Chapitre Deux
De retour chez elle, Léa ne put s'empêcher de s'effondrer sur son lit. Cela lui arrivait chaque fois qu'elle revenait de ce qui était maintenant la demeure de ses parents.
Retenant un lourd sanglot, Léa entreprit de se ressaisir et respira lentement. Il fallait qu'elle reste forte. Elle était trop épuisée pour parler à quelqu'un, et puis de toute façon personne ne pouvait l'aider.
Au bout d'un moment, la jeune femme s'endormit sans s'en rendre compte, la tête remplie de tristes pensées.
Lorsqu'elle se réveilla en sursaut, le front couvert de sueur, Léa fut prise de panique. Que s'était-il passé ? Elle était convaincue d'avoir oublié quelque chose. Elle essaya tant bien que mal de se remémorer les événements de la veille, sans grand succès.
Tout à coup, elle se souvint, réagissant précipitamment.
— Putain, non ! J'ai oublié le rendez-vous !
Léa jeta un coup d'œil à l'horloge accrochée au-dessus d'elle. Huit heures trente.
Ce travail tant espéré lui filait entre les doigts...
Léa prit conscience de ce qui se passait et commença à réfléchir. Elle appela tout d'abord la société dans l'espoir de se rattraper.
Tomber sur le répondeur n'était pas du tout ce qu'elle espérait.
Prise d'un soudain élan, Léa se chaussa, ne prit même pas la peine de se couvrir malgré le froid glaciaire qui régnait dehors et sortit de son logement. Peut-être arriverait-elle à prendre un train et arriver à son rendez-vous sans trop de retard ?
La jeune femme se mit à courir, les doigts gelés et les membres engourdis, et arriva tant bien que mal à la gare. Les passants la regardaient étrangement, mais Léa ne fit pas attention. Elle se faufila dans la foule et réussit à trouver le comptoir. L'air désolé de la vendeuse lorsqu'elle annonça sa destination n'augurait rien de bon.
En effet, le train était déjà loin. Le prochain ne partirait que dans l'après-midi. Retenant ses larmes, Léa rentra chez elle, se désolant sur son sort.
En arrivant dans son appartement, elle songea que plus rien de pire ne pouvait arriver. Sa surprise fut grande lorsqu'elle trouva son appartement sens dessus dessous.
— Ah non !
Léa poussa un cri de rage. Les larmes brouillaient sa vue. Elle ne pouvait croire à ce qu'elle voyait.
Dans sa course, elle n'avait pas fermé son logement à clé.
La cité dans laquelle elle vivait était bien loin d'être sécurisée.
En une vingtaine de minutes, Léa s'était fait cambrioler.
Des débris jonchaient le sol, tout était renversé, fracassé.
— Non... murmura Léa.
Elle se mit à fouiller avec ardeur dans le coin de son armoire si bien caché.
Rien.
Les voleurs avaient pris tout son argent.
Léa regarda alors sous le canapé, comme hypnotisée. La petite boîte contenant le bijou de sa mère avait disparu. Dans un dernier espoir, elle chercha son manteau des yeux. Il lui semblait avoir laissé ses clés et un petit billet dans la doublure.
Introuvable.
Léa ne possédait maintenant que des meubles abîmés, quelques vêtements et plus rien pour payer son loyer. Elle n'avait même plus de clé.
Elle était au bout du rouleau.
Elle allait finir à la rue.
Soudainement, Léa ne ressentait plus rien. C'était comme si la vie n'avait plus d'importance. De toute façon, elle n'en pouvait plus. Rien n'allait. Ne pouvait-elle pas profiter un minimum de ce monde ? Était-elle obligée de souffrir sans arrêt ?
Léa était complètement brisée. Et lorsqu'un lourd sanglot prit possession de son être, la jeune femme se jeta au sol en pleurant, se cogna au coin d'un meuble, et sombra dans l'inconscience.
Quelques heures plus tard, Léa ouvrit les yeux et se réveilla douloureusement, un mal de crâne insupportable la faisant grimacer. Plusieurs têtes amassées au-dessus d'elle l'affolaient. Que se passait-il ?
— Eh madame, ça va ?
— Qu'est-ce qui vous est arrivé ?
— Elle s'est évanouie ou quoi ?
— J'en sais rien, eh frère, file-moi de l'eau. Madame, tu veux boire ?
Léa cligna des yeux et reconnut les adolescents qui vivaient un peu plus bas dans la cité.
— Je...
La jeune femme ne savait quoi dire.
— Tu veux de l'eau ?
— Je veux bien merci, répondit Léa, encore étourdie.
— Qu'est-ce que t'as ? demanda l'un des adolescents.
Sans réfléchir, à moitié consciente, Léa leur raconta tout. Toute sa vie, ses problèmes, sa malchance, et son désir de vivre sereinement.
À la fin de son récit, seul un garçon osa parler.
— Elle est folle, c'est pas possible, elle est vraiment tarée.
Il se fit foudroyer du regard par ses amis. Apparemment, ils prenaient la jeune femme très au sérieux.
— Écoute, madame, fit le plus grand qui avait l'air d'être le chef de la bande, tu vas nous dire ton nom et on va t'aider, parce que là tu pisses le sang.
Un murmure d'approbation parcourut les jeunes hommes.
— Je m'appelle Léa, répondit-elle dans un souffle.
— Ok, Léa, tu te lèves et tu nous suis ? Ou tu préfères qu'on appelle les pompiers si tu te sens trop faible ?
Léa sursauta.
— Non, pas eux...
Les jeunes se regardèrent, étonnés.
— Pourquoi ?
— Je ne peux pas le dire, souffla Léa.
Ils haussèrent les épaules et l'aidèrent à se relever. Ce geste toucha la jeune femme qui partit, soutenue par une bande d'adolescents, en espérant qu'il ne lui arriverait rien.
Elle suivit les garçons jusqu'à un immeuble qu'elle se rappelait avoir déjà vu. Des petits jouaient au foot en riant sans se soucier de la neige qui recouvrait finement le sol. Des femmes de différentes origines discutaient entre elles tandis que les hommes pariaient sur un prochain match. Quelques dames bien habillées prenaient des notes et parlaient gentiment aux enfants.
Tout le monde avait l'air de vivre si paisiblement.
— Bienvenue à la cité, Léa !
La jeune femme s'étonna. La cité... Jamais elle n'avait imaginé cet endroit comme tel ! Auparavant, elle voyait les cités comme des endroits remplis de violence et des familles défavorisées. Elle regretta d'avoir pu un jour penser cela. Le tableau qu'elle observait depuis quelques minutes déjà était si beau à voir.
Tout le monde vivait en société. Léa fut touchée par ce spectacle.
Un des garçons se dirigea vers une femme qui devait être sa mère. Il lui expliqua rapidement la situation et celle-ci se tourna vers une de ces élégantes dames.
Lorsqu'ils se tournèrent vers elle, Léa se sentit mal. Voulaient-ils l'aider alors qu'elle n'était rien ?
La femme si bien habillée commença à parler d'une voix claire et enjouée.
— Bonjour, je m'appelle Mélissa. Je suis assistante sociale. J'aide les personnes en difficulté. C'est mon métier. J'adore aider les gens ! On m'a raconté rapidement ce qui s'est passé. J'espère pouvoir vous aider !
Léa en resta bouche bée. Mélissa était sûre d'elle. Légèrement excitée, certes, mais elle lui offrait son aide. La jeune femme n'y croyait pas. En fait, elle n'osait pas y croire. Après tout ce qu'elle avait traversé, le bonheur lui semblait impossible.
Pourtant, elle se laissa docilement conduire dans un appartement inconnu afin de parler.
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