J'aurais aimé être capable de t'inviter chez moi ce Noël.

Debout devant la mansion de ses parents, Nurys hésitait à signaler sa présence. Bien qu'elle essayait de canaliser ses pensées sur le moment présent, elle était consciente qu'elle ne réalisait qu'un piètre job. En effet, elle ne pouvait s'empêcher de penser à Kasen et surtout à leur dernière conversation.

Elle se souvenait de comment il était resté avec elle jusqu'à ce que le taxi qui devait la conduire à l'aéroport n'arrive. Et aussi de ces étonnants mots qu'il lui avait soufflé entre les multiples vidéos drôles qu'ils avaient été entrain de regarder sur internet. Une phrase si innocente qui lui avait cependant rappelé un de leurs plus grands malentendus.

J'aurais aimé être capable de t'inviter chez moi ce Noël.

Cette déclaration avait précédé un bisous sur son front de la part du châtain. Une de ses signatures, Nurys avait remarqué.

Puis son conducteur de la journée avait klaxonné et ils avaient dû se séparer. Elle avait dû dire au revoir -quand bien même passager, Nurys détestait les adieux- à l'université qu'elle avait apprit à aimer, ainsi qu'au châtain pour qui elle développait des sentiments bien plus qu'amicaux.

Un câlin. Des adieux murmurés. Puis elle s'était engouffrée à l'arrière, tandis que son prince charmant aidait le chauffeur à glisser ses deux grosses valises dans le coffre de la voiture.

Après cette semaine spectaculaire en présence du châtain, elle devait à présent passer les trois semaines restantes de ses vacances loin de lui. Et si l'ancienne Nurys ne s'en serait guère souciée, celle qu'elle était aujourd'hui ignorait si c'était possible.

Quand est-ce qu'elle avait commencé à donner autant d'importance à un garçon? Telle était la question qui abritait les pensées de Nurys, tandis qu'elle sonnait finalement à la grande porte de la mansion.

Elle se retourna et lança un sourire aux deux gardes de la sécurité qui l'observaient avec suspicion. À leur place elle aurait fait pareil, vu qu'après avoir parcouru la distance entre le portail qu'ils lui avaient ouverts et la grande porte, elle s'était immobilisée devant celle-ci et s'était laissée perdre dans ses pensées.

Une de leurs nombreuses gouvernantes se hâta d'ouvrir la porte et quand elle vit la jeune fille, elle lui adressa un grand sourire, tout en s'emparant de ses valises.

« Mlle Nurys, bonne arrivée. Votre mère a passé toute la matinée à s'assurer que votre retour parmi nous se ferait sans péripéties. Je puis vous assurer que ce soir vous ne mangerez que vos plats préférés. »

C'est en remerciant sa gouvernante préférée, que Nurys aperçut sa mère descendre les escaliers.

« Dinah qui est... Nurys? Nurys est-ce bien toi?»

« Coucou maman. » La concernée déclara en se dirigeant vers sa mère, tout en serrant son sac à main.

« Tu es arrivée plus tôt que prévue. Je suis si contente de te revoir mon bébé. » La mère de la jeune fille déclara tout en la rejoignant.

Nurys ne put s'empêcher de remarquer que sa mère avait dévalé les escaliers à une vitesse surprenante.

« Allez viens dans mes bras, Nuryssa. Tu m'as tellement manquée. » Elle n'eut pas le temps de souffler mot que sa mère l'engouffrait dans un câlin.

Une fois que leur embrassade fut rompit, la mère inspira un grand coup avant de réprimander sa fille.

« Maintenant que j'y pense, je ne suis pas contente de toi Nuryssa. Pas du tout. »

En prenant sur elle, pour ne rien dire à propos du nom que sa mère avait tout simplement inventé à sa naissance, Nurys passa sa main dans ses cheveux en s'excusant.

« Pour le moment, on ne va pas en parler. En ces quelques mois tu as tellement grandi ma belle. Tu es ravissante. » Sa mère déclara en touchant ses joues. « Ton père et ton frère t'attendent.»

En lançant un dernier sourire à Dinah, Nurys suivit l'élan de sa mère. La minute où elles prirent l'escalier, elle savait déjà où elles allaient.

« Maman, je vois que vous avez encore changé les gardes de la sécurité. »

« Tu n'ignores pas comment ton père peut être parano. La minute où il suspecte que quelque chose de louche se trame, il les remplace. J'ai arrêté de compter. » Sa mère déclara en arborant un air dramatique.

« Et le salon, j'ai remarqué que tout a été refait. Et je ne parle pas de la peinture dans la maison entière. »

La vérité était que Nurys supposait juste, vu qu'elle n'avait pas eu le temps de visiter la maison qui changeait à chaque fois qu'elle s'en absentait plus d'un mois.

« Oh non ça, c'était moi. Ça peut être ennuyant parfois même avec toutes les servantes. Ton père voyage tout le temps et ton frère et toi - » Elle se stoppa et Nurys put voir la tristesse se dessiner dans ses yeux.

« Enfin bon, vous grandissez tous. À quoi m'attendais-je? » Elle s'enquit avant que son humeur ne change considérablement, sa mauvaise mine très vide remplacée par une mine joyeuse.

« Et toi as-tu une nouvelle à m'annoncer? La minute où Jaxon a sorti son téléphone, il m'introduisait à une chinoise. Il a tout bonnement mit de côté toutes ces belles jeunes filles noires au profit de quelqu'un qui n'a pas la chair sur les os... »

Nurys cessa aussitôt d'écouter sa mère, la minute où elles arrivèrent à l'étage. En effet, elle avait reconnut son père et son frère Jaxon qui se livraient à leurs jeux favoris: lancer des balles de golf dans l'océan.

C'était bien entendu un sport- si on pouvait appeler ça comme ca- auquel Nurys et sa mère s'opposaient fortement, mais auquel les deux hommes de la famille recourraient très souvent.

La terrace n'avait pas changé et la vue sur l'océan était toujours aussi magnifique. Le père de Nurys, un homme d'affaire très connu de part et d'autre sur le continent africain et même en delà, avait décliné les avertissements de ses amis et conseillers et avait décidé de construire sa mansion proche de la mer.

On lui avait prédit une centaine d'années au maximum avant que la mer n'engloutisse la maison, mais c'était un de ses rêves d'enfants auquel il tenait vraiment.

Et même si Nurys pensait que c'était un très mauvais investissement, elle ne pouvait s'empêcher de l'adorer.

Enfant, elle avait passé presque tous les couchers de soleil à observer comment la mer et le ciel semblaient se rencontrer à l'horizon. De plus, c'était toujours un merveilleux spectacle de voir les dauphins nager si près de la côte.

Jaxon fut le premier à la voir et interrompit le match afin de se diriger vers elle en souriant.

« Soeurette, ça fait quoi- sept mois qu'on ne s'est pas vu? »

« Trois mois, Jax. » Elle le corrigea en roulant des yeux avant de se réfugier dans les bras de son grand frère. « Tu m'as manqué. »

« Toi aussi. »

Profitant de leur proximité, il lui murmura aux oreilles, « j'ai entendu parler de ton exploit à Querencia et laisse moi te dire que je suis fier de toi. »

« Ne l'encourage pas Jaxon. » La maman s'immisça dans leur conversation, en prenant un ton désapprobateur.

« Tu ignores de quoi nous discutons. »

« Je suis ta mère je sais tout. » La concernée déclara avant de prendre place dans une longue chaise.

C'est en riant de la nouvelle conversation entre sa mère et son frère, que Nurys accepta le câlin que lui donnait son père.

En effet, sa daronne se plaignait sur le fait qu' il fallait monter trois étages avant de se retrouver sur cette terrasse et une fois sur place, comment l'un se rendait compte que le service était inexistant, vu que les gouvernantes y venaient très peu.

« Ma fille chérie, je suis content de te voir. Mais nous devons parler de ton comportement au campus. Ta mère et moi ne sommes pas contents. »

Bien que son ton expimait de la réprobation, il avait un sourire à la face qui trahissait son état d'âme.

« Je suis infiniment désolé papa. »

« Je sais que tu l'es. Allez viens, nous devons célébrer ton arrivée avec une bonne boisson. Tu as plus de dix-huit ans pas vrai? »

« J'ai dix-neuf ans.»

« Nurys pendant que tu es avec ton père, profite pour lui dire que lancer ces balles de golfes dans l'océan, qui en passant nous coûtent une fortune, polluent l'environnement.»

« Je pense qu'il le sait maman. » Nurys déclara en passant la main dans ses cheveux tout en en abordant un sourire gêné.

« Pourquoi ne veut-il donc pas changer? Cet homme décidément. »

Nurys suivit son père vers le mini bar qu'ils avaient aménagés sur la terrasse et prit place sur une chaise, profitant pour la premiere fois, de la chaleur du soleil.

Elle adorait tellement cette sensation. C'était comme si le continent africain en lui-même l'accueillait. Comme si ces ancêtres l'enlaçaient et d'une façon elle pouvait ressentir leur amour pour elle. Eux qui s'était sacrifié pour qu'elle ait un avenir.

« Ta mère a tellement voyagé mais quand elle parle, son accent revient au galop. » Le père déclara en s'emparant de deux verres.

« C'est ce qu'on adore chez elle. » Nurys commenta. En vérité c'était plutôt le contraire, mais ses parents adoraient se disputer sur ce sujet.

« N'est-ce pas? » Il s'enquit, tandis que les deux observaient la mère de Nurys et son frère débattre par rapport à quelque chose sur le téléphone de ce dernier.

« C'est quand nous sommes réunis que je realise que j'ai réussi. »

« Tu nous rend fiers tous les jours papa. » Elle déclara en acceptant le verre qu'il lui tendait

Elle sirota le contenu avant de se rendre compte qu'il était dépourvu d'alcool.

« Papa! »

« Tu n'as pas encore vingt-ans ma chérie. Dix-neuf ans est comme dix-sept dans mon agenda. » Il déclara en balayant la situation d'un revers de sa main.

La jeune fille afficha une moue mais il ne broncha pas. Plutôt, il se mit à déranger ses cheveux, pendant qu'elle essayait de se dérober de son étreinte.

❃❃❃

Une heure plus tard, la famille Simmons était rassemblée dans leur salon et se livrait à une de leur tradition; ils s'échangeaient leurs dernières experiences ces quelques mois passés loin les uns des autres.

« Il n'y a rien de meilleur qu'être chez soi, les enfants. » Le père entama d'une voix rauque. Puis il sortit tous ses appareils électroniques et les éteignit.

« Bon, j'étais le premier à quitter la maison donc je commence. Vous le savez tous mais il y a quatre mois de cela je figurais sur une des listes de Cerbes et j'ai donc été invité en Amérique pour plusieurs interviews. »

Cerbes était un magazine reconnu de part le monde dans lequel figurait les meilleurs de toutes les categories. Son père avait eté choisi comme un des plus riches en Afrique entière et aussi un de ses pionniers.

« Félicitations papa. » Elle déclara en se levant.

Jaxon suivit son élan, avant de s'excuser et sortir de la pièce. Il revint quelques instants après, avec un cadre qu'il avait dissimulé avec un tissu.

Nurys le retira, dévoilant au passage, leur surprise qui était une photo de leur père -celle là-même qu'avait utilisé Cerbes dans leur magazine- ainsi que les mots le dix-septième homme le plus riche en Afrique et Innovateur de l'Afrique inscrits.

Le père l'accepta en essuyant une larme qui menaçait de couler. Après que la mère de Nurys, ait fait une petite blague dessus, c'était au tour de Jaxon de prendre la parole.

Il racla sa gorge pendant longtemps, désireux de faire durer l'intrigue, mais dut se raviser quand sa mère menaça de lui foutre une gifle.

« Je suis finalement entré dans un contrat avec l'une des entreprises chinoises que je ciblais. D'ici l'année prochaine nous pourrons enfin commencer à développer le futur de la technologie.»

« Tu aurais juste pu me demander. » Le père de Nurys grommela sous sa barbe mais ses paroles n'échappèrent à personne.

« S'il veut évoluer de lui-même, laisse le faire Bernard. »

« C'est une bonne nouvelle Jaxon, felicitations à toi. » Nurys déclara en souriant à son frère.
Il repondit en lui faisant une grimace.

Nurys et Jaxon avaient toujours été les deux côtés opposé d'une pièce d'argent. Elle avait toujours aimé les mots et les lettres tandis que lui était passionné par les chiffres et les mathématiques. Très tôt, il avait exprimé ce désir de vouloir créer de nouvelles choses. Il doutait des limites qui avait été imposé sur chaque chose et se questionnait sur comment faire avancer la technologie. Ce projet qu'il dévéloppait était une sorte de téléphone rencontre robot; où le telephone devenait plus qu'un appareil, et plus comme un assistant ou un meilleur ami. Dans d'autres mots, son projet était de réaliser la prochaine génération de Siri ou encore d'Alexa.

« Aussi, j'ai rencontré quelqu'un. Elle s'appelle Ru Shi Tsai. Mais vous pouvez l'appeler Rachel Tsai. »

« Une chinoise? Ça c'est très bien. Beaucoup ignore que la mixité est le futur. » Le père de Nurys commenta en hochant positivement de la tête.

C'était à present au tour de sa mère de se plaindre.

« C'est ton premier et seul fils et tu oses me dire que tu es d'accord avec ça? C'est quoi le problème avec toutes les belles jeunes noires qui pullulent nos rues? Mon fils ne sera pas un de ses hommes noirs qui pensent qu'ils ont réussi et décident d'aller chercher des blanches.»

« Techniquement, elle est chinoise. Rose, je peux savoir d'où te viens cette animosité?»

« Je n'autorise juste pas cela. J'espère que tu ne prendras pas la même route que ton frère Nurys? »

La déclaration de sa mère, centra toute l'attention sur la jeune fille, qui passa la main dans ses cheveux en réfléchissant à un moyen d'en sortir. Cependant la seule chose à laquelle elle pouvait penser était comment sans s'en rendre compte, elle avait adopté cette manie qu'avait Kasen de passer les mains dans ses cheveux à chaque fois qu'il était confronté à une situation stressante.

« Nuryssa Yakima Harmony Simmons, y-a-t- il quelque chose que tu voudrais partager? »

« Ce n'est pas encore mon tour. Je préférerais laisser Jaxon finir. » Elle déclara en riant nerveusement.

« Mais sœurette, j'ai déjà fini. » Jaxon déclara en lui tirant la langue.

« Manière jeune homme. » La mère déclara en pointant son index dans la direction de Jaxon, avant de se tourner vers Nurys, « alors? »

« Tu sais maman. Personne ne m'appelle Nuryssa. C'est juste Nurys. »

« Est-ce que je ressemble à quelqu'un qui est d'humeur à plaisanter? »

La plus jeune des Simmons perdit aussitôt son sourire.

« Pas du tout. »

« Pour la dernière fois... Alors? »

« J'ai recontré quelqu'un. Il s'appelle Kasen White. »

« White, dis-tu? Intéressant. » Son père déclara d'un air rêveur.

« Suis-je la seule qui trouve bizarre que nos deux enfants aient décidé de s'intéresser à des personnes à l'extérieur de leur race. »

« Rose- »Le père commença, mais fut vite interrompu par la mère qui se levait.

« J'ai besoin dun verre. »

À son depart leur père les lança un sourire qu'il voulait réconfortant.

« Ne vous inquiétez pas, c'est juste passager. »

❃❃❃

Après une aussi longue journée, Nurys ne se plaignait point d'être finalement capable de rejoindre son lit. Après leur tradition qui s'était terminée sur une note désastreuse, elle avait décidé d'aller explorer la ville où ils résidaient en compagnie de son frère. Celui-ci lui avait confié combien il avait été surprit d'entendre qu'elle croyait de nouveau à l'amour interracial. Ils étaient ensuite rentrés chez eux, après qu'ils aient résisté à l'envie de dîner à l'extérieur.

Elle se réfugia dans son grand lit à badalquins avant de se saisir de son téléphone. Dans le couloir, elle pouvait entendre son père et son frère discuter de leurs divers projets.

Elle fut agréablement surprise de remarquer qu'elle avait reçu plusieurs notifications. Une de Keyana, une autre de Jacob et finalement une dernière de Kasen.

Elle inspira un grand coup avant d'ouvrir sa conversation avec Cuddles -un surnom que Kasen avait lui-même choisit. C'était un mot en anglais qui voulait simplement dire câlins.

Le message qu'elle vit, força un sourire sur son visage.

J'ai pensé à toi toute la journée. J'espère que tu es contente d'être de nouveau en présence de ta famille. Bonne nuit, ma belle.

Jamais n'aurait elle imaginé qu'un simple message était capable de précipiter en elle autant d'émotions. C'est en souriant de toutes ses dents, que la jeune fille répondit au message.

Peut-être bien, qu'elle avait renoncé des années arrières à un jour expérimenter cet exceptionel amour interracial. Peut-être bien qu'elle était persuadée que c'était impossible pour les races de se mélanger.

Mais une chose restait sûre, quelque mois en arrière elle avait rencontré Kasen White. Et bien que cela n'avait pas été facile entre les multiples tumultes et remue-ménages, il était celui qui avait été capable de lui montrer qu'elle se trompait sur toute la ligne.

Leur relation n'était pas parfaite. En effet, ils avaient passé la plupart de leurs temps à s'ignorer, mais il y avait un truc qu'elle possédait; de l'espoir. Cet espoir qu'à eux deux tout était possible.

Oui sa relation avec Kasen représentait cette lueur d'espoir qui invitait à croire que cela n'avait finalement jamais été une question de race.