20 - Sur le panneau...
A quelques mètres derrière eux, un énorme panneau publicitaire trône au milieu de la rue. On y voit une tour de verre immense s'élevant dans un ciel d'azur, un oiseau vert prenant son envol dans un cercle doré, ainsi que des personnages souriants sur le côté qui ressemblent à des chercheurs au travail.
Un slogan en grosses lettres du même vert que l'oiseau surplombe le tout : « L'innovation scientifique au service de votre santé ! »
Depuis le matin, c'est la troisième fois que Rébecca voit ce symbole. Mais cette fois, sans qu'elle n'arrive à comprendre pourquoi, son cœur se met à battre plus vite. Des images défilent dans son esprit : un portail portant ce logo, une lueur verte aveuglante, accompagnée d'une peur immense.
Ses mains se mettent à trembler sans qu'elle ne puisse les contrôler. Dans un état second, elle sent qu'on l'aide à s'assoir, elle entend qu'on lui parle, mais les mots n'arrivent pas jusqu'à son cerveau obnubilé par ces images qui passent en boucle dans sa tête.
Sa poitrine se sert, sa respiration s'accélère. La tour a disparu. C'est cette lumière verte angoissante qui la hante. Elle ne voit plus que ça. Une voix lointaine, robotique, scande dans son crâne et lui donne des sueurs froides : « fermeture des portes... fermeture des portes... fermetures des portes... ».
Elle ne comprend pas ce qu'il se passe. Ça ne lui était jamais arrivé. Est-ce que c'est à cause de toutes ces nouvelles choses découvertes en si peu de temps ? Son cerveau sature d'images ? Ce n'est pourtant pas la première fois qu'elle voit une tour, que ce soit en photo ou dans un film... ! Mais celle-ci a quelque chose de particulier, accompagnée de l'oiseau... L'estomac de la jeune fille se tord, elle a l'impression qu'elle va rendre son repas.
Elle n'arrive plus à respirer. Un étau enserre sa poitrine et sa gorge. Elle voudrait disparaître. Ne plus être. Ne plus sentir cette sensation horrible. Est-ce qu'elle est en train de mourir ?
A bout, elle se recroqueville sur elle-même, et met sa tête entre ses mains tremblantes dans une tentative désespérée de faire disparaître les images et les sons qui l'entrainent dans un tourbillon de sensations incontrôlables.
C'est alors qu'elle sent une chaleur bienfaisante l'envelopper, l'apaiser. Sa respiration chaotique commence à se calmer, peu à peu son pouls ralentit, l'oppression se fait moins forte. Une voix douce et rassurante remplace le robot. Elle se laisse aller contre cette chaleur bienvenue et cette voix réconfortante, ses muscles se détendent progressivement.
Elle ne sait pas combien de temps elle reste comme ça. Elle est comme dans du coton, elle n'a pas envie d'en sortir. Est-ce qu'elle dort ? Où est-elle ?
Un ronronnement familier la sort de sa torpeur. La vibration contre sa poitrine lui confirme la présence de son fidèle ami. Elle voudrait remettre correctement sa couverture pour s'emmitoufler encore plus dans la chaleur confortable de son lit en compagnie de son chat.
Encore un peu sonnée, elle sent un léger souffle sur son front qui lui balaye une mèche de cheveux. Du vent. Est-ce qu'elle a laissé une fenêtre ouverte ?
― T'es sûr que tu veux pas appeler une ambulance ? entend-elle alors non loin d'elle.
Une autre voix répond à la première, bien plus proche, douce, presque aussi vibrante contre elle que les ronronnements de Calou :
― Non, c'est passé, je t'assure. Elle bouge, je crois qu'elle se réveille. Et puis, les feux d'artifices vont bientôt commencer.
Les feux d'artifices ? Rébecca commence sérieusement à se demander ce qu'il se passe. Est-ce qu'elle est en train de rêver ? Elle fait un effort pour ouvrir les yeux.
Elle n'est pas dans son lit. Allongée en position de fœtus sur quelque chose de plus dur, elle voit une paire de jambes faire les cent pas sur une étendue d'herbe, à quelques mètres d'elle. Contre sa poitrine, Calou, à qui elle donne une caresse pour le remercier d'être encore là pour elle. Et sous son chat... une autre paire de jambes ?
Elle sursaute violemment et se redresse, manquant de se cogner la tête au menton de la personne qui la tenait contre elle. La veste qui lui servait de couverture lui glisse des épaules, elle se retrouve à fixer des yeux couleur chocolat à quelques centimètres de son visage.
― Fla... Flavio ? balbutie-t-elle, encore étourdie, reconnaissant enfin le jeune homme.
Ce n'était donc pas un rêve : elle est bien à l'extérieur, en compagnie de Flavio et de Maxime. Ce dernier a arrêté son manège et la regarde également avec des yeux inquiets.
― Que... qu'est-ce qui s'est passé ? demande encore la jeune fille, s'éloignant légèrement du voleur en sentant ses joues se réchauffer, se rendant compte qu'elle était allongée en boule contre lui depuis tout ce temps.
Mais au fait, depuis combien de temps ? Et pourquoi ? La chaleur, la voix, c'était lui ?
― Je me suis endormie ? s'inquiète-t-elle encore.
― Tu as fait une crise d'angoisse, lui répond Flavio avec douceur.
Une crise d'angoisse ? Oh ! Tout lui revient soudain : la tour, l'oiseau, la lumière verte et la voix robotique !
Devant ses yeux qui recommencent à s'ouvrir grands de frayeur, le jeune homme s'approche et lui murmure doucement en lui prenant la main :
― C'est fini, Ré. Nous sommes là. Regarde-moi. Tout va bien. Est-ce que tu te sens mieux ?
La jeune fille fixe les yeux doux de son voisin, avale sa salive, prend une grande inspiration, et finit par hocher la tête. Elle ne peut pas l'expliquer, mes ce regard est comme une bouée à laquelle elle s'accroche pour ne pas repartir dans le tourbillon angoissant qui menace encore de l'emporter.
― On n'est pas obligés de rester regarder le feu d'artifice, si tu ne le souhaites pas, continue Flavio.
Rébecca sursaute : Quoi ? Pas question ! Elle n'a pas fait tout ce chemin pour rater ce pour quoi elle s'est enfuie de sa maison ! Pour son rêve depuis des années ! Et Flavio a pris tant de risques pour l'aider, il n'est pas question d'abandonner si près du but !
Se ressaisissant, elle se redresse et déclare d'un ton n'autorisant aucune contestation :
― Pas question de rentrer maintenant ! Il est où, ce feu d'artifice ?
Flavio lui sourit, satisfait de l'effet que sa réplique a provoqué, et lui tend la main pour l'aider à se relever.
― Viens, on sera mieux un peu plus loin.
Sans se faire prier, Rébecca le suit. Les jambes encore légèrement tremblantes, elle est soulagée d'avoir la main du jeune homme pour la soutenir jusqu'au talus sur lequel il s'assoit, quelques mètres plus loin. Encore un peu mal à l'aise à l'idée de s'être endormie contre lui, elle laisse quelques centimètres de vide entre eux en s'asseyant à son tour.
Maxime s'installe un peu en retrait, silencieux.
― Mets le sweat, tu auras plus chaud, dit encore Flavio à sa voisine en lui tendant le vêtement qu'il a rattrapé avant qu'il ne tombe au sol.
― Et toi ?
― Ça va, je n'ai pas froid.
Rébecca n'insiste pas : elle se demande comment il fait avec un simple t-shirt, mais est bien contente d'enfiler une épaisseur en plus, car la nuit est tombée avec une humidité qu'elle n'avait pas prévue.
A ce moment, des notes de musique commencent à s'élever dans la nuit étoilée, en direction du château juste en face d'eux.
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Hello mes chers lecteurs ! 😊❤️
Passage un peu particulier... A la base, je n'avais pas du tout prévu de faire un chapitre entier concernant le panneau publicitaire... ça devait être très court, comme quand Raiponce voit le portrait de ses parents et d'elle petite, dans le village en fête, sans y faire trop attention sur le coup.
Mais bon, qu'est-ce que vous voulez... Quand c'est parti, c'est parti, quoi ! 😅😇
J'ai beaucoup aimé écrire ce passage, il est finalement très cohérent avec ce que j'ai prévu d'écrire dans la suite, alors j'en suis plutôt satisfaite.
Qu'est-ce que vous en avez pensé ?
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