Chapitre 91 - Souvenirs douloureux
POV Clarke
J'étais enfin seule avec Charlotte. Ma mère n'avait cessé de monopoliser l'attention depuis son arrivée. J'avais pu voir que ma petite sœur de cœur n'allait pas bien et je savais aussi qu'à l'époque elle n'était pas une grande bavarde, alors s'épancher devant ma mère n'était pas pour elle. J'étais heureuse de savoir qu'elle avait retrouvé son père et que leur relation se reconstruisait petit à petit. Mais j'avais aussi vu à quel point elle était dévastée par tout ce qu'elle avait enduré. Je l'avais été alors que j'étais adulte mais Charlotte n'était qu'une enfant. J'avais peur d'apprendre qu'elle ait pu endurer la même chose que moi...pendant trois ans...
— Est-ce que tu veux un gâteau ? Je crois que Lexa a cru que je devais me nourrir pour cinq, tentai-je de plaisanter pour la rendre plus à l'aise.
Je lui tendis un biscuit qu'elle accepta sans rechigner. Les sucreries étaient toujours une valeur sûre pour établir le contact.
— C'est ton amoureuse ? me demanda-t-elle après avoir avalé la moitié. Elle est jolie.
— Oui c'est mon amoureuse. Tu te souviens que tu l'as déjà vu ?
— Euh...non.
— Lorsque nous nous sommes enfuies de la Montagne, nous l'avons rencontrée dans la forêt, tu te rappelles ?
— Non. Je ne me souviens de rien de cette période, essaya-t-elle d'éviter le sujet.
— Charlotte... tu sais qu'à moi aussi ils m'ont fait du mal ? Et c'est important d'en parler à quelqu'un. Je vois bien que tu n'es pas bien... Tu en as parlé avec ton père ?
— Non ! Je ne peux pas lui raconter. Je ne veux pas lui faire de la peine. Il est tellement heureux de m'avoir retrouvée. Qu'est-ce qu'ils t'ont fait à toi ?
Comment je pouvais raconter à une enfant de onze ans que des hommes m'avaient violée sans ménagement pendant plusieurs jours ? Je ne pouvais pas lui dire textuellement ce que j'avais vécu.
— Ils ont fait des choses sans avoir mon consentement. Tu sais ce que c'est le consentement ?
— C'est quand tu es d'accord pour faire quelque chose. Et si on t'oblige à faire des choses alors que tu n'es pas d'accord c'est mal.
— Exactement. Est-ce qu'on t'a fait des choses sans ton consentement ?
Je vis dans ses yeux des larmes se former avant de finir par glisser le long de ses joues. La réponse était très claire. J'espérai juste qu'elle n'avait pas été violée. C'était une chose bien trop horrible pour une enfant de son âge.
— Viens là.
Elle vint se blottir dans mes bras et sa vulnérabilité me replongea quelques mois en arrière. Je pris pleinement conscience que j'avais eu de la chance d'avoir Lexa à mes côtés ainsi que mes amis pour me soutenir dans cette terrible épreuve. Charlotte, elle, n'avait eu que Maya mais ça ne semblait pas avoir été suffisant.
— Je sais que c'est difficile de mettre des mots sur ce que tu as vécu mais si tu y parviens, tu te sentiras mieux après. Je ne vais pas te dire que tu vas oublier mais tu vas pouvoir apprendre à vivre avec.
Voyant qu'elle ne voulait toujours pas parler, j'essayais de trouver une nouvelle approche.
— Tu sais que ce n'est pas ta faute ? Qu'importe ce qu'ils t'ont fait, ils n'auraient pas dû. C'était mal de leur part. Mais surtout il faut que tu saches qu'ils ne te feront plus jamais de mal.
— C'est vrai ? me demanda-t-elle timidement.
— Oui c'est vrai. Je ne laisserai plus jamais ça arriver et Lexa non plus d'ailleurs. Personne ne les laissera recommencer.
J'avais l'impression qu'elle réfléchissait à ce qu'elle pouvait me dire ou peut-être ce qu'elle allait me dire. Mais ce qui était certain, c'était que son cerveau était en train de carburer.
— Ils...ils m'ont touchée là, annonça-t-elle en montrant sa poitrine. Et ils m'ont demandée de les toucher aussi en utilisant mes mains et ma bouche.
Je serrai les dents pour éviter de l'interrompre mais ce que j'entendais me révoltait au plus haut point et me donnait envie de vomir. Ce n'était qu'une enfant...
— Je voulais pas mais ils m'ont obligée. Parce que quand je leur disais non ils me frappaient.
Elle releva son haut et je vis quelques cicatrices qui me faisaient penser aux miennes. Elle aussi avait dû subir leurs humeurs.
— Et quand ils ne me faisaient pas des choses, ils m'ordonnaient de m'occuper du ménage et de la cuisine. Le soir ils m'enfermaient dans une cellule. Il faisait noir et froid. J'avais peur. Et puis un jour Maya est venue. Elle m'a donné un livre pour m'occuper sauf que je ne savais pas lire. Alors dès qu'elle le pouvait, elle venait m'apprendre la lecture. Et grâce à elle, je pouvais m'échapper de cet endroit...
— Bravo ma puce, c'était très courageux de te part de tout me raconter mais j'ai une dernière question si tu veux bien.
Elle hocha la tête pour simple réponse. J'appréhendai ce qu'elle allait me dire mais je devais savoir car je doutais que ma mère l'ait examinée autant que moi.
— Est-ce qu'ils t'ont touchée ici ? dis-je en montrant son entrejambe.
— Non jamais. Pourtant y en a un qui a voulu mais un autre monsieur lui a dit que j'étais trop jeune pour avoir des enfants. Qu'il fallait attendre que je grandisse. J'ai pas vraiment compris pourquoi il a dit ça.
— Tu n'as pas besoin de comprendre, ce qui compte c'est qu'ils ne l'ont pas fait.
J'étais rassurée de savoir qu'il n'y avait eu aucune pénétration. Mais en comprenant la raison des kidnappings, j'avais peur que l'enfant que je porte soit de l'un de ces monstres. Même si ça me coutait de penser cela, j'espérai que cet enfant était de Wells. Après tout, choisir entre la peste et le choléra n'était pas un choix si compliqué.
— Et toi ?
— Comment ça moi ?
— Ils t'ont touchée là ?
Je ne m'attendais pas à cette question. Mais je pouvais comprendre cette curiosité. Même si nous ne l'avions pas vécu à un même degré, nous avions toutes les deux étaient des victimes.
— Oui ils l'ont fait. Mais il faut que tu saches que c'est mal de le faire quand l'autre n'est pas d'accord, tentai-je de lui faire comprendre alors que des souvenirs ressurgissaient violemment.
Je sentis ma respiration s'accélérer et je savais ce qu'il allait suivre. Je ne voulais pas que Charlotte soit témoin d'une crise, qui je le savais par expérience, pouvait être violente et faire peur à voir.
— Tu...tu veux bien aller chercher Lexa s'il te plait ma puce ?
Elle ne posa pas de question et sortit de la chambre. J'essayais de penser à autre chose et de me concentrer sur mon souffle mais les seules images qui défilaient dans ma tête étaient celles de Charlotte qui vivait la même chose que moi. Mon cerveau me jouait des tours puisque j'étais parfaitement consciente qu'elle n'avait pas vécu toutes ces horreurs.
— Je suis là mon amour, respire.
J'étais tellement dans mon imagination que je ne l'avais pas vu rentrer et encore moins s'installer dans mon dos. Je sentis ses mains caresser mon ventre.
— Ça va aller, tu es en sécurité et je suis avec toi. Concentres-toi sur ma voix. Je sais que tu peux le faire et que tu es une femme forte. Respire en même temps que moi Clarke.
Je tentais de suivre le mouvement de son corps que je sentais derrière moi mais c'était difficile. Ma trachée n'en faisait qu'à sa tête et l'air ne voulait pas passer malgré mes essais.
— Aller mon amour, tu vas y arriver. Souviens-toi de choses agréables, de choses qui te rendent heureuse et vivante.
Inconsciemment, mes pensées dérivèrent vers mon unique source de bonheur : Lexa. Je revoyais le jour où nous l'avions trouvé dans la capsule, de notre cohabitation forcée, de la cérémonie lors de laquelle elle avait rejoint mon clan, de notre emménagement à Polis, de notre première fois qui avait été merveilleuse. Et dans tous ces souvenirs, il y avait un sentiment qui revenait à chaque fois. C'était l'amour. Il avait évolué au fil du temps et il était devenu inconditionnel aujourd'hui. Ma vie n'aurait pas été la même si elle n'avait pas été à mes côtés.
— C'est parfait ça. Je ne sais pas à quoi tu penses mais continue de le faire, ça semble fonctionner.
Et elle avait raison. Ma respiration était en train de se calmer et de redevenir normale. Je sentais mes poumons se gonfler d'air avant de se dégonfler sans difficulté. La crise était passée et encore une fois c'était grâce à elle.
— Ça va mieux ?
— Oui merci.
— Ça faisait longtemps que tu n'avais pas eu une si grosse crise. A quoi tu as pensé pour que ce soit si rapide ?
— A toi et à notre amour. Je ne sais pas ce que je serai devenue si tu n'étais pas entrée dans ma vie.
— Et toi dans la mienne.
— Je t'aime, dîmes-nous en même temps dans un seul souffle.
Nos lèvres s'étirèrent en de beaux sourires avant de se retrouver pour jouer ensemble. Le baiser était rempli de tendresse et d'amour. C'était extrêmement apaisant.
— j'imagine que Charlotte t'as parlé ?
— Oui, elle a aussi vécu des abus sexuels mais ils ne l'ont pas violée. Ils cherchaient des femmes à mettre enceinte. Je ne comprends pas pourquoi...
— Je pense savoir. Il faut que tu saches que Marcus est en bas avec Indra.
— Indra ? Mais comment c'est possible ?
Elle me raconta rapidement la situation et je me rendis compte de son inquiétude que je n'avais pas perçue plus tôt.
— Elle m'a dit que lorsqu'ils ont attaqué la Montagne, il n'y avait pas beaucoup de monde. Principalement des hommes. Ça doit expliquer pourquoi ils avaient besoin de femmes pour procréer...
— Tu veux dire que leur clan est en train de disparaitre ?
— J'en ai bien l'impression. Et maintenant que le Skaikru a pris le contrôle je pense qu'il ne reste plus grand-chose. Si Nia ne les a pas obligés à rejoindre ses rangs alors ils sont déjà morts...
— Mais tout le monde n'était pas comme ces monstres. Regarde Maya, elle m'a aidé à m'enfuir. Et je suis certaine aussi qu'il y a encore des victimes et que tout le monde ne s'est pas enfui avec nous...
— Demain, nous allons aller voir Heda. Il faut que nous accélérions les choses si nous voulons les arrêter et sauver ceux qui mérite de l'être...
— Tu penses que ça va prendre encore longtemps ? Ça fait déjà plus de deux semaines que tu m'as dit qu'il avait envoyé les éclaireurs pour réquisitionner les guerriers mais je n'en ai pas beaucoup vu à Polis...
— Ceux qui sont arrivés campent à l'extérieur de la ville mais tu as raison, ils ne sont pas très nombreux. Et d'après Indra, les soldats Skaikru sont plus de mille, alors il va nous falloir du renfort. Surtout qu'il y a toujours le problème du brouillard. Indra n'a pas su me dire si elle était toujours utilisée.
Deux coups furent portés à la porte et après avoir donné l'autorisation d'entrer, c'était Raven qui pénétra dans la chambre.
— Heya les amoureuses. Pour info Lexa, Anya est d'accord et elle m'a même dit de te dire que tu aurais dû y penser avant !
— Penser à quoi ?
— Je t'annonce que tu vas enfin pouvoir quitter cette chambre en attendant ton accouchement. Les filles sont d'accord pour échanger nos chambres le temps qu'il faudra.
C'était la meilleure nouvelle de la journée. J'allais enfin retrouver un peu de liberté et surtout je n'allais plus avoir cette sensation d'emprisonnement qui me faisait encore froid dans le dos. Encore une fois je pouvais remercier Lexa car c'était elle qui en avait eu l'idée.
— Je t'aime.
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Coucou tout le monde ! Vous allez bien ?
Je suis désolée de publier si tard mais pour une fois j'ai eu beaucoup de difficultés à écrire ce chapitre. Je ne pensais pas que c'était si compliqué de faire parler une enfant tout en voulant rester dans la bienveillance et le soutien. Mais j'espère que j'ai réussi et que vous avez ressenti la différence (entre les aveux de Clarke dans un précédent chapitre et ceux de Charlotte dans ce chapitre).
Je ne vous embête pas plus longtemps et je vous dis à dimanche !
Nestam !
Celia
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