'es une salope et que tu l'as voulu ! Parce qu'au fond Nouvel An ou pas, tu sais très bien que tu plais plus aux garçons que moi ! Et tu te sers de ton charme pour me tromper moi, ta sœur !

Un silence de mort se répand dans la chambre. L'atmosphère est lourde.

Pitié, sortez moi de là, avec la phrase qu'elle vient de sortir, on se croirait dans un mauvais film en fin d'après midi sur TF1.

Roxane- N'importe quoi, qu'est ce que tu racontes !

Là j'avoue qu'elle m'a piqué là où il fallait pas ! Parce que je suis la première à être complexée par ma taille très mince, ma poitrine quasi inexistante et mes boutons et c'est elle qui me dit que je suis plus belle !

Roxane- Tu sais très bien que je me hais physiquement alors je vois pas comment j'aurais eu l'audace volontairement de l'embrasser ! En plus c'est lui qui l'a fait pas moi !

Sofia- Mais quelles raisons t'aurais de te sentir laide ? T'as un corps parfait, t'es mince, grande, ventre plat comme dans les magazines ! Et puis arrête de rejeter la faute sur les autres, tu veux pas assumer c'est tout ! Franchement, tu me déçois, je te pensais plus raisonnable que ça, ROXANE !

Roxane- Attends je...

TROP TARD. Elle a claqué la porte.

Sofia- Viens plus me parler, je veux pas te voir !

Roxane- Moi non plus !!

Sofia- Très bien, mais ne reviens pas me voir pour me demander des conseils par rapport à Ken parce que tu sais que t'arrivera jamais à sortir avec lui parce que du cran t'en as pour embrasser vite fait un gars mais quand il faut passer aux choses sérieuses là il n'y a plus personne !

Une violente tension me broie le ventre. Elle me déçoit. Au fond, elle sait faire mal aux gens, elle sait ce qui les touche, moi j'en suis incapable. Quoi que.

Moi- Et toi ne viens pas pleurer parce que Deen et aucun autre mec ne veut de toi ! En même temps t'es tellement froide, distante qu'aucun gars voudrait ...

Non cette réplique était vraiment nulle, mais c'est dans mes gènes, j'ai besoin d'avoir le dernier mot sinon j'ai l'impression de me faire envahir par l'autre.

Roxane- Et arrête de trop regarder Joséphine ange gardien, ça te rends pas plus lucide ! Parce que tes phrases toutes claquées de meuf outrée ça va 2 secondes chérie !

Grand mère- BON CA SUFFIT LA STOOP !

Ca me choque.

C'est la première fois que j'entends ma grand-mère crier aussi fort.

Je m'assois sur le rebord de ma fenêtre et met la musique à fond dans mes oreilles. Au fond, je regrette, si mes parents me voyaient ils seraient tellement en colère contre nous. C'est ce que mes grands parents nous ont toujours dit quand on s'embrouillait avec ma sœur.

Ca me fait repenser à un jour de 3ème où avec Sofia on s'étaient gravement disputées pour un garçon (encore une fois). Ma mamie m'avait dit quand je prenais le goûter seule « Tu sais Roxane, si ta mère et ton père te voyaient ils te diraient que c'est mal ce que tu fais ! Ils ne seraient pas fiers de vous ! ». Ce à quoi j'avais répondu : « Ils sont morts grandma. ». Elle avait soudainement arrêtée de remuer la pâte d'un de ses gâteaux et m'avais regardé d'un air mi désolé mi colérique. Ma chaise avait grincé sur le sol. J'étais partie dans ma chambre.

Ma foi, je préfère ne pas remuer trop de souvenirs au risque de finir en larmes une fois de plus et comme d'habitude d'en vouloir à la vie d'avoir une destinée aussi merdique.

Je regarde loin au dessus des immeubles. Le soleil se couche sur des tons mauves et pastels, 7 janvier 2008, Paris.

9 janvier :

Bon,hier Sofia était soi disant malade du coup elle est pas venue au lycée. Moi j'ai du prétexter une excuse bidon comme celle ci pour éviter qu'on me pose trop de questions. A midi, aujourd'hui j'ai parlé avec Eff Ge qui prépare sa soirée, Antoine, Ivàn et Darryl zeuja.

Eff Gee- Du coup vous venez à ma réssoi ce week end ?

DZ- Ouais je sais pas gros, longtemps que mes darons me demandent de passer du temps avec eux !

Eff Gee- Tu t'en fous frère tu les verras plus tard ! C'va être THE soirée, y aura quasiment tout le lycée !

Ivàn rigole. Je sourie gênée.

Eff Gee : Tu viens toi (en me regardant) ?

Roxane- Qui vient ?

Eff Gee- Ben tout les terminales presque à part les plus chelous tu vois !

Roxane- Je sais pas trop.

Eff Gee- Oh mais vous fatiguez wesh ! Les gars !

On rigole tous ensemble et ça le soûle du coup il boude comme un gamin de quatre ans.

Au fond la soirée me tente vraiment, mais ça, ça serait sans compter mon éternel problème : Ken.

Quand on remonte en cours, on a histoire. Pas de chance je suis à côté du fameux intéressé. Il me regarde d'un air froid et consterné. Le pire c'est que toute cette réflexion pendant les vacances sur mes probables sentiments envers lui n'a mené à rien sachant que je réfléchis beaucoup trop et que je finis toujours par retourner à la case départ sans solution.

Alicia(une autre élève assise derrière nous)- Vous auriez pas un manuel en plus s'il vous plait ?

Moi-( à Ken) T'as le tien ?

Je sais pas pourquoi j'y suis allé aussi brusquement mais y a un moment où il faut briser la glace.

Il pouffe de rire et s'affale contre le mur sur sa chaise. Je regarde Alicia désemparée. Elle me lance un sourire timide et se rassoit sans rien dire. L'heure passe lentement, L E N T E M E N T...

Je repense à ma sœur, au mal que je lui ai fait. « Promis ce soir je vais la voir pour m'excuser » me dis je.

Mais c'est sans connaître le caractère de ma sœur que je me suis faite cette réflexion. Je suis actuellement dans le bus comme d'habitude rempli de touristes avec des sacs « I Love Paris » et des appareils photos en bandoulière, de vendeurs de tours Eiffel, de mamans traînant leur poussette à bout de bras ou de gosses surexcités qui croquent dans leur Kinder.

Pour en revenir à Sofia, je sais qu'elle pardonne pas facilement et qu'à coup sur elle se sera barricadée dans sa chambre. Et moi je déteste parler aux murs.

Une fois arrivée chez moi, mon téléphone vibre. Une notification Messenger. De Ken. What ??? Alors là je sais pas quelle mouche l'a piquée entre le cours d'histoire de tout à l'heure et maintenant. J'hésite à lire le contenu de son message. Je compose mon code. Bizarrement, mes mains transpirent.

De Nek le Fennek : Besoin de te parler. Vite.

Je décide de ne pas lui répondre. Si il a cru que j'allais lui parler comme ça par message il peut toujours rêver, je préfère mille fois plus le réel au virtuel.

Une voix étouffée me parvient de la chambre voisine.

???- Ouais demain ... Café Montparnasse... je serais seule t'inquiète...

Attendez, attendez, STOP. A qui elle parle là ?

Bon, mis à part le fait que le Café Montparnasse soit un des bistrots les plus branchés et luxueux de l'arrondissement, je me demande bien qui peut l'y accompagner.

Ma curiosité me pousse dans le couloir. D'un coup, j'ai envie de tout envoyer balader, de me marrer un peu parce qu'au fond j'ai tellement d'embrouilles en ce moment qu'une de plus, une de moins...

Roxane- Alors Sofia, tu vas boire un café avec qui demain ?!

J'attends quelques longues secondes avant que la porte s'ouvre sans un bruit. Ma sœur a l'air autant malade que je le suis. Bref.

Sofia- D'où t'écoutes aux portes toi ?

Roxane- Alors Madame la souffrante, on m'informe plus quand il se passe quelque chose d'important ?

Sofia- Je te rappelle qu'on se parle plus toi et moi.

Roxane- Ben tu dois être encore un peu malade parce que regarde ce que t'es en train de faire !

Sofia- HAHA. Haha.

Roxane- Effectivement, tu n'es pas dans le meilleur de tes jours !

Sofia- Bon, je sais qu'on est censées tout se pardonner entre jumelles mais j'avoue que j'ai mal digéré que t'ai embrassé Deen au Nouvel An.

Moi- Non, ça c'est le protocole de la société qui pousse les jumeaux à créer une certaine complicité entre eux mais si tu ne veux plus me parler libre à toi.

Sofia- T'es folle toi ! Je suis comme toi, j'arrive pas à en vouloir aux gens surtout à toi, t'es ma seule attache dans ce monde de merde.

Sa phrase m'a touchée en plein cœur.

Je ne sais plus quoi dire.

Je m'attendais pas à cette réaction de sa part. Je me sens pas bien, j'ai envie de changer de sujet. Mais avant faut que je lui dises tout.

Non, tout est redevenu normal entre vous, facilement en plus pourquoi il faudrait que je gâche tout ? C'est ce qui s'appelle la sincérité Roxane. Oui ben merci je connais, malheureusement trop peu de personnes s'en servent, les gens préfèrent se cacher pour sauver les aspects derrière des phrases mielleuses qui font plaisir. Je dis pas qu'il faut pas dire quand ça va mais quand ça va pas il faut savoir le dire. C'est la seule façon d'avancer dans la vie.

Ouais enfin, je me fais des théories sur la vie mais en attendant je ne les appliquent pas avec ma sœur, en l'occurrence la personne qui m'est vitale au quotidien pour tenir sous la pression permanente. Depuis 6 ans, dans chaque école, avec tout le monde, de la prof jusqu'aux surveillants on essaie toujours de nous surprotéger en nous favorisant en nous disant « Tu sais si c'est trop dur pour toi on peut adapter les cours », « Je comprends ce que tu ressens, nous sommes là pour t'écouter ». Merci Madame la directrice, mais non désolé de vous décevoir mais vous ne comprendrez jamais, oh non, ce que je ressens vis à vis de cette situation. Pas assez scolaire. Non ce ne sont pas des phrases formées de sujet, verbe, complément qui défilent dans ma tête quand j'y pense. Plutôt un fouillis propre à moi même trop indigeste pour votre putain de système.

Toujours obligées de nous justifier pour dire que nous ne sommes malheureusement pas les seules à avoir un passé douloureux et que c'est pas en nous enveloppant dans de la soie que la pilule passera mieux. Le tout avec la politesse. Ma sœur me tire de mes cogitations.

Sofia- Tu sais Roxane, je te sens absente parfois, c'est comme si tu m'entendais pas, ça fait 5 minutes que je te parle et que tu réagis pas !

Roxane- Sorry, je réfléchis trop soeurette tu le sais bien.

Elle s'éclaircit la voix et poursuit.

Sofia- Du coup, je te disais que je vois bien que quelque chose va mal chez toi au-delà de Ken. Tu sais, je peux t'écouter, je suis ta sœur, combien de fois tu m'as aidé à me sortir d'impasses ou je ne cessais de tourner en rond ?!

Roxane- En fait, j'ai pas calculé grand-chose le soir du Nouvel An. Je savais que tu aimais Deen mais j'étais... pas bien et...

Sofia- Pas bien ? Non, je te connais t'es plus complexe que ça Rox'.

Roxane- Ben, j'ai parlé à Ivàn et aux filles de la situation avec Ken mais elles m'aident pas vraiment. Et puis j'en ai marre qu'à chaque moment qui pourrait être cool, une flèche du destin vienne s'abattre et brûle tous mes espoirs. Je suis pas une salope. Je déteste jouer le rôle de la pétasse qui fait du mal à tout le monde. Mais ce soir là, j'ai joué de trop près avec le feu. Voilà pourquoi je l'ai embrassé. Mais mon cœur n'était pas enclin à le faire. Je l'ai fait par pur ras le bol. Alors tu vas sûrement trouver ça un peu gros d'avoir besoin d'embrasser un mec lambda pour remédier à ces problèmes d'autant que ça ne résout rien mais je suis impulsive. TROP impulsive.

Une sonnerie interromps mes paroles.

Sofia- Tu sais, j'ai pas de vraies raisons de t'en vouloir vu qu'on est pas en couple et qu'on le saura probablement jamais !

Roxane- Ouais haha ben à notre célibat permanent alors !

On se prend dans nos bras en rigolant.

Elle file prendre une douche.

J'en avais presque oublié la sonnerie. Il est 21:16, je doute que ça soit mes grands parents qui rentrent de leur apéritif « entre collègues » où que ça soit un livreur. Mais sait on jamais.

Je pousse la lourde porte en bois massif pour me retrouver nez à nez avec la personne que j'ai le moins envie de voir en ce moment. Lui. J'aimerais tellement qu'il y ait marqué « casse toi connard » sur le paillasson plutôt que « Bienvenue » parce que c'est pas du tout le cas.

Ken- T'as pas répondu à mes appels et à mes messages ! Tu joues à quoi Roxane ?

Roxane- C'est pour ça que tu sonnes chez moi à 21h, tu peux revenir d'où tu viens !

Pile quand j'allais refermer la porte, il la repousse.

Ken- Je crois qu'on a des choses à se dire.

A contrecœur, je le laisse entrer.

21H ou pas, j'ai finalement envie d'entendre ce qu'il a à me dire de si important pour que cela nécessite qu'il se pointe chez moi.


J'espère que ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à voter et à me donner vos impressions en commentaires.

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