3. Qui Sème Le Vent Recolte...
- Alors, tu as ressenti quelque chose ? demandais-je avec appréhension, une semaine après notre onzième anniversaire.
Étain, assise dans les vestiaires, regarda sa médaille en soupirant. J'étais monté sur le podium avec elle, moi en tant que deuxième, elle en tant que première.
J'avais été davantage fier d'elle que de moi-même. Nous avions tous les deux souri, ayant belle allure dans nos kimonos et ceintures noires.
Nous avions été pris en photo, nous ressemblant plus que jamais, le même sourire, les mêmes cheveux, que ce soit la coupe, un carré plongeant qu'Étain avait choisi pour nous deux ou la même couleur, d'un blanc fané.
Je n'étais pas fan, je la préférais avec les cheveux plus longs et moi bien plus court... Mais je n'avais pas vraiment voix au chapitre.
Nos habits avaient fait ressortir l'intensité de nos prunelles violines. Maman, c'était libérée exprès pour voir ça. Mais maintenant que nous étions enfin seuls dans les vestiaires, je me devais de poser la question. Sans une réponse positive, la victoire ne serait pas totale.
Étain pensa un instant à me mentir, juste pour me faire plaisir, chose qu'elle m'avoua plus tard, mais là encore, ce serait un mensonge. Voilà pourquoi elle soupirait.
Comprenant, j'allais m'asseoir à ses côtés. Là où je me sentais à ma place, puis je l'enlaçai par-derrière, la serrant contre moi, lui caressant les cheveux et pour finir, l'embrassant sur le front.
- Je te promets qu'un jour, je réussirai à te faire sentir quelque chose, lui murmurais-je.
D'ailleurs, j'avais déjà ma petite idée pour l'essai suivant.
C'était notre truc à nous, essayer des choses encore et encore.
***
J'avais eu une idée totalement folle, que je m'étais empressé de partager avec maman, tandis que ma sœur se douchait dans notre salle d'eau attenante à notre chambre.
Notre mère, qui préférait travailler de nuit, avait les moyens de subvenir à nos besoins. Enfin, c'était sa façon bien à elle de se justifier. J'avais appris, par un concours de circonstances, qu'elle avait piqué quelques ilons à son père, quand elle était partie.
Elle avait choisi délibérément de couper les ponts avec sa famille.
Après avoir passé dix ans dans un taudis, elle nous avait enfin acheté un appartement à trois chambres, dont l'une n'avait jamais servi. Du coup, elle avait abattu les cloisons, faisant deux petites suites avec la dernière des chambres.
Nous avions alors eu droit à une nouvelle décoration dans notre espace, en noir et blanc, un petit dressing où nos fringues se mélangeaient et une salle d'eau privative. Cerise sur le gâteau, elle avait remplacé les lits d'une place que nous avions accolée pour n'en faire qu'un et dormir toujours ensemble, à un lit king size. Elle en avait pu faire de même pour sa chambre.
Alors, quand elle me vit envahir son espace personnel sans ma petite sœur, elle sut que de nouveaux ennuis étaient à prévoir.
- Maman, j'ai un service à te demander.
L'espoir qui scintillait dans mes yeux la convainquit de dire oui, avant même de savoir de quoi il en retournait. D'un regard, elle m'incita à continuer.
- Voilà, est-ce que ce soir, tu pourrais nous laisser la voiture et partir au boulot en métro ?
Je me souviens nettement que Juliana avait froncé les sourcils. Oh ça oui, elle était au courant que nous prenions la voiture souvent pendant la journée, surtout pour faire les courses, lorsqu'elle dormait.
Elle le savait et elle nous laissait faire, n'ayant jamais eu une seule contravention ou une arrestation pour conduire un véhicule sans permis.
Alors que peut-être un jour, nous aurions besoin de savoir conduire...
Mais qu'avait-on besoin de faire avec en pleine nuit ?
- Pourquoi ? me demanda-t-elle, surprise.
- Tu veux vraiment le savoir ? demandais-je plus que sérieux.
Ma mère réfléchit, il y avait tellement de possibilités et certaines lui faisaient froid dans le dos, mais elle-même avait piqué la voiture de sa mère plus d'une fois avec son propre frère...
Ne voulant pas revivre ses souvenirs trop douloureux, elle se dit que non, elle n'avait pas besoin de savoir.
- Je prendrai le métro, m'annonça-t-elle.
Je m'élançais et lui fis un câlin, fou de joie. Oui, à onze ans, j'aimais encore faire des câlins à ma mère.
- Merci, maman, je te promets que tu ne le regretteras pas.
De tout cœur, cette dernière, l'espéra.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top