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14h28 Palais de justice de Dunkerque...

Michelle s'approcha lentement de la barre, les mains enfouies dans ses poches, la tête baissée dont on pouvait lire l'expression d'un sentiment de crainte. Elle ne savait pas ce qui l'attendait, mais elle appréhendait déjà sa sentence. Quant à Léa, elle s'était contentée de restée assise où elle était, sans rien dire. A lire l'expression de son visage, elle semblait être calme. Elle se disait qu'elle avait l'âme oratrice, que ce procès, elle l'avait remporté à coup sûr, comme ses précédents, d'ailleurs. Son concurrent la fixait depuis un moment, se demandant sans doute comment elle faisait, où elle puisait cette assurance et cette force qu'elle avait en elle. L'avocat général avait beau être son rival, mais il ressentait quelque part une certaine admiration pour elle.

Lorsque le Président Rousseau se prononça, ce fut seulement pour condamner la cliente de Léa à trois ans d'emprisonnement et quarante-cinq mille euros d'amende, et non trente-cinq ans comme l'avait suggéré le procureur. Et enfin, depuis le début de cette affaire, Léa put découvrir le magnifique sourire angélique de Michelle.

Léa voulut retrouver sa mère pour fêter ça, mais elle se rendit d'abord au restaurent, car elle avait un creux.

Elle s'assit sur la table vide à l'entrée. La réverbération du soleil vint se déposer sur son visage. Elle regarda vaguement la carte noire qui servait de menu sur la table. Elle ferma les yeux, prit une bonne bouffée d'air, et pensa à sa famille, au fait qu'elle aurait pu partager ce bon moment avec elle. Pour ne pas trop penser à cette solitude qu'elle avait elle-même bâtie, elle fit signe au serveur de venir prendre sa commande.

— Bonjour ! s'exclama-t-il avec un sourire radieux.

— Bonjour ! Je voudrais des frites avec du poulet frit, s'il-vous-plaît ?

— Comme plat principal ?

— Oui.

— Pas d'entrée ?

— Ah... Si. Donnez-moi s'il-vous-plaît des croissants tous chauds avec du jus d'orange.

— Très bien.

— Et comme dessert... de la glace au coco.

— Voulez-vous du vin ? Il y a du vin maigre...

— Oui, s'il-vous-plaît. Du bon vin de Province. Merci beaucoup.

— Je vous apporte cela tout de suite.

Le serveur se retira. Puis il revint quelques minutes plus tard servir à Léa sa commande. Il profita pour lui faire la conversation.

— Vous êtes très jolie...

— Merci, c'est flatteur.

— Pourrais-je savoir quel est le nom qui illustre cette charmante demoiselle ?

Léa ne se préserva pas de sourire.

— Il me semble vous avoir déjà croisé, poursuivit-il.

— Croisé ? Je ne crois pas... mais vous avez sûrement dû me voir à la télé, ou aux journaux !

— ... Non... vous... vous êtes Léa Vermandois ! ?

— Vous m'avez reconnu, fit-elle, l'air flattée.

Il prit place et poursuivit :

— Qui aurait cru qu'un jour j'allais rencontrer la célèbre avocate en personne ! Charles, pour vous servir. Comme vous pouvez le voir, je travaille en tant que serveur dans un restaurant minable au nom minable...

— Petits délices ? demanda-telle avec un sourire moqueur.

— Chut ! Ne le dites à personne. Car si mon patron vient à apprendre que j'ai insulté son restaurant, je me ferai botter le derrière.

— Non mais... Sérieusement... Vous rigolez...

— S'il-vous-plaît... Brisons les barrières...

Léa sourit un court instant. Elle regarda sa montre et s'excusa :

— Je suis désolée, mais... Je dois m'en aller. Il faut que je passe voir ma mère pour ensuite...

— Ne t'inquiètes pas. De toutes les manières, tu sais où me trouver. Je servirai tous les jours, sauf le vendredi où je fais la cuisine, et le samedi où je nettoie. Je finis tout le temps à sept heures du soir, excepté le lundi où je suis de garde.

Léa lui sourit, quelque peu gênée.

— Très bien.

— Bon, il faut que je file aussi, si je ne veux pas que mon patron me surprenne à faire la causette avec une femme. Je te laisse ma carte.

Charles lui tendit ses coordonnées, puis s'en alla.


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