La photographie

Posée sur le petit bureau bancal
D'une chambre à l'allure conviviale
Juste à côté de l'humble lampe verte
Qui incline piteusement la tête
Trône, fière, une photographie
Trop jeune encore pour être jaunie.
Bien en vue dans son fin cadre de bois,
Elle date de plusieurs mois déjà.
Pourtant les bons souvenirs qu'elle inspire
Sont toujours aussi frais dans la mémoire.

C'était un jour d'hiver, un jour heureux,
Dernier moment de bonheur pour l'un d'eux.
Il sourit sincèrement lui qui souffre
Oubliant un instant le fond du gouffre,
La douleur lancinante qui l'assaille
Et profite de la moindre des failles.
Mais ce jour-là le temps s'est arrêté
Afin qu'il puisse, avec joie, célébrer
La quarantaine de sa fille unique.
Ce furent vingt-quatre heures magnifiques.
Mais le grand Chronos a de fourbes lois,
Le temps insensible a repris ses droits.

De cet instant il ne reste aujourd'hui
Que cette petite photographie.
Discret papier glacé dont les couleurs
Ont immortalisé ce doux bonheur.
Six sur ce petit bout d'éternité
Mais cinq dans la dure réalité,
Puisque l'un d'eux, seul, a dû s'envoler.
Pourtant sur cette feuille protégée
Par une vitre et des regards si tendres
Qu'ils semblent caresser le joli cadre
Il vit toujours sous ces yeux nostalgiques.
Billet bigarré aux reflets magiques
Puisqu'il le fait revivre chaque jour
Cet homme doux qui débordait d'amour.

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