Chapitre 23: Question de chance
GM- Tu ne peux pas sortir de table sans prévenir Roxane ! On ne t'as pas appris à te comporter ainsi !
Je lève mes yeux d'un regard sombre, limite insolent qui veut dire « Moi tes codes je m'en fous ». Et c'était vrai. Depuis toute petite, j'étais la rebelle, qui ne respecte jamais rien, avec trop de caractère au goût de Monsieur Tout Le Monde. Mais que voulez vous, j'ai besoin de m'exprimer. Mais quand je parle de caractère, je ne parle pas de toutes ces personnes susceptibles qui partent au quart de tour et qui appellent ça avoir du caractère. Non, le vrai fort caractère c'est être capable en creusant dans ta personnalité qu'on puisse y trouver quelque chose qui persiste. Pour contrebalancer j'ai ma sensibilité. Et mon trop plein de stress. Et mes crises d'oppression et d'angoisse. Diagnostiquées en décembre 2001.
GM- A qui tu parles ?
Roxane- Thaïs m'appelle pour la villa, il faut absolument que je passe cet appel.
Elle me regarde, effarée et sur les nerfs, comme si je l'épuisais. Parfois je le regrette. Mais parfois, ça me pousse à continuer.
Je lui lance un petit sourire désolé et referme la porte.
Je me jette sur mon téléphone, espérant que ma cousine n'a pas raccroché.
Roxane- Allo ?!
Thaïs- Ah tu es là, écoute j'ai trouvé une solution.
Roxane- Euh, t'es pas en train de me proposer de partager la maison avec une autre famille là j'espère ?
Thaïs- Mieux que ça.
Roxane- Ça promet.
Thaïs- Oh sois plus sympa s'il te plait, j'ai dit à la famille qui logeait pendant vos dates que j'avais un imprévu, de la famille nombreuse à loger en urgence, ils finiront par comprendre. C'est toujours comme ça, au début les clients réclament une assurance et des tonnes de papiers et une caution mais quand ils voient qu'on ne leur répond plus ils n'insistent pas. L'argument ça va le faire et tu sais...
Elle continue son blabla explicatif. Je suis juste refaite. Ma cousine, c'est la seule à pouvoir nous débloquer sa maison en si peu de temps.
Roxane- Merci, c'est... juste génial mais comment tu vas les reloger ?!
Je l'entends rigoler. Ce genre de rire de ceux qui ont de l'argent et qui se foutent bien de trouver une solution pour les autres. Comprenez, dans la vie ils ont toujours eu le choix alors pourquoi ça ne serait pas pareil pour les autres ?
Thaïs- Tu sais, ils trouveront bien une villa à Santorin où dans ce genre de coin, ça attire généralement les familles Amérindiennes comme eux.
Je pouffe de rire, elle se prend maintenant pour une conseillère touristique.
Roxane- Tu veux qu'on fasse quelque chose en particulier pour la... (BIIP BIIP : 1 SMS de Ken)
Thaïs- La... ?
Roxane- Attends...
Ken : Fais pas crari
Il m'énerve, heureusement que la situation s'est vraiment arrangée parce que sinon je lui aurai déballé une de ces tirades...
A Ken- Ça a failli être vraiment annulé donc je serais toi je serais bien content de m'avoir comme amie pcq en attendant c'est pas avec toi qu'on a avancé.
J'avoue que cette réplique était un peu osée mais je veux le faire réagir.
Roxane- Pour la maison, on peut faire quelque chose en plus si tu veux.
Thaïs- Oh tu penses bien, t'es chez toi cousine, t'as rien à faire, j'te checke par SMS pour l'heure d'arrivée , les clés enfin bref tu connais le système. J'tenvoie le contrat dès que je peux.
Roxane- Merci...
Thaïs- Bon, j'te laisse, j'ai beaucoup de taf en ce moment, allez bisous Roxane !
Elle raccroche avant même que j'ai pu lui dire au revoir. c'est toujours comme ça avec ma cousine. Gentillesse mais courtoisie et rapidité sur les bords.
Mais malgré cette bonne nouvelle, je n'arrive pas à être totalement heureuse.
Ken ne me répond pas, il fait exprès ou quoi ?
Je m'allonge dans mon lit toute habillée.
Je zone sur mon Mac, attendant bêtement un signe de vie de sa part. Je me sens vraiment mal, pourquoi les relations amoureuses c'est si compliqué ? Oui, je sais, c'est la question que tout le monde se pose mais j'aimerais vraiment savoir.
Parce qu'ils ont beau faire de longues études, des théories et des explications de phénomène l'amour, ça, c'est de l'ordre de l'impossible. Et moi il a fallu que je tombe sur un mec impossible à atteindre.
Voilà.
Putain.
Je me laisse aller à mes divagations. Je me faisais cette réflexion en cours de philo, mais avec cette prof impossible d'en placer une, elle tout ce qui sort du programme scolaire et de la pensée de la science littéraire ça ne l'intéresse pas. Je me faisais donc la réflexion suivante : j'ai comme le sentiment que la vie n'est là que pour nous faire souffrir, en nous offrant de temps à autre des moments de joie, de plaisir, de gaieté pour mieux nous replonger dans les enfers de notre pensée. Si l'on remarque bien, la vie n'est pas bien faite, ni idéale comme le disent tous ces philosophes niais. Si la vie était bien faite, pour que nous partions tous au ciel la conscience légère dans les conditions les plus confortables, pour que nous soyons entourés d'amis là pour nous renforcer et nous aider à avancer alors pourquoi certains souffrent de harcèlement ? Pourquoi certains meurent dans des attentats, incendies, kidnappés, violées, frappés. La loi de la nature ou le hasard me diriez vous.
Et bien, dans ce cas je vous invite à vous retrouver dans des situations aussi extrêmes et dangereuses que celles là, voir si vous tiendrez le même discours. Parce que c'est bien facile de crier haut et fort des maximes de hasard, de coïncidence mais si vous étiez au coeur de cette coïncidence je crois que vous auriez aimé que l'on vienne vous aider au lieu de vous laisser crever sous prétexte du hasard et que « ce sont des choses qui arrivent ». Et voilà que je pleure encore. Je suis emmitouflée dans ma couette, je ne voudrais plus jamais en sortir. Parfois, je me sens comme pas assez forte pour affronter le monde extérieur.
Voilà ma sœur qui entre.
Sofia- Alors ?(hésitation) euh Roxane ça va ?
Adossée maintenant au mur dans la pénombre, je la regarde les yeux brillants.
J'aimerais tellement rendre les gens heureux afin qu'ils ne se préoccupent plus de mes pensées délirantes et de mes aléas de tristesse.
Roxane- Ça va t'inquiète... tout est bon pour la villa.
Elle s'assoit sur mon lit. Je vois qu'elle hésite à dire quelque chose.
Sofia- Je... ok c'est bien. Mais, tu sais si jamais t'as besoin je suis là pour parler(phrase niaise entendue des dizaines de fois mais jamais réaliste sauf que venant de ma sœur je sais que c'est vrai), parce que parfois tu veux tout encaisser mais à un moment il faut que tu te relèves.
Roxane- C'est bien de savoir frapper mais c'est mieux de savoir encaisser.
Sofia- Oui mais tu peux pas tout encaisser toute seule, il faut qu'on s'aide mutuellement.
Roxane- Alors ça non, je t'aime bien hein mais comptes pas sur moi pour avaler les pseudos principes de paix intérieure et d'entraide collective de ta psy parce que ça marche ap avec moi.
Sofia-(interrogée) Comment tu sais ça toi ?
Roxane- Ordonnance de magnésium pour le stress, ventoline pour ton asthme et compte rendu de ta séance laissée trop longtemps sur la table du salon.
Sofia- T'es sérieuse ?
Roxane-(repliant ses genoux négligemment) Fallait être plus organisée sista !
Sofia- Alors ça parles pour toi, ta convoc du bac blanc que t'as perdu pendant une semaine alors que tu l'avais laissée dans la maison de Versailles ça va deux secondes !
Roxane-(rires) Chance que je l'ai retrouvée.
On arrête de parler et on se regarde puis tantôt on baisse simultanément nos yeux vers le sol ou vers un autre point.
C'est comme ça pendant 5 minutes.
Sofia- J'peux rester ?
Roxane- Vas y...
On s'endort toutes les deux dans mon lit, l'esprit embrouillé de pensées diverses.
J'écoute la respiration posée de son coeur quand moi je n'arrives pas à calmer le mien.
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Une voix lointaine. Puis, d'un seul coup plus insistante.
GM- Roxane, c'est pour toi, rOOOXANE !!!
Je repousse ma couette brusquement, les cheveux en bataille. Ma sœur est partie, sans doute déjà levée.
Roxane- QUOIII ?
GM- T'as de la visite ? Je peux entrer ?
Ce dimanche 27 mars 2008 ne pouvait pas mieux commencer. Pff.
Je me regarde brièvement dans le miroir. Trop de cernes, mes longs cheveux ébourriffés, si c'est des amis de mes grands parents je suis vraiment mal barée pour jouer au jeu de la petite fille bien éduquée du 16 ème qui lève l'annulaire pour boire son thé.
Une voix grave se fait entendre dans le couloir. C'est qui encore ?
GM- Bon tu me réponds quand là ?
J'essaie de capter la voix masculine à peine audible depuis l'entrée quand ma grand-mère déboule dans ma chambre et ouvre les volets en grand avant de se retourner vers moi, catastrophée.
GM- Tu es tombée du lit dans la nuit ? Enfin c'est quoi cette tête ? Et puis...oh la la ta chambre c'est pire que Barbès en plein marché dis moi !
Je rie nerveusement, légèrement agcée des expressions saugrenues de ma grand-mère.
Elle ressort de la chambre me laissant bredouille comme une loque assise par terre.
11:27 !! Pourtant je suis matinale mais à croire qu'à chaque fois que j'ai la tête pleine mon sommeil en prend un coup.
GM- Jeune homme ! Vous pouvez venir suivez moi.
Des pas se rapprochent.
GM- Bon je vous laisse entre « amoureux » comme on disait de mon temps, je vais cuisiner et j'ai quelques appels à passer voilà.
Ken ??!!
Mais c'est Deen qui fait son apparition à côté de ma grand-mère.
Oh my god, la situation est tellement gênante, j'aurais tellement aimé continuer à dormir où même que ma grandma ne se trompe pas de personne comme ça !
Elle disparaît dans le couloir nous laissant face à face.
Deen- Euh, je crois qu'il y a eu un malentendu...
On éclate de rire.
Roxane- Je pense aussi, Sofia est chez Mariane aujourd'hui je viens de m'en rappeler, t' aurais des nouvelles de Ken ?
Pourquoi j'ai dit ça ? Ca fait vraiment la meuf hyper intrusive. Il faut que je fasse comme si sa vie ne m'intéressait plus. Même si, en vérité c'est tout le contraire.
Deen- Ben, en ce moment il réfléchit à un tas de trucs et en même temps il bosse ses textes pour ses open mic tu vois du coup il est bizarre parfois on dirait qu'il est perturbé par un truc.
Ah ben il est pas le seul.
Deen- Pourquoi ? Vous vous parlez plus ?
Roxane- Mouais, plus trop enfin on se prend surtout la tête...
Deen- Mais vous êtes ensemble ou pas bordel ?
Roxane- Non.
La réponse était sortie, percutante, tranchante mais j'en ai plus que marre des questions incessantes. Il est temps de mettre un terme à notre idylle naissante même si au fond... il me travaille, il occupe mes pensées, il me fait vraiment de l'effet alors...
Deen- Tu sais tu peux me le dire si tu l'aimes, tranquille.
Roxane- Il s'est jamais rien passé de serieux entre nous et... (regard par la fenêtre)... au final j'ai pas envie de lui courir après.
Deen- Comme tu voudras...(long silence)... bon je vais aller en ville, je bouge et au fait y a une soirée samedi pro chez oim, j'tattends ce soir là...
Il me fait un signe de la main puis il part.
Le 2 avril hmmm... malchance, rien de prévu, au pire ça me fera une occasion d'afficher Ken en venant avec un autre gars. Mais qui ? Louis... ha ha ha. Rien que d'y repenser ça m'effraie, j'ai arrêté de le suivre sur tous les réseaux et au lycée j'ai coupé le contact avec lui.
J'espère que ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à voter, commenter et partager.
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