Je la grave sur mon cœur
1 034 jours avant...
🌻🌻🌻
Timothy
J'ai rejoint Rosie et maman dans un café du centre-ville. En ce matin brumeux et plutôt calme, Killian est occupé à la maison avec son père, se formant en tant que comptable pour son entreprise. Je les sens se rapprocher chaque jour un peu plus et je sais qu'ils ont besoin de l'entreprise de Patrick pour rester connectés. J'admire leur complicité, je les envie parfois d'avoir cette relation père-fils que je n'ai plus aujourd'hui. Penser à mon père me crève le cœur mais je suis heureux pour eux.
Rosie me tire soudain de mes réflexions en me secouant le bras.
— Alors ? C'est quoi ce job autour duquel tu fais tant de mystère ? Raconte-nous !
Elle ne me lâche pas depuis qu'on est arrivé, j'ai pourtant essayé de parler d'autre chose mais Rosie est pire qu'un chien ayant un os dans la gueule, elle ne lâche pas le morceau. Maman elle, se contente de me regarder les bras croisés sur sa poitrine. Sa chevelure blonde, qui tombe en cascade sur ses épaules, n'adoucit pas ses traits qui semblent aussi fermés que la coquille d'une huitre. Je sens sur moi son regard désapprobateur, alors que je n'ai encore rien révélé. Ça va être une partie de plaisir, je le sens.
Je regarde Rosie en secouant la tête puis maman, qui attend que je parle pour pouvoir libérer sa parole à son tour. Je ne suis pas serein mais je prends mon courage à deux mains et me lance.
— Eh bien, puisque tu insistes tant, je vais vous le dire. J'ai été engagé en tant que mannequin, dis-je pour commencer.
Rosie applaudit, sourire aux lèvres, tandis que ma mère rapproche sa chaise de la table, l'air toujours aussi renfrogné. J'aurais préféré rester sur le sourire de Rosie, ma mère ne semble pas apprécier.
— C'est génial ! J'ai toujours dit que tu étais trop beau mon frère, réplique Rosie en se dandinant sur sa chaise.
— Et l'université ? annonce ma mère froidement.
Je soupire, pas du tout étonné par sa réponse, qui tombe comme le couperet d'une guillotine sur ma gorge. Rosie arrête soudain d'applaudir et se rétracte sur son siège.
— Je ne suis pas fait pour les études maman, tu le sais et la directrice de l'agence compte sur moi maintenant, dis-je la voix tremblante. Et puis j'aime ce que je fais, c'est le principal, non ?
— Tu gâches ton avenir avec ce genre de... travail ? Je comprends pas Timothy, dit-elle sèchement en secouant la tête.
Mon estomac se contracte à sa remarque. Je m'y attendais un peu à vrai dire mais ça ne me fait pas vraiment plaisir de l'entendre.
— Je ne gâche rien et il n'y a rien à comprendre. Je gagne ma vie en faisant ce que j'aime, je ne vois pas où est le problème, dis-je plus durement que je ne l'aurais voulu.
Elle replace nerveusement une mèche de cheveux derrière son oreille et croise à nouveau les bras, signe qu'elle n'est pas d'accord.
— Tu aimes vraiment ce que tu fais ? Tu ne pourrais pas trouver quelque chose de moins... dégradant ?
Elle a vraiment prononcé ce mot ? Je pouffe d'un rire nerveux, sentant mon genou tressauter sans que je ne le contrôle.
— C'est peut-être dégradant pour toi de poser... en lingerie... mais pas pour moi !
Oups ! C'est sorti tout seul de ma bouche et je me rends compte que j'en ai dit plus que je ne le voulais.
— Tu... quoi ? Comment ça en lingerie !? s'étrangle ma mère. Tu te moques de moi Timothy !?
Son visage vire au rouge pivoine. Rosie se retient de rire. Je me redresse quelque peu sur ma chaise, raclant ma gorge devenue trop sèche.
— Oui, je suis mannequin lingerie. Je pose en petite tenue et j'aime ça, dis-je avec un aplomb que je ne me connaissais pas.
Ce sont là hélas, les derniers mots que je peux prononcer, car ma mère se lève d'un bond, avant même que je n'ai fini ma phrase. Rosie l'observe s'en aller puis elle se tourne vers moi, un air désolé sur le visage qui me fend le cœur en deux.
— Ne lui en veux pas, Roger lui monte la tête depuis que tu es parti. Il la manipule et j'ai beau essayer de le lui faire comprendre, maman ne se rend compte de rien. Je suis désolé Tim.
— C'est pas de ta faute Rosie, dis-je en soupirant.
Elle vient m'enlacer et ce réconfort me va droit au cœur.
— Moi je suis certaine que ce job est fait pour toi et que tu assures. Je suis fière de toi Tim.
Rosie m'embrasse la joue, avant de courir afin de rattraper ma mère qui s'éloigne sans même l'attendre. Je ne la reconnais pas et si ce que Rosie dit est vrai, j'ai peur de la perdre à cause de ce manipulateur de Roger. Il a toujours été quelqu'un qui aimait tout contrôler dans nos vies mais j'ai l'impression que depuis que je suis parti et qu'il n'a plus de contrôle sur moi, il se défoule sur ma mère. Je le déteste plus encore maintenant que je le sais.
Depuis le départ de mon père, une alchimie que je pensais invincible, s'était créée entre Rosie, ma mère et moi. On était devenu une équipe tous les trois, puis elle a rencontré Roger, est tombée amoureuse, ou du moins, elle s'est accrochée à lui pour tenter d'oublier mon père, et cet amour qu'on se portait, a changé. Roger a été là pour elle, il était un soutien, puis il lui a acheté une maison, fait de belles promesses mais a gentiment enfermé ma mère dans une cellule dorée de laquelle elle n'est jamais vraiment sortie. Il l'a isolée de ses amies, comme Rosie et moi. Il est devenu celui qui rapportait l'argent à la maison et celui à qui on ne pouvait rien reprocher.
Aujourd'hui encore, il étend son pouvoir destructeur et me repousse, parce que je ne suis plus dans le rang. Je dérange dans son plan, quel qu'il soit d'ailleurs. Il nous a séparés et nous manipule, comme si on était des marionnettes au bout d'un fil invisible. Je ne lui pardonnerai jamais d'avoir fait éclater notre famille comme il l'a fait.
Je paye les consommations et quitte le café sans réfléchir à l'endroit où je vais. J'erre dans les rues animées du bord de mer, les mains dans les poches de mon jean, l'esprit embourbé par les paroles de ma mère. Je me retrouve sans m'en rendre compte, devant la vitrine d'une boutique de lingerie et soudain, je nous vois, toi et moi, en noir et blanc sur une affiche géante, portant fièrement les pièces qui sont exposées. Tu es splendide et mon cœur se serre en repensant à notre discussion d'hier, à ce corps que tu détestes si souvent et qui pourtant, me plait énormément. J'aimerais que tu puisses le voir comme moi je le vois.
J'hésite un instant, puis décide d'entrer dans la boutique, afin de te faire un petit cadeau. La vendeuse ne remarque pas que je suis en photo dans son magasin mais elle est très heureuse de me faire la promotion de ce tout nouveau créateur. Quelques minutes plus tard, mon paquet cadeau en mains, je saute dans le premier bus et rentre à la maison. J'ai encore du mal à me dire que votre maison est aussi la mienne maintenant mais je me fais petit à petit à l'idée de ce nouveau foyer. Je ne me suis jamais vraiment senti chez moi dans la maison de Roger mais ici, j'ai l'impression d'avoir trouvé un endroit sûr, une famille.
Vous êtes encore occupés ton père et toi quand j'entre dans le salon, aussi je fais discrètement demi-tour et monte dans notre chambre, cachant mon cadeau dans un des tiroirs de la commode, quand mon téléphone sonne, me faisant sursauter. C'est Rosie.
— Hello frangine !
« Salut... Je voulais te prévenir que j'ai surpris une discussion entre Roger et maman. Il lui a demandé de bloquer ton compte bancaire. Il pense que t'es pas capable de gérer ton argent seul. Maman lui a dit pour ton job, je pense qu'il fait ça pour te faire comprendre qu'il n'apprécie pas. »
Sa voix est brisée et j'ai soudain envie de lui faire un câlin mais c'est Twinkle qui saute sur mes genoux lorsque je m'assois sur le lit. Je soupire en caressant la boule de poil.
— Put... Fais chier !
« Ouais, je suis désolée. Maman était fâchée et ça n'a pas aidé Roger à se calmer. »
Je soupire longuement, ébouriffant mes cheveux nerveusement.
— Pourquoi maman était si fâchée ?! C'est juste un job bon sang. Je fais pas le trottoir non plus !
Rosie rit puis soupire à son tour.
« Tu sais, je crois que derrière la colère de maman, il y a beaucoup de tristesse. Papa et Jackson sont partis, j'imagine qu'elle a peur de te perdre aussi. Elle ne le dit pas mais, tu lui manques énormément. »
— C'est pas en se mettant du côté de Roger qu'elle va me garder près d'elle. Elle fait tout le contraire de ce qu'il faut. Pourquoi elle fait ça ?
« Je sais pas mais elle est perdue. Laisse-lui une chance, ne la repousse pas. C'est ta seule maman, pense-y. »
— C'est elle qui m'a repoussé la première.
« Mets-toi à sa place deux minutes. Essaie. J'ai pas envie de te perdre toi aussi. J'ai encore besoin de mon grand frère. Désolée je dois te laisser, je t'aime Tim. »
— Moi aussi Rosie.
Je m'allonge sur le lit tout en lâchant une ribambelle de jurons. Twinkle se blottit contre moi en ronronnant. Lui au moins, il me comprend, contrairement à Roger qui fait vraiment tout pour me pourrir la vie.
Je ferme les yeux quelques instants, n'écoutant que le doux son qu'émet mon chat près de moi. Lorsque je me réveille, quelqu'un me secoue l'épaule. J'ouvre un œil et je te vois, assis près de moi, ta main caressant mes cheveux.
— T'es rentré depuis longtemps ? me demandes-tu avant de m'embrasser le front.
— Je sais pas, il est quelle heure ?
— Bientôt dix-huit heures.
Je lève un sourcil, surpris.
— Presque deux heures je crois. Je me suis endormi, désolé. Vous étiez occupés ton père et toi, j'ai pas osé vous embêter.
— T'aurais pu venir et abréger mes souffrances, râles-tu en te couchant à côté de moi.
— T'avais pas vraiment l'air de souffrir quand je suis arrivé, tu riais avec ton père, dis-je en haussant les épaules.
— Mouais... ça va toi ? T'as l'air contrarié.
Je te raconte mon après-midi et plus j'en dis, plus ton visage se ferme. A la fin de mon histoire, tu bondis du lit et fais les cent pas dans la chambre.
— Putain mais quel connard !
— J'ai pas mieux effectivement, soupiré-je en enfouissant ma tête dans l'oreiller.
— On trouvera une solution. Je demanderai à mon père, il a des avocats dans son entreprise, ils sauront certainement quoi faire. T'inquiète pas pour ça Tim, c'est provisoire. Et pour ta mère, elle finira par comprendre, j'en suis sûr.
Tu reviens t'assoir à côté de moi sur le lit, me serrant contre toi en humant mes cheveux. Je repense soudain aux paroles de ma sœur.
— J'espère que tu dis vrai. Je n'ai plus qu'elle et Rosie, j'ai pas envie de les perdre.
— Tu ne les perdras pas, je te le promets.
— Ne fais pas de promesse que tu ne peux pas tenir, dis-je tristement.
— Ok, alors moi tu ne me perdras pas. Ça je peux te le promettre.
Ta main caresse ma joue, ton regard accroche le mien puis tes lèvres fondent sur les miennes avec douceur. J'en oublie ma sœur et ma mère et ce connard de Roger. Twinkle se fait chasser du lit, tout comme nos vêtements qui, un par un, glissent sur le parquet. Ta bouche part en exploration sur mon torse, tandis que mes mains suivent les courbes fines de ton corps. Je sens l'air devenir lourd entre nous, tes soupirs emplissent la chambre d'une mélodie enivrante. Le désir monte en moi sous ton regard presque noir. Il me transperce, me déstabilise, indéchiffrable.
Je t'attire à moi pour t'en demander plus mais je sens soudain une réticence. Le souffle court, tu m'observes sans pouvoir articuler un mot.
— Est-ce que ça va ? murmuré-je crispé.
Tu remues la tête de gauche à droite, tu mords ta lèvre puis tu t'assois finalement à côté de moi en soufflant tout l'air de tes poumons. Mon cœur se serre à nouveau.
— Je suis désolé... cazzo*, marmonnes-tu en serrant ma main dans la tienne.
Je tente de comprendre, mais tu fuis mon regard.
— Killian, c'est pas grave, t'as pas à être désolé. On a toute la vie pour apprendre à se connaitre toi et moi, on prendra le temps qu'il te faut ok ?
Tu lèves enfin les yeux vers moi, souris.
— Ouais, on a toute la vie.
Tu m'embrasses puis on se rhabille sans reparler de ce qui vient de se passer. Je sens que ce n'est pas le moment, que ça ne sert à rien d'insister maintenant. Je serais patient si tu en as besoin. J'ai pas l'intention de t'abandonner moi non plus et même si je ne t'en fais pas la promesse à voix haute, je la grave sur mon cœur.
*Cazzo / Merde
❤❤❤
Hello vous !
J'espère que vous allez bien en ce début d'automne ?
On sent Killian sur le point de perdre pieds, ou de vouloir enfin s'ouvrir à Tim...
On en saura plus mercredi avec un chapitre qui risque de vous remuer ;)
Je vous souhaite un bon weekend et je vous fais des bisous (づ ̄ 3 ̄)づ❤
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