Chapitre XLI

J'attrapai aussitôt mon sac de sport et mis mes affaires dedans, tout en réprimant les larmes qui ne cessaient de couler le long de mes joues. Je ne pouvais pas la laisser gagner, pas aussi facilement. Je laissai tout dans mon casier et me dirigeai rapidement vers les toilettes pour nettoyer mes mains et mon visage. Arrivée devant le miroir, je fis une grimace en voyant que mon maquillage avait coulé et que mes mains étaient entièrement bleues. Je réglai le problème à grand coup de savon et repartis à la bibliothèque, comme si de rien n'était. Je ne voulais pas inquiéter mes amis, je décidai donc de taire ce petit souci concernant mes livres et mes vêtements.

-Bah, tu n'as pas ramené ton bouquin ? Me demanda Rachel, d'un air suspicieux.

-Heu, non, en fait, il n'était pas dans mon casier ! Il doit être à la maison ! Dis-je, essayant d'être le plus crédible possible.

-Ah ok ! Pas grave ! Répondis ma meilleure amie, en retournant à ses devoirs.

Je sentis immédiatement les yeux de Joshua se poser sur moi. Son regard était intense et semblait vouloir lire dans mes pensées. Je l'observai discrètement et lui fis un doux sourire, qu'il me rendit au centuple.

En pleine réflexion, je me remémorais tous les stratagèmes, toutes les vengeances merdiques que Lindsay et sa petite bande avaient mis en place durant ses dernières années. Et pourquoi tout cela, toute cette haine ? Par jalousie tout simplement ?
J'avais, à chaque fois, exprimé ma colère, mon ressenti, mais plus maintenant. Au jour d'aujourd'hui, je n'allais plus réagir, continuer à faire ma vie, à voir mes amis sans qu'elle ne puisse interférer dans tout ça, il fallait que je lui montre qu'elle n'avait plus d'emprise sur moi dorénavant.

-Tu me passes ton devoir ou il faut que je le prenne de force ? Haussa Joshua, tout en me fixant étrangement.

--Heu oui, excuse-moi ! Prends-le ! Balbutiai-je, la tête ailleurs.

-Ça va, bébé ? Chuchota-t'il, attrapant la feuille que je lui tendais et effleurant mes doigts au passage.

Je hochai la tête machinalement et lui souris. Je sentais qu'il s'inquiétait pour moi, mais je ne voulais pas qu'il s'en prenne violemment à Lindsay et attise sa flamme vengeresse. J'avais déjà assez de soucis comme cela et je ne voulais pas en rajouter davantage. C'était un petit mensonge qui ne concernait en rien notre couple.
À la fin de la journée, je me précipitai dans le hall pour récupérer mon sac, qui devait faire le double de mon poids et me dirigeai rapidement vers ma voiture, ne laissant pas le temps aux autres de me suivre et de me poser des questions sur l'état et la grosseur suspecte de ce dernier. Rachel me rejoignis au moment où je fermai mon coffre et ne fît même pas attention à mon comportement ainsi qu'à mon essoufflement soudain.

-N'oublies pas ce week-end, on va au cinéma ! Lâcha-t'elle, trop occupée à reluquer Jason qui allait à sa voiture.

-Oui, on va voir Bambi ! Pouffai-je, pour me foutre d'elle.

-Ouais, c'est ça ! Répondit Rachel, sans réellement prêter attention à ce que je disais.

Et elle n'était pas amoureuse ? Mais bien sûr. Ses yeux ne mentaient pas, eux.

-Bambi ? Mais de quoi tu parles ? Cria-t'elle, revenant à la réalité, son bel étalon étant enfin sorti de son champ de vision.

-Ça va ? Le spectacle t'a plus ? Demandai-je, en désignant l'endroit où était garé Jason quelques secondes auparavant.

-Pfff, n'importe quoi, sérieux ! Maugréa ma meilleure amie, prise en flagrant délit.

J'éclatai d'un rire sonore, relâchant toute la pression et la tension qui m'habitaient. Rachel me fixa, sans réellement comprendre ma soudaine bonne humeur, puis se dirigea vers sa voiture en me faisant un doigt d'honneur bien mérité.

-Moi aussi, je t'aime ! Criai-je à son attention, tout en riant de plus belle.

Je n'entendis pas sa réponse, mais je savais qu'elle ne m'en voulait pas le moins du monde. Elle était juste trop réservée pour parler de ces choses-là. C'était la première à raconter en détail ses ébats sexuels et à parler de l'anatomie de ses prétendants, mais lorsqu'il s'agissait d'histoires de cœur et d'amour, il n'y avait plus personne.
J'allai monter en voiture, lorsque Joshua retint ma portière. Je sursautai, ne m'attendant pas à le voir.

-Moi aussi, je t'aime Princesse ! Murmura-t'il, avant que Calvin et Shelby arrivent.

Je lui fis un clin d'œil enjôleur et dis au revoir au petit groupe, tout en regrettant de ne pas pouvoir embrasser mon amoureux.
Alors que je me garai devant chez moi, une sonnerie retentit dans l'habitacle, m'indiquant que j'avais reçu un message. Josh m'invitait à le rejoindre "Chez Doyle", un pub irlandais qu'il affectionnait particulièrement. Je ne pus m'empêcher de pousser un cri de joie puis je pensais aussitôt à ma mère qui ne me laisserait sûrement pas sortir, dans un bar qui plus est, un jour de semaine. Je stressai immédiatement à l'idée de devoir lui demander, la supplier même, de voir mon petit-ami. Ma mère leva les yeux, un large sourire aux lèvres, lorsque j'entrai dans le salon. Mon frère devait être à son entraînement de baseball car je n'entendais pas de cris, ni de musique trop forte.

-Coucou Maman, ça va ? Tu as passé une bonne journée ? Demandai-je, essayant de lancer la conversation.

-Oui et toi, ma puce ?

-Très bien ! Répondis-je, brièvement.

Je m'approchai et l'embrassai sur la joue. Elle me serra contre elle un instant, puis je m'assis en face, tout en la regardant faire des créations, l'un de ses passe-temps favoris. Ma mère avait toujours eu un don pour tout ce qui était manuel. La maison était d'ailleurs remplie de ses différentes œuvres d'art et elle en vendait parfois à des amis ou des connaissances.

-Que veux-tu me demander de si important pour que tu n'oses pas m'en parler ?

Je la fixai, abasourdie. Nous n'avions jamais eu besoin de mots pour nous comprendre et ce, depuis toujours, mais je ne m'attendais pas à ce qu'elle comprenne si rapidement que je voulais lui demander quelque chose.

-Je...voilà...Josh m'a invité à boire un verre ce soir et, comme on ne peut pas se voir comme on veut...je pensais...que peut-être tu accepterais que j'y aille ! Balbutiai-je, tout en gardant les yeux rivés au sol.

-Tu sais très bien que je n'apprécie pas vraiment que tu sortes en semaine, ma chérie ! Tu as besoin de sommeil et j'ai peur que tu n'arrives plus à suivre en cours, si tu sors trop souvent !

-Je sais, Maman ! Mais j'ai des très bonnes notes, je suis à deux doigts de décrocher ma bourse et c'est la première fois que je te demande ça ! Suppliai-je presque, en la regardant droit dans les yeux, cette fois-ci.

Elle resta silencieuse un certain temps, semblant réfléchir à la situation et moi, je ne cessai d'épier chacun de ses gestes, espérant un signe positif. Je la vis poser son pinceau, s'essuyer les mains et lever la tête vers moi, le visage complètement impassible. Elle toussota un peu, faisant durer cette douloureuse torture.

-J'accepte pour cette fois ! Mais n'espère pas une prochaine fois ! Lâcha ma mère, tout en souriant discrètement.

Je lui sautai au cou, réellement ravie de sa réponse et l'embrassai un millier de fois pour la remercier.

-Merci, merci, Maman !

Je montai aussitôt me préparer. Je voulais me faire belle pour mon chéri, qui devait déjà m'attendre au pub. Je lui envoyai un message, lui confirmant mon arrivée d'ici peu, il répondit dans la seconde avec un smiley en forme de bonhomme content et un cœur. Je me dépêchai de m'habiller, voulant profiter de chaque minute avec lui. J'enfilai alors ma jolie robe bleue avec une ceinture en cuir marron, le sac assorti et des jolies compensés dans les mêmes tons que ma robe. J'attrapai au passage ma veste en jean et descendis rapidement.

-Pas plus de 20h00 ! Me dit immédiatement ma mère, tout en tapotant sa joue pour que je lui fasse un gros bisou d'amour.

-Je serai là, Maman ! Merci beaucoup ! Je t'aime !

Je sautai dans ma voiture et démarrai. Je n'avais qu'une envie, voir mon copain, pouvoir le serrer dans mes bras, l'embrasser et parler avec lui pendant des heures.
Devant la porte du pub, je rajustai ma robe et recoiffai mes cheveux pour qu'il me trouve la plus belle à ses yeux, pas aux miens, ça c'était sur. Je le vis d'emblée en entrant, il était à une table et ne cessait de scruter la rue et le parking. Il n'avait pas encore remarqué ma présence et je me glissais derrière lui, sans aucun bruit.

-Bonsoir, joli monsieur ! Êtes-vous seul à cette table ou vous attendez quelqu'un ? Chuchotai-je à son oreille, tout en déposant mes douces mains de chaque côté se ses épaules.

Il se retourna vivement et me tira vers lui, sans même se préoccuper du regard insistant des autres clients. Je me retrouvai sur ses genoux et l'embrassai délicatement, voulant savourer chaque millimètre de sa bouche.

-J'attendais une très charmante demoiselle, mais je me contenterais de vous !

Je lui mis une tape sur le bras et nous éclatâmes de rire, ignorant magistralement les gens qui nous fixaient encore.

-Viens ! On va se mettre sur une banquette, on sera mieux ! Me proposa-t'il, entrelaçant mes doigts aux siens, dans un geste très sensuel.

Le serveur vint nous voir après notre changement de place et je commandai un cappuccino et Josh, un expresso.

-Tu m'as tellement manqué ! Soufflai-je, comme si son simple toucher m'avait permis de respirer à nouveau.

-Toi aussi, ma beauté !

-C'est vraiment dur de ne pas pouvoir te toucher, ni t'embrasser quand j'en ai envie, c'est à dire, tout le temps ! Avouai-je, malgré moi.

Je ne voulais pas le blesser, ni lui rappelait de mauvais moments, mais cette situation m'attristait et j'avais besoin de lui parler, de le sentir près de moi. Je n'avais jamais été aussi amoureuse et je pensais sincèrement que ça ne m'arriverait jamais.

-Je sais, bébé ! C'est très difficile pour moi aussi ! Et...j'ai tellement envie de toi !

Je devins rouge écarlate et lui lançai un regard noir, ce qui le fit aussitôt rigoler. Il savait quel impact avaient ses mots sur moi et se délecter de me voir me tortiller sur place. Je changeai immédiatement de sujet et nous parlâmes des cours et de nos futurs respectifs concernant nos études et le métier que l'on voulait faire. Joshua me parla alors de sa passion pour tout ce qui était scientifique, ce qui m'étonna un peu vu les résultats qu'il avait eu en début d'année, dans quasiment toutes les matières, puis je me souvins tout à coup, que ses soi disantes lacunes n'étaient, en fait, qu'un stratagème pour pouvoir apprendre à me connaître et passer du temps avec moi. Je ne pus réprimer un large sourire à ces doux souvenirs et Josh me caressa délicatement la joue, remarquant bien que j'avais cessé de l'écouter.

-Excuse-moi ! Tu disais, bébé ?

-Je te disais juste à quel point tu es belle et que mon cœur est comblé de bonheur en voyant ta jolie bouche, à défaut de combler autre chose ! Lâcha-t'il, un petit air malicieux dans ses beaux yeux bleus.

-On parlait de nos choix après le lycée, pas de nos ébats ! Chuchotai-je, soudainement gênée par la proximité des gens qui nous entouraient dans le pub.

-Et toi alors, Princesse ? Même si je me doute que n'importe quelle Université accepterait ta candidature !

-Je voudrais entrer à Yale, l'année prochaine !

-Et bien, nous irons à Yale ! C'était aussi un de mes choix, ils ont un super département de mathématiques ! Ajouta-t'il, comme si cela était tout à fait normal.

-Tu veux...tu veux aller là-bas avec moi ? Demandai-je soudain, n'en croyant pas mes oreilles.

Ce garçon beau comme un dieu et dont j'étais follement amoureuse voulait me suivre à l'université, comme si nos chemins ne pouvaient se décroiser. J'en eus immédiatement les larmes aux yeux et les retins, tant bien que mal. Je câlinai son beau visage, encore marqué par les coups qu'il avait reçu lors de la bagarre avec l'autre abruti.

-Bien sûr que je veux y aller avec toi ! Ça ne fait pas longtemps que l'on est ensemble et nous sommes jeunes, mais ce que je ressens pour toi va au delà d'un simple flirt d'adolescent et tu le sais aussi bien que moi, mon cœur t'appartient et vice versa, enfin je l'espère !

Je hochai vivement la tête, voulant, à tout prix, le rassurer sur la force de mon amour pour lui. Il me serra alors tendrement dans ses bras et je ne pus m'empêcher de sentir et d'essayer de m'imprégner de son odeur si caractéristique.

-J'espère simplement que mon père me laissera faire ce que je veux et que je ne saurais pas obligé de suivre ses pas, comme lui l'exige ! Je n'ai jamais été intéressé par le commerce international et je ne veux pas reprendre son entreprise, il faut qu'il le comprenne et l'accepte ! Dit-il doucement, la tête enfouie dans mon cou.

-Que lui as-tu raconté pour la bagarre ? M'inquiétai-je, tout en lui déposant un baiser sur la tempe.

-Oh, ne t'inquiète pas pour ça ! Je lui ai dis que c'était à un de mes entraînements, nous nous étions un peu échauffés avec quelques collègues et c'était parti en vrille avec un, en particulier ! Il en était ravi, il m'a dit que c'était comme ça qu'il fallait se faire respecter au milieu des requins !

Choquée par le comportement de cet homme qui aurait du le protéger au lieu de l'inciter, je préférai me taire. Avec beaucoup d'amour, je lui caressai délicatement les cheveux et embrassai son cou pour qu'il se détende.

-Tu comptes faire quoi pour ton anniversaire ? Me questionna-t'il subitement.

Son changement inattendu de comportement et de sujet, par la même occasion, m'ébranla un peu, surtout que je n'avais aucunement réfléchi à mon anniversaire, qui était dans un peu plus d'un mois et je ne préférais pas y penser. Je souhaitai aussi changer de sujet de discussion, n'appréciant pas particulièrement parler de mon anniversaire, me rappelant trop de mauvais souvenirs. Nous nous rapprochions surtout de Noël et cela voulait dire que je ne pourrais pas le voir autant que je le désirais, durant deux longues semaines.

-Que fais-tu pour Thanksgiving et Noël ?

Il releva la tête et me fixa longuement, semblant ailleurs tout à coup. Il passa alors la main dans ses cheveux, signe qu'il était en proie à un grand stress.

-Je ne sais...pas ! Mes parents organisent une grande réception avec des membres de l'entreprise de mon père ainsi que des clients fortunés de ma mère, mais je n'aime pas du tout ce genre de repas où toutes les grosses bourses de ce pays viennent pour se pavaner et présenter la nouvelle poupée à peine majeure qu'ils ont déniché ! Mais je suis obligé d'y assister si je ne veux pas m'attirer, encore plus, les foudres de mon père !

Je restai silencieuse un instant, l'imaginant entouré de jeunes femmes toutes plus belles les unes que les autres et je sentis immédiatement mon cœur se serrer à cette sombre idée. Dans ces moments-là, je détestais sérieusement mon imagination.

Le monde dont il me parlait n'avait strictement rien à voir avec le mien. Pour Thanksgiving, ma mère préparait un délicieux repas où elle conviait, chaque année, tante Faye et oncle Rob, qui ne cessait de raconter des blagues salaces, les mêmes depuis toujours et nous passions l'après-midi à jouer à des jeux de société et à boire du lait de poule au coin du feu.

-Et toi ? Demanda-t'il, tout en jouant avec une mèche de mes cheveux.

J'allai pour répondre, quand je vis un homme, bien trop élégant pour cet endroit, entrer dans le pub, balayer la salle des yeux et s'arrêter instinctivement sur nous. Son visage ne m'était pas inconnu et je compris instantanément de qui il s'agissait. Mon cœur s'arrêta de battre un millième de seconde et je lâchai, sur-le-champ, la main de Joshua. L'homme s'avança alors lentement vers nous et tout ce que je pus remarquer, c'est qu'ils avaient exactement le même regard.

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