25


Il était sept heures du soir, et la fête avait déjà commencé. Léa venait tout juste de sortir de la douche. Elle était enveloppée de sa serviette blanche, et ses cheveux étaient complètement en bataille. Elle quitta la salle de bain à toute vitesse, comme si le feu y était. Elle se dirigea vers la coiffeuse. Elle jeta un regard évasif dans le miroir, juste pour admirer sa beauté. Elle se courba pour ensuite ouvrir le deuxième tiroir. Elle y trouva sa brosse et la saisit. Elle se redressa et promena ses doigts sur son visage, savourant la douceur de sa peau. Elle passa trois coups de brosse dans ses cheveux et la redéposa sur la commande. Sous ses yeux, se tenait la boite de crème dermatologique. Elle la prit et l'ouvrit. Elle trempa son indexe et son majeur à l'intérieur, et les tourna vigoureusement avant de les ressortir et de les diriger vers sa joue. Elle la pataugea partout de sorte que les rides disparussent, du moins, deviennent moins visibles. Elle glissa sa main dans le pot de maquillage pour en sortir son mascara. Elle l'ouvrit longuement et fit avec la pointe du crayon le tour de ses yeux. Ensuite, elle le referma et, ce fut au tour du rouge à lèvres de la servir. Elle ôta son capuchon d'une main, et de l'autre, elle le tenait fortement. La couleur l'obnubilait. Pour elle, il n'y avait rien de mieux que le vermillon. Elle frotta ses lèvres l'une contre l'autre pour qu'elles soient parfaitement maquillées. Elle les remua tendrement et repensa à son beau Cédric. Elle eut un léger frisson.

Le sourire aux lèvres, les mains posées délicatement sur sa poitrine, Léa tourna sur elle-même, en admirant son svelte corps. Elle s'éloigna quelque peu du miroir pour se diriger vers son lit. Elle récupéra ses robes de soirée et se demanda laquelle elle devait mettre. Elles étaient toutes splendides. La verte lui donnait un air de coquetterie alors que la bleue, pailletée, lui attribuait un coté superficiel. Elle préféra donc la première.

Léa passa près d'un quart d'heures à s'habiller et à se coiffer. Elle fit un très beau chignon étouffé. Ensuite, elle se parfuma légèrement pour attiser la flamme en Cédric. Et après avoir mis des escarpins, elle se regarda une toute dernière fois dans la glace. Puis elle disposa de la chambre. Elle referma la porte après elle. Depuis l'étage, elle entendait la musique jouer. Elle déposa un pied sur la première marge, puis le deuxième, jusqu'à ce qu'elle arrivât dans le salon. Et là, tous les regards se braquèrent sur elle de manière synchronisée, comme si tout était prévu. Léa baissa la tête légèrement, gênée par ces regards ébahis. Elle se dirigea vers Cédric qui, lui, était de dos. Il était le seul à ne pas l'avoir vu. Il s'était peut-être noyé dans sa conversation. Léa n'imaginait pas sa réaction lorsqu'il l'aurait vu...

Elle avançait doucement. Mais ses pas, au bout d'un moment, la trahirent : son époux se retourna machinalement.

Cédric resta bouche bée, sans doute bluffé. Il ne devait pas en croire ses yeux. Il ne l'avait jamais vu ainsi, depuis vingt ans, précisément. Il s'approcha de Léa, de pas lents. Mais étrangement, il reconnût une certaine assurance dans sa démarche. Il tendit sa main vers elle. Et elle la saisit. Léa ferma les yeux lentement. Il encercla sa taille à l'aide de sa main gauche et la tira jusqu'à lui. Son bassin se frotta au sien. Léa appréciait ce contact. Elle sentit la chaleur de son souffle se mêler au sien. Il humait sans doute l'effluve de son parfum. Cela déclencha un mince sourire sur les lèvres de Léa.

Léa crut un instant que le temps s'était arrêté, pour eux. Tout lui semblait figé. Et il n'y avait que lui et elle au milieu de la foule, rien qu'eux deux. La mélodie flottait dans l'air...

La main de son époux parcourut son visage, cherchant à reconnaitre la femme avec qui il avait passé vingt ans. Léa entendit le timbre de sa voix virile prononcer ce mot frissonnant : « Léa ». Il réduisit la distance entre eux en déposant ses lèvres sur les siennes. Il enroula sa langue passionnément. Puis il s'arrêta. Au même moment, Léa ouvrit les yeux, et remarqua que Cédric fit de même. A cet instant, leurs regards, croisés, communiquaient. Inutile de prononcer le moindre mot, leurs yeux se chargeaient de tout.

— Cédric !

— Tu es très jolie, ce soir.

— Merci.

Le temps reprit son cours. Léa adressa un dernier sourire à Cédric avant qu'il ne la présentât, ou plutôt, représentât à ses parents :

— Voici ma mère, Aurore, mon père, Alphonse, et ma sœur, Huguette.

Léa leur tendit la main. Et chacun, à tour de rôle, la serra.

— Il me semble t'avoir déjà rencontré, remarqua Huguette.

— Effectivement, il y a vingt ans que nous avons fait connaissance...

Huguette sourit légèrement à Léa.

— Ah oui ! Pour nous annoncer vos fiançailles ! Ça y est, tout me revient. Mais il me semble que cela fait un peu moins de vingt ans. Juste quelques mois avant, si mes souvenirs sont exacts.

Léa se retourna vers Cédric et, le visage empli de bonheur, elle répondit :

— Je suppose.

— N'allons pas débattre sur des années ! intervint Cédric, le cœur content.

— En effet ! répondit sa sœur. Mais dis-donc, votre amour pour l'un et l'autre n'a pas bougé d'un cran. Il est rare de voir un couple aussi uni... Enfin... de notre temps...

— Oui, oui, j'ai compris.

Il se retourna et prit Léa par la taille en continuant :

— Mais cette femme, c'est la plus belle de toutes.

Et cette fois-ci, en lui adressant un regard authentique, il poursuivit son discours émouvant :

— Je l'aime de tout mon être et j'aimerais passer le restant de mes jours avec elle, car elle est la femme idéale, elle est celle dont tous les hommes rêvent. Elle sait comment me séduire, elle sait comment me faire vibrer... et... elle sait comment me faire plaisir.

Il s'approcha d'elle et son cœur se mit à battre violemment. Cédric lui répéta :

— Je t'aime, Léa !

— Moi aussi je t'aime, lui répondit-elle, le sourire marqué sur son visage.

Soudainement, la sonnerie retentit. Cédric abandonna Léa pendant un laps de temps afin de voir qui c'était. Elle profita de la discussion pour se familiariser avec ses parents et sa sœur.

— Alors, vous faites comment sans votre chou à la crème ? Enfin... Je pense que vous êtes très attachée à lui donc ce n'est pas facile de vivre sans lui. Enfin... C'est ce que je pense car à votre place j'aurais été désespérée.

Aurore poussa un léger gloussement avant qu'elle ne réponde :

— Assurément ! Cédric est l'homme de notre vie à toutes ici présentes...

Huguette acquiesça de la tête.

— ... Comment Cédric ne peut pas nous manquer ? Par moments... je regrette ces bons vieux jours où il avait encore cinq ans et qu'il courait partout dans la maison en s'écriant Maman ! Maman ! Regarde-moi !

Un sourire aimable se forma sur le visage de Léa. Et elle avertit à voix basse :

— Je vous en prie, ne le dites surtout pas devant Cédric, il se sentirait très mal !

— Oui, oui, ne vous inquiétez pas ! Mais là, on peut tout vous dire, vu qu'il n'est pas ici parmi nous ! répliqua-t-elle farouchement.

— Bien sûr !

Un silence se fit. Mais Aurore le coupa très vite :

— Alors, qu'est devenue ma chère belle-fille après dix-huit ans et quelques mois de mariage ?

— Eh bien... Je suis toujours la même. Je travaille toujours en tant qu'avocate. Même si ce n'est pas facile, je gère. Et puis, j'ai quatre enfants sous les bras, une de dix-sept ans, qui s'appelle Camille ; une autre de onze ans, Manon ; un de huit ans, Alix ; et le tout petit dernier de quatre ans, Vince.

— Mais dis donc, quel sacré courage ! s'exclama Aurore.

Elle se retourna vers Alphonse et lui susurra :

— Chéri, cette femme a du remontant !

— Ah oui, c'est clair !

Cédric, après quelques instants, revint les interrompre. Il prit Léa par la main et l'entraîna sur le côté pour lui demander si elle avait commandé un colis.

— Non..., répondit-elle autant surprise que lui-même.

— Bah il y a la livreuse qui t'attend, là.

— Moi ! ?

— Si, si, toi...

Léa écarquilla les yeux et s'absenta pour un moment. Elle traversa le long de la salle bondée d'invités pour retrouver la livreuse.

— Vous me demandez ? l'interrogea-t-elle déjà à longue distance.

La livreuse masqua son visage avec sa casquette, attendit que Léa s'approche d'elle, et demanda :

— Léa Vermandois ?

— Oui, c'est moi...

— J'ai un colis pour vous.

— Un colis pour moi ? En êtes-vous sûr ? Car je ne me rappelle pas avoir passé une commande...

— Moi je ne sais strictement rien. Je ne fais que mon boulot.

Léa daigna prendre le paquet qui, d'ailleurs, ressemblait à un cadeau d'anniversaire. Elle pensa que ce devait forcément être ses amies ou Cédric. A l'hôpital, il lui avait parlé d'un cadeau surprise qu'il comptait lui faire. Léa esquissa un large sourire.

— Signez ici ! indiqua la livreuse.

Léa s'exécuta et la salua avant de refermer la porte. Elle contempla le colis pendant un court instant. Celui-ci était emballé d'un magnifique nœud violet magenta avec de jolis rubans dorés. Léa était certaine qu'il provenait de son époux, vu que la personne avait pris soin de choisir un emballage de sa couleur préférée. Il était le seul à la connaitre...

Léa attendit que tous les regards fussent distraits pour filer à l'anglaise jusqu'à sa chambre. A pas feutrés, elle monta les escaliers de bois en colimaçon, en entrainant avec elle quelques grincements. Léa arriva à l'étage. Son cœur battait à tout rompre. Elle était en extase. Elle posa délicatement ses mains sur la poignée de la porte puis l'ouvrit. Léa espérait que personne ne l'avait entendu. Elle referma la porte derrière elle et imagina que cela pouvait être une robe.

Elle s'assit sur le lit et prit le temps de croiser ses jambes. Elle lorgnait le cadeau. Elle était si impatiente d'ouvrir le colis. Et pourtant, elle faisait durer le suspense. Elle s'auto torturait en quelques sortes. Un mince sourire apparût sur le visage de Léa. Les battements de son cœur s'accélérèrent. La patience touchait à ses limites. Elle posa ses fins doigts sur l'emballage du cadeau. Elle frotta ses ongles vernis d'un rouge brillant sur les rubans. Elle fit le tour complet du nœud avant de mettre un terme à sa souffrance.

Léa déchira le paquet à vive allure. Et, ce fut une surprise pour elle. Elle recula avec empressement en poussant un cri strident. Elle posa la main sur sa poitrine, tant l'horreur l'avait envahie.


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