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Cédric attrapa les clés de la voiture, et descendit les escaliers quatre par quatre. Camille, qui s'occupait des petits dans le salon, l'arrêta :

— Papa ! Qu'est-ce qu'il se passe ? Où vas-tu ?

— Camille, on avait tout faux ! commença-t-il à expliquer, essouflé.

— Attends, Papa ! Garde ton calme... Respire... Assieds-toi !

— Non. Camille, Léa disait vrai.

— Quoi ! ? Je ne te suis plus, là...

— Elle disait vrai. Elle avait peur qu'il nous arrive malheur... Elle s'inquiétait réellement pour nous...

— Attends Papa ! Ça fait des années qu'elle ne prête pas attention à nous ! Pourquoi maintenant ! ? Réfléchis un peu et arrête de te faire du mal ! Tout ce qu'elle voulait c'était de trouver un moyen de se débarrasser de nous ! Elle a tué tous ses amis, sa maman... Elle voulait être seule avec sa gloire... ! Elle ne nous a jamais aimés... !

— Non tu as tort. Depuis tout ce temps elle vivait dans l'angoisse, dans la crainte de vous perdre... Pendant tout ce temps un type la harcelait et menaçait sans doute de s'en prendre à vous.

Cédric mouilla ses lèvres. Camille semblait abasourdie. Elle n'arrivait sans doute pas à assimiler cette nouvelle. Et Cédric la comprenait. Tout était beaucoup trop pour elle.

Une larme s'échappa de ses yeux, et, comme avec regret, elle poursuivit :

— J'ai pendant tout ce temps humilié Maman ? J'ai passé mon temps à vouloir qu'il lui arrive malheur tandis qu'elle se battait pour nous sauver ?

— On s'est tous trompés... ça devait arriver. Ma chérie...

Cédric prit Camille dans ses bras pour la réconforter. Il sentit de chaudes larmes venir se déposer sur sa chemise. Camille ajouta :

— Et moi qui croyais qu'elle n'était qu'une Maman indigne, qui ne cherchait qu'à détruire le bonheur de ses enfants...

— Elle savait qu'elle avait commis des erreurs dans le passé, elle voulait sûrement les réparer... Elle voulait vous protéger de la menace qui pesait sur vous. Mais, comme elle n'était pas habituée à ce genre de choses, elle ne savait pas comment s'y prendre.

— Mais on était bien trop aveugles pour s'en rendre compte.

— On n'a jamais su ce qu'elle était vraiment. C'est sûrement ce Benoît qui a tué sa mère, et qui a tenté​ de vous tuer. Elle voulait éviter qu'il s'en prenne à vous. Mais je n'arrive pas à comprendre pourquoi tous les indices nous mènent à elle.

— Mais qui est ce Benoît, au juste ? Qu'est-ce qu'il lui veut ? Qu'est-ce qu'il nous veut ! ?

— Benoît est un de ses anciens clients. Il lui en veut parce qu'elle a refusé de le défendre.

— Tout ça pour... ! ?

— Oui, aussi fou que ça puisse paraître. Mais je te jure que si je mets la main sur ce type, il regrettera d'avoir vu le jour.

Le visage de Cédric se crispa.

— Mais ce n'est pas le genre de Maman de refuser un cas. Alors pourquoi l'a-t-elle fait ?

— Je ne sais pas.

— Mais qu'est-ce qu'on vient faire là-dedans ?

— Il lui a peut-être mis en garde qu'il s'en serait pris à vous ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas, sincèrement. Ou peut-être qu'elle a juste pris conscience que cet individu était dangereux et prêt à tout. Et elle voulait peut-être vous épargner le pire, au cas où.

— Pourquoi avait-elle gardé le silence ?

— Je ne sais pas. Peut-être la crainte. La crainte d'empirer les choses.

— Qu'allons-nous faire maintenant ?

— Je vais voir Jenny.

— Jenny ! ?

— Oui.

— Pourquoi ?

— Elle doit sûrement savoir ce qu'il s'est passé avec Léa.

— Quoi ! ? Mais pourquoi ! ?

— Parce que c'est elle qui a appelé Léa avant qu'on ne la revoie plus.

— Tu veux dire que c'est à cause d'elle si Maman nous a laissés en plan ?

— Probablement. Et pour cela, il faut le vérifier. Il y a quelque chose qui ne me parait pas net. Pourquoi voudrait-elle partir juste après avoir reçu un coup de fil de Jenny, alors qu'elle ne voulait en aucun cas sortir de cette maison, et ce, malgré​ les menaces de Benoît ?

— Attends ! Attends !

Camille lui fit signe d'arrêter.

— Tu vas beaucoup trop vite à mon goût. Comment ça, menaces ?

— C'est trop long. Mais pour faire court, ce Benoît, il menaçait Léa pour qu'elle lui ouvre la porte. Je... Je dois aller voir Jenny. Elle doit tout savoir.

— Je t'accompagne.

— Mais... Et les petits ! ? Reste avec eux, compris ? Lorsque je reviendrai je t'en donnerai des nouvelles.

Et Cédric partit de la maison en courant, après avoir claqué​ la porte.

La nuit était tombée et la lune se montrait pleinement. Des nuages maussades et pâles recouvraient tout le ciel. Il allait commencer à pleuvoir. Pourtant, Cédric n'avait ni manteau, ni parapluie, ni pull dans cette nuit glaciale. Il regarda vers le ciel puis enfouit ses mains dans les poches de son vieux jean tout déchiré​ aux genoux. Il se dirigea vers la maison de Jenny et frappa à la porte trois fois. En prenant une grosse bouffée d'air, il s'assit sur l'une des marges d'escaliers. Il jeta un coup d'œil à sa montre, signe d'impatience. Il poussa un soupire d'agacement. Cela faisait plus d'une quinzaine de minutes qu'il poirotait. Mais que faisait-elle donc ? Elle ne pouvait pas dormir à cette heure-là !

Cédric sortit son téléphone, composa le numéro de Jenny, et décrocha. Il attendit quelques secondes avant de tomber sur son répondeur. Il se faisait plusieurs scénarios : soit elle se trouvait sous l'eau, soit son téléphone était éteint parce qu'elle n'avait plus de batterie, soit il s'était cassé, soit on le lui avait piqué​, soit elle l'avait laissé​ très loin d'elle...

Le vent soufflait violemment. Cédric vit de petits éclairs se dévoiler. Il fronça les sourcils.

Il tourna la poignée instinctivement, et s'aperçut que la porte n'était pas fermée à clé. Il fit alors un pas à l'intérieur et avança à l'aveuglette.

Soudainement, une odeur nauséabonde commença à l'envahir. Une odeur presque insupportable. Il esquissa une grimace.

— Jenny ! appela-t-il. Jenny, vous êtes là ! ? Répondez-moi ! Jenny !

N'y avait-il personne ? Un étrange frisson me traversa. Alors il daigna poser sa main gauche sur le mur, cherchant à toute vitesse l'interrupteur. Après l'avoir trouvé, il éclaira la pièce.

Et là, ce fut l'horreur ! Il remarqua une énorme tâche rouge sur le sol, allant de l'entrée jusqu'à​ la porte de derrière.

— Oh mon Dieu ! s'exclama-t-il.

Un long silence se fit. Son rythme cardiaque s'accéléra. Il ne savait pas ce qui était pire entre l'effluve qui lui parvenait au nez, et la vue que lui offrait l'intérieur de la maison de Jenny.

— Il y a quelqu'un ! ? hurla-t-il, épouvanté.

L'orage se mit à gronder. Les rideaux se soulevèrent et se mirent à s'agiter. Le vent même semblait lui parler. Il avait cette sensation bizarre en lui...

— Mais qu'est-ce qu'il se passe ? se demanda-t-il à voix basse.

Sa voix résonnait désagréablement dans toute la pièce. Il posa sa main sur la poignée de la porte qu'il fixait longuement. Il ouvrit la porte et une vague torpeur l'envahit. Il fit trois pas en arrière, presque abasourdi par ce que ses yeux pouvaient voir.

Le sol était recouvert de marques de sang épais, noir et sec. Il s'approcha doucement et constata des bras flotter dans la piscine, baignée de sang. Des pieds trainaient par-ci, par-là, et la tête de Jenny était déposée juste sur la petite table qui avait longtemps été blanche.

Cédric fit couler ses yeux partout, et tout ce qu'ils pouvaient voir, c'était des morceaux de chair humaine. A cet instant, il se dit que cela ne pouvait être l'œuvre d'un humain. Jenny avait été tronçonnée sans pitié. Les questions étaient : par qui, et pourquoi ?


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