Une véritable torture
1 065 jours avant...
🌻🌻🌻
Killian
Papa s'inquiète pour moi et moi je m'inquiète pour toi. Couché dans mon lit, tu dors à poings fermés, Twinkle pelotonné contre ton torse. On dirait deux petits chatons abandonnés par leur mère mais moi je ne t'abandonnerai pas Tim. Je t'en fais la promesse.
Le soleil se lève à peine mais je n'arrive plus à dormir, ma tête emplie d'interrogations auxquelles je ne trouve pas de réponses, m'empêche de fermer l'œil. Après une douche vite faite, je pars courir en te sachant en sécurité. J'ai besoin de faire descendre la pression après cette semaine à craindre de revoir ton beau-père. Mais il n'est pas venu et je crois qu'on ne le reverra pas.
Rosie t'a laissé des messages, ta mère aussi mais tu n'as pas eu le courage de les lire. Je l'ai fait pour toi et je t'ai vu pleurer pour la deuxième fois depuis qu'on se connait. Je ne veux plus jamais te voir dans cet état. Tu m'as fait peur, paniquer même. Mon cœur a tremblé en te voyant arriver il y a une semaine sur ton vélo bleu, des larmes plein les yeux. J'ai cru me noyer quand tu m'as raconté. J'ai détesté Roger autant que toi et crié ma haine comme s'il pouvait m'entendre. Ce matin j'ai besoin de me vider la tête, de reprendre le contrôle parce que je sens que je ne maîtrise pas tout et ça me fait horriblement peur.
Je cours et décide d'aller sur la plage. J'aime entendre l'océan aller et venir sous mes pieds et l'odeur iodée qui s'en dégage. Je longe Ocean Boulevard et descend sur le sable humide de ce début de matinée. Quelques goélands volent au-dessus des vagues mais la plage est quasiment déserte. Long Beach s'étale devant moi et je cours toujours à la recherche d'un peu de paix.
Je n'ai pas vécu la discussion avec ton beau-père mais ses mots, retranscrits de ta bouche, m'ont fait hurler intérieurement. Je t'ai soutenu du mieux que j'ai pu, je t'ai écouté, réconforté et malgré tout, j'ai l'impression de ne pas avoir été à la hauteur. J'aimerais lui dire ce que je pense à ton beau-père mais aujourd'hui ma colère est si grande que je pourrais faire une bêtise et le seul moyen que j'ai trouvé pour me canaliser depuis une semaine c'est de courir tous les jours pour me vider la tête. Courir et d'autres activités dont je ne suis pas très fier.
Lorsque je reprends mes esprits, je me rends compte en regardant ma montre connectée que j'ai couru presque quinze kilomètres. Je suis vidé mais j'ai besoin d'évacuer alors je me remets en route et continue de courir jusqu'à la maison. Il est presque neuf heure trente lorsque je débarque dans le salon. Tu es en pleine discussion avec mon père et vos sourires communicatifs me font presque oublier mes angoisses. Je m'approche du canapé où vous êtes installés et t'embrasse puis salue mon père.
— Tu t'es perdu ce matin ? me demande ce dernier en déposant sa tasse de café sur la table basse en verre.
Ce n'est certainement pas la première de la journée et d'autres suivront. Mon père aime le café autant que ses voitures de luxe.
— Non, j'ai pas réalisé tout de suite que j'avais couru autant mais ça m'a fait du bien.
— Tant mieux, pense à t'hydrater Killian. Je vais partir au bureau et je rentrerai sûrement tard, ça ira pour vous ? demande-t-il en nous dévisageant tour à tour.
— T'inquiète pas 'pa, ça ira, file. Je travaille cet après-midi, on sera occupé Tim et moi et on va se débrouiller.
Un sourire étire ses lèvres puis il m'embrasse sur le front avant de nous saluer et de disparaitre du salon. Je me retourne vers toi et remarque que tu m'observes d'un œil curieux.
— Qu'est-ce qu'il y a ? dis-je en sentant mes joues chauffer tout à coup.
— Rien, je me demandais simplement à quoi on allait être occupé ? dis-tu en te levant pour m'embrasser.
— J'ai plein d'idées mais là tout de suite, il faut que j'aille prendre une douche. Je pue le fennec c'est immonde !
Tu ris et enlaces mon poignet avant que je ne puisse m'éloigner. Tu me fais face et ton regard insistant fait soudain divaguer mon esprit qui s'envole en imaginant ce qui se cache sous tes vêtements.
— J'ai pas encore pris ma douche ce matin... ça t'embête si je me joints à toi ?
Je déglutis difficilement, manquant de m'étouffer avec ma salive. Soudain tout mon corps se tend et ça doit se voir sur mon visage. Tu penches la tête sur le côté comme si tu tentais de lire en moi. Je me mords la joue pour revenir à la réalité.
— Je sais pas si c'est une bonne idée, dis-je en espérant ne pas te blesser.
Je ne veux pas que tu croies que je n'en ai pas envie mais je ne sais pas comment mon corps réagira. J'ai peur mais ta main qui enlace la mienne, ton pouce qui caresse ma paume me rassurent un peu mais l'angoisse est là et ne veut pas lâcher mes intestins qui se nouent.
— Si tu ne veux pas, j'attendrai mon tour, c'est pas grave tu sais.
— Tim, je... peut-être une autre fois. Je suis pas...
Tu poses ton index sur mes lèvres pour me faire taire.
— T'inquiète pas, laisse tomber. C'était pas une bonne idée. Vas-y, dis-tu en me souriant.
— T'es pas fâché ?
— Non, pas du tout. T'as le droit de pas avoir envie, je comprends.
Je t'embrasse et te promets de faire vite. Je monte dans la salle de bain avec l'impression qu'une brume impénétrable m'enveloppe la tête. Des fantômes du passé reviennent soudain, me glaçant le sang comme si j'avais plongé dans un lac gelé. Je me glisse sous la douche et allume le jet d'eau chaude. Ça brûle pendant quelques secondes puis je ne sens plus rien, mis à part mes mains sur mon corps. Je ferme les yeux et tente de reprendre possession de mes émotions en faisant glisser ma main sur mon sexe. J'ai besoin d'évacuer, d'annihiler ces souvenirs de ma mémoire, de penser à autre chose pour pouvoir avancer.
Je me crispe en pensant que ce n'est même pas de ta faute. Je serre les dents jusqu'à ce que l'orgasme physique me submerge alors que tout en moi transpire la colère et la haine. Je me déteste de devoir faire ça. J'ai envie de vomir lorsque mon bas-ventre se contracte. Je m'assois au fond de la douche et laisse l'eau effacer les traces de mes faiblesses pendant quelques minutes. Lorsque je relève la tête, tu es là, debout dans l'encadrure de la porte. Je me liquéfie. Je te vois te déshabiller sans pouvoir te stopper. J'aimerais te hurler de ne pas approcher mais je n'y arrive pas. Tu ouvres la porte vitrée de la douche et t'accroupis à côté de moi, ton regard doux sur moi.
Je voudrais te dire de ne pas me toucher mais je n'y arrive pas. Je reste figé et malgré moi, je te laisse entrer dans mon espace privé, dans ma bulle de sécurité, parce que j'ai confiance en toi. Tu me prends dans tes bras avec tant de douceur que j'en oublie pourquoi je n'aime pas qu'on me touche. Tu m'embrasses la tempe en me murmurant que tout est fini, que tout ira bien. Mais tu ne sais pas si c'est vrai, tu ne sais pas ce qui se passe et je ne peux pas te le dire.
— Il y a plein de choses qui ne vont pas chez moi Tim. Tu peux pas comprendre, marmonné-je en cachant mon visage mouillé d'eau et de larmes salées.
Ta main caresse mon dos et avec étonnement je ne me crispe pas, comme si tes mains pouvaient effacer ce que mon corps à tant détesté et repoussé depuis plusieurs années.
— Tu n'as pas besoin de me dire quoi que ce soit Killian. Je suis là et je peux supporter pour nous deux si tu en as besoin.
— T'as pas à faire ça pour moi Tim, dis-je en te repoussant doucement.
— Killian, laisse-moi faire, ok ?
Tu insistes et sans savoir pourquoi, je te laisse faire. Je ne sais pas si ce sont tes mots, ta douceur ou ton regard sur moi mais je suis incapable de te repousser.
— Pourquoi tu fais tout ça pour moi ?
— Peut-être parce que tu es important pour moi, parce que je tiens à toi et que te voir comme ça me fait mal au cœur.
— Je veux pas de ta pitié Tim.
— C'est pas de la pitié imbécile, chuchotes-tu en prenant mon menton entre tes doigts.
Ton regard aussi grand que le firmament sonde mon visage puis il s'arrête sur mes lèvres et tu murmures :
— Est-ce que je peux ?
J'hoche la tête, la boule a ventre. Tes lèvres se posent sur les miennes si doucement que ça me chatouille presque. J'arrête de respirer mais mon cœur s'emballe. Mes mains s'agrippent à ta taille, glissent dans ton dos pour raffermir ma prise. Je ne veux plus te lâcher et je ne veux pas t'entendre me dire ce que je crois que tu vas me dire.
— Killian, murmures-tu contre mes lèvres.
— Non, ne dis rien s'il te plaît. Je peux pas l'entendre, pas pour l'instant.
Tu souris puis embrasses ma tempe, tes lunettes complètement embuées et tes mèches blondes collées sur ton front.
— Tu fais battre mon cœur et tu t'y es fait une place toute particulière. Ça tu peux l'entendre ?
J'hoche la tête, souriant bêtement, gravant ce moment dans mon esprit pour ne jamais l'oublier. Je te remercie silencieusement. Tu me rends mon sourire et mon cœur tambourine dans ma poitrine.
— J'en dirais pas plus dans ce cas. Est-ce que tu veux sortir de là ?
— Mouais, je crois.
Tu me relâches et te glisses hors de la cabine, revenant avec une serviette que tu entoures autour de ma taille. J'embrasse ton front puis j'y joins le mien en observant tes yeux à travers tes lunettes parsemées d'eau. Les gouttelettes ressemblent à des étoiles faisant scintiller tes yeux.
— Grazie*, murmuré-je simplement, incapable de savoir quoi dire de plus à cet instant.
— T'as pas à me remercier Killian. Toi et moi on est un couple maintenant, on se soutient. Quand l'autre en a besoin, on répond présent. Tu l'as fait pour moi il y a une semaine, je le fais tout naturellement maintenant. Et si tu n'es pas prêt à me parler, j'attendrais le bon moment. On a tout le temps.
Tu m'enlaces et me retiens dans une étreinte emplie de douceur. Tu déposes de petits baisers sur mon torse sans jamais me lâcher.
— Je te remercie Tim, j'en avais besoin.
Ton index se pose à nouveau sur mes lèvres et tes baisers descendent soudain plus bas sur mon ventre. C'est une véritable torture pour mon esprit qui imagine déjà la suite mais je ne veux pas que ça se passe comme ça, pas quand je suis dans cet état, pas alors que tu penses me devoir quelque chose. Alors, avant que ma serviette ne finisse parterre, je te retiens.
— Attends Tim.
Ton regard accroche le mien et tu te recules, surpris. Un sourire timide étire tes lèvres et je respire à nouveau.
— Excuse-moi, je me suis laissé emporter. Je te laisse t'habiller, je t'attends en bas. Je crois qu'Anna voulait nous préparer quelque chose pour le déjeuner, dis-tu avec un clin d'œil.
Tu ramasses tes vêtements laissés sur le sol de la salle de bain et disparais dans le couloir. A poil. Ok. Je ris en secouant la tête mais c'est du soulagement que je ressens tout à coup. Tu n'as pas idée du poids que tu viens d'enlever de mes épaules. Je ne voulais pas être celui qui te repousse.
Je m'habille et descend te rejoindre dans le salon qui est baigné par les rayons du soleil, ça sent bon le café et le bonheur. Anna a effectivement préparé le déjeuner et nous engloutissons ses tacos sans reparler de ce qui s'est passé ce matin. Tu as repoussé mes ténèbres et c'est là tout ce dont je veux me souvenir de ce moment avec toi.
Lorsque vient l'heure de partir au boulot, je t'emmène avec moi. On débarque à l'agence main dans la main, faisant fleurir les sourires sur les lèvres de mes collègues. Tu observes la séance photo depuis un coin de la pièce mais quand j'ai terminé, je réalise que tu as disparu. Je panique et te cherche partout lorsqu'Ophra me rassure.
— Tu cherches ton blondinet ? Je crois que Gloria essaye de l'embaucher, dit-elle avec un grand sourire.
— Je vois, ça ne m'étonne même pas, marmonné-je en m'asseyant sur le siège en cuir.
Ophra me démaquille et lorsque j'ai fini de me rhabiller, je te vois venir avec des papiers en main et un sourire à faire fondre la glace en plein hiver, collé sur la tronche. Tu secoues les papiers et me sautes au cou.
— Gloria m'a engagé ! Je n'aurais pas à squatter chez toi. Je vais pouvoir payer mon loyer à ton père, s'il est d'accord.
Je ris intérieurement, tu me dévisages.
— Je ne compterais pas trop là-dessus si tu veux mon avis, dis-je en grimaçant.
— M'en fous, je veux pas vivre chez toi sans payer ma part. Je lui parlerai Killian.
— Bon courage !
— J'ai déjà eu affaire à son fils, j'ai même pas peur, dis-tu tout sourire.
Moi j'ai peur mais je ne vais pas te le dire. J'ai peur de trop m'attacher et que tu te rendes comptes que je suis trop déglingué pour être aimé et que tu partes loin de moi. J'ai la trouille mais je préfère l'ignorer pour l'instant, c'est plus facile.
*Grazie / Merci
❤❤❤
Hello !
Un chapitre où on comprends un peu mieux l'état d'esprit de Killian lorsqu'il ne va pas bien.
Timothy essaie de comprendre mais y arrivera-t-il ?
On en saura plus mercredi ;)
Je vous fais des bisous (* ̄3 ̄)╭❤
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