10
Léa se rendit à l'hospice où se trouvait sa mère pour savoir comment elle allait. Elle entra dans la salle bondée de personnes âgées. Et elle la vit. Son regard croisa celui de sa mère qui sourit. Elle devait être heureuse de voir sa fille. Léa l'était aussi. Cela faisait cinq ans qu'elles s'étaient quittées. Camille devait se sentir très mal, surtout après ce qu'il venait de se passer. Léa s'approcha d'elle, et s'assit à ses côtés. Son visage, était pâle et ridé. On remarquait l'abandon et la solitude dans son expression faciale.
— Bonjour Maman !
— Bonjour, ma Léa. Comment ça va ?
— Bien, et toi ?
— Bien.
Une larme s'échappa de ses yeux pour glisser le long de sa joue.
— Je suis désolée de ne pas avoir été là pour toi, Maman, s'excusa Léa, sans plus attendre.
Sa mère leva la tête en sa direction.
Mais tu sais que je t'aime... et que l'amour que je porte pour toi est infini.
— Maman... je m'en veux de t'avoir abandonnée ici...
— Tu n'as pas à...
— Mais comprends moi, je croyais que c'était le meilleur endroit qui puisse exister pour toi. Je croyais faire ce qui était juste pour toi.
— Léa...
Une larme perla le long de la joue de Léa.
— Non, Maman. Écoute ce que j'ai à te dire, s'il-te-plaît. Sache que jamais je n'ai souhaité ton mal. Et au moment où j'ai appris cette affreuse nouvelle je me suis sentie très mal. Tu as passé plusieurs années à me loger, à me nourrir, à me couvrir d'amour... Normalement, c'était à mon tour de le faire. Parce que j'étais la seule qu'il te restait. Puisque ce vaurien à assassiné de sang-froid Papa, puis Jessica. J'ai manqué à mon devoir de fille. Je ne sais pas mais depuis que j'ai réalisé que j'étais un personnage réputé, j'ai complètement oublié que j'avais une vie en dehors du travail... que j'avais un mari qui m'aimait énormément, des enfants adorables, une Maman en or. Je regrette...
Léa baissa la tête, honteuse.
— ... J'ai oublié que c'était une joie infinie d'avoir une famille. J'ai tout relégué pour ma popularité.
Camille mouilla ses lèvres séchées par le froid du climatiseur.
— Ma chérie...
Elle posa sa main douce sur la joue de Léa.
— Maman, je suis une mère irresponsable, une fille ingrate, une femme indigne...
— Cesse de te faire du mal, ma chérie. Il faut que tu te rendes compte que tout le monde fait des erreurs. Et c'est en se trompant qu'on apprend de nos erreurs pour pouvoir être meilleur. Tu n'es pas habituée aux erreurs... Et ça je l'entends. Mais l'essentiel, c'est que tu aies reconnu tes fautes. Ça montre que tu as réalisé que ce que tu faisais était mal. C'est une raison de plus pour que je t'accorde le pardon.
— Maman, je ne mérite pas ton pardon...
— Comme on dit, l'erreur est humaine...
Léa lui prit les mains et lui expliqua en la regardant droit dans les yeux :
— Maman, je suis prête à changer. Tu verras, je ne serai plus celle que tu as connu autrefois, car tu comptes beaucoup pour moi. Je ne veux pas te perdre. Et pour te le prouver...
— Le fait que tu reconnaisses tes torts me le montre déjà.
— ... Non. Pour te le prouver, je te sortirai de cet hospice.
Et pour la première fois, depuis une dizaine d'années, Léa vit un sourire se dessiner sur le visage de sa mère.
— Oui, tu as très bien entendu. Je signerai une décharge pour que tu viennes avec nous. Maman, tu es la prunelle de mes yeux. Et je ne me pardonnerai pas s'il t'arrive quoi que ce soit par ma faute. J'ai honte de t'avoir laissé ici. Si je ne l'avais pas fait, ta vie aurait été toute autre.
— Mais qui pourrait bien vouloir ma mort ?
— ... Je n'en sais rien, mentit-elle. Mais ça n'a pas d'importance. Tu ne resteras pas une seconde de plus ici, Maman.
Léa déposa un baiser sur son front.
— Tout ira bien, crois-moi, Maman.
Elle réchauffa sa main.
— Tu peux maintenant être soulagée... Fini les riz sans huile, sans sel, les soupes de poulet... toutes ces nourritures immangeables. Ainsi pourras-tu grossir et... tu seras plus heureuse. Tu verras, chez moi, il y a plein d'enfants à chouchouter. Et s'il le faut, je paierai une infirmière pour veiller sur ta santé.
Après vingt ans d'ignorance, Léa avait réalisé que la famille était le principal ingrédient du bonheur. Peu importe si l'on est mal vu par les autres, peu importe si l'on perd une bataille. L'essentiel c'est d'avoir une famille, de s'en occuper, et de lui montrer à quel point elle compte à nos yeux. Car elle sera toujours là pour nous, pour le meilleur et pour le pire.
Léa croyait que pour être heureuse il fallait qu'elle réussisse dans tout ce qu'elle entreprenait, quitte à laisser sa famille de côté. Elle croyait que la vie sans victoire n'était pas une vie. Que ce n'était qu'une pièce sombre, dépourvue de lumière. Mais elle avait tort de penser ainsi.
Plus tard dans l'après-midi, Léa alla, avec sa mère, voir Thérèse pour lui expliquer ses droits concernant cette affaire. Puis elles rentrèrent chez elles faire une surprise à Cédric et aux enfants. Elle était persuadée qu'ils n'en reviendraient pas. Et leur réaction était telle : Cédric était si content de revoir sa belle-mère, les enfants, leur grand-mère. Ils se prenaient dans leurs bras et avaient presque envie de pleurer, tant l'émotion les submergeait.
Finalement, c'était ça le secret du bonheur : toute la famille réunie.
***
Plus tard, Léa eut envie de cuisiner. Elle se rendit dans la cuisine préparer du riz cantonné et des huitres aux échalotes. Une fois fait, tout le monde se lava les mais puis s'attabla. Et Léa leur servit le repas l'un après l'autre, sans s'oublier, évidemment. Pour finir, elle s'installa confortablement, leur souhaita un bon appétit, et ils se mirent à manger avec avidité.
Finalement, Léa se dit qu'elle n'avait plus rien à craindre. Car plus rien ne pouvait les séparer. Selon elle, plus rien ne pouvait détruire une famille aussi soudée que la leur.
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