Chapitre XXXIII
Sur la route, Joshua prévint Rachel que j'étais avec lui. Elle m'envoya aussitôt un message, ravie de savoir que ça allait mieux entre nous. Je lui souhaitai alors une bonne fin de soirée et lui demandai, expressément, de faire attention à elle. J'observai l'homme que j'aimais conduire jusqu'à chez moi, il semblait dans ses pensées, le visage tendu et les mains crispées sur le volant.
-Si j'avais été avec toi toute la soirée, jamais tu n'aurais bu et ce connard n'en aurait pas profité pour t'emmener là-haut ! Lâcha-t'il, soudain, la voix emplie de remords.
Je ne répondis pas, sachant qu'il avait parfaitement raison, mais posai doucement ma main sur sa cuisse. Il l'attrapa et la serra fort contre son torse, me faisant sentir, par la même occasion, les battements saccadés de son cœur. Une profonde tristesse m'envahit alors et une larme, coula, lentement, le long de ma joue. Il était réellement inquiet pour moi et pourtant, une sorte de barrière invisible m'empêchait d'être vraiment proche de lui. Que me cachait-il ? Était-ce quelque chose de grave ?
Arrivés devant chez moi, je lui proposai de venir mais il refusa aussitôt, prétextant un couvre-feu bidon, mise en place par son père. Il me prit sur ses genoux et m'enlaça longuement, tout en déposant de doux baisers sur le haut de ma tête. En peu de temps, ce garçon était devenu mon refuge, mon havre de paix et je priais silencieusement pour qu'il le reste à jamais. Mais, tout au fond de moi, je ne pouvais arrêter de penser qu'il y aurait une fin certaine à ce bonheur naissant.
Pourquoi ne pouvait-il pas me dire la vérité ? Après tout le mal qu'il s'était donné pour me faire la cour. Je l'avais repoussé maintes et maintes fois et pourtant il n'avait cessé de me prouver tout son amour et s'était fait un devoir de me protéger de tout. Et maintenant, essayait-il de me protéger de lui ?
Je levai la tête vers lui et croisai son beau regard, bleu azur, qui me scrutait intensément.
-Je t'aime Kate ! Bien au-delà de tout ce que j'aurais pu imaginer ! Ne l'oublie pas, surtout ! Souffla-t'il, les larmes au bord des yeux.
Cette phrase sonnait étrangement, comme un adieu et je paniquai immédiatement. Comprenant mon inquiétude grandissante, il me rassura.
-Ce n'est pas un adieu, bébé ! Je voulais juste que tu le saches ! Si je suis étrange ces temps-ci, ça n'a rien à voir avec toi, j'ai juste quelques soucis à régler ! M'expliqua-t'il, sans pour autant me révéler les secrets qui le torturaient.
J'acquiesçai, ne pouvant dire quoi que ce soit, par peur que mes larmes ne jaillissent, sans que je ne puisse les retenir. Il m'embrassa tendrement et me raccompagna jusqu'à la porte d'entrée. Nous nous quittâmes après un long câlin, puis je le regardai s'en aller, emportant mon cœur avec lui.
-Chérie, tu te lèves ? S'égosilla ma mère, tout en ouvrant les rideaux de ma chambre, laissant entrer ce satané soleil, déjà haut dans le ciel.
J'hurlai de douleur, persuadée que ma tête allait littéralement exploser. Je la maudissais, en silence, et sortis difficilement de mon lit, très difficilement. Ma mère me fixa un instant, comprenant rapidement, la raison de mon état. Elle ne fit aucune remarque, mais son regard en disait déjà trop. Elle était déçue, profondément déçue et je pouvais sentir la colère qui émanait de tout son être. J'eus envie de lui crier que c'était la première fois et que je recommencerais pas de si tôt, mais ma bouche pâteuse et l'envie de vomir qui ne m'avait pas lâché depuis la veille, m'en empêchèrent. Je la vis alors passer devant moi et sortir, sans même me demander une explication.
Je me dirigeai vers la salle de bains, évitant toute source de lumière et de bruit, me déshabillai et m'écroulai dans la baignoire, laissant couler l'eau sur mon corps courbaturé. Je restai un moment prostrée, essayant de calmer cet horrible mal de tête qui commençait à me rendre dingue. Quel plaisir pouvait-on avoir à boire plus que de raison et à souffrir ainsi le lendemain. C'était une véritable torture et il fallait être masochiste pour aimer cela. Je ressentis, pour la première fois de ma vie, une forme de pitié à l'égard de mon géniteur. Il avait volontairement détruit sa santé, mais aussi sa vie et, accessoirement la nôtre, pour quelques heures d'ivresse, vite effacées par cette douleur physique et morale que j'endurais en ce moment-même.
Après être resté plus de trente minutes dans mon bain, je me décidai enfin à descendre pour affronter ma mère, qui, je pense, devait m'en vouloir énormément.
Je la trouvai dans la cuisine, préparant le déjeuner, elle ne leva même pas les yeux vers moi.
-Maman, je peux te parler ? Demandai-je, très anxieuse.
Elle hocha la tête, sans même me regarder, continuant à couper en dés, les légumes qu'elle venait de laver.
-Je...je suis désolée ! Tu sais très bien que je déteste l'alcool, je voulais simplement essayer une fois, juste une fois ! Bégayai-je, ne sachant que dire.
-Je sais, ma puce ! Mais, quand je t'ai vu comme ça, les yeux hagards et le visage cireux, mon sang n'a fait qu'un tour et je n'ai pas réfléchi ! Cela m'a mise hors de moi !
Elle avait lâché le couteau et je pouvais voir ses mains tremblaient. Je me précipitai dans ses bras, et éclatai en sanglots sur son épaule. Elle me serra contre elle, en pleurs, et nous restâmes ainsi un long moment.
-Je...je suis désolée, Maman ! Par...pardonne-moi ! Réussis-je à dire, prise de soubresauts.
-Calme-toi, ma chérie ! Je sais que tu es jeune et que tu as besoin de t'amuser, d'apprendre et de tester tes limites ! Concéda-t'elle alors, des larmes plein les yeux.
-Je ne t'en veux pas, ne t'inquiètes pas pour ça ! Tu es ma fille et je suis extrêmement fière de toi, de la jeune femme que tu deviens et jamais je ne regretterais quoi que ce soit à ton égard !
Elle resserra son étreinte et je me repris enfin, essuyant mes joues trempées et souriant doucement à la femme de ma vie, la seule qui ne m'avait jamais jugé et toujours aimé d'un amour inconditionnel.
-Il se passe quoi ici ? Lâcha Steven, nous observant d'un œil suspect.
Nous éclatâmes de rire toutes les deux, devant son incompréhension, faisant enfin disparaître toute cette tension autour de nous.
-Rien, mon chéri ! Ta sœur et moi faisions simplement un câlin ! Dit doucement ma mère, en s'approchant de lui.
Elle déposa un bisou sur sa joue, ce qui le fit aussitôt ronchonner, et m'arracha un sourire moqueur.
-Allez mettre la table, les enfants ! Nous demanda notre mère, avant que l'on s'étripe, une fois de plus.
Après le repas, n'ayant eu aucune nouvelle de Joshua, je décidai de lui écrire un message pour savoir ce qu'il faisait aujourd'hui. À peine avais-je appuyer sur envoyer, qu'il me répondait déjà.
"Je ne suis pas dispo aujourd'hui, ma princesse ! Mais je pense très fort à toi et tu me manques énormément ! Je t'aime ma beauté."
J'étais déçue de ne pas le voir, mais son message avait déclenché en moi un millier de sensations, toutes plus agréables les unes que les autres.
J'appelai donc Rachel et Shelby et leur proposai une sortie entre filles, qu'elles acceptèrent aussitôt.
-Maman, je peux aller faire les magasins avec Rach' ? Criai-je alors, priant pour qu'elle dise oui, malgré mon comportement de ce matin.
-Oui, ma chérie ! Mais pas de bêtises !
-Et pas d'alcool surtout ! Rajouta-t'elle, sur un ton ironique.
Je me préparai, réellement ravie de pouvoir profiter de mes amies en dehors du lycée. J'enfilai mon jean, ma robe pull violette et mes éternelles converses, que je n'avais pas mises depuis un bout de temps, puis me maquillai légèrement, pour cacher les cernes et la fatigue de la veille.
En descendant, j'embrassai ma mère, qui en profita alors pour me glisser une petite liasse de billets dans la poche. Je voulus refuser, mais elle ne m'en donna pas l'occasion, puisque Rachel était déjà devant la porte, accrochée à la sonnette.
-Bonjour Susan, comment allez-vous ?
Elles se saluèrent chaleureusement en se faisant la bise et ma meilleure amie se tourna sans tarder vers moi, impatiente d'y aller.
Je pris ma voiture et récupérai Shelby devant chez elle. Nous partîmes toutes les trois en virée, chantant comme des folles avec la musique à fond dans l'habitacle.
Arrivées devant le Colpley Place, nous allâmes directement dans notre magasin fétiche. Des vêtements à perte de vue, tous plus beaux les uns que les autres nous attendaient patiemment. Rachel choisit rapidement plusieurs tenues et partit les essayer, sans même regarder les prix. Shelby en fit de même, embarquant une dizaine de fringues dans la cabine d'essayage.
Je ne savais que choisir, n'ayant pas énormément d'argent, je me contentais souvent de peu, et cela me suffisait. Je trouvai alors une robe bleue magnifique, qui me plaisait beaucoup mais son prix était, juste, exorbitant. Je la reposai donc, un peu dépitée.
-Elle est superbe ! Lâcha Shelby, dans mon dos.
-Oui, c'est vrai ! Mais trop chère, c'est dommage ! Avouai-je, honteuse.
Shelby n'avait sûrement jamais connu ce problème, elle pouvait s'acheter tout ce qu'elle voulait, sans avoir à s'inquiéter des conséquences et je l'enviai un peu pour ça.
-Ça te dérange si je la prends ? Elle me plait trop ! Me questionna-t'elle, un peu gênée.
Je lui répondis non, même si j'étais profondément déçue, mais c'était mon amie et si elle lui plaisait, j'en étais heureuse pour elle.
Je choisis un soutien-gorge et un tanga couleur rose, assez sexy et emmenai mes articles à la caisse, où m'attendaient déjà mes copines.
-Et si on allait manger une bonne glace ! Proposa Rachel, lorsque l'on sortit du magasin.
Nous acceptâmes avec plaisir et Shelby me tendit un paquet.
-Qu'est-ce que c'est ?!
-Ouvre ! M'intimèrent-elles, toutes les deux, un sourire complice aux lèvres.
Je découvris, stupéfaite, la robe bleue sur laquelle j'avais craqué. Je les regardai, tour à tour, ne comprenant pas de quoi il s'agissait.
-C'est un cadeau, bécasse ! Rigola Rachel, devant mon incompréhension.
Je leur sautai alors dans les bras, les remerciant mille fois de leur geste. J'étais vraiment chanceuse d'avoir des amies aussi adorables.
-Tiens, tiens, tiens ! Qui vois-je ici ?
Je restai bloquée un instant, comprenant que cette fourbe de Lindsay se trouvait juste derrière moi. Je lâchai alors Rachel et me retournai vivement vers ma meilleure ennemie.
-Serais-tu devenue lesbienne ? Railla-t'elle, jetant un regard vers Dakota qui, même le week-end, était sous les ordres de son Altesse Royalissime.
-Et si tu passais ton chemin, sale garce ? Lâcha Rachel, tout en la fusillant littéralement du regard.
-Oh, doucement le chien de garde ! Ironisa Lindsay, fière de sa blague stupide.
Je fis signe à mes amies de continuer notre route et nous commençâmes à avancer, ignorant les deux blondes qui nous fixaient méchamment.
-En tout cas, chapeau Katie ! Faire du shopping dans le même centre commercial que ton ex et sa nouvelle conquête, il faut avoir du courage ! Lâcha-t'elle alors, crachant son venin mortel.
-Mon ex ? Demandai-je soudain, sans le vouloir.
Trop contente que je m'intéresse enfin à ce qu'elle disait, Lindsay en rajouta un peu plus.
-Oui, tu sais Joshua ! Tu l'as déjà oublié ? Nous l'avons croisé il y a quelques minutes, assis à une table du "Bon Pain" avec une jolie brune, bien plus classe que toi !
Je n'écoutais déjà plus ce qu'elle me racontait et courrais immédiatement vers le café en question. Ce n'était pas possible ? Il ne pouvait pas être ici, avec cette fille ?
Je m'arrêtai brusquement et restai figée devant la scène qui se déroulait devant moi.
Joshua était assis à côté de cette fille, celle-là même, avec qui il avait passé toute la soirée, à la fête de Shelby. Ils avaient l'air très proches, riant tous les deux ensemble, sans même s'apercevoir de ma présence.
Il leva alors les yeux dans ma direction et son visage changea instantanément. Je ne lui laissai pas le temps de réagir et partis en courant de toutes mes forces.
C'était fini, bel et bien terminé !
Jamais plus je ne pourrais refaire confiance.
Je rayais définitivement cet homme de ma vie.
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