Chapitre 5
Média : Nuage de Baie (chaton)
Nuage de Baie s'empressa de détourner le regard. D'après ce que lui avait dit Lac de Vase, Museau Aplati était très gentil... mais là, le chaton était juste incapable de regarder tout ce sang séché, ces crocs tordus... pour lui qui était si facilement dégoûté, le voir un instant de plus aurait été un supplice !
Tournant le dos au blessé, il regarda prudemment autour de lui. Il aperçut un petit passage de quelques queues de renard, et y vit au fond une tache crème.
« Heu... chuchota-t-il. Moustache Courte ? »
Il discerna une tête en train de s'approcher de lui, et bientôt le guérisseur fut à ses côtés.
« Mmm ? marmonna-t-il. Nuage de... de Feuilles... non, de...
- Nuage de Baie, s'empressa de minauder le jeune chat. »
Les yeux du grand chat s'éclairèrent.
« Aaah, oui, le nouvel apprenti... tu as besoin d'aide ? sourit-il. »
Le jeune matou baissa les yeux, sa timidité prenant le dessus.
« Heu... pas vraiment... enfin, oui, mais... heu...
- Oui ? »
Nuage de Baie releva un peu la tête.
« J'ai quelque chose d'important à dire, et je pensai que, puisque tu es le guérisseur... ben...
- Oui, oui, je comprend, s'amusa le chat aux vibrisses courtes. Vas-y, dis-moi. »
Il se planta en face de lui, tandis que l'autre cherchait ses mots.
« En fait... je ne sais pas trop si je suis le seul, ou si c'est comme ça pour tout le monde, mais... commença-t-il. Des fois, j'entend des cris, des hurlements... parfois juste des voix. Et ça arrive de temps en temps qu'en plus je vois des images... enfin, une image, toujours la même : une bataille. Et je crois qu'elle arrive ici. »
Il attendit quelques instants avant de souffler :
« Voilà. »
Il releva la tête, et remarqua que le soigneur l'observait avec attention.
« Eh bien non, je pense que tu es le seul dans ton genre... dit-il à voix basse. Je n'ai jamais eu de cas comme le tien, en tout cas. Et puis... »
Il l'examina longuement.
« Oh, quel cervelle de souris je suis ! J'aurai dû te le dire après ton baptême...
- Mmm ? marmonna Nuage de Baie, intrigué. »
Moustache Courte se leva et vint lentement s'asseoir à ses côtés. Un peu gêné par son odeur de plante, le jeune chat se décala mais - évidemment ! - l'autre, comme si de rien n'était se repositionna de façon à ce que la truffe de l'apprenti soit en plein dans son pelage odorant.
« Heu... tenta t-il de protester. »
Mais il était collé entre le guérisseur et la paroi, alors il renonça.
« Nuage de Baie, lui souffla le matou à l'oreille. J'ai des annonces très importantes à te faire. »
Le chaton ouvrit les yeux un peu plus grands, bien que des touffes de poils lui rentrèrent dedans. Il les referma aussitôt.
« Ah bon ?
- Oui, s'empressa de miauler le guérisseur. Je pense... que c'est toi. Oui...
- Moi ? De quoi ?
- Toi, le sauveur ! »
Le petit mâle se redressa.
« De quoiiii ?!
- Nuage de Baie ! s'exclama Moustache Courte, avant de baisser de ton. Je t'ai vu dans une source, il y a des lunes... non, laisse-moi finir. Je pense que tu feras quelque chose d'important dans ta vie. Oui, j'en suis sûr, même. Nuage de Baie, tu ne dois rien dire, d'accord ? Ne répète rien de ce que je t'ai dis et que je te dirai maintenant, d'accord ? »
Gueule bée, le jeune chat hocha la tête.
« Mais... bafouilla-t-il. Qu'est-ce que...
- Je répondrait à toutes tes questions plus tard. Ce qu'on va faire, c'est que maintenant, un soir sur deux, tu viendras ici, d'accord ? Pour que je t'entraîne à tout ça. Il faudra aussi que...
- Stop ! couina Nuage de Baie, les yeux plissés. Déjà, là tu m'étouffes, alors tu te pousses ! S'il te plaît, s'empressa-t-il de rajouter, intimidé. Et puis je comprend rien ! Je vais faire quoi, déjà ? Une bataille, un voyage ? Je peux pas le faire si je sais pas ce que c'est...
- Tu le feras sans te forcer, miaula le guérisseur d'une voix neutre. Ce sera de ton plein gré. Voilà tout ce que je peux te dire. »
L'apprenti rentra sa tête dans ses épaules.
« C'est bien gentil, tout ça, mais j'aurai aimé être mit au courant un peu plus tôt, quand même... marmonna-t-il. Si je dois devenir chef ou un truc de genre, le mieux est quand même de se préparer... J'imagine. Enfin, après moi je veux bien sauver je-sais-pas-quoi, hein... mais là c'est pas trop le meilleur moment quoi... »
Le soigneur sourit, amusé.
« Ah, les petits... »
Puis il ne dit plus rien. Cependant, son regard avait l'air de se balader dans le vide. Après un long silence pour le moins gênant - surtout pour le plutôt timide Nuage de Baie -, il se décida enfin à parler.
« En fait, est-ce que ça te dirais de devenir guérisseur ? »
La réponse du novice fut immédiate. Il se l'était longuement demandé plus jeune, et connaissait par cœur sa réponse.
« Non merci. Sans façon. Je... j'aime la chasse, le combat... et tout ça, quoi... »
Moustache Courte ne parut déçu qu'un instant, et s'empressa d'afficher un sourire figé.
« D'accord. C'est normal. J'étais comme toi, au départ... enfin bon. Je sais ce que c'est de ne pas faire ce que l'on souhaite. Je comprend. »
Il fixait Nuage de Baie, comme dans l'attente que celui-ci le questionne sur ses paroles étranges et... pas du tout naturelles. Le chaton crème mit un certain temps à comprendre, avant de bafouiller :
« Ah ? Heu... vous... non, tu, désolé... tu ne veux pas, heu... tu n'es pas... heureux ? »
Le guérisseur le regarda une nouvelle fois de ses yeux transperçants.
« Oh, je me suis bien habitué. J'aime soigner, mais... il y a de nombreux inconvénients que tu connais à être guérisseur. »
Le jeune chat hocha la tête. Il ne souhaitai pas continuer cette conversation qui, il n'osait se l'avouer, ne l'intéressait pas spécialement. L'autre sembla comprendre son silence et décida de le briser.
« En fait, tu me disais que tu aurais voulu être au courant plus vite pour le... signe ? »
Il ne lui laissa pas le temps de répondre, mais le petit mâle hocha la tête doucement tandis que l'autre continuait.
« Eh bien, c'est trop tard, mais... il se pourrait que tu fasses partie des chats capables de voir des signes sans être guérisseur. Ce n'est pas si rare. Je vais bientôt à la Pierre de Lune, de toute façon, je voulais parler au Clan des Étoiles. Tu n'auras qu'à venir avec moi. Comme ça, on pourrait peut-être en savoir plus. J'ai comme le pressentiment que tu en est capable. »
Sans trop réfléchit, Nuage de Baie acquiesça. Mais, même après réflection, il n'y voyait pas non plus d'inconvénient.
Et c'est ainsi qu'il s'embarqua pour un long périple vers la Pierre de Lune...
Cela faisait des heures que Moustache Courte et Nuage de Baie marchaient côte à côte. Ce dernier ne cessait de se plaindre : il ne s'attendait pas à un si long chemin, et l'herbe trempée du début de la saison des feuilles mortes ne l'emparadisait pas... il poussa un soupir las et avança un peu plus vite, dans un espoir vain que la route se raccourcisse. Peine perdue : à force d'avancer dans la terre humide, il trébucha et se retrouva le pelage plein de bourbe. Il se décala pour que Moustache Courte ne remarque pas sa crasse et se dépêcha de se nettoyer la fourrure en rouspétant, et surtout, en grimaçant sous ce goût atroce. Il trottina alors pour rejoindre le guérisseur, et se rendit alors réellement compte de la grande taille de celui-ci : tandis que le chaton devait lever la tête pour apercevoir le bout des hautes herbes, le chat brun-crème, lui, les dépassait d'une demi-tête. Il grogna un peu avant de demander pour environ la dixième fois, d'une voix lasse :
« C'est encore loin ? »
Moustache Courte se dressa sur ses hautes pattes (sûrement pour avoir une vision périphérique), et lui annonça au bout de quelques secondes :
« On sera bientôt arrivés au Chemin du Tonnerre. On a fait le plus compliqué. »
Nuage de Baie tenta de visualiser le chemin qu'il leur restait : échec.
« Du coup, c'est dans combien de temps ? »
Le soigneur réfléchit un instant.
« On à fait les trois quarts. »
C'est pas trop ce que j'appelle une réponse. Enfin bon...
Au bout de quelques minutes, les deux matous arrivèrent devant un énorme tronc d'arbre noir et plat.
Le Chemin du Tonnerre... je ne l'avais vu que de loin, je ne le pensais pas si... grand.
Moustache Courte lui fit signe de s'asseoir. Le chaton obéit, la truffe plissée : l'odeur laissée par les monstres venait juste de lui parvenir, et il était déjà sur d'une chose : il ne l'aimait pas du tout.
« Alors, commença le guérisseur. Je vais te montrer comment on fait, comme ça tu seras capable de le faire seul les fois prochaines. »
Nuage de Baie hocha la tête, tandis que l'autre continuait, posant une patte sur le sol puant.
« Tu vois, on ressent les vibrations des monstres quand on fais ça. Imite-moi. »
Tandis que le jeune mâle obéissait, il lui expliquait quand les vibrations étaient synonymes de danger ou non. Le novice retint de son mieux les informations qui lui étaient délivrées.
« Je passe le premier, déclara Moustache Courte. Comme ça, tu pourras prendre exemple. Et surtout, n'oublie pas : lorsque tu es sur le Chemin du Tonnerre, tu ne t'arrêtes pas : tu fonces. »
Un peu apeuré, l'apprenti acquiesça malgré la peur qui lui serrait désormais le ventre. Il observa avec attention le soigneur sentir les ondes avant de s'élancer, sûr de lui. Il parvint bien vite de l'aitre côté.
Nuage de Baie, lui, était tout tremblant. Il posait sa patte sur la surface dure, mais ne parvenait plus à se souvenir ce que lui avait expliqué le grand chat. Au bout d'un moment, ce dernier, qui était de l'autre côté, décida de l'aider : il imita son geste et sentit bientôt des vibrations surpuissantes.
« Écarte-toi ! cria-t-il au chaton. »
Celui-ci sursauta et ne bougea pas d'un poil. Heureusement, il n'était pas sur la trajectoire de la bête écarlate qui venait de passer, sans quoi il serait assurément mort écrasé. Il observa le Chemin du Tonnerre, terrifié, et, puisqu'il ne voyait aucun monstre à l'horizon, il décida de s'élancer, la peur au ventre. Et c'est bien connu : la peur donne des ailes. Le petit mâle crème n'avait jamais couru aussi vite. En un rien de temps, il se retrouvait aux côtés de Moustache Courte, secoué mais intact. Celui-ci le regarda un instant en silence, les yeux grands ouverts.
« Eh bien... on peut dire que tu es chanceux. »
Sur-ce, il lui tourna le dos et continua le chemin. Ils se trouvaient désormais dans la lande, et Nuage de Baie fut soulagé que les herbes soient courtes et rêches de ce côté-là. Il rejoint bien vite le guérisseur et commença à trottiner à ses côtés. Il apercevait déjà de grandes roches au loin...
« C'est ici ? »
Moustache Courte hocha la tête.
« Oui. Encore quelques pas et ce sera bon. »
Ah bah tout de même ! Je commençais à croire qu'il s'était perdu, moi.
« D'accord. »
Le chaton jeta un rapide coup d'œil à ses pattes et grimaça, avant de se re concentrer sur le paysage. Elles étaient toutes égratignées, et il ne sentait plus ses griffes. Il était si fatigué... il voyait déjà le soleil se coucher à travers tous les épais nuages sombres, leur faisant refléter une belle teinte rose. Le novice regarda la fourrure fine du guérisseur, puis son propre duvet. Étant donné que leurs couleurs étaient assez proches, ils prenaient chacun une couleur dorée. Nuage de Baie observa ensuite discrètement les prunelles du soigneur. Leur lueur ambrée devenait encore plus brillante qu'à l'accoutumée.
« Et nous y voilà ! s'exclama soudain le jeune guérisseur, faisant sursauter le mâle crème. Voici la Grotte de la Vie... »
L'apprenti l'observa un long moment, essayant y déceler une quelconque trace prouvant que le Clan des Étoiles était bien en rapport avec cet endroit. Mais, à part une très légère lumière qui semblait filtrer de l'intérieur - si fine que Nuage de Baie se demanda si elle existait vraiment -, ce n'était que des roches aussi noires que l'ombre.
Moustache Courte s'approcha d'une des pierres les moins hautes et y bondit, suivit par le jeune chat - qui lui eu beaucoup moins d'aisance à monter. Il lui expliqua :
« Il faut attendre que la nuit tombe, et que les premières étoiles apparaissent... on a largement le temps de se reposer et de chasser un bout. Enfin, toi tu pourras en manger. Mais moi, je dois jeûner avant de parler à nos ancêtres. »
Il semblait froncer les sourcils. Nuage de Baie gronda. Ça se voyait bien qu'il était affamé ! Comment les guerriers d'antan pouvaient-ils le priver de manger ? C'était injuste et inutile.
« C'est nul ton truc. Moi je vais te chasser un truc, tu vas voir. »
Le soigneur haussa les épaules.
« Comme tu veux. Je n'en prendrais pas. »
Tandis que le chaton s'éloignait, il lui cria :
« Reste dans les environs ! Je doute que tu saches chasser le lapin... »
« Et hop ! Trop-fa-cile. »
Nuage de Baie déposa sa souris au sol. Il la contempla d'un air fier, et se dépêcha d'y ajouter l'oiseau inconnu qu'il avait attrapé plus tôt.
« J'adore la chasse... murmura-t-il pour lui-même. »
Il prit soigneusement le volatile dans sa gueule - il lui semblait fragile -, avant d'y ajouter le rongeur. Quand il fut retourné près de la Grotte de la Vie, il rejoint difficilement Moustache Courte sur son rocher et lui miaula d'un air hautain :
« Alors ? Qui c'est qui ne voulait pas manger ? »
Le guérisseur grogna.
« Retire ça de ma vue. Ce n'est pas que je le veux, mais j'y suis obligé. Ne me force pas à te pousser, après tu galèreras à remonter. »
Nuage de Baie soupira, comme si l'autre ne comprenait rien à rien.
« Tant pis pour toi, ça m'en fera plus. »
Le grand matou haussa les sourcils.
« Et je peux savoir depuis quand tu aimes manger des canaris ? »
Le chaton plissa les yeux.
« De quoi ? »
Moustache Courte poussa un long soupir, prenant à son tour un air supérieur.
« Eh bien vois-tu, il se trouve que dans la lande on ne trouve pas les mêmes choses que dans les rivières. Bizarre, non ? Enfin bref, l'oiseau que tu as chassé, c'est un canari. Tu as dû le trouver près de l'arbre, non ?
- Et qu'est-ce que c'est qu'un canari ? s'enquit Nuage de Baie sans comprendre ni répondre. »
Le soigneur poussa un soupir d'exaspération.
« Je serai bien tenter de te dire que c'est un jeune canard, mais bon... apparemment, il faut s'occuper de ton éducation. C'est un oiseau. Qui vole. Et qui a des plumes. Et qui fait cui-cui. »
Le jeune chat grogna et ne répondit pas.
Prend-moi pour un chaton, tant que t'y est.
Il s'allongea en faisant la moue et avala en quelques coups de dents son oiseau.
Nuage de Baie était à moitié endormi quand il sentit une brise fraîche lui caresser le pelage. Il ouvrit les yeux et s'étira paresseusement, avant de sauter de la roche.
« Moustache Courte ? C'est l'heure, non ? »
Pas de réponse.
« Moustache Courte ? répéta-t-il en haussant le ton. »
Mais toujours pas de réponse.
En bon peureux, le chat au pelage clair paniqua aussitôt. Il rappela deux ou trois fois le matou, de plus en plus inquiet, sans succès.
Il est quand même pas parti sans moi ! Hein ?!
« Si c'est une blague c'est pas drôle ! gémit-il. »
En premier réflexe de protection, il se colla au rocher. Depuis-là, il tenta de trouver une lumière pour le guider. Il se tourna vers la Grotte de la Vie.
La lumière de tout à l'heure ! Il y en avait bien une, alors ! Et puis ça se trouve, Moustache Courte est allé blablater avec le Clan des Étoiles sans moi juste pour pas me réveiller. Aller, je tente.
Alors, tout doucement, il s'approcha de la lueur. Il découvrit alors un grand trou dans la paroi et l'emprunta. Après quelques pas à peine, la lumière baissait déjà. Le chaton s'aidait de sa queue et ses vibrisses pour se guider, mais il prenait peur de seconde en seconde. Peut-être s'était-il trompé d'endroit ? Peut-être était-il dans la tanière d'un renard ? Peut-être était-il en train de se perdre ?
Il fit vite taire ces idées noires pour se focaliser sur une seule chose : avancer.
Nuage de Baie fut très surpris lorsque tout à coup, la lueur jusqu'ici faible l'aveugla. Il cligna des yeux et, quand il les rouvrit enfin découvrit qu'il était face à une pierre. Mais pas une comme celles de tout à l'heure. Non. Celle-ci semblait faite de millions de minuscules gouttes de rosée scintillante. Et, à côté de cette fabuleuse découverte se trouvait un chat assoupi.
Donc il ne m'a vraiment pas attendu. Et dire qu'au départ c'est lui qui m'a proposé de venir... il est gentil, maintenant me voilà tout seul à devoir me débrouiller.
Le chaton s'approcha rapidement de la Pierre de Lune. Il en fit le tour (elle était énorme !) et... surprise ! Derrière la roche se trouvait une chatte ! Et... il la connaissait.
« Mais qu'est-ce que tu fais là ? Aile de Libellule ? »
Ah, mince, elle dort. Bon. Je lui demanderai ce qu'elle fait là plus tard. En attendant, Moustache Courte m'a dit de coller ma truffe à ce rocher. Tentons...
Mais avant qu'il ai pu tirer n'importe quelle conclusion de son essai, il était déjà plongé dans le tourbillon des rêves.
PFIOU ! 3063 mots ! ;-;
Je me suis donnée pour vous, là 😂
Alors, des hypothèse :3 ? Des remarques ? Des commentaires ? C'est ici ❤️ —>
*Pense* - Je vais me prendre un vent.
Bref, bisouilles et à la prochaine ❤️
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