Me retrouver seul


904 jours avant...


🌻🌻🌻

Killian

Cela fait une semaine que je te cache un secret et plus le jour du match approche, plus je suis angoissé. J'ai peur, non, je suis terrorisé à l'idée que tu refuses mon cadeau. Oui, je ne te l'ai pas encore offert mais j'attendais d'être prêt et de ça, je ne suis même pas certain. Est-ce que c'est vraiment le bon moment ? Est-ce que tu accepteras ? J'en ai aucune idée et ça me stresse comme pas possible. J'ai le ventre en vrac et le cœur qui palpite bien trop vite.

Les mains tremblantes, je mets ma casquette des Dodgers restée dans mon armoire depuis quelques années. En me voyant dans le miroir de la chambre, je repense aux années de lycée lors des entraînements, les vestiaires qui puent, les toilettes... Je ferme les yeux pour chasser cette image de ma tête mais le regard de Giovanni s'impose, aussi vert et hypnotisant qu'à l'époque. Alors que je sens l'angoisse monter comme une vieille amie indésirable, tes bras m'enlacent puis tes mains glissent sur mon torse. Ta tête se pose contre mon dos.

— Qu'est-ce que tu rumines encore Killian ? murmures-tu d'une petite voix.

— Je me rappelais de vieux souvenirs de lycée et des choses que j'aurais pu faire différemment, dis-je ironiquement.

— Arrête de penser au passé, ça fait plus de mal que de bien crois-moi. Certaines choses sont indélébiles, t'auras beau essayer de les effacer de ta mémoire, de vouloir les changer, elles ne cesseront de te crever le cœur, quoi que tu fasses. Pourquoi tu n'essaies pas de penser au match qu'on va finir par rater si on ne se bouge pas les fesses !

J'entends ton rire s'envoler dans mon dos quand tu rajoutes que les miennes te donnent des envies. Tu oses même me tâter le fessier.

— Laisse mon cul tranquille ! Allé viens, on y va !

Je te tire par la main alors que tu me retiens soudain, m'obligeant à te faire face. Une lueur aussi lumineuse qu'une étoile fait pétiller tes yeux.

— Tu sais que je t'aime toi ? chuchotes-tu en riant.

Je t'embrasse une fois, deux fois puis tu me repousses en riant plus fort encore. Ton rire, unique, fait accélérer mon cœur.

— Je t'aime aussi Tim mais... faut qu'on se bouge !

Pour une fois mon père a eu envie de sortir une de ses voitures de luxe. On file dans les rues de San Marino dans sa Porsche 911 cabriolet noire. On rejoint le nord du centre-ville et moins de trente minutes plus tard, l'antre des Dodgers se profile à l'horizon. Le plus grand stade de la ligue nationale, entouré de son parking impressionnant nous fait maintenant face. Mon estomac se contracte lorsque je pense à la dernière fois que je suis venu ici. Ma mère était encore là.

— Tu viens ? dis-tu en trépignant déjà sur le bitume, me tirant de mes pensées.

Je m'extirpe de la voiture et vous suis mon père et toi, un pas en retrait. Je suis heureux d'être là avec vous mais une partie de moi angoisse d'entrer dans le stade. Une partie de moi aimerait rester à l'extérieur, là où les souvenirs de ma mère ne vont pas me submerger, là où je me sens encore en sécurité. Je cherche ta main et y entrelace nos doigts. Ton regard croise le mien et ton doux sourire me fait vite oublier mes pensées.

Je suis étonné que mon père n'ait pas échangé le billet que t'a offert ta sœur pour aller en tribune VIP. On fait la file, main dans la main, mon père derrière-nous lorsque je l'entends crier :

— Fermez-là !

Je me retourne et croise son regard voilé par la colère. Il secoue la tête comme pour me dire que tout va bien ou pour me demander de fermer ma bouche, je ne sais pas, mais je sens que quelque chose ne va pas. Je lâche ta main et me rapproche de lui.

— Qu'est-ce qui se passe 'pa ?

Il souffle du nez les lèvres pincées, en nous observant toi et moi, sans dire un mot, quand tout à coup une voix derrière mon père s'élève :

« T'as besoin de ton p'tit papa pour te défendre sale pédé !? »

On échange un regard, le sien est empli de peine.

— Killian, non. Il n'en vaut pas la peine, souffle mon père.

Mais je ne suis pas de son avis et la colère, mélangée à l'angoisse que je ressentais déjà en arrivant, provoque en moi un raz-de-marée qui pourrait être dévastateur. Je pousse mon père, malgré ses protestations et me place devant l'enfoiré qui a osé me provoquer.

— T'as un problème testa di minchia* !? crié-je en me retenant de lui envoyer mon poing dans sa face de rat.

Son regard empli de dédain me toise de la tête aux pieds.

— Quoi ?! Ouais, j'aime pas les pédés et là... il y en a deux et ça m'emmerde !

— Ohh ! Et moi je déteste la merde, pourtant t'es là et tu gâches tout le paysage. Ça m'emmerde autant que toi mais comme je pense pas partir, va falloir faire avec. Moi je dois bien supporter ton odeur nauséabonde qui empeste tout l'air ici, alors ferme ta gueule et casse-toi !

Je le pousse en arrière par les épaules et retourne auprès de mon père qui s'est un peu éloigné de la file avec toi. Tu me dévisages, les dents serrées mais j'enlace ta main et nous reprenons notre place dans la file lorsque mon père lâche un énorme soupir.

— Je déteste ce genre de personne qui pense être mieux que les autres. Pourquoi sont-ils aussi fermé d'esprit bon sang ?! Sachez que je vous aime tous les deux, quoi qu'en pense le reste du monde, lâche mon père en nous accordant un regard aussi tendre et réconfortant que ses paroles.

— Merci 'pa. Moi aussi je t'aime.

— C'est la chose la plus gentille qu'on m'a dite depuis longtemps, déclares-tu en reniflant.

Tout ton visage est rouge mais tes yeux brillent comme des étoiles et ton sourire pourrait faire fondre le plus endurci des cœurs. Mon père t'attire à lui et te serre dans ses bras, je complète le câlin en faisant de même, oubliant immédiatement l'incident.

Aujourd'hui l'amour et le bonheur se sont donné rendez-vous, comme deux complices ils ont fait naitre ton sourire, fait étinceler tes yeux et réunis les deux personnes qui compte le plus pour moi. Avec toi à mes côtés, je me sens heureux. Tu es comme un refuge pour mon cœur, mon endroit sûr lorsque les ténèbres sont trop présentes. Tu es le plus bel imprévu qui me soit tombé dessus depuis bien longtemps. C'est le cœur gonflé de bonheur que je vis ce match de baseball avec mon père et toi. Je retrouve avec joie l'ambiance du stade, le stress bénéfique du match, le plaisir de la victoire et après quelques heures d'euphorie, on retrouve le calme de la maison.

Mon père s'est servi un verre de Whiskey et est partit dans son bureau, certainement pour se retrouver seul avec les souvenirs de maman, la fan de baseball. Je suis sûr qu'il revit nos retours de lycée, lorsqu'elle lui racontait mes matchs et mes réussites. Elle adorait partager avec mon père ces moments qu'il n'avait pas vu. Elle était tellement fière de moi, tellement heureuse de le dire à mon père. Aujourd'hui il ne reste que des souvenirs, quelques photos et trophées de ces instants qui me semblent si loin. J'ai parfois l'impression que c'était dans une autre vie. Elle me manque à un tel point que je si je ferme les yeux, je peux presque entendre sa voix réjouie, sentir son parfum sucré, imaginer sa main sur ma joue et son sourire s'épanouir lorsqu'elle parle de moi.

Je reprends mes esprits lorsque je sens des doigts essuyer avec délicatesse, mes joues humides. Tu m'observes en silence, ta main glissant le long de mon bras pour trouver la mienne, que tu enlaces.

— T'étais parti très loin. Tout va bien mon cœur ? chuchotes-tu.

J'hoche la tête et te prends dans mes bras pendant quelques instants, sentant ton cœur battre contre le mien comme un tambour de guerre. Je me rends alors compte que je suis dans le couloir qui donne sur le bureau de mon père, planté comme un con devant sa porte.

— J'ai quelque chose à te donner... pour ton anniversaire, dis-je pour changer de sujet.

Tes yeux se plissent puis un sourire franc nait sur ton visage. Je t'attire jusque dans notre chambre et te fais assoir sur le lit. Je cherche dans le tiroir de ma table de chevet et te rejoins.

— Tends la main et ferme les yeux, s'il te plait, dis-je aussi excité qu'un écureuil au musée de la noisette.

Tu grimaces puis obéis en tentant de tricher en regardant entre tes doigts.

Le cœur au bord de l'explosion, je dépose mon cadeau dans tes mains jointes devant toi. Tu ouvres un œil puis deux, aussi curieux qu'étonné.

— Qu'est-ce que c'est que cette clé ? J'ai déjà celle de ta maison.

— C'est aussi ta maison Tim mais cette clé ne l'ouvre pas, dis-je en faisant durer le suspense.

Tu la regardes de plus près, sourcils froncés.

— J'adore le porte-clé « Welcome to LA » aux couleurs de l'arc-en-ciel mais je ne vois pas ce que c'est. Ce n'est pas la clé d'une voiture... celle du pool house ? Non... Aide-moi, je sais pas, dis-tu en haussant les épaules.

Je déglutis difficilement, prenant mon courage à deux mains.

— C'est celle de notre futur appartement.

Un silence s'installe entre nous. Tu observes la clé puis mon visage. Tu secoues la tête d'incompréhension.

— Quoi ? Quel appartement ?

Je viens m'assoir à tes côtés, le cœur battant. Tu m'observes l'air perdu.

— Mon père nous a fait une avance pour l'achat d'un appartement sur Ocean Boulevard, avec vue sur l'océan. J'ai mis le reste, pour t'offrir un foyer. Un vrai « Chez nous ». Qu'est-ce que tu en dis ?

J'ai une boule qui compresse mon estomac et ton hésitation, aussi longue que tes jambes, ne font que renforcer mon angoisse.

— Alors ? insisté-je en appréhendant ta réponse.

Semblables à deux billes d'obsidiennes, tes yeux se remplissent de larmes. Ta lèvre tremble lorsque tu tentes de répondre sans vraiment y arriver. Tu renifles puis serres ma main dans la tienne.

— C'est... j'ai pas les mots. Tu m'offres un appartement, vraiment ?

— Techniquement c'est mon père et moi mais oui, c'est bien ça.

— Ça me fait énormément plaisir Killian... mais je... il faut que j'y réfléchisse. J'ai besoin d'un peu de temps... pour penser à tout ça, tu comprends ?

J'ai tout à coup la sensation de tomber d'un immeuble de cent étages et de ne pas savoir comment je vais atterrir. Je retiens mes larmes mais la déception est là et me déchire le cœur en deux. Je pensais que t'allais sauter de joie, me sauter au cou mais ta réaction me surprend, dans un sens que je n'avais pas vu venir. Putain ! Je suis sous le choc mais je tente de garder la tête haute.

— Bien sûr que je comprends. Tu as tout le temps, rien ne presse. Hey, je t'aime.

Non, je comprends pas. J'ai beau essayer, je ne saisis pas ce qui se passe. Je suis perdu. Je croyais en nous mais j'ai soudain plus aucune confiance. Pourquoi j'ai encore l'impression que tout me glisse entre les doigts ?

— Je t'aime aussi, murmures-tu.

J'ai envie de t'embrasser, de te jeter sur le lit et de te faire l'amour jusqu'à ce que tu dises oui mais je sais que je ne peux pas. Je t'embrasse presque timidement et prétexte un besoin urgent pour m'éloigner de toi. J'ai besoin d'air, de faire sortir cette tension qui m'emprisonne.

Enfermé dans la salle de bain de mon père, je me masturbe jusqu'à ce que mon cerveau ne cesse de réfléchir, jusqu'à ce que je capte pourquoi tu es si réticent à ce qu'on vive ensemble et plus je cherche de réponse et plus elle devient évidente, aussi limpide que les armes qui coulent le long de mes joues.

Tu ne veux pas de moi.

Je le savais au fond de moi. Je ne suis qu'un fardeau pour les gens qui m'entourent de toute manière. Ils iraient bien mieux sans moi. Je me sens coincé dans cette vie, dans ce corps que je déteste par moment, sans voir d'issue pour m'en sortir. J'ai mal au cœur, au corps et à mon sexe qui s'est enfin libérer de cette tension insupportable. Je ne sais pas si un jour j'accepterai cette part d'ombre qui m'engloutit chaque fois un peu plus. Je ne sais pas si un jour je serai assez bien pour que les gens arrêtent de me quitter.

Je pensais avoir tout donner dans cette relation mais apparemment, je ne suis même pas bon à ça et j'ai peur de me retrouver seul, encore.

*testa di minchia / Tête de bite

❤❤❤

Hello,

Comme promis, le deuxième chapitre du jour. 

On avance dans l'histoire, leur relation évolue mais comment vont réagir Timothy et Killian  face à ce changement ? 

La suite mercredi ;) 

Je vous fais des bisous (* ̄3 ̄)╭❤

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top