Tu me connais trop bien

Jour J


🌻🌻🌻

Killian

J'ai perdu le contrôle. Et maintenant Radiohead chante dans ma tête. Je suis un pauvre type, je suis taré. Qu'est-ce que je fous là bordel ? Je sais que ma place n'est pas ici mais tu es trop loin pour pouvoir me retenir. Je devrais m'enfuir, courir, passer cette putain de porte et te retrouver mais Tim, tu me connais, je suis taré autant que tu es spécial à mes yeux.

Je suis comme une voiture de course lancée à trois cent kilomètres à l'heure, dont les freins auraient lâché. Je ne peux plus m'arrêter quand je suis comme ça. Mon corps réagis plus que mon esprit. Je suis déconnecté, comme coupé de mes émotions, comme un pantin sans fils.

Lorsque l'orgasme me submerge, je réalise avec horreur que je j'ai tout foutu en l'air, que je vais te perdre, c'est sûr, et je ne mérite que ça. C'est de ma faute si j'en suis là, uniquement de ma faute. J'aurais dû t'écouter, écouter Alicia et me soigner. Au lieu de ça, j'ai fait n'importe quoi et aujourd'hui, je n'ai plus que mes yeux pour pleurer.

Sydney, qui était à genoux devant moi, se relève et m'observe, soudain son regard s'assombrit alors que ses lèvres luisent.

— C'était si bon que ça ?

La main sur le cœur, mon sexe à l'air libre alors que je le dévisage, j'ai envie de me baffer ou de sauter par-dessus la balustrade de la terrasse. Je me rhabille et cours aux toilettes vider le contenu de mon estomac. 

Qu'est-ce que j'ai fait Santa madonna* ?!

Tu l'as laissé te sucer et t'as même aimé ! Voilà ce que t'as fait imbécile ! me hurle ma conscience, aussi horrifiée que moi. 

Dans le miroir, je ne me reconnais pas. Mon visage est déformé par une grimace ou peut-être par le choc et dans ma poitrine, mon cœur frappe violemment, comme pour me punir de ce que je viens de faire. Je m'assois sur le marbre froid de la salle de bain, complètement perdu et l'estomac retourné.

J'ai beau chercher dans les arabesques du sol ou au fond de mon esprit une quelconque réponse logique, je ne comprends pas ce qui s'est passé. Pourquoi j'ai accepté ?!

Poussé par une soudaine vague de panique, je me relève et pars vérifier si tout ça n'est pas qu'un mauvais rêve, un putain de cauchemar mais lorsque je retrouve Sydney, les larmes aux yeux, la sensation d'effroi s'intensifie !

— Qu'est-ce qui se passe bordel ! crié-je sans vraiment savoir pourquoi.

Il se frotte la nuque, l'air embarrassé puis secoue la tête en marmonnant. Il essuie une larme sur sa joue. Mais putain je comprends rien à ce qui se passe.

— Je crois que tu devrais répondre au message sur ton téléphone, dit-il en pinçant les lèvres.

Son ton est aussi froid que le marbre de la salle de bain et j'ai soudain l'impression qu'il m'en veut lui aussi. Je cours pour trouver mon téléphone que j'ai laissé sur le lit. Un message de toi y est affiché et me soulève le cœur.

« J'espère que t'es bien arrivé, tu ne m'as pas appelé. Tu me manques mon cœur, je t'aime. »

Comment ça je ne t'ai pas appelé ? J'ai essayé putain ! C'est quoi ce bordel ?!

Je regarde l'heure sur l'écran qui affiche trois heures du matin. Je ne vais pas te rappeler maintenant, tu dois certainement dormir. Et pour te dire quoi ? Je peux pas. Je glisse mon téléphone dans ma poche de jean et fais quelques pas, évitant Sydney qui est toujours là, à m'observer.

— Alors ? T'aurais pu me dire que t'avais quelqu'un dans ta vie.

Pardon ?

— C'est toi qui m'as dit ; pas de questions, on ne se dit rien !

— Ouais, je sais mais, le fait que tu sois en couple, t'aurais pu me prévenir. Je ne fais pas ce genre de chose avec des mecs déjà pris d'habitude !

— T'as raison, c'était une très mauvaise idée, une erreur et j'ai merdé, j'ai... Putain ! crié-je en frappant dans le mur, réalisant le mal que j'ai fait.

Je m'assois sur le lit, le regard dans le vide. Sydney fait de même, gardant le silence quelques instants puis il ouvre la bouche. Sa voix est rauque, comme marquée par l'émotion.

— Si j'avais su, je ne l'aurais pas fait. Je ne suis pas un briseur de couple. Je suis désolé mais t'avais l'air de le vouloir toi aussi.

Le pire c'est qu'il a raison, j'en avais envie mais pour de mauvaises raisons.

— Je... j'aurais pas dû mais c'est fait et je me sens bien assez mal comme ça, pas besoin de rajouter de la culpabilité en me vantant ta bonté d'âme.

— C'est pas ce que je fais, je... laisse tomber, je vais m'en aller ça vaut mieux, dit-il en se levant. J'espère que ça ira pour toi et ton petit ami.

— Casse-toi ! crié-je soudain hors de moi.

— C'est facile de crier sur les autres. T'es tout de même à moitié responsable tu sais.

La culpabilité vient me gifler en plein cœur et ça fait mal.

Je lui lance un regard noir puis un doigt d'honneur qui le fait sourire. Il ouvre la porte et pousse sa valise dans le couloir sans se retourner. La porte se referme et je réalise qu'il a oublié son blouson sur le petit meuble de l'entrée. Lorsque je le soulève, un trousseau de clé tombe au sol. Je le ramasse et découvre un porte clé avec la photo d'un homme aux yeux verts dans un cadre en forme de cœur.

Je rêve ou il se fout carrément de ma gueule !?

J'ouvre la porte afin de lui rendre son blouson. Poussé par la colère, je cours dans le couloir et retiens les portes de l'ascenseur qui se fermaient.

— Tu brises pas les couples ? Et lui c'est qui dans ce cas ? dis-je en lui tendant le trousseau de clé sous son nez.

Il ferme les yeux un instant puis chasse une larme d'un revers de main.

— Rends-moi ça. T'as pas à savoir qui c'est, râle-t-il en sortant de l'ascenseur en me prenant son blouson des mains.

Dans le couloir de l'hôtel, il me dévisage et reprend.

— En fait, je vais te le dire, juste pour que tu ne culpabilises pas plus. Il s'appelait Oliver et il est décédé il y a deux ans. C'était mon petit ami mais t'inquiète pas, il ne t'en voudra pas. Au revoir 6B, je te souhaite une belle vie et excuse-toi auprès de ton petit ami. J'espère qu'il comprendra.

Il tapote mon épaule et appuie sur le bouton de l'ascenseur en me tournant le dos. Les portes s'ouvrent, il s'engouffre dans la cabine et ajoute avec plus de douceur :

— Tu peux encore rattraper la situation, fais-le. Au revoir 6B.

Les portes se referment sur son regard gris-vert indéfinissable. Était-ce de la tristesse ? De la culpabilité ? J'en ai aucune foutue idée mais je sais qu'au fond de mes tripes, de la culpabilité il y en a à revendre.

Je rejoins ma chambre et me couche car vu l'heure qu'il est chez nous, je peux pas t'appeler maintenant. Ici le soleil s'approche de l'horizon, la journée se termine. Demain je dois assurer à la place de mon père, il faut que je dorme mais c'est compliqué. Je fais des cauchemars, des rêves des plus bizarres et le lendemain, j'ai la tête dans le cul et une dizaine de messages et d'appels en absences sur mon téléphone, dont certains viennent de Yuma. Ça m'inquiète.

Il est sept heures quand je sors du lit, me glissant sans attendre sous la douche. Une fois sec, j'enfile un jean noir et une chemise blanche puis je prends mon petit déjeuner en tentant de comprendre ce qui se passe à Los Angeles. Je t'appelle, avalant une gorgée de café au passage. Tu réponds à la troisième sonnerie.

« Mon cœur, enfin ! Tu vas bien ? » me demandes-tu l'air paniqué.

— Ouais ça va, je suis désolé, avec le décalage horaire j'ai pas réussi à t'appeler. C'est quoi tous ces messages bizarres ? J'ai rien compris. Tout va bien ?

Oui je mens à moitié mais je suis pas capable de m'expliquer ce que j'ai entendu au téléphone hier et j'ai besoin de savoir.

« Ouais, il s'est passé un truc bizarre. Je crois qu'on a mis de la drogue dans mon verre quand je suis allé au bar avec les collègues. Yuma s'inquiétait et il t'a appelé je crois. »

— Oui, au moins cinq fois. Comment ça de la drogue ?! Qui a fait ça ?!

« J'en sais rien mais je vais bien mieux, t'inquiète pas. Yuma et Alice ont pris soin de moi. »

— Ok, tant mieux. Ecoute, je dois bientôt partir pour ma première séance de la semaine. Je t'appelle ce soir... Ah non cazzo* ! Ce sera à nouveau le milieu de la nuit ! J'essaierai demain à midi, comme ça, ça fera pas trop tard pour toi. Tu me manques Tim.

« Toi aussi, c'est horrible sans toi. Ça va être long jusqu'à ce que tu m'appelles, soupires-tu. Tu sais que je t'aime ? »

Ces quelques mots font remonter mon petit déjeuner mais je me retiens de tout garder en ravalant ma culpabilité en même temps.

— Moi aussi je t'aime. A demain mon cœur.

« A demain mi amor* »

Tu raccroches et le silence m'étouffe, comme si tout à coup, on avait volé tout l'oxygène de la pièce. J'ai la nausée et à nouveau mal au crâne, je sens que la journée va être longue.

Finalement je gère cette semaine comme le reste de ma vie. La boule au ventre et la main sur mon sexe lorsque la nuit tombe. Je sais que je dois te parler, t'expliquer mais j'ai la trouille que tu partes définitivement de ma vie. Je ne veux pas me retrouver seul mais je sais aussi que ce que j'ai fait le justifierait. J'ai fait n'importe quoi et même si je suis soulagé quand l'avion se pose sur le tarmac de Los Angeles, j'ai le plus grand mal à apprécier le fait d'être de retour.

Je récupère mon bagage et réalise que l'avion a une heure d'avance. D'un côté je me dis que c'est une bonne chose, je vais pouvoir réfléchir à la manière dont je vais bien pouvoir t'avouer la pire connerie de ma vie, d'un autre côté, j'aimerais que ce soit déjà fait. Dans le taxi, la pression monte, autant dans mon crâne que dans mon estomac qui est prêt à tout faire ressortir.

J'appréhende mon retour et lorsque le véhicule s'arrête devant notre porte, j'hésite quelques instants. Tremblant, je marche d'un pas lent jusqu'à notre porte. Je la pousse et découvre Twinkle qui m'observe de loin, couché sur son fauteuil bleu. Il semble lire dans mes pensées et vouloir me mordre ou pire, ma mort. Ça ne me rassure pas vraiment.

Je me glisse dans notre chambre et quitte mes vêtements trop stricts afin de me sentir plus à l'aise, si du moins c'est possible. Je t'entends siffloter sous la douche mais je n'ose pas approcher. Je pars finalement en direction du salon et caresse Twinkle qui me fait définitivement la gueule. Il ne ronronne même pas, renforçant mon mal être. Si même lui m'en veut, qu'est-ce que je vais devenir ?

— Tu vas voir le chat et le petit ami tu l'ignores ? râles-tu tout à coup derrière moi.

Je me retourne et enlace ton corps encore humide. Tu ne portes qu'une serviette enroulée autour de ta taille mais je ne me laisse pas tenter.

— Je ne t'ignore pas, jamais je le ferai. Twinkle était moins occupé, c'est tout.

Je t'observe et je sens tout à coup le poids de la culpabilité écraser mon assurance. Je renifle, évitant ton regard. Mais tu me connais et ne me laisse pas partir lorsque je tente de fuir.

— Qu'est-ce qui ne va pas amor* ? demandes-tu en m'attirant sur le canapé, ta main enlaçant la mienne avec douceur.

Je m'assois en déglutissant bruyamment. Je sais pas quoi faire de mes mains et encore moins des mots qui m'asphyxient à cet instant. Je sais que si je ne parle pas maintenant, ça fera encore plus mal plus tard. Je ne veux pas te blesser mais c'est malheureusement déjà trop tard. Je prends une grande inspiration qui me bouffe toute mon énergie et je me lance la gorge serrée.

— Je crois qu'il faut que je t'avoue quelque chose.

Tu sourcilles, ta main lâchant soudain la mienne. Le froid que tes doigts laissent entre les miens, me fiche la trouille. J'ai peur que tu aies compris.

— Pourquoi j'ai l'impression que ça ne va pas me plaire du tout ? siffles-tu entre tes dents serrées.

— Parce que tu me connais trop bien et... que j'ai... j'ai fait une grosse connerie.

Ta main se lève puis s'abaisse sans même m'effleurer. Ton regard est d'un noir que je n'ai jamais vu dans tes iris. Aussi lentement que dans un rêve, tu te lèves du canapé, marchant jusqu'à notre chambre, en ignorant mes appels désespérés. Tu fermes la porte avec tant de douceur que ça m'effraie plus encore que si tu l'avais claquée violemment.

J'arrête de respirer. J'attends quelques secondes et prenant mon courage à deux mains, je te rejoins dans notre chambre. Tu es assis sur le lit, la tête basse. Tu ne réagis même pas quand le matelas s'enfonce sous mon poids, un silence aussi lourd que mes remords, s'installe entre nous. Je ne sais pas par où commencer, comment t'avouer la chose que tu dois redouter depuis un moment. Au fond je suis sûr que tu n'attendais que ça pour me quitter. Ce serait l'excuse parfaite pour me dire que toi et moi c'est fini.

— Killian, je veux que tu ailles voir un professionnel. Je crois que je ne peux plus t'aider et je ne veux plus être celui qui entretien tes addictions. Je veux être ton petit ami, pas ta sexe thérapie et c'est non négociable.

Je crois que j'aurais encore préféré que tu cries, parce que ton calme me fait peur, m'angoisse autant que tes mots. 

❤❤❤

Hello vous,

Killian a succombé et la bombe est lâchée.

Comment va réagir Tim à votre avis ?

On en saura plus au prochain chapitre...

Des bisous (づ ̄3 ̄)づ╭❤~

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