S'il faut chercher de la lumière
18 jours avant...
🌵🌵🌵 TW (mention de viol, d'abus sur personne en détresse, de manipulation mentale, de tentative de suicide)
Timothy
Je suis choqué d'apprendre que tu as vraiment eu une relation avec Giovanni. Je ne comprends pas comment tu as pu en arriver là. Mon cerveau a beau turbiner aussi vite qu'un moulin soufflé par le vent, il refuse complètement de saisir le sens de tout ça. Est-ce qu'il y a d'ailleurs, ne serait-ce qu'une quelconque logique à cette... relation ? Ce mot m'écorche le cœur. J'ai beau essayer d'y voir clair, je n'y arrive pas.
Alors que tu te reposes, Twinkle à tes côtés, je prends mon vélo bleu et je file dans le vent, là où je sais que j'aurai des réponses. J'ai besoin de comprendre ou du moins, d'essayer. Tenter d'entrevoir à travers cette brume de mystère, qui entoure ce chapitre de ta vie et qui nous bouscule en ce moment. Je suis perdu, comme ballotté par des flots tumultueux, cherchant un point d'ancrage là où il n'y en a peut-être pas. J'ai peur de finir par me noyer moi aussi.
Debout devant la maison blanche, j'hésite, écoutant le chant des oiseaux et le bourdonnements des insectes dans le jardin. Je prends quelques grandes inspirations et je sonne.
Alicia m'ouvre la porte de sa maison avec joie, puis de sa chambre, que je redécouvre avec une sensation de bonheur éphémère. Étonnamment ici, je me sens presque comme chez moi, il faut dire qu'avec nos nombreuses soirées cinéma à trois, on s'est beaucoup rapproché elle et moi. Elle me sourit, toujours aussi belle, dans une robe légère, un simple cardigan mauve couvrant ses épaules.
— T'as une petite mine Tim, qu'est-ce qui se passe ? me demande-t-elle en me désignant son lit, tandis qu'elle prend place sur sa chaise de bureau, accoudée sur le dossier.
Son regard, bienveillant, me sonde un instant mais elle patiente alors que je cherche mes mots. C'est difficile d'engager la discussion, bien qu'Alicia soit mon amie, j'ai du mal à savoir par où commencer, tant le malaise de cette histoire me remue. Pourtant je sais que c'est elle la bonne personne.
— Pour être franc, j'ai pas vraiment bien dormi ces deux dernières nuit. J'ai besoin de réponses et je sais qu'avec toi, ce sera plus facile d'en avoir, dis-je en levant lentement les yeux vers elle.
J'hésite, secouant la tête afin de remettre de l'ordre dans mes idées, en vain. Tout est sens dessus dessous. J'ai l'impression d'avoir passé mon cerveau à la machine à laver.
— Tu peux tout me dire Tim, tu sais que je ne te jugerai pas. Dis-moi ce qui te tracasse.
Je prends une grande respiration, qui me coûte toute mon énergie, et je me lance, la boule au ventre.
— Je sais pas si tu sais mais, Killian a revu Giovanni. En fait il a été engagé par notre agence, comme photographe, et ça ne s'est pas très bien passé, t'imagines bien. Il y a trois jours, Giovanni est venu chez nous, il voulait parler à Killian et j'ai appris... qu'ils avaient eu une relation et j'ai beau retourner cette histoire dans tous les sens dans ma tête, je comprends pas... Bon sang, comment c'est possible Ali ?
Je renifle et essuie mes yeux trop humides alors qu'Alicia fait rouler la chaise afin de se mettre juste devant moi, nos nez se frôlant presque. Elle pose une main sur mon épaule et prend une grande inspiration. Je sens bien que cette histoire l'a touchée elle aussi, je le constate dans son regard qui me renvoie une grande tristesse.
— Tim, je sais pas si c'est à moi de te le dire mais comme je connais Kiki, il se renfermera si tu lui en parles, alors... je veux bien éclairer tout ça, si ça peut t'aider à y voir plus clair.
— Je te remercie Ali mais est-ce que je peux avoir un câlin d'abord ?
Elle sourit puis se lève et vient s'installer avec moi sur la couette rose du lit, m'offrant une pause réconfort dont elle a le secret. Dans ses bras, je me sens mieux, plus léger mais je sais que la suite ne va pas me plaire. Elle attend patiemment mon feu vert, avant de reprendre avec douceur :
— Tout d'abord, sache que cette histoire s'est passée quelques mois après le renvoi de Giovanni du lycée. Killian venait de perdre sa mère et était vulnérable, au fond du trou et s'attachait à chaque personne qui lui donnait un soupçon d'espoir. Il s'était même lié d'amitié avec le gardien du cimetière, pour te dire à quel point il était paumé. Bon, il était gentil Bill mais il avait dans les cinquante ans je crois. Enfin bref, Giovanni a commencé à venir voir Kiki chez lui, après les cours. Je les voyais fumer sur le toit et boire aussi, beaucoup. Killian cherchait de l'attention et Giovanni lui en a donné au moment où il en avait le plus besoin. C'est aussi simple et cruel que ça.
Je serre les poings sur mes cuisses, j'ai envie de hurler ma haine envers lui.
— Mais comment Killian a pu accepter ça ? Cet enfoiré a abusé de lui... Je... Je comprends pas Alicia.
— Tu sais, quand on te répète que tu n'es qu'une sous-merde, un moins que rien mais que la seule personne qui peut t'aider est là devant toi, quand tu es au fond du trou, tu ne peux que la croire j'imagine. Killian était sous son emprise et Giovanni savait très bien ce qu'il faisait. Il le manipulait. Il lui promettait de l'aimer, d'être là pour lui mais surtout, qu'il était le seul à pouvoir le faire. Cette merde insignifiante a même été jusqu'à lui dire qu'après avoir été violé, il ne pouvait pas espérer que quelqu'un l'aime. Il lui a répété si souvent qu'il n'y avait que lui pour le comprendre, que Killian a fini par le croire.
Je vois les liens de cette histoire se dénouer doucement dans ma tête mais ils ont décidé de nouer mon estomac et ce que je commence à comprendre, me fait peur, me dégoute aussi.
— Bon sang, ce type est à vomir. Si j'avais su ça avant, je lui aurais cassé la gueule quand j'en avais l'occasion. Il l'a détruit... soufflé-je en tentant de retenir mes larmes, en vain.
Alicia garde le silence quelques instants, puis serre ma main dans la sienne et tourne son visage triste vers moi. Je renifle alors que j'ai l'estomac au bord des lèvres.
— Je n'ai su que récemment pour les... abus que Killian a subi mais j'ai fait comprendre mon point de vue à Giovanni sur leur relation à l'époque. Je lui ai mis mon poing dans la figure et Killian m'en a voulu pour ça, soupire-t-elle tristement. Tu sais, je ne le reconnaissais plus, j'ai bien cru perdre mon meilleur ami. Mais effectivement, Giovanni est une ordure, un manipulateur et il a fait énormément de mal à Killian. Il l'a brisé tout en lui disant qu'il était le seul à pouvoir prendre soin de lui.
— C'est horrible, et Killian ne se rendait compte de rien ? Et son père ?
— Patrick pensait, et pense toujours je crois, qu'il était un petit ami attentionné. Pour lui, Killian semblait aller mieux, jusqu'à ce que Giovanni le laisse tomber comme une merde. Il s'est barré, du jour au lendemain, quand Kiki a commencé à m'écouter et à comprendre que Giovanni l'utilisait et que cette relation était toxique et tout sauf normale. Tu sais, c'était la première relation de kiki, il était encore jeune et pensait que c'était comme ça que ça devait se passer, il ne voyait pas le mal, l'emprise malsaine qu'avait Giovanni sur lui. Il était une victime, incapable de se rendre compte du piège dans lequel il était enfermé.
— Ça a dû être horrible quand... cet enfoiré l'a quitté.
Alicia se redresse et ramène ses jambes contre son torse, essuyant une larme roulant sur sa joue. Le regard observant le même vide nous faisant face, elle pose sa tête sur mon épaule et murmure :
— Killian a bien failli faire une grosse bêtise mais je me suis interposée juste à temps. J'ai bien cru que j'allais perdre mon meilleur ami pour toujours cette nuit-là.
Je réalise à cet instant que, sans elle, Killian ne serait peut-être plus de ce monde. Si elle n'avait pas été là, Killian aurait pu mettre fin à ses jours.
— Alicia... Je te remercie...
— Pour quoi ?
— Pour l'avoir sauvé et pour m'avoir raconté cette histoire, même si elle est... immonde, atroce. J'ai pas les mots.
Elle esquisse un léger sourire qui allège un peu ma douleur puis me prend dans ses bras.
— Kiki va me tuer s'il l'apprend mais je crois que tu avais le droit de savoir. Et il ne te l'aurait pas dit, parce qu'il a encore honte de cette relation.
— Je sais qu'il a honte, il me l'a dit mais je ne lui dirai rien pour le reste, promis. Par contre, j'ai besoin de le voir là. Je vais aller rejoindre l'homme de ma vie et lui faire passer une belle soirée, histoire de lui remonter le moral, dis-je en me levant du lit.
Alicia fait de même, réajustant son cardigan mauve sur sa poitrine, tandis que son regard accroche le mien.
— C'est une super idée Timothy. Merci à toi d'être là pour lui, t'imagines même pas à quel point tu le rends heureux, combien il avait besoin de quelqu'un comme toi dans sa vie, et comme je suis heureuse, pour vous deux. Prends soin de mon meilleur ami, pour toujours s'il te plait.
— Je t'en fais la promesse Alicia. Merci infiniment d'être là toi aussi. Je t'aime... comme une sœur bien sûr.
Elle me fait un clin d'œil avant d'ajouter les larmes aux yeux :
— Moi aussi je t'aime.
Elle m'embrasse sur la joue puis me raccompagne jusqu'à la porte. Je salue sa mère, puis la remercie une nouvelle fois, avant d'enfourcher mon vélo bleu. Je jette un regard à la maison voisine, me demandant si vraiment ton père n'était au courant de rien.
Je crois que je me sens encore plus mal maintenant que je connais la vérité. Imaginer une situation, ce n'est rien à côté du poids que la réalité pèse quand on entrevoit vraiment toutes les ficelles qui s'entremêlent. J'ai l'impression qu'elles vont m'étrangler au fur et à mesure que mon cerveau traite toutes ces informations.
Je file droit devant, entre les voitures qui me klaxonnent et celles qui m'évitent maladroitement. Il faut que je fasse attention à ne pas me faire écraser par l'un de ces monstrueux SUV. J'arrive finalement entier à la maison quelques minutes plus tard. Au loin, l'océan est calme et infuse déjà les couleurs orangées du soir. L'air est chaud et quelques lucioles volent au-dessus des parterres de fleurs, donnant l'impression d'un ballet aléatoire de petites lumières. Je dépose mon vélo dans la cour intérieur et monte les marches quatre à quatre, en espérant que tu acceptes l'idée qui vient de germer au milieu des souvenirs de ma discussion avec Alicia.
Je te trouve sur le canapé, en train de jouer sur la console, Twinkle sur tes genoux, qui semble dormir comme un petit chaton. Tu tournes la tête lorsque tu me vois arriver dans le salon. Ton regard semble affolé.
— T'es de retour, enfin, râles-tu en déposant Twinkle sur le canapé, abandonnant ta manette de jeu sur la table basse.
— Oui, je suis là. Je suis parti si longtemps que ça ?
— Une heure et demie, si j'en crois ma montre.
— Je suis sûr qu'elle avance, dis-je en me rapprochant.
— Ça me ferait bien chier, vu le prix qu'elle vaut.
Je secoue la tête et vient glisser mes mains sur tes hanches, te faisant abandonner la contemplation de cet objet, bien trop cher pour qu'il ne montre que l'heure.
— Tu sais que je t'aime toi ? dis-je en plongeant dans ton regard.
— Moi aussi mi amor. Alors qu'est-ce que tu complotes depuis le début de l'après-midi ?
— Je tente de trouver comment te changer les idées et je viens d'en avoir une bonne, je crois.
— J'ai hâte de la connaitre, parce que mon père vient de m'appeler et je dois t'avouer que ce qu'il m'a dit ne me plait pas du tout. J'ai besoin de distraction.
Je fronce les sourcils, te poussant à m'en dire plus en te chatouillant les côtes.
— Crache le morceau ! Dis-moi ce qu'il veut !
— Arrête, pas de chatouilles, c'est pas du jeu...souffles-tu en me retenant les mains. Il veut que je le remplace pour un voyage d'une semaine... à Sydney !
Bon sang, il veut m'achever ?!
— Je crois qu'il va nous falloir une deuxième idée géniale ! dis-je en grimaçant.
— Pas besoin, j'ai déjà trouvé, susurres-tu en glissant tes mains sur mes fesses.
— Retiens-toi beau gosse, d'abord, on sort ! Je dis pas non, mais seulement quand on sera de retour, dis-je en te conduisant à notre chambre afin qu'on puisse se changer.
Inconsciemment ou non, je repousse le moment où on va se retrouver dans l'intimité, parce qu'avec ce que j'ai appris avec Alicia, j'appréhende soudain tout ce qui pourrait mal se passer. Depuis notre rencontre, j'ai appris à voir les signes de ta détresse, de tes blocages, ils ne me font plus peur. Néanmoins, une petite partie de moi est terrifiée à l'idée de ne pas pouvoir gérer. Comme si ça ne suffisait pas, ton père te met la pression en t'envoyant à l'autre bout du monde. Il y a aussi le retour de Giovanni et je sais que ce sont typiquement des évènements qui peuvent te faire perdre tes moyens.
Les ténèbres semblent s'être concentrées autour de nous, comme un voile sombre dans lequel on risque de se perdre et s'il faut chercher de la lumière, je crois qu'il va falloir qu'on la crée nous-mêmes, d'une manière ou d'une autre. On n'a pas le choix.
❤❤❤
Hello bonjour !
Je suis désolée, je vous ai encore oublié hier soir. J'ai un peu de mal à suivre ces derniers temps.
Bref, j'espère que ce chapitre vous a plu ?
Moi j'adore la relation entre Alicia et Timothy, et vous ?
On se retrouve samedi ?
Des bisous (づ ̄3 ̄)づ╭❤~
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